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Document 52024DC0149

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS sur le 9e rapport sur la cohésion

COM/2024/149 final

Bruxelles, le 27.3.2024

COM(2024) 149 final

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

sur le 9e rapport sur la cohésion

{SWD(2024) 79 final}


COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

sur le 9e rapport sur la cohésion

«Afin de promouvoir un développement harmonieux de l'ensemble de l'Union, celle-ci développe et poursuit son action tendant au renforcement de sa cohésion économique, sociale et territoriale.»

(Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, article 174)

Introduction

La cohésion économique, sociale et territoriale est un bien public européen

L’UE a été fondée sur des valeurs de solidarité, d’égalité des chances et de cohésion. Dès l’origine, le traité de Rome a fixé l’objectif de réduire «l’écart entre les différentes régions et le retard des moins favorisées». Cette cohésion économique et sociale, visant la réduction des disparités internes, a été perçue à juste titre comme profitant à toute l’Europe et reste tout aussi valable aujourd’hui.

Depuis lors, la politique de cohésion est l’un des piliers essentiels du projet européen. Depuis la création du marché unique, en passant par l’Union économique et monétaire et jusqu’aux élargissements successifs, la politique de cohésion a soutenu toutes les étapes de l’intégration européenne, y compris, ces dernières années, les transitions écologique et numérique. Les forces du marché ne peuvent, à elles seules, garantir que les retombées positives de ces étapes clés de l’intégration se répartissent uniformément dans toute l’Europe. La politique de cohésion est donc nécessaire pour que les États membres et les régions soient en mesure de contribuer à cette cohésion et d’en tirer profit, et d’exploiter pleinement le potentiel que cette politique leur offre. Au fil du temps, la politique de cohésion a également joué le rôle de stabilisateur économique, en tant que source fiable de soutien et d’investissement pendant la crise financière et, plus récemment, durant la pandémie et la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine, en parallèle à d’autres instruments comme la facilité pour la reprise et la résilience. Avec sa dimension régionale et son approche territorialisée, la politique de cohésion est l’une des manifestations les plus visibles de la solidarité européenne, fait partie intégrante du modèle européen de croissance et constitue une pierre angulaire de notre maison européenne.

Les parties prenantes confirment le rôle clé et l’importance de la politique de cohésion. Elles se sont clairement exprimées en ce sens lors des discussions sur l’avenir de cette politique. Au cours de l’année écoulée, les autorités régionales et d’autres parties prenantes ont apporté leur contribution et 20 États membres ont organisé des débats. Un groupe de spécialistes de haut niveau a publié en février des orientations clés pour la politique future 1 . Le Parlement européen, le Conseil de l’Union européenne, le Comité économique et social européen et le Comité européen des régions ont tous adopté des avis et des conclusions concernant les éléments clés pour l’avenir de la politique de cohésion. Ensemble, ces contributions confirment le rôle essentiel de cette politique et dressent un tableau des défis émergents, ainsi que des enseignements tirés et des réponses possibles.

Trente ans après le lancement parallèle du marché unique européen et d’une politique de cohésion renforcée, et vingt ans après l’élargissement de 2004, la tendance à long terme est claire: de nombreuses régions d’Europe ont connu une convergence économique et sociale ascendante remarquable. Toutefois, des disparités socio-économiques subsistent et un nombre croissant de régions risquent de se heurter à de nouvelles difficultés. Dans ce contexte, il convient de prendre en considération, non seulement les réalisations de la politique de cohésion, mais également les manières envisageables de l’adapter. Si l’objectif du traité en matière de cohésion économique, sociale et territoriale demeure plus pertinent que jamais, les méthodes devraient évoluer.

Carte 1. Indice de développement économique au niveau NUTS 3, 2001-2021



II. Politique de cohésion: croissance et compétitivité à long terme, emplois de qualité

L’élargissement historique de l’UE en 2004 illustre clairement l’incidence positive de la politique de cohésion. Vingt ans plus tard, le PIB moyen par habitant dans les États membres qui ont adhéré depuis lors à l’UE est passé d’environ 52 % de la moyenne de l’UE en 2004 à près de 80 % de celle-ci en 2023. Les taux de chômage dans ces États membres sont passés d’une moyenne de 13 % à 4 % au cours de la même période.

Cette convergence ascendante s’explique par une hausse de la productivité (PIB par personne occupée) dans les régions moins développées. Cette tendance témoigne de l’amélioration à long terme de la compétitivité et de l’environnement des entreprises dans ces régions. Ce rattrapage a également permis de progresser de manière tangible sur le plan social, par exemple avec une amélioration des résultats en matière de santé et une réduction des taux de chômage et de pauvreté dans la quasi-totalité des régions au cours des dix dernières années.

La convergence a toutefois été inégale au sein de l’UE. Cette tendance traduit des différences de productivité et de compétitivité. Tandis que plusieurs régions orientales ont connu un rattrapage impressionnant depuis 2004, bénéficiant d’une relance économique après l’élargissement, la situation de nombreuses autres régions a progressivement divergé, car elles ne parvenaient pas à rattraper leur retard par rapport à la moyenne de l’UE. C’est notamment le cas de régions dans les États membres méridionaux, en particulier depuis la crise financière de 2008, mais aussi le cas d’un groupe de régions en transition dans des États membres plus développés. De fait, environ un tiers des régions de l’UE n’ont pas encore retrouvé leurs niveaux de PIB par habitant de 2008. Ces régions peuvent se trouver à toutes les étapes de développement et se situer même dans des États membres plus développés.

Le PIB réel par habitant a d’ailleurs diminué dans plusieurs régions des États membres méridionaux depuis le début du siècle, montrant l’incidence des chocs économiques et des défis structurels persistants: croissance de la productivité, qualité des institutions et bon fonctionnement des marchés du travail. Dans le même temps, la plupart des régions orientales devraient maintenir la dynamique de convergence et étendre leurs moteurs de croissance au-delà des zones métropolitaines afin de ralentir l’aggravation des disparités interrégionales.

 

Carte 2. PIB par habitant (SPA), 2022

Carte 3. Croissance régionale du PIB par habitant comparée aux moyennes de l’UE et des États membres, 2001-2021

Remarque: la carte 3 montre la croissance régionale du PIB par habitant depuis 2001. Toutes les régions en vert (clair et foncé) ont connu une croissance supérieure à la moyenne de l’UE, tandis que la croissance des régions en jaune et en orange a été inférieure à la moyenne de l’UE. La nuance de couleur (vert clair et vert foncé, jaune et orange) indique la croissance régionale par rapport à la moyenne nationale.

La politique de cohésion a contribué à améliorer le fonctionnement du marché unique en stimulant la croissance et la compétitivité à long terme. Elle a amélioré l’accès aux biens et aux services grâce à des infrastructures physiques et numériques, en renforçant la connectivité. Cette politique a en outre stimulé les économies locales et l’attractivité en améliorant l’innovation et l’esprit d’entreprise grâce au soutien apporté aux PME, ainsi qu’en renforçant le capital humain grâce à la formation et à l’éducation. La politique de cohésion a également favorisé une bonne gouvernance, la coopération et l’efficacité administrative.

La politique de cohésion a joué un rôle clé dans le soutien de l’investissement public. Par exemple, la politique de cohésion représente environ 13 % du total des investissements des administrations publiques 2 dans l’ensemble de l’UE, et 51 % dans les États membres moins développés 3 . Ces investissements ont renforcé le modèle de croissance européen, en stimulant la croissance économique conformément aux grandes priorités stratégiques, qui vont de la double transition à l’innovation, aux entreprises et aux compétences, en passant par les services de garde d’enfants, l’éducation et la santé, jusqu’à la protection contre les catastrophes naturelles.

Figure 1. Réalisations des programmes de la politique de cohésion 2014-2020

Au-delà de ses incidences sociales et économiques directes, la politique de cohésion a également contribué à améliorer la capacité administrative et la qualité de gouvernance dans les États membres. Les investissements au titre de la politique de cohésion sont assortis d’exigences préalables, appelées «conditions favorisantes». Celles-ci soutiennent les grandes priorités de l’UE, ainsi que la qualité et la durabilité des investissements. L’incidence horizontale des conditions favorisantes est complémentaire de la mise en œuvre des réformes propres à chaque pays promues dans le cadre du Semestre européen.

