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Document 52010AE1617

Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur les produits dérivés négociés de gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux» COM(2010) 484 final – 2010/0250 (COD)

JO C 54 du 19.2.2011, p. 44–47 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

19.2.2011   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 54/44


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur les produits dérivés négociés de gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux»

COM(2010) 484 final – 2010/0250 (COD)

(2011/C 54/14)

Rapporteur général: M. IOZIA

Le 13 octobre 2010 et le 7 octobre 2010, le Conseil et le Parlement européen ont respectivement décidé, conformément à l'article 114 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), de consulter le Comité économique et social européen sur la:

Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur les produits dérivés négociés de gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux

COM(2010) 484 final – 2010/0250 (COD).

Le 20 octobre 2010, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Marché unique, production et consommation» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 467e session plénière des 8 et 9 décembre 2010 (séance du 8 décembre 2010) de nommer M. IOZIA rapporteur général et a adopté le présent avis par 144 voix pour, 4 voix contre et 6 abstentions.

1.   Observations et recommandations

1.1   D'après la Banque des règlements internationaux (BRI), la valeur notionnelle des dérivés à la fin 2009 s'élevait à 615 mille milliards de dollars US (615 000 000 000 000) environ, c'est-à-dire à un montant dépassant plus de dix fois celui du PIB mondial. Les recettes en 2010 provenant de ces produits dérivés devraient atteindre pour les établissements bancaires un montant de 150 milliards de dollars. 40 % de ce chiffre d'affaires est constitué par les marchés de gré à gré (over-the-counter-OTC). D'après une récente étude réalisée par un grand groupe bancaire mondial, les réformes qui seront adoptées par l'Europe et les États-Unis sur ces marchés de gré à gré entraîneront une diminution des recettes d'un montant avoisinant au moins les 15 milliards de dollars.

1.2   Le CESE est favorable à la proposition de règlement sur les produits dérivés négociés de gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux et souscrit aux affirmations du Commissaire Barnier: «Aucun marché financier ne peut se permettre de fonctionner suivant la loi de la jungle. Les produits dérivés de gré à gré ont un impact considérable sur l'économie réelle, qui s'étend des crédits hypothécaires aux prix des denrées alimentaires. L'absence de réglementation sur ces produits a contribué à la crise financière et aux répercussions massives que nous subissons tous actuellement.»

1.3   Selon le Comité, le recours au règlement pour codifier cette matière est approprié et répond à l'exigence d'introduire des obligations générales et homogènes pour tous les acteurs de ce secteur.

1.4   Le CESE souscrit à la proposition de la Commission de recourir à des contreparties centrales (CCP) pour la compensation des dérivés de gré à gré normalisés et de veiller à ce que les CCP, qui assumeront des risques croissants, soient soumises à des normes prudentielles uniformes. Cette idée figurait déjà par ailleurs dans un précédent avis du CESE: «les marchés de gré à gré ne devraient pas être ouverts à des échanges bilatéraux, mais opérer exclusivement par le biais d'une contrepartie centrale, qui en surveillant le niveau global de risque, serait susceptible de limiter l'accès aux transactions pour les parties dont l'exposition est trop élevée. Les échanges devraient avoir lieu sur une plateforme unique, ou tout au plus sur un ensemble défini de plateformes, ce qui améliorerait la transparence des marchés».

1.5   Le CESE se félicite de la décision de conférer aux autorités nationales, conjointement avec l'AEMF, la responsabilité de surveiller le marché des produits dérivés négociés de gré à gré, de déterminer les différents types de produits dérivés devant être traités par les contreparties centrales, d'accorder, révoquer ou modifier les agréments des CCP et enfin, de procéder de manière analogue pour les référentiels centraux.

1.6   Le CESE estime qu'il est indispensable de renforcer la coopération entre l'AEMF et les autorités nationales, qui seront très certainement invitées à apporter leur contribution en termes d'expérience et de connaissance des marchés locaux et qui devront également favoriser le développement progressif de l'interopérabilité des CCP, en analysant leur niveau de compétence, leur organisation interne et leur capacité de faire face aux risques. Le Comité considère opportun d'avoir choisi pour l'instant de limiter l'interopérabilité aux valeurs au comptant.

