EUR-Lex Access to European Union law

Back to EUR-Lex homepage

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 31997D0816

97/816/CE: Décision de la Commission du 30 juillet 1997 déclarant la compatibilité d'une concentration avec le marché commun et avec le fonctionnement de l'accord sur l'Espace économique européen (Affaire nº IV/M.877 - Boeing/McDonnell Douglas) (Le texte en langue anglaise est le seul faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

JO L 336 du 8.12.1997, p. 16–47 (ES, DA, DE, EL, EN, FR, IT, NL, PT, FI, SV)

Legal status of the document In force

ELI: http://data.europa.eu/eli/dec/1997/816/oj

31997D0816

97/816/CE: Décision de la Commission du 30 juillet 1997 déclarant la compatibilité d'une concentration avec le marché commun et avec le fonctionnement de l'accord sur l'Espace économique européen (Affaire nº IV/M.877 - Boeing/McDonnell Douglas) (Le texte en langue anglaise est le seul faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

Journal officiel n° L 336 du 08/12/1997 p. 0016 - 0047


DÉCISION DE LA COMMISSION du 30 juillet 1997 déclarant la compatibilité d'une concentration avec le marché commun et avec le fonctionnement de l'accord sur l'Espace économique européen (Affaire n° IV/M.877 - Boeing/McDonnell Douglas) (Le texte en langue anglaise est le seul faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (97/816/CE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté européenne,

vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 57 paragraphe 1,

vu le règlement (CEE) n° 4064/89 du Conseil, du 21 décembre 1989, relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (1), modifié par l'acte d'adhésion de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède, et notamment son article 8 paragraphe 2,

vu l'accord entre les Communautés européennes et le gouvernement des États-Unis d'Amérique concernant l'application de leur droit de la concurrence (2), et notamment ses articles II et VI,

vu la décision prise par la Commission, le 19 mars 1997, d'engager la procédure dans la présente affaire,

après avoir donné aux entreprises concernées l'occasion d'exprimer leur point de vue sur les griefs formulés par la Commission,

après avoir entendu le comité consultatif en matière de concentrations entre entreprises (3),

considérant ce qui suit:

(1) Le 18 février 1997, la Commission a reçu, conformément à l'article 4 du règlement (CEE) n° 4064/89 (règlement sur les concentrations), une notification relative à un projet de concentration, opération par laquelle The Boeing Company (Boeing) acquiert le contrôle de l'ensemble de McDonnell Douglas Corporation (MDC) au sens de l'article 3 paragraphe 1 point b) dudit règlement.

(2) Après examen de la notification, la Commission a décidé, le 7 mars 1997, de proroger la suspension de la concentration jusqu'à ce qu'une décision finale soit adoptée. Étant arrivée à la conclusion que la concentration envisagée relevait du règlement sur les concentrations et soulevait des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché commun, la Commission a donc engagé, par décision du 19 mars 1997, la procédure prévue à l'article 6 paragraphe 1 point c) du règlement susmentionné.

I. PARTIES

(3) Boeing est une société américaine cotée en bourse. Cette société est active dans deux domaines principaux: les avions commerciaux et le secteur militaire et spatial. Ses activités dans le secteur des avions commerciaux comprennent le développement, la production et la commercialisation d'avions à réaction commerciaux et la fourniture, au niveau mondial, de services connexes de soutien aux compagnies aériennes. Ses activités dans le secteur militaire et spatial comprennent la recherche, le développement, la production, la modification d'avions et d'hélicoptères militaires et les services de soutien y afférents, les systèmes connexes, les systèmes pour la navigation spatiale et les systèmes pour missiles, les moteurs de fusée et les services d'information.

(4) MDC est une société américaine cotée en bourse. Ses quatre domaines d'activité principaux sont les avions militaires, les missiles, les systèmes pour la navigation spatiale et les systèmes électroniques, les avions commerciaux et les services financiers. Ses activités dans les deux premiers domaines comprennent la conception, le développement, la production et les services de soutien afférents aux grands produits suivants: avions de transport militaire; avions de combat et systèmes d'entraînement; hélicoptères commerciaux et militaires et équipements; missiles; satellites; véhicules de lancement et composants et systèmes pour stations spatiales; lasers, capteurs et systèmes de commande, de contrôle, de communications et de renseignements. Dans le secteur des avions commerciaux, MDC conçoit, développe, produit, modifie et vend des avions à réaction commerciaux et les pièces détachées correspondantes. MDC est également actif dans le domaine du financement de l'industrie aéronautique et du crédit-bail pour les équipements commerciaux ainsi que dans l'immobilier commercial, aussi bien pour son propre compte que pour une clientèle d'affaires.