En outre, les principes fondamentaux régissant la programmation et la mise en œuvre de la politique de cohésion, avec des exigences en matière d’évaluation, de partenariat, de transparence ou d’audit et de contrôle, ont des retombées positives sur les pratiques nationales.

La politique de cohésion renforce le marché unique et assure des conditions de concurrence équitables

La convergence permet à chaque région de participer pleinement au marché unique. La suppression des obstacles à la libre circulation des biens, des services, des capitaux et des travailleurs a favorisé une meilleure allocation des ressources dans l’ensemble de l’UE et encouragé l’échange d’idées et l’innovation. La diversité croissante des régions de l’UE a procuré à l’Union et à ses entreprises un vaste ensemble d’avantages concurrentiels. En investissant dans les infrastructures, l’innovation, l’éducation et d’autres domaines clés, la politique de cohésion aide toutes les régions à participer aux économies d’échelle générées par le marché unique et par la concurrence internationale, ainsi qu’à en bénéficier. Un marché unique plus vaste, bien développé, innovant et connecté est essentiel au développement de chaînes de valeur solides au sein de l’Union, qui sont importantes pour l’autonomie stratégique ouverte de l’UE.

La politique de cohésion a des retombées importantes et positives pour l’Europe dans son ensemble. La modélisation macroéconomique 4 suggère que les programmes 2014-2020 et 2021-2027, considérés conjointement, pourraient augmenter le PIB de l’UE de 0,9 % d’ici la fin de 2030. Cette incidence s’envisage à long terme et serait encore de 0,6 % en 2043. Elle est bien sûr beaucoup plus importante dans les pays relevant de la politique de cohésion 5 où l’aide est concentrée: en 2030, le PIB sera jusqu’à 8 % plus élevé en Croatie, 6 % plus élevé en Pologne et en Slovaquie, et 5 % plus élevé en Lituanie que si le soutien au titre de la cohésion n’était pas fourni. Les régions plus développées, qui reçoivent un soutien par habitant moins important au titre de la politique de cohésion, bénéficient également de retombées positives importantes générées par les programmes mis en œuvre dans d’autres régions. Les régions développées établissent de nouveaux partenariats dans leurs chaînes d’approvisionnement et entrent sur de nouveaux marchés pour leurs exportations et leurs investissements.

Le retour sur investissement positif de la politique de cohésion dans le marché unique peut être illustré par le multiplicateur. Chaque euro investi dans les programmes 2014-2020 et 2021-2027 aura généré 1,3 EUR de PIB supplémentaire dans l’Union d’ici à 2030 et aura presque triplé en 2043, ce qui équivaut à un taux de rendement annuel d’environ 4 %. D’après la modélisation, environ 1,3 million d’emplois supplémentaires devraient être créés pour l’ensemble de l’UE d’ici à 2027, dont une part importante dans les secteurs liés aux transitions écologique et numérique.

Le caractère ciblé du soutien au titre de la politique de cohésion permet d’atténuer largement le risque d’éviction des investissements privés. La politique de cohésion se concentre principalement sur les domaines dans lesquels les investissements privés sont insuffisants, soit en raison de défaillances du marché (par exemple l’accès au financement pour les jeunes pousses, les microentreprises et les petites entreprises), soit pour soutenir les biens publics (par exemple, l’éducation, la garde d’enfants). Les analyses quantitatives qui sous-tendent le 9e rapport sur la cohésion 6 montrent systématiquement des retombées positives nettes, confirmant que cette politique favorise des investissements privés importants au-delà de la durée des programmes. Le recours accru aux instruments financiers peut contribuer à accroître les investissements privés.

Les futurs élargissements nécessiteront l’intégration de nouveaux États membres dans le marché unique. Les objectifs de la politique de cohésion de l’UE restent valables dans une Union élargie, tant dans les États membres actuels que dans les États membres futurs 7 . Toutefois, la convergence socio-économique avec l’UE devrait déjà être lancée au cours de la phase de préadhésion. La nouvelle facilité pour l’Ukraine, le plan de croissance pour les Balkans occidentaux et la facilité pour les réformes et la croissance en faveur des Balkans occidentaux ont le triple objectif d’améliorer l’accès au marché unique de l’UE, d’accroître l’assistance financière et d’accélérer la mise en œuvre des réformes.

La politique de cohésion a contribué à atténuer les incidences asymétriques des crises récentes

La série de crises récentes sans précédent a eu une incidence inégale dans l’ensemble de l’Union. Qu’il s’agisse de la pandémie de COVID-19 ou de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine, les différentes régions et différents groupes sociaux ont été touchés de manière très diverse. En ce qui concerne la pandémie, les effets les plus graves ont été observés dans les régions dépendantes du tourisme, des industries culturelles ou d’autres services à forte intensité de main-d’œuvre, ainsi que dans les industries profondément intégrées dans des chaînes de valeur mondiales. En ce qui concerne la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine, les répercussions négatives se sont particulièrement fait sentir dans les régions frontalières, ainsi que dans les régions où l’industrie est vulnérable face aux prix élevés de l’énergie ou aux perturbations de la chaîne d’approvisionnement. En général, pour toutes les crises, les régions périphériques et moins développées ont été davantage exposées. Les incidences asymétriques ont également été amplifiées par la capacité institutionnelle variable des différents niveaux nécessaires pour relever les défis.

L’UE a réagi rapidement pour atténuer les effets des crises et ouvrir la voie à une reprise solide. La politique de cohésion a rapidement mobilisé un soutien en faveur des régions vulnérables, réduisant ainsi le risque d’aggravation des disparités. Les actions mises en place comprenaient l’injection de nouvelles liquidités pour soutenir les investissements, une flexibilité pour soutenir la poursuite des projets, des programmes de maintien de l’emploi, ainsi que de nouvelles flexibilités ciblées dans la programmation et la mise en œuvre, notamment par l’intermédiaire des trains de mesures relevant de l’initiative d’investissement en réaction au coronavirus (CRII). En outre, dans le cadre de NextGenerationEU, un soutien global a été apporté aux États membres pour favoriser leur processus de relance économique et leur résilience à long terme, par la mise en œuvre de réformes et d’investissements au titre de la facilité pour la reprise et la résilience (FRR), ainsi que du soutien à la reprise en faveur de la cohésion et des territoires de l’Europe (REACT-EU). Avec le plan REPowerEU, lancé à la suite de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine, les flexibilités prévues dans le cadre de la politique de cohésion avec l’initiative de soutien à l’énergie abordable (SAFE) ont joué un rôle déterminant pour soutenir les personnes les plus vulnérables, en particulier celles exposées au risque de précarité énergétique et les PME vulnérables face aux prix élevés de l’énergie. Parallèlement, les actions de cohésion pour les réfugiés en Europe (CARE) ont apporté un soutien financier aux autorités locales et aux ONG qui accueillent des personnes fuyant l’Ukraine en raison de la guerre d’agression menée par la Russie.

Avec l’instrument européen de soutien temporaire à l’atténuation des risques de chômage en situation d’urgence (SURE) et NextGenerationEU, notamment la FRR, les interventions au titre de la politique de cohésion ont contribué à une reprise économique rapide en 2021 et 2022, en particulier pour les régions moins développées, et avec de faibles taux de chômage. Alors que la crise de la COVID‑19 avait entraîné une contraction du PIB de 5,7 %, les revenus ont pratiquement retrouvé leur niveau de 2019 en deux ans dans toutes les catégories de régions. À titre de comparaison, à la suite de la crise de 2008, le ralentissement avait été moins marqué (4,3 % du PIB), mais deux ans plus tard, en 2010, la situation s’était aggravée dans les régions moins développées, tandis que les régions en transition et les régions plus développées avaient à peine commencé à se redresser. Soutenus par les mesures d’atténuation susmentionnées et les mesures de soutien nationales, les marchés du travail dans l’UE ont fait preuve d’une résilience remarquable. Il aura fallu un an seulement pour retrouver ou dépasser les niveaux d’emploi de 2019 dans la plupart des régions de l’UE. À titre de comparaison, pendant la crise financière de 2008, la contraction de l’emploi avait duré jusqu’en 2013 et la situation était revenue aux niveaux d’avant la crise en 2016, et en 2019 seulement dans les pays du sud de l’UE.