1.7   La proposition de règlement met en œuvre les recommandations du conseil de stabilité financière suggérant d'étendre les services de contrepartie centrale aux dérivés de gré à gré normalisés; le G20 a convenu que d'ici la fin 2012, ces contrats devront être échangés sur des marchés ou via des plateformes de négociation électronique et compensés par des contreparties centrales. Par ailleurs, les contrats de produits dérivés de gré à gré doivent faire l’objet d’une notification aux organismes appropriés («référentiels centraux»).

1.8   Dans le domaine international, un groupe de travail conjoint CSPR-OICV (Comité sur les systèmes de paiement et de règlement et Organisation internationale des commissions de valeurs) a lancé en février 2010 une révision globale des normes pour les infrastructures de marché: systèmes de paiement, systèmes de règlement des opérations sur titres et contreparties centrales. L'objectif poursuivi par ce groupe de travail consiste à actualiser et à renforcer les recommandations et principes actuels, en s'appuyant sur les leçons tirées de la récente crise financière. Un premier résultat important a été obtenu par la publication en mai 2010 du document intitulé «Considérations pour les référentiels centraux dans les marchés de produits dérivés négociés de gré à gré». Par ailleurs, en ce qui concerne la fonction des CCP, des recommandations utiles avaient été formulées dès le mois de mars 2004 par le comité technique; malheureusement, elles n'ont pas été suivies.

1.9   La proposition de la Commission ne fait aucune allusion à une règle spécifique pour les contrats d’échange sur risque de crédit («Credit Default Swaps» – CDS). Le CESE souhaite que l'on adopte dans de brefs délais une r2glementation sur les CDS également, qui seront soumis à des restrictions, tout comme les ventes à découvert («short selling»), à partir du premier juillet 2012, alors que les produits dérivés seront soumis au même traitement à partir de la fin 2012.

1.10   En octobre 2009, la Commission a publié une communication concernant les actions à mener pour réglementer les marchés des dérivés. L'objectif poursuivi est d'accroître la transparence, de réduire les risques opérationnels par la normalisation et de développer les marchés des contrats normalisés, en modifiant en tant que de besoin la directive concernant les marchés d'instruments financiers (MiFID).

1.11   Le CESE est convaincu que les mesures proposées renforceront la transparence des marchés, grâce à un rôle de plus en plus important des référentiels centraux, et qu'elles réduiront les risques de la contrepartie, par un accroissement progressif des opérations qui seront réglementées par les CCP, celles-ci étant à leur tour soumises à des règles plus contraignantes en ce qui concerne la gouvernance, l'organisation interne et les exigences de fonds propres. Le Comité est enfin convaincu que les mesures proposées réduiront le risque opérationnel grâce au recours à des procédures électroniques pour valider les conditions des contrats sur les produits dérivés négociés de gré à gré.

1.12   Le CESE est favorable tant à la proposition relative aux contreparties centrales qu'aux limitations imposées aux ventes à découvert. Le fait d'imposer la transparence des transactions, de faire endosser la responsabilité aux opérateurs et aux contreparties et d'éviter tout excès spéculatif sont autant d'objectifs nécessaires que la Commission poursuit de manière efficace, en proposant des mesures visant à combler, tout au moins partiellement, l'absence de réglementation qui a contribué à la crise financière.

Néanmoins, le CESE fait observer qu'il y a des risques à ne pas sous-estimer, comme une trop lourde insistance sur les bénéfices que les CCP peuvent apporter à court terme aux marchés des CDS. La nature compétitive des différentes CCP au niveau de la compensation et de la fragmentation du processus, constitue un autre facteur qu'il convient de ne pas négliger, de même que le risque de limiter la gamme d'instruments disponibles et d'accroître les coûts de transaction liés aux activités financières.

1.13.1   Afin de prévenir efficacement ces risques, il convient avant tout d'examiner avec une attention particulière les questions d'interopérabilité des CCP, la confidentialité de l'échange de données, la concentration de la collecte de données et les obligations d'information envers les contreparties centrales, ainsi que la participation des clients à la gestion des CCP.

1.14   Le CESE préconise que les institutions européennes:

adoptent sans tarder le règlement sur les produis dérivés négociés de gré à gré, qui vise à rétablir la confiance et la sérénité sur les marchés et à protéger les épargnants;

complètent la nouvelle réglementation relative aux produits dérivés, tel que l'a déjà suggéré la Commission,

veillent à accélérer l'achèvement de l'ensemble de l'architecture institutionnelle et réglementaire, processus qui est lié à la réforme de la réglementation des marchés financiers.