Les crises récentes ont néanmoins mis en évidence la vulnérabilité de nombreuses régions et la nécessité d’une plus grande résilience de leurs économies et de leurs marchés du travail. À cette fin, il convient d’encourager la promotion de chaînes de valeur européennes à l’épreuve du temps, notamment par l’adoption et le développement de technologies critiques et émergentes dans des secteurs stratégiques, comme ce que favorise la plateforme «Technologies stratégiques pour l’Europe» (STEP) 8 .

La convergence sociale a progressé, même s’il reste de nombreux défis à relever

La convergence sociale est guidée par l’engagement ferme qu’ont pris les institutions de l’UE, les États membres et les partenaires sociaux, lors du sommet social de Porto, d’atteindre les objectifs du socle européen des droits sociaux:

-au moins 78 % des personnes de 20 à 64 ans devraient avoir un emploi;

-au moins 60 % des adultes devraient participer à des activités de formation chaque année;

-le nombre de personnes menacées de pauvreté ou d’exclusion sociale devrait diminuer d’au moins 15 millions, dont au moins 5 millions d’enfants.

Carte 4. Taux d’emploi (20-64 ans), 2022

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La politique de cohésion de l’UE a joué un rôle central dans l’amélioration globale des indicateurs en matière sociale et d’emploi dans l’UE au cours de la dernière décennie. Les pays de l’est de l’UE ont accompli des progrès significatifs en matière d’inclusion sociale et de réduction de la pauvreté, convergeant vers la moyenne de l’UE (taux de pauvreté de 21 %). Toutefois, les pays du sud de l’UE stagnent depuis 2019 (à 25 % environ ). L’écart entre les régions plus développées et les régions moins développées s’est également réduit, passant d’environ 14 points de pourcentage en 2016 à 9 points de pourcentage en 2022.

Toutefois, les tendances positives en matière d’inclusion sociale et de réduction de la pauvreté pourraient être compromises par l’inflation et les prix élevés de l’énergie, ainsi que par des progrès inégaux d’un groupe de population à un autre. Les zones rurales de l’est et du sud de l’UE sont les plus directement touchées par la précarité énergétique. Des poches de pauvreté s’observent toutefois dans toutes les régions, y compris dans les zones urbaines développées. Certains groupes de population, comme les communautés marginalisées, vivent dans une pauvreté persistante, marquée par une ségrégation en matière de logement, par des possibilités d’éducation et d’emploi insuffisantes, ainsi que par un accès limité aux services de base.

Les disparités en matière d’emploi entre les régions se sont réduites, avec le soutien actif de la politique de cohésion. Bien que les taux d’emploi demeurent plus faibles dans les régions moins développées (68 % en 2022, contre 78 % dans les régions plus développées), l’écart s’est réduit de 5 points de pourcentage depuis 2013.

Les taux de chômage ont également convergé. L’amélioration est impressionnante dans les régions moins développées, où le taux a presque diminué de moitié, passant de 15,8 % en 2013 à 8 % en 2022, tandis que la réduction de 8,3 % à 5 % dans les régions plus développées montre également des progrès significatifs.

Cependant, malgré les progrès réalisés ces dernières années, le chômage des jeunes et le taux de jeunes ne travaillant pas et ne suivant pas d’études ou de formation (taux de NEET) dans l’UE constituent encore un défi de taille, de même que la baisse persistante des taux d’emploi des personnes handicapées. La baisse du chômage des jeunes et des NEET observée depuis 2014 a repris en 2021 et 2022, après une augmentation temporaire en 2020 pendant la pandémie de COVID-19. Le taux de chômage des jeunes de 15 à 24 ans a fortement chuté depuis 2013, de plus de 10 points de pourcentage, pour atteindre 14 % en 2022. Néanmoins, ce chômage représente plus du double du chômage global, qui est tombé à 6,2 %. Le taux de NEET a diminué de plus de 4 points de pourcentage depuis 2013, pour s’établir à 12 % en 2022. Des progrès supplémentaires sont nécessaires pour atteindre l’objectif de 9 % du socle européen des droits sociaux.

Les disparités en matière de chômage des jeunes observées entre les régions moins développées et les autres régions ont diminué de 2013 à 2022, en raison de réductions plus marquées dans les régions moins développées et dans les pays du sud de l’UE. Ces disparités restent néanmoins importantes, étant donné que le taux de chômage des jeunes de 22 % dans les régions moins développées représente près du double de celui des régions plus développées. Les différences concernant le taux de NEET entre les régions moins développées et les autres régions se sont également atténuées entre 2013 et 2022. Néanmoins, le taux de NEET dans les régions moins développées reste de 16 %, soit près du double de celui des régions plus développées.

Un taux de chômage faible et une forte demande de main-d’œuvre exercent une pression toujours plus grande sur les marchés du travail. Les pénuries de main-d’œuvre et de compétences sont en augmentation et constituent à présent un défi majeur dans toute une série de professions et de secteurs à tous les niveaux de compétences, et en particulier dans certaines régions. Ces pénuries sont exacerbées par les défis concomitants liés à la demande de compétences spécifiques pour répondre aux transitions numérique et écologique, aux transitions industrielles structurelles et à la forte réduction de la population en âge de travailler, qui devrait diminuer de 50 millions d’ici à 2050. À cet égard, la participation inclusive au marché du travail des groupes sous-représentés joue un rôle essentiel pour parvenir à la convergence et remédier aux pénuries de main-d’œuvre dans l’UE, de même que le renforcement des politiques en matière de formation tout au long de la vie et d’éducation, et l’intensification des réformes du marché du travail. La part des femmes dans la population active continue d’augmenter grâce à un niveau d’instruction élevé, à un meilleur accès aux services de garde d’enfants et à des formules de travail plus souples, tandis que le taux d’emploi des ressortissants de pays tiers est fortement remonté après une baisse en 2020.

Malgré une baisse visible des disparités en ce qui concerne les performances du marché du travail, certaines régions sont sous-performantes; le marché du travail est plus solide (et, dans l’ensemble, la situation sociale est meilleure) dans les régions du centre et du nord de l’UE que dans les régions du sud et du sud-est. Les progrès accomplis pour réduire l’écart entre les hommes et les femmes en matière de participation au marché du travail ont ralenti ou stagné ces dernières années: concernant l’UE dans son ensemble, cet écart est encore de 11 points de pourcentage, ce qui reste un facteur aggravant les disparités sur le marché du travail.

Le niveau d’instruction a globalement augmenté. La proportion de jeunes quittant prématurément le système éducatif a diminué dans l’ensemble de l’UE, en particulier dans les régions moins développées. La tendance positive observée au niveau du taux de diplômés de l’enseignement supérieur s’est maintenue dans toutes les régions, le taux global atteignant 34 % en 2022. En revanche, la participation des adultes à l’éducation et à la formation a diminué lors de la pandémie de COVID-19, mais a connu une reprise en particulier dans les régions moins développées et les États membres de l’est de l’UE.

Les niveaux de compétences et l’innovation jouent un rôle moteur central dans la croissance de la productivité et la compétitivité à long terme. Des travailleurs plus qualifiés et créatifs sont essentiels pour l’innovation et la création de nouveaux produits et services compétitifs. En 2022, la participation des adultes à l’éducation et à la formation a fortement augmenté, dépassant ainsi le niveau antérieur à la pandémie. Toutefois, des progrès substantiels sont nécessaires pour atteindre l’objectif du socle européen des droits sociaux, à savoir que 60 % des adultes participent chaque année à l’éducation et à la formation. L’expérience acquise dans certains États membres en ce qui concerne les comptes de formation individuels 9 montre clairement la voie à suivre.

Des disparités persistent en matière d’éducation et de formation, notamment en raison d’une forte concentration de diplômés de l’enseignement supérieur dans les villes (où se concentrent la plupart des possibilités d’accès à l’enseignement supérieur). Il en résulte des déséquilibres, parfois encore aggravés par l’exode des diplômés de l’enseignement supérieur quittant la région où ils ont obtenu leur diplôme. Cette «fuite des cerveaux» constitue un défi majeur pour la durabilité future des économies régionales et des tissus sociaux. Les déséquilibres dans la disponibilité des talents d’une région à l’autre sont dus à des possibilités d’emploi de qualité insuffisantes et à d’autres facteurs tels que le faible niveau de dotation en infrastructures, et d’accès à la garde d’enfants, à l’éducation et à la formation, aux services et équipements de santé et à d’autres services.

L’évolution démographique devrait encore exacerber les pénuries de main-d’œuvre et accroître la pression sur les budgets publics. Après des décennies de croissance, la population de l’UE diminue depuis 2020, car le solde migratoire ne compense plus la croissance naturelle négative. Au niveau de l’EU-27, la variation naturelle de la population et le solde migratoire connaissent le niveau le plus haut dans les régions urbaines et le niveau le plus bas (et souvent négatif) dans les zones rurales. En outre, les régions ultrapériphériques présentent un solde migratoire globalement négatif, lié à un manque de possibilités économiques et d’emploi, ainsi qu’à un manque d’accès aux services essentiels (notamment l’éducation, la garde d’enfants et les soins de santé), ce qui les rend moins attrayantes et peut inciter les habitants à partir vivre ailleurs.

Carte 5. Variation démographique totale, croissance naturelle et solde migratoire, 2010-2021

La diminution de la population en âge de travailler nécessitera d’accélérer les gains de productivité afin de maintenir le niveau de vie et des taux d’emploi en augmentation, notamment pour les personnes qui ne sont pas encore actives sur le marché du travail. À cet égard, les régions sont équipées de façon inégale. Les régions qui dans lesquelles s’observent à la fois une faible proportion de personnes hautement qualifiées et le départ des jeunes et des diplômés peuvent tomber dans un piège de développement des talents, limitant leur capacité à construire des économies durables, compétitives et fondées sur la connaissance. Comme l’indiquaient les communications intitulées «Mettre à profit les talents dans les régions européennes» 10 et «L’évolution démographique en Europe: une panoplie d’instruments d’action» 11 , un dosage stratégique combinant réformes et investissements est nécessaire pour supplanter cette réalité ou s’y adapter.

L’évolution démographique nécessite une adaptation au niveau des régions et des villes. Il s’agit par exemple d’intégrer des projections démographiques dans l’élaboration des politiques en matière d’aménagement du territoire, d’adapter la fourniture de services publics et la gouvernance publique, d’augmenter les taux d’emploi et de promouvoir des facteurs de productivité. L’enseignement et la formation professionnels ont une forte capacité à remédier aux pénuries de main-d’œuvre et à réaliser les transitions écologique et numérique, et jouent un rôle majeur dans les stratégies de spécialisation intelligente: ils contribuent à retenir et attirer les talents, à générer une capacité d’absorption dans les sociétés et les économies dans lesquelles ces talents se trouvent, ainsi qu’à soutenir la mise en place de communautés durables (et plus équitables).

Carte 6. Régions prises dans un piège de développement des talents et régions à risque de tomber dans un piège de développement des talents

... et toutes les régions ne bénéficient pas de la même dynamique de croissance

Les disparités économiques restent importantes sur l’ensemble du continent. Plus d’une personne sur quatre dans l’UE (28 %) vit dans une région dont le PIB par habitant est inférieur à 75 % de la moyenne de l’UE. La plupart d’entre elles vivent dans des États membres de l’est, mais aussi en Grèce, au Portugal, en Espagne, dans le sud de l’Italie et dans des régions ultrapériphériques. Depuis 2001, la croissance du PIB réel par habitant a été négative dans plusieurs régions, notamment en Grèce et en Italie, bien qu’elle se soit récemment redressée.

L’évolution des disparités infranationales fait apparaître des schémas différents d’un État membre à l’autre. Dans de nombreux États membres de l’est (comme la Slovaquie, la Bulgarie et la Roumanie), l’aggravation des disparités a été due à des taux de croissance très élevés dans les régions plus développées (généralement la région de la capitale). En France et en Grèce, les disparités internes ont augmenté car la croissance du PIB par habitant dans les régions les plus pauvres était particulièrement basse. Dans certains autres États membres, comme le Portugal, la diminution des disparités régionales est due aux performances relativement faibles de certaines régions développées, auparavant dynamiques.

Dans de nombreux États membres, le développement économique repose sur la compétitivité des régions des capitales et des grandes agglomérations. Associée à un manque de rattrapage dans d’autres domaines, cette situation entraîne des disparités internes. Cette polarisation des territoires peut être source d’externalités négatives (tensions sur les marchés du travail et du logement, congestion, pollution) et de sous‑utilisation du potentiel économique de l’ensemble du pays, ce qui peut nuire à la compétitivité des États membres et, partant, à la viabilité de leur modèle de croissance à plus long terme.

Les zones rurales, montagneuses, insulaires et à faible densité de population continuent de faire face à des défis spécifiques qui entravent la croissance et le développement économiques, en raison d’une connectivité physique et numérique moins forte ou de possibilités limitées en matière d’éducation et de formation. Le revenu moyen dans les zones rurales correspond à 87,5 % du revenu moyen dans les zones urbaines 12 . Toutefois, au cours de la période 2001-2021, les régions non urbaines ont enregistré (en moyenne) une croissance du PIB par habitant nettement supérieure à celle des régions urbaines: 1,5 % contre 0,8 %. La tendance est néanmoins différente dans les États membres de l’est, où la croissance est davantage portée par les grandes agglomérations et les capitales. Le rapport public intitulé «Une vision à long terme pour les zones rurales de l’UE: principales réalisations et pistes pour l'avenir» ouvre l’espace pour un débat sur l’avenir des zones rurales.

Ces disparités territoriales aggravent une situation dans laquelle un certain nombre de régions sont confrontées à une stagnation ou à un déclin économiques, avec le risque de tomber dans un piège de développement (c’est-à-dire qu’elles sont en retard par rapport aux taux de croissance moyens de l’UE et des États membres, et par rapport à leurs propres performances passées). Il s’agit notamment de certains anciens pôles industriels importants dans les régions plus développées. Les décideurs politiques des régions piégées peinent souvent à trouver des solutions pour rétablir le dynamisme économique antérieur. Cette situation alimente la frustration, qui évolue de plus en plus en mécontentement politique.

Les causes profondes des pièges de développement diffèrent d’une région à l’autre. Ces causes nécessitent un diagnostic individuel et peuvent concerner divers facteurs interdépendants, tels qu’une spécialisation insuffisante, une gouvernance publique faible, un écosystème d’innovation inefficace, un déficit de services ou une inadéquation des compétences. Ces facteurs méritent une analyse spécifique pour chaque région et des réponses stratégiques adaptées, au moyen d’un ensemble ciblé d’investissements et de réformes.

III. Si rien n’est fait, les défis structurels et émergents pourraient accentuer les disparités territoriales

Les transitions écologique et numérique offrent de nouvelles possibilités; elles sont nécessaires pour préserver la compétitivité de l’UE à l’avenir et garantir une bonne qualité de vie aux citoyens. Mais elles appellent également à des changements structurels, qui doivent s’accompagner de mesures de soutien, en particulier pour les personnes, les entreprises et les régions les plus vulnérables et exposées, sans quoi le risque existe de voir grandir les disparités régionales et sociales. La politique climatique de l’UE vise à garantir l’équité, notamment en fixant des objectifs de réduction des gaz à effet de serre plus stricts pour les États membres les plus riches, tandis que ceux dont le PIB par habitant est plus faible reçoivent une part plus importante des recettes tirées de la mise aux enchères dans le système d’échange de quotas d’émission. Outre les fonds transversaux de l’UE, relevant par exemple de la politique de cohésion et de la FRR, un ensemble d’instruments spécifiques de financement a également été déployé pour atténuer les incidences sociales et économiques de la transition climatique, notamment le mécanisme pour une transition juste et le futur Fonds social pour le climat.