2.   La proposition de la Commission

2.1   Les leaders du G20 ont à plusieurs occasions rappelé leur engagement pour accélérer l'adoption de mesures fortes, destinées à accroître la transparence et à remédier à la faible attention qu'accorde la réglementation aux produits dérivés négociés de gré à gré.

2.2   La proposition de règlement se réfère aux nombreuses mesures contenues dans la résolution du Parlement européen du 15 juin 2010 intitulée «Marchés de produits dérivés: actions politiques futures»et est cohérente avec la législation adoptée récemment par les États-Unis (le «Frank-Dodd act»).

2.3   En ce qui concerne la compensation, la déclaration et l'atténuation des risques des produits dérivés négociés de gré à gré, seuls les contrats dérivés de gré à gré normalisés remplissent les conditions pour être éligibles à la compensation par des CCP. Par conséquent, afin de garantir que le plus grand nombre possible de contrats dérivés de gré à gré soit inclus dans le mécanisme de compensation obligatoire, le règlement a prévu deux approches pour déterminer ceux des contrats appelés à faire l'objet d'un compensation.

2.4   La première approche, de type ascendant, prévoit que la CCP soit autorisée par l'autorité compétente à prendre des décisions relatives à la compensation de certains types de contrats. Après cette autorisation, cette même autorité compétente sera tenue d'informer l'AEMF qui pourra alors décider si une obligation de compensation de ce type doit s'appliquer à tous les contrats analogues dans l'UE.

2.5   La deuxième approche, de type descendant, permet de déterminer quels contrats n'ont pas fait l'objet d'une compensation par une CCP. Cette approche prévoit que l'AEMF, conjointement au comité européen du risque systémique (CERS), décide quels sont les contrats qui pourraient être soumis à l'obligation de compensation. Les contreparties soumises à l'obligation de compensation doivent avoir recours à une CCP.

2.6   Le règlement, en principe, ne s'appliquera pas aux entreprises non financières, à moins que les positions qu'elles détiennent en produits dérivés négociés de gré à gré n'atteignent un seuil déterminé et soient considérées comme ayant une importance systémique.

2.7   Le règlement établit un processus permettant d'identifier les établissements non financiers qui détiennent des positions en produits dérivés négociés de gré à gré ayant une importance systémique et les soumet à des obligations spécifiques. Ce processus se base sur la définition de deux seuils: a) un seuil d'information et b) un seuil de compensation.

2.8   Le règlement prescrit dès lors d'utiliser des moyens électroniques et de disposer de procédures de gestion des risques. En dernier lieu, les contreparties financières et non financières au-dessus du seuil de compensation sont tenues de déclarer aux référentiels centraux les informations détaillées de chaque contrat de produits dérivés et toute modification intervenue par la suite.

3.   Exigences applicables aux contreparties centrales

3.1   Les CCP doivent endosser un surcroît de risques. Par conséquent, le règlement prescrit que, pour des raisons de sécurité, elles se soumettent à des règles de fonctionnement rigoureuses et à des exigences prudentielles (règles de gouvernance interne, exigences en fonds propres plus strictes, etc.).

3.2   Une CCP doit disposer d'un solide dispositif de gouvernance qui devra tenir compte de tout conflit d'intérêt potentiel entre ses propriétaires, sa direction, les membres compensateurs et les participants indirects. Les administrateurs indépendants jouent un rôle particulièrement important. Pour être autorisée à exercer son activité, une CCP devra disposer d'un quantum minimum de capital. Le règlement demandera à la contrepartie centrale de prévoir un fonds de défaillance auquel les membres de la CCP devront contribuer.

4.   L'agrément et la supervision des référentiels centraux

4.1   Le règlement prévoit des exigences d'information s'agissant des transactions sur dérivés de gré à gré, exigences visant à accroître la transparence de ce marché et en vertu desquelles ces transactions devront être signalées aux référentiels centraux. Les référentiels centraux s'enregistrent à l'AEMF qui en assure la surveillance.

4.2   Le règlement contient également des indications pour les référentiels centraux, en vue de garantir qu'ils se conforment à un ensemble de normes. Celles-ci sont conçues de manière à garantir que les informations détenues à des fins réglementaires par les référentiels centraux soient fiables, sûres et protégées. En particulier, les référentiels centraux seront soumis à des exigences organisationnelles et opérationnelles garantissant la protection voulue.

5.   Observations du CESE

5.1   Les infrastructures des marchés mobiliers ont montré des carences significatives au niveau de la gestion du risque de contrepartie et de la transparence des négociations effectuées sur les marchés dérivés de gré à gré, en particulier sur celui des contrats d’échange sur risque de crédit (credit default swaps ou CDS), désignés comme les responsables de la «grande récession».

5.2   Ces contrats «atypiques» ont contribué à réduire la perception du risque et à étendre la crise, touchant durement les établissements qui les avaient émis et, partant, les épargnants finaux. Enfin, du côté des émetteurs, la spéculation pratiquée par les banques, qui ont vendu des CDS «à nu», c'est-à-dire sans le sous-jacent, a fait augmenter les taux et donc les charges financières acquittées par les émetteurs, jusqu'à provoquer leur faillite.

5.3   Pour ces raisons, les CDS ont été définis comme des «parachutes plombés», dans la mesure où ils constituent un danger potentiellement mortel pour le système financier mondial. La seule solution concrètement adoptée a consisté à ne pas permettre la faillite des établissements financiers, en les recapitalisant à l'aide de capitaux publics, et donc en les nationalisant. Cette intervention a simplement entraîné une inévitable augmentation de la dette publique, le problème et le risque étant déplacés de la banque vers le pays d'appartenance, ce qui a provoqué dans la zone euro de graves turbulences sur les marchés des changes. Tous les pays ont été contraints d'adopter des mesures d'austérité sévères qui ont contribué à ralentir la faible reprise économique.

5.4   Aux États-Unis, la Depository Trust & Clearing Corporation (DTCC) a constitué une société ad hoc (The Warehouse Trust Company LLC), autorisée à œuvrer comme système d'enregistrement des contrats (référentiel central) pour les CDS; le gouvernement a entamé une réforme législative des échanges de dérivés de gré à gré qui prévoit l'obligation de recourir aux contreparties centrales pour les contrats normalisés et la concentration des échanges sur des marchés réglementés ou des plateformes organisées.

5.5   En Europe, la Commission européenne travaille actuellement à une proposition législative sur les infrastructures de marché visant à accroître la transparence et la stabilité du marché des dérivés de gré à gré. Les actions envisagées sont cohérentes avec la proposition américaine, l'intention étant d'éviter des arbitrages réglementaires (ce qui est important).

5.6   Le CESE souhaite également procéder à une mise en garde concernant certains risques inhérents aux mesures proposées pour réglementer le marché des dérivés. En effet, l'effondrement des marchés financiers n'est pas uniquement imputable aux dérivés ni à l'absence de contreparties centrales ou d'interdiction des ventes à découvert.

5.7   À partir des années 80 se sont répandus sur les marchés financiers des instruments dérivés toujours plus sophistiqués, qui en ont accru l'efficacité pour les rapprocher de l'idéal de complétude des marchés tel que décrit par la théorie économique. La complexité de l'activité de réglementation, de supervision et de vigilance s'est elle aussi accrue en proportion; tous les trains de mesure visaient à parvenir à un contrôle accru des marchés, ce qui a souvent eu pour effet d'en diminuer l'efficacité.

5.8   Un marché est d'autant plus efficace que le prix (ou le rendement) d'un titre reflète les informations disponibles. Pour rendre un marché plus efficace, il faudrait donc y favoriser la circulation des informations, afin qu'elles puissent être intégrées le plus rapidement possible dans les prix des titres. Il est important de connaître le sacrifice à consentir pour cette recherche d'efficacité.

5.9   Avant toute chose, les mesures visant à réduire la gamme des instruments financiers disponibles, comme les limitations applicables aux ventes de CDS «à nu» ou autres ventes à découvert, pourraient ne pas accroître l'efficacité des marchés. Limiter les instruments susceptibles d'être utilisés réduit en effet la capacité des marchés à absorber et diffuser les informations dont disposent les opérateurs.

5.10   Il est évidemment loisible de discuter de l'utilité de ventes «à nu» de CDS, des informations supplémentaires qu'ils véhiculent par rapport à d'autres instruments ou de la mesure dans laquelle ils influent sur les coûts de financement. En revanche, leur interdiction pure et simple n'amènerait pas de gains d'efficacité importants. Le fait de limiter les possibilités de ventes à découvert réduit la liquidité du système et, partant, la capacité de réagir immédiatement à de nouvelles informations à mesure qu'elles deviennent disponibles. En outre, limiter les transactions de gré à gré en obligeant les opérateurs à traiter tous les dérivés sur des marchés réglementés et au moyen de chambres de compensation peut induire un effet double.