Le changement climatique risque d’accentuer les inégalités régionales. La fréquence et la gravité des catastrophes météorologiques, telles que les températures extrêmes, les tempêtes, les crues et les inondations côtières, les sécheresses et les incendies de forêt, augmentent. Par exemple, les inondations survenues dans les régions situées à la frontière belgo-allemande en 2021 ont infligé des dommages directs estimés à 34,5 milliards d’EUR. La mortalité due à la chaleur a augmenté, notamment en raison du vieillissement de la population. Ces événements et leur incidence sur les citoyens et l’économie, ainsi que la capacité de ceux-ci à y faire face, sont répartis de manière inégale dans toute l’Europe. Les régions côtières, méditerranéennes et orientales, qui sont déjà moins riches que la moyenne de l’UE, sont plus vulnérables et touchées de manière disproportionnée, et sont confrontées à des pertes économiques annuelles estimées à au moins 1 % du PIB, ainsi qu’à une exposition accrue des habitants aux effets négatifs du climat.



Carte 7. Incidence du changement climatique dans un scénario de réchauffement planétaire de 2° C d’ici à 2050

La pollution atmosphérique dans l’UE reste caractérisée par des différences socio-économiques. La pollution atmosphérique est généralement plus élevée dans les villes que dans les zones rurales, notamment en raison de l’incidence du trafic. Bien que la qualité de l’air se soit améliorée dans les régions les plus riches et les plus pauvres de l’UE au cours de la période 2007-2020, des inégalités persistent, puisque la concentration en particules fines inhalables est systématiquement supérieure d’environ un tiers dans les régions les plus pauvres, qui dépendent davantage des combustibles solides pour le chauffage.

L’atténuation du changement climatique et l’amélioration de la qualité de l’environnement nécessitent une réduction rapide des émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques dans tous les secteurs, y compris au moyen de l’économie circulaire et de la restauration des écosystèmes. Un tel objectif requiert une action à tous les niveaux de gouvernance, étant donné que ces défis ont généralement de fortes répercussions territoriales et sociales. Du fait de leurs différences naturelles, géographiques et socio-économiques, les régions présentent en outre des capacités différentes de réduction des émissions.

La transition vers une économie neutre pour le climat doit être gérée de manière juste et équitable. La capacité inégale des régions à tirer parti de cette transition peut exacerber les disparités territoriales. Le changement économique associé à cette transition profite généralement aux régions les plus à même d’attirer les investissements et de mobiliser une main-d’œuvre qualifiée. Dans le même temps, de nombreuses régions rurales et moins développées présentent un fort potentiel de production d’énergies renouvelables à partir de l’énergie éolienne et solaire, ou de captage et de stockage du carbone dans les écosystèmes naturels. Le développement de ce potentiel servirait non seulement les régions elles-mêmes, mais aussi la sécurité énergétique dans l’ensemble de l’Europe.

Carte 8. Potentiel inexploité pour l’énergie solaire, éolienne et hydraulique

La transition climatique s’accompagne par ailleurs à la fois de possibilités et de défis pour l’emploi et pour les ménages. Certains secteurs fortement dépendants des combustibles fossiles sont susceptibles de subir des pertes d’emplois ou des restructurations. Dans le même temps, le changement climatique représente un défi pour les secteurs traditionnels tels que l’agriculture, le tourisme, l’industrie ou même la production d’énergie, en particulier dans les zones où la rareté de l’eau devient la norme. Les travailleurs des secteurs dans lesquels l’incidence du changement climatique est plus marquée — en particulier ceux qui possèdent des compétences spécifiques ou des possibilités limitées d’évoluer vers d’autres secteurs — peuvent avoir du mal à trouver un nouvel emploi, ce qui entraîne du chômage et des pressions sur les revenus des ménages. Pour les secteurs qui occupent une place prépondérante dans les économies régionales et locales, les effets seront d’une plus grande ampleur, ce qui obligera les économies de ces régions à s’adapter pour rester compétitives. En outre, la mise en œuvre de technologies et de mesures respectueuses du climat nécessite des investissements supplémentaires, ce qui crée des difficultés pour les ménages à faibles revenus.

Une approche globale est nécessaire pour favoriser l’emploi et les possibilités dans toutes les régions, pour faire face aux coûts asymétriques du changement climatique, ainsi que pour mettre en œuvre la transition climatique et écologique, ce qui requiert notamment: une atténuation plus rapide des émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques, les investissements nécessaires dans la résilience face au changement climatique, l’amélioration de la gestion des ressources naturelles et de la restauration de la nature, la création d’écosystèmes sains et de solutions fondées sur la nature, le soutien de l’adaptation au changement climatique et de la gestion des risques de catastrophe, des investissements dans l’utilisation rationnelle de l’eau et le traitement des eaux usées (le cas échéant), dans l’économie circulaire, dans l’efficacité énergétique des logements, ainsi que le passage à des modes de transport respectueux du climat.

La transition numérique offre des possibilités à toutes les régions en termes d’augmentation de la productivité des entreprises, d’innovation, de résilience et d’accès aux services, ainsi qu’aux zones rurales et aux territoires plus isolés. Toutefois, la transition numérique peut également comporter des risques pour la cohésion, car les territoires et les individus n’ont pas tous les mêmes capacités pour adopter et utiliser les technologies numériques, notamment les personnes en situation défavorisée et celles issues de communautés marginalisées. En l’absence de politiques publiques adéquates, les déficits en termes de compétences numériques peuvent se creuser, ce qui risque d’aggraver les fractures sociales et régionales au sein de l’Europe. En outre, le manque d’investissements dans les infrastructures de connectivité numérique et dans le déploiement des technologies numériques peut entraver la croissance à long terme et la compétitivité des régions touchées, ce qui peut avoir une incidence négative sur l’attractivité socio-économique de ces régions, et rendre plus difficile de retenir la main-d’œuvre qualifiée et les entreprises innovantes sur le territoire.

Il est nécessaire d’apporter un soutien continu aux régions, notamment aux régions les moins préparées, et en particulier dans les zones rurales et isolées, pour faire en sorte que ces régions puissent tirer parti de la transformation numérique. Ce soutien est particulièrement essentiel en ce qui concerne les investissements dans le déploiement d’infrastructures et de services de réseaux numériques avancés, l’acquisition de compétences numériques de base et avancées, ainsi que l’adoption des technologies numériques par les entreprises, les citoyens et les administrations publiques.

Le nouveau paysage géopolitique peut également avoir de graves répercussions sur de nombreuses régions de l’UE. La guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine a entraîné, dans certaines régions, une baisse notable des investissements, des flux commerciaux et des activités économiques (y compris du tourisme), ainsi que l’apparition de nouveaux obstacles économiques et la perte d’emplois. En raison de la guerre, un nombre sans précédent de personnes se sont en outre retrouvées à la recherche d’un abri dans l’UE. En proposant un ensemble d’aides juridiques, opérationnelles et financières, l’UE a contribué à garantir le soutien aussi bien aux personnes fuyant vers l’Union qu’aux États membres d’accueil. Toutefois, certaines régions ont enregistré un nombre particulièrement élevé d’arrivées, ce qui a exercé une pression sur les systèmes locaux d’intégration. Les régions limitrophes de la Russie et de la Biélorussie sont également confrontées à des défis en matière de sécurité et à la menace de l’instrumentalisation de la migration ou au recours à une telle instrumentalisation.

Un soutien continu est également nécessaire en faveur de certaines régions périphériques méridionales et régions ultrapériphériques exposées à une pression migratoire particulière aux frontières extérieures, ou enregistrant une augmentation des arrivées clandestines.

La montée des tensions et l’intensification de la concurrence internationale exigent des chaînes de valeur plus diversifiées. Dans le contexte d’une autonomie stratégique ouverte, la diversité des régions de l’UE et leurs avantages concurrentiels existants et potentiels constituent un atout. La diversité régionale peut renforcer le marché unique et les chaînes de valeur dans toute l’Europe. Pour y parvenir, les régions doivent toutefois être dotées des ressources physiques, humaines et innovantes adéquates, et être en mesure de libérer leur potentiel et leur valeur ajoutée.

Questions de gouvernance

Des lacunes en matière de gouvernance publique et de capacité administrative entravent le potentiel de développement et demeurent un défi structurel dans plusieurs régions et États membres. La qualité des institutions — y compris le respect de l’état de droit et la capacité administrative — est essentielle pour la rentabilité des investissements publics et privés. Il existe une forte corrélation entre la qualité de la gouvernance et l’incidence des investissements au titre de la politique de cohésion, ce pourquoi un renforcement des capacités administratives est nécessaire dans les régions européennes, y compris dans la perspective de futurs élargissements de l’UE, étant donné qu’une meilleure qualité de la gouvernance aux niveaux national, régional et local peut accroître l’efficacité des politiques et des investissements nationaux et européens.

Carte 9. Indice européen de la qualité de l’administration, 2024

Le potentiel de développement de nombreuses régions peut également être amoindri par le manque de diversification des sources de financement aux niveaux régional et local, lorsque ces régions dépendent en grande partie de transferts à partir des budgets nationaux. Les entités infranationales sont chargées de gérer, en moyenne, plus de la moitié des investissements publics. Cette proportion est plus faible, bien qu’en augmentation, dans les États membres moins développés. Ce type de dépendance nuit à la résilience des pays concernés face aux chocs. Une capacité de financement accrue et diversifiée des autorités régionales et locales, notamment la possibilité de mobiliser des investissements privés, ainsi que le renforcement de leurs capacités institutionnelles et de leurs compétences administratives, renforceraient donc la viabilité de leurs stratégies de développement.

IV. Faire le point sur les réalisations de la politique de cohésion et tirer des enseignements pour l’avenir

Comme souligné ci-dessus, si la politique de cohésion a bien contribué à la convergence entre les États membres, la situation au niveau infranational est plus nuancée. En effet, ce processus de convergence nationale est parfois éclipsé par des disparités infranationales croissantes, notamment entre les grandes zones métropolitaines et les autres régions, ainsi que par des régions en retard de développement, souvent prises dans un «piège de développement».

Les programmes 2021-2027 ont démarré avec un certain retard en raison des effets de la pandémie et, dans certains États membres, en raison d’autres facteurs, tels que la nécessité d’élaborer en même temps des plans pour la reprise et la résilience. Les autorités de gestion des États membres et des régions ont dû agir parallèlement avec des systèmes de gouvernance et des calendriers différents. Les États membres et les régions moins développés, dans lesquels le besoin d’investissements au titre de la politique de cohésion est le plus marqué, rencontrent souvent des difficultés de conception et de mise en œuvre, et disposent de ressources administratives plus limitées. Malgré les mesures de simplification de la politique de cohésion introduites par le cadre législatif 2021-2027 et le soutien apporté aux capacités administratives au cours des dernières décennies, il est nécessaire de poursuivre la simplification de cette politique.

Afin de renforcer son efficacité dans la réalisation des objectifs du traité, notamment à la lumière des défis à venir, il est nécessaire de réfléchir à la manière dont la conception de la politique de cohésion pourrait encore être améliorée. 

Réalisation de l’objectif du traité: réduire les disparités en matière de développement économique

La politique de cohésion n’a cessé d’évoluer au cours des périodes antérieures, afin de s’adapter aux nouvelles circonstances et de soutenir les priorités de l’UE. Des modifications ont été apportées en ce qui concerne les investissements soutenus, la couverture géographique, le mode de mise en œuvre, l’utilisation de conditions et le lien avec le processus du Semestre européen. Dans le même temps, les valeurs et principes fondamentaux de la politique ont été maintenus, voire renforcés au fil du temps: un cadre à long terme pour la programmation, un partenariat avec les parties prenantes et la société civile, la gouvernance à multiniveaux, l’évaluation et la collecte de données et, surtout, l’approche territorialisée dans laquelle le soutien est adapté aux besoins et aux possibilités propres à chaque région.

Conformément aux objectifs du traité, les ressources de la politique de cohésion ont été concentrées sur les régions et les États membres les moins développés de l’UE: 70 % du Fonds européen de développement régional et du Fonds social européen plus sont alloués à ces régions dans le cadre des programmes 2021-2027. Le Fonds de cohésion est entièrement alloué aux États membres dont le RNB par habitant est inférieur à 90 % de la moyenne de l’UE. Bien que toutes les régions bénéficient d’un financement au titre de la politique de cohésion, l’intensité de l’aide pour la période 2014-2020 était plus élevée dans les régions moins développées, avec environ 297 EUR alloués par habitant et par an en moyenne, contre 117 EUR pour la moyenne de l’UE.

Tout en continuant à accorder une attention particulière aux régions moins développées, il convient également d’accorder une attention particulière à la dynamique de développement et aux tendances à long terme, en s’attaquant aux problèmes avant qu’ils ne s’enracinent et en aidant les régions prises dans des pièges de développement (ou risquant de l’être). En résumé, il s’agit d’adopter une approche plus proactive pour atteindre l’objectif du traité consistant à promouvoir un développement harmonieux.

Les différentes régions ne partent pas toutes du même point de départ et ont des trajectoires de développement différentes

Les points de départ, les besoins et les capacités des régions en matière de développement sont tous différents. Les régions sont par ailleurs équipées de manière inégale pour relever les défis émergents, compte tenu de leurs capacités administratives et financières différentes. Elles suivront donc des trajectoires de développement différentes pour gérer les transformations en cours et à venir.

L’UE, par l’intermédiaire de la politique de cohésion (mais par d’autres vecteurs également), devrait canaliser un soutien ciblé et territorialisé axé sur les besoins spécifiques de chaque région, cohérent par rapport aux priorités de l’UE, et en accordant l’attention requise aux défis, aux cadres et aux politiques de chaque État membre.

Les programmes de développement régional sont depuis longtemps au cœur de la politique de cohésion, mais le Fonds pour une transition juste a illustré la manière dont le soutien pouvait être davantage adapté aux besoins de développement de certains territoires en vue de relever les défis préalablement recensés en matière de transition climatique. De même, les stratégies de spécialisation intelligente se sont révélées utiles pour renforcer les écosystèmes régionaux d’innovation: sur la base des capacités et des atouts locaux, en s’appuyant sur un réseau d’acteurs locaux et régionaux, et en s’attaquant à la fracture de l’innovation.

Les transitions écologique et numérique, la transformation démographique, l’évolution des tendances économiques mondiales et le changement climatique auront des effets sur toutes les économies régionales. Mais l’ampleur et la nature de ces défis varieront d’une région à l’autre, ainsi que la capacité de celles‑ci à y faire face.

Par conséquent, une réflexion approfondie est nécessaire sur la meilleure manière d’adapter davantage la politique aux différents profils économiques et caractéristiques géographiques des régions, afin de cibler stratégiquement les investissements. Il est de plus en plus nécessaire de mieux cerner les multiples défis en matière de développement, les besoins de réforme et les différences de situation sociale et d’emploi, afin de faciliter une programmation plus efficace des fonds de l’UE dans les régions ultrapériphériques, les régions faiblement peuplées, les îles, les régions montagneuses, les régions frontalières, les zones rurales et les zones touchées par la transition industrielle et autres.

Promouvoir un développement territorial plus équilibré

Le développement économique infranational se caractérise souvent par une forte polarisation entre les régions des capitales et les grands centres métropolitains, d’une part, et les régions à faible densité de population, d’autre part. La répartition inégale des moteurs de croissance conduit les régions plus développées obtenir de meilleurs résultats en ce qui concerne l’innovation et la compétitivité, la qualité de la gouvernance et de l’administration publiques, ainsi que le niveau d’éducation. Cette situation peut également signifier qu’un potentiel important pour l’économie et la création d’emplois de qualité est encore à exploiter dans les régions rurales et intermédiaires moins développées.