5.11   D'une part, cela contribuerait à rendre le marché plus transparent (il serait par exemple plus facile de surveiller le montant et le risque lié aux titres détenus par les opérateurs) et permettrait de limiter, du moins en partie, les sources potentielles d'instabilité. Toutefois, dans les situations de stress financier, peut-être la transparence n'est-elle pas suffisante à elle seule. La proposition de la Commission confère clairement aux régulateurs nationaux le pouvoir, dans des situations exceptionnelles, de limiter ou d'interdire «temporairement» l'interdiction de vente à découvert de tout instrument financier, en coordination avec l'AEMF, qui aura dans tous les cas la possibilité d'intervenir directement à deux conditions: que le bon fonctionnement et l'intégrité des marchés soient menacés, ou que les régulateurs nationaux n'aient pas pris de mesures ou pris des mesures insuffisantes.

5.12   D'autre part, cependant, le risque que l'on court cette fois encore est de limiter la gamme des instruments disponibles et d'augmenter les coûts de transaction liés aux activités financières. Le marché des contrats à terme (futures market) est hautement standardisé et réglementé (parce qu'il importe de pouvoir observer les prix des contrats négociés), tandis que le marché des contrats à terme de gré à gré (forward market) est en revanche adapté aux besoins des contreparties et permet aux opérateurs de structurer leurs arbitrages de manière flexible. Ces titres sont peu standardisés et difficilement envisageables sur un marché réglementé de manière traditionnelle sans limiter les options dont disposent les investisseurs.

5.13   Les mécanismes de compensation à contrepartie centrale (CCP) sont considérés comme la «solution» ou l'instrument par lequel gérer le risque systémique de façon à rendre les marchés de gré à gré plus efficaces et plus transparents. Les CCP représentent certainement un facteur important pour atténuer les risques et accroître l'efficacité des marchés. Ils constituent un élément indispensable de l'infrastructure du marché des dérivés cotés en bourse. Il est donc raisonnable de penser que les CCP contribueront aussi à l'évolution des marchés de gré à gré. De nombreuses instances et responsables politiques mettent toutefois trop l'accent sur les bénéfices que les CCP pourront offrir aux marchés de CDS à court terme.

5.14   En effet, les CCP ne peuvent être considérées comme la solution au risque de contrepartie, et elles sont susceptibles de ne pas être en mesure d'accroître l'efficacité du marché, eu égard à l'état dans lequel il se trouve aujourd'hui. Dans le cadre actuel, où coexistent nombre de CCP différentes dans chaque région, selon qu'il s'agit de dérivés sur les crédits ou de contrats d'échange de taux d'intérêt (interest rate swaps), la possibilité d'utiliser les garanties de manière efficace et de réduire l'exposition à la contrepartie est compromise. La CCP peut compenser l'exposition sur une base multilatérale, mais uniquement pour la région, les contreparties ou les types de dérivés idoines qu'elle couvre. Il s'ensuit qu'il n'est pas possible de procéder à une compensation entre les positions sur CDS et les positions sur contrats d'échange de taux d'intérêt.

5.15   La compensation bilatérale des expositions à plusieurs types de dérivés de gré à gré par une partie unique extérieure à la CCP pourrait aboutir à une utilisation plus efficace des garanties. Il faut en outre tenir compte du fait que les dérivés sont par essence des instruments novateurs faits sur mesure, et qu'un grand nombre de contrats ne se prêtent pas à la compensation. Ces positions devront être conciliées en tenant compte du risque de crédit, au moyen d'un processus adéquat de gestion des garanties n'incluant toutefois pas la CCP.

5.16   Les CCP contribuent à fournir une valeur ajoutée et à répartir et isoler le risque lié à un opérateur unique. Le CESE souscrit à cette position. Leur popularité augmentera et accélérera la maturation et la transparence du marché, engendrant une expansion souhaitable des activités de gré à gré.

5.17   Les CCP ne sont toutefois qu'un élément parmi d'autres dans une infrastructure solide de gestion du risque. Le risque de contrepartie ne sera pas éliminé, et il faudra continuer de compter avec le risque bilatéral pour les positions externes à la CCP.

5.18   Enfin, il convient d'ajouter à tout cela que nombre d'établissements n'investissent pas dans les systèmes de gestion du risque associé à leur portefeuille de dérivés. Il est probable que ces établissements continueront de s'attendre à être sauvés même lorsque leur gestion des risques est tout à fait inopportune.

Bruxelles, le 8 décembre 2010

Le Président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


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