Les zones métropolitaines, les villes et leurs environs jouent un rôle central dans le développement régional. Ces zones concentrent le capital humain (y compris les universités, les centres de formation professionnelle et les centres de recherche et développement) et garantissent une connectivité élevée et des services de grande qualité. Elles attirent ainsi naturellement les investissements. Mais leur attractivité a un coût: une forte congestion, des défis sociaux et les prix des logements qui, s’ajoutant à des coûts salariaux importants, peuvent nuire à leur compétitivité.

Les villes de petite et moyenne taille jouent également un rôle central dans le développement territorial, en favorisant la croissance des zones environnantes. Leur rôle est essentiel dans la fourniture de services publics et privés et elles offrent des possibilités d’emploi et d’éducation aux zones environnantes.

Une meilleure coopération entre les régions de l’UE peut également contribuer à un développement territorial plus équilibré. La politique de cohésion, en particulier par l’intermédiaire des programmes Interreg, a contribué à soutenir la collaboration interrégionale grâce à la coopération transfrontalière et transnationale, notamment au moyen de stratégies macro‑régionales. Celles-ci favorisent l’innovation, le développement et une meilleure gouvernance. Il est néanmoins possible de renforcer la coopération régionale à différents niveaux, en particulier pour la fourniture de biens publics communs par-delà les frontières, compte tenu de la valeur ajoutée du soutien aux investissements transfrontaliers au moyen du budget européen.

Les déséquilibres territoriaux pourraient être atténués par un modèle de développement plus polycentrique: s’appuyer sur les villes de petite et moyenne taille et promouvoir la fourniture de services publics dans des zones éloignées des grands centres urbains. La coopération régionale pourrait être renforcée en développant les capacités des autorités et des parties prenantes concernées.

Partenariat, gouvernance à multiniveaux et autonomisation des parties prenantes

Les personnes présentes sur le terrain ont une meilleure connaissance des besoins précis de leur territoire. À ce titre, elles doivent être associés à la prise de décision et à l’élaboration des politiques. Cette inclusion et cette autonomisation servent également à lutter contre le mécontentement politique croissant 13 et la défiance à l’égard des pouvoirs publics.

Le cadre 2021-2027 a renforcé le partenariat et la participation des acteurs régionaux et locaux, de la société civile et des partenaires sociaux. Les actions prévoyaient la promotion de modèles de mise en œuvre territoriale, tels que le développement local mené par les acteurs locaux (DLAL) ou des investissements territoriaux intégrés. Ceux-ci combinent des financements provenant de sources multiples pour contribuer à la mise en œuvre d’une stratégie territorialisée faisant intervenir un partenariat local, des approches ascendantes et une gouvernance territoriale. Il est nécessaire de poursuivre la réflexion sur la manière d’associer au mieux les autorités infranationales et les autres parties prenantes concernées, et de renforcer les mécanismes territoriaux de gouvernance à multiniveaux. L’objectif est de mieux répondre aux besoins des partenaires économiques et sociaux et des citoyens, conformément aux priorités de l’UE. Ce renforcement du rôle des partenaires locaux nécessite une amélioration de leurs capacités administratives. Une réflexion autour de la meilleure manière d’y parvenir devrait faire partie du débat.

Promouvoir la convergence institutionnelle en remédiant aux lacunes existantes en matière de gouvernance publique et de capacités administratives

Une bonne gouvernance, des institutions fortes, le respect de l’état de droit et une solide capacité administrative sont des conditions préalables à la conception et à la mise en œuvre efficaces et efficientes de toute stratégie de développement et, plus généralement, au progrès économique et social. Les lacunes administratives et de gouvernance empêchent certains États membres et certaines régions de tirer pleinement parti de la politique de cohésion, notamment en raison de leurs difficultés à préparer et à mettre en œuvre les investissements.

Ces lacunes sont encore largement répandues. Le soutien que la politique de cohésion apporte actuellement, au moyen d’une assistance technique, comble principalement les lacunes en matière de capacité dans la gestion des fonds et les modalités de mise en œuvre, y compris en ce qui concernela lutte contre la fraude et la corruption.

D’autres instruments de l’UE ont également contribué au renforcement des capacités administratives, principalement l’instrument d’appui technique, qui soutient de plus en plus les autorités régionales et locales. Les réformes des administrations publiques soutenues par la FRR (par exemple dans les procédures d’octroi de permis ou les marchés publics) ont bénéficié d’investissements financés à la fois par la FRR et par la politique de cohésion.

Une approche plus ambitieuse et plus globale s’impose pour remédier aux lacunes des administrations nationales et régionales, ainsi qu’à celles de certains bénéficiaires et partenaires. Une telle approche stratégique pourrait combiner un soutien technique sur mesure et des exigences en matière de réforme dans certains domaines.

Remédier aux lacunes administratives permettrait non seulement d’améliorer l’efficacité de la politique de cohésion, mais aussi de stimuler les investissements et les échanges au sein du marché unique, d’accroître l’attractivité des régions et États membres concernés, ainsi que d’améliorer leur capacité à mettre en œuvre l’acquis de l’UE.

Renforcer l’efficacité des investissements au titre de la politique de cohésion et promouvoir les réformes

Les investissements sont une condition nécessaire mais non suffisante pour garantir le développement économique. Certaines régions, bien qu’ayant bénéficié du soutien de la politique de cohésion pendant de nombreuses années, enregistrent encore de faibles performances économiques. Des réformes sont nécessaires pour éliminer les obstacles au développement régional, qu’il s’agisse d’obstacles spécifiques aux investissements, d’obstacles réglementaires ou de mesures visant à améliorer le fonctionnement du marché du travail et l’environnement des entreprises.

La politique de cohésion au titre du cadre 2021-2027 a œuvré au renforcement des liens entre les investissements et les réformes en créant des conditions favorisantes, ainsi qu’à l’alignement sur le Semestre européen. En supprimant les obstacles à la croissance et au développement régionaux, ces liens peuvent avoir une incidence positive sur le marché unique.

Des conditions favorisantes permettent l’établissement d’un cadre uniforme pour accroître l’efficacité des investissements au titre de la politique de cohésion, en garantissant, par exemple, la pertinence économique et la viabilité financière de la planification des investissements dans les transports, ou la cohérence de la gestion de l’eau par rapport aux priorités et exigences de l’UE. Toutefois, l’application de ces conditions, au moyen d’un ensemble commun d’exigences fixées dans le cadre réglementaire, peut limiter la capacité à tenir compte des difficultés, des besoins et des défis spécifiques des États membres à mesure qu’ils évoluent dans le temps.

Une coordination plus étroite a également été mise en place entre le Semestre européen et les investissements au titre de la politique de cohésion. Bien que le Semestre européen se concentre sur les réformes nationales, le renforcement de sa dimension territoriale et sociale depuis 2018 a étendu son rôle d’orientation auprès des États membres pour exploiter le potentiel économique de l’ensemble de leur territoire et réduire les inégalités. En effet, les recommandations par pays liées aux investissements ont orienté les programmes de la politique de cohésion 2021-2027 et l’utilisation du Fonds pour une transition juste. Les recommandations de 2024 joueront un rôle clé dans l’examen à mi-parcours et les ajustements des programmes en 2025, en mettant davantage l’accent sur les spécificités et les défis régionaux. 

Afin de stimuler davantage la croissance et la convergence régionales, il est nécessaire d’examiner comment renforcer encore le lien entre les investissements et les réformes afin de maximiser l’incidence de la politique de cohésion. Cette réflexion devrait tenir compte de l’expérience tirée d’autres instruments de l’UE, notamment de la FRR, qui a introduit une complémentarité accrue entre la stratégie d’investissement et les réformes dans les États membres. Les réflexions engagées devraient examiner la portée des réformes nécessaires, le rôle du Semestre européen et la coordination entre les politiques européennes, nationales et régionales.

Améliorer la coordination et la cohérence par rapport aux politiques nationales

La promotion de la cohésion ne repose pas uniquement sur la politique de cohésion. L’exploitation du potentiel économique de toutes les régions de l’UE, tout en réduisant les inégalités socio-économiques, nécessite des efforts communs et devrait être un objectif commun des politiques d’investissement, au niveau de l’UE et au niveau national. Cela n’a pas toujours été suffisamment le cas. Par conséquent, il est nécessaire de poursuivre la réflexion sur la manière dont les actions de l’UE et des États membres visant à remédier aux disparités et à promouvoir l’objectif de cohésion économique, sociale et territoriale du traité devraient fonctionner ensemble, en se renforçant mutuellement et en adaptant le soutien aux différents types de territoires.

Par exemple, l’intégration, le cas échéant, de la dimension territoriale dans la conception des politiques pourrait renforcer la cohérence entre les besoins régionaux et les politiques horizontales (européennes et nationales).

Accroître l’efficacité de la mise en œuvre

Les retards dans la programmation et la mise en œuvre des programmes de la politique de cohésion (partiellement dus à la concentration de la mise en œuvre financière en fin de période, conjuguée à des lacunes administratives dans certains États membres et certaines régions) laissent à penser que le mode de mise en œuvre de cette politique peut être amélioré. Cette amélioration peut notamment avoir lieu au moyen d’une plus grande simplification pour les administrations et les bénéficiaires.

Le cadre 2021-2027 a présenté d’importantes mesures de simplification, notamment une liste réduite d’objectifs stratégiques, une logique d’intervention plus claire utilisant des indicateurs, des rapports allégés et des dispositifs d’audit unique. Il a également étendu les possibilités d’utiliser d’autres options de paiement que les coûts sur facture, c’est-à-dire un financement non lié aux coûts, ou des options simplifiées en matière de coûts. La voie a ainsi été ouverte à une mise en œuvre plus simple, avec des possibilités de paiement plus rapides. Toutefois, les États membres n’ont pas encore fait pleinement usage de ces options.

Les expériences positives acquises dans la mise en œuvre du FSE et du FSE+, qui évoluent vers un modèle de mise en œuvre fondé sur la performance, peuvent contribuer à fournir des enseignements pour l’avenir. Il importe d’évaluer si ce modèle de mise en œuvre, avec des paiements liés à l’obtention de résultats (et non au remboursement des coûts exposés), pourrait réduire la charge administrative pour les autorités responsables des programmes et les bénéficiaires, accélérer la mise en œuvre financière et développer l’orientation de la politique vers les résultats.

L’évaluation à mi-parcours de la FRR 14 a également permis une réflexion importante à prendre en compte pour la conception future des instruments de financement de l’UE. Les consultations correspondantes montrent qu’il existe un large soutien en faveur des instruments de financement fondés sur la performance au niveau de l’UE. Les fonds au titre de la FRR sont décaissés une fois que les jalons et les cibles ont été atteints, car ils représentent des étapes concrètes dans la mise en œuvre des réformes et des investissements par les États membres, et récompensent ainsi les progrès accomplis tout au long du processus.

Il ressort également de l’évaluation à mi-parcours que le fait de combiner les réformes et les investissements de manière intégrée fournit des incitations efficaces pour satisfaire les besoins de réforme au long cours, et peut conduire à une mise en œuvre plus cohérente et plus efficace. Les plans pour la reprise et la résilience favorisent l’élaboration de politiques globales en incitant les États membres à concevoir un ensemble cohérent de réformes et d’investissements, assorti de résultats clairs, qui répondent à la fois aux priorités stratégiques de l’UE et aux défis propres à chaque pays. Dans le même temps, l’évaluation montre que les collectivités locales et régionales, les parties prenantes et les partenaires sociaux ont souligné leur participation insuffisante, et rappelle l’importance de leur participation effective, non seulement dans la conception, mais aussi dans la mise en œuvre et le suivi des mesures qui les concernent. Enfin, l’évaluation met également en évidence les domaines susceptibles de faire l’objet d’une simplification future afin de garantir une flexibilité suffisante dans la conception et la mise en œuvre des plans, notamment en ce qui concerne leur procédure de révision, la formulation de jalons et de cibles; ainsi que le cadre actuel d’audit et de contrôle.

Toute modification future de la politique de cohésion ou tout nouveau modèle de mise en œuvre doit être aligné(e) sur l’objectif de cohésion économique, sociale et territoriale du traité, et tenir compte de l’expérience tirée de la programmation de la politique de cohésion et de son approche régionale et territorialisée, ainsi que des enseignements tirés de la FRR. D’autres questions pratiques devraient également être prises en considération, par exemple les répercussions sur le système d’audit et de contrôle.

Atteindre des objectifs à long terme — mais avec une souplesse intrinsèque en cas de circonstances imprévues

Les programmes de la politique de cohésion poursuivent des objectifs de développement à long terme, dont la période de mise en œuvre s’étend sur une décennie.

La possibilité existante de modifier les programmes de la politique de cohésion permet déjà un ajustement en souplesse pour tenir compte de l’évolution de la situation. Cette flexibilité s’est accrue au fil du temps. Elle a été utilisée de manière efficace en réaction aux crises économiques et aux chocs imprévus, notamment dans les domaines de la gestion des situations d’urgence, de la reprise et de la prévention. Le cadre législatif prévoit des options pour une réaffectation rapide des fonds entre les programmes et au sein de ceux-ci, l’exercice d’une révision à mi-parcours et des dispositions spécifiques prévoyant des dérogations temporaires en réaction à des circonstances exceptionnelles ou inhabituelles.

S’il était essentiel que la politique de cohésion contribue à la réaction de l’UE face aux répercussions socio-économiques de la pandémie de COVID-19 et de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine, cette politique doit rester centrée essentiellement sur la réalisation d’objectifs structurels à long terme. La résilience économique ne peut être obtenue qu’au moyen d’investissements à long terme, notamment par la diversification des économies régionales, le renforcement de la capacité d’adaptation aux changements technologiques et démographiques, et le renforcement des compétences de la main-d’œuvre.



CONCLUSION

Le 9e rapport sur la cohésion met en évidence les réalisations importantes de cette politique en ce qui concerne la promotion de la convergence économique et sociale ascendante dans l’Union. Il reste des défis à relever, en particulier au niveau régional, qui seront encore amplifiés par des transformations structurelles. Les enseignements tirés des périodes de mise en œuvre antérieures et de l’interaction avec d’autres instruments soulignent la nécessité d’améliorer davantage la conception de la politique de cohésion. Une politique plus forte et modernisée est essentielle pour renforcer le modèle de croissance de l’Europe, construire une Union inclusive et réaliser l’objectif de cohésion économique, sociale et territoriale fixé par le traité.

(1)

  Forging a sustainable future together - Cohesion for a competitive and inclusive Europe: report of the High-Level Group on the Future of Cohesion Policy  

(2)

Formation brute de capital fixe des administrations publiques.

(3)

États membres dont le revenu national brut par habitant est inférieur à 90 % de la moyenne de l’UE.

(4)

L’incidence des programmes 2014-2020 et 2021-2027 a été évaluée à l’aide de RHOMOLO, un modèle d'équilibre général spatial calculable de la Commission européenne. Pour une analyse plus détaillée, voir le chapitre 9 du 9e rapport sur la cohésion.

(5)

Tchéquie, Pologne, Slovaquie, Croatie, Bulgarie, Roumanie, Estonie, Grèce, Chypre, Lettonie, Lituanie, Hongrie, Malte et Slovénie.

(6)

Voir Chapitre 9 du 9e rapport sur la cohésion.

(7)

COM(2024) 146 final du 20.3.2024.

(8)

  Règlement (UE) 2024/795 établissant la plateforme «Technologies stratégiques pour l’Europe» (STEP)

(9)

Les comptes de formation individuels fournissent aux personnes en âge de travailler un budget à consacrer à une formation de qualité pour améliorer leurs compétences et leur aptitude à l’emploi.

(10)

COM(2023) 32 final du 17.1.2023.

(11)

COM(2023) 577 final du 11.10.2023.

(12)

  Urban-rural Europe - income and living conditions - Statistics Explained (europa.eu)

(13)

A. Rodriguez-Posé, L. Dijkstra et H. Poelman: «The Geography of EU Discontent and the Regional Development Trap»,  Regional Policy Working Papers 03/2023 . 

(14)

COM(2024) 82 final du 21.2.2024.

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