II. OPÉRATION

(5) Le 14 décembre 1996, Boeing et MDC ont conclu un accord aux termes duquel MDC deviendra une filiale à 100 % de Boeing.

III. CONCENTRATION

(6) L'opération constitue une concentration au sens de l'article 3 du règlement sur les concentrations, puisque Boeing acquiert le contrôle de l'ensemble de MDC au sens de l'article 3 paragraphe 1 point b) dudit règlement.

IV. DIMENSION COMMUNAUTAIRE

(7) Le chiffre d'affaires total réalisé sur le plan mondial par Boeing et MDC représente un montant supérieur à 5 milliards d'écus (Boeing: 17 milliards d'écus, MDC: 11 milliards d'écus). Chacun d'eux réalise dans la Communauté un chiffre d'affaires supérieur à 250 millions d'écus [Boeing: [. . .] (4), MDC: [. . .]], mais aucun des deux ne réalise plus des deux tiers de son chiffre d'affaires total dans la Communauté à l'intérieur d'un seul et même État membre. L'opération notifiée revêt donc une dimension communautaire.

V. INCIDENCE DE L'OPÉRATION DANS L'ESPACE ÉCONOMIQUE EUROPÉEN

(8) L'opération revêt non seulement une dimension communautaire au sens juridique du règlement sur les concentrations (voir section IV), mais son incidence économique est également importante sur le marché des avions à réaction commerciaux de grande capacité au sein de l'Espace économique européen (EEE), comme il sera démontré ci-après à la section VII «Appréciation sous l'angle de la concurrence».

(9) Aux fins de l'appréciation de l'opération en question, le marché en cause est le marché mondial des avions à réaction commerciaux de grande capacité. L'EEE est une partie intégrante et importante de ce marché mondial et sa structure concurrentielle est très similaire. D'après l'édition 1997 de son Current Market Outlook (Perspectives actuelles du marché), Boeing prévoit que les compagnies aériennes européennes représenteront au cours de la prochaine décennie 30 % environ de la demande mondiale cumulée. En moyenne, les parts de marché détenues par Boeing et MDC dans l'EEE au cours des dix dernières années ont atteint 54 % et 12 % respectivement (contre 61 % et 12 % au niveau mondial). En ce qui concerne la flotte existante en service dans l'EEE, la part de marché de Boeing s'élève à 58 % environ, celle de MDC à 20 % environ et celle d'Airbus à 21 % environ (5) (au niveau mondial, ces parts de marché atteignent respectivement 60 %, 24 % et 14 %).

(10) L'opération se déroulant sur le marché mondial dont l'EEE constitue une partie importante, il est incontestable qu'elle aura une incidence considérable dans l'EEE.

VI. COOPÉRATION AVEC LES AUTORITÉS AMÉRICAINES

(11) Conformément à l'accord entre les Communautés européennes et le gouvernement des États-Unis d'Amérique concernant l'application de leur droit de la concurrence (ci-après dénommé «accord»), la Commission et la Federal Trade Commission ont procédé à toutes les notifications nécessaires. En application de l'article VI de l'accord, la Commission s'est efforcée de prendre en considération les intérêts nationaux importants des États-Unis d'Amérique, notamment ceux qui découlent de la restructuration du secteur américain de la défense. Elle a par ailleurs, conformément à l'article VI de l'accord, notifié le 26 juin 1997 aux autorités américaines ses conclusions préliminaires et ses motifs de préoccupation, et elle a demandé à la Federal Trade Commission de prendre en considération les intérêts importants de l'Union européenne, à savoir la préservation de la concurrence sur le marché des avions civils de grande capacité. Dans sa lettre de réponse adressée le même jour, le président de la Federal Trade Commission, M. Pitofsky, indiquait que la Federal Trade Commission tiendrait compte, dans sa décision, des intérêts exprimés par les Communautés européennes. Le 1er juillet 1997, la Federal Trade Commission décidait à la majorité de ne pas s'opposer à l'opération de concentration.

(12) Le 13 juillet 1997, en application des articles VI et VII de l'accord, le ministère américain de la défense et le ministère américain de la justice ont, au nom du gouvernement américain, fait part à la Commission de leurs préoccupations, qui portaient sur les points suivants: i) une décision interdisant le projet de concentration pourrait porter atteinte à d'importants intérêts américains en matière de défense; ii) nonobstant les mesures que la Commission pourrait imposer à un tiers se portant acquéreur de Douglas Aircraft Company (DAC), il est probable qu'une cession de DAC ne parviendrait pas à préserver son autonomie en tant que constructeur d'avions; il en résulterait une cession non rentable des activités de DAC en matière de construction d'avions, quelles qu'elles soient, qui pourraient potentiellement être sauvées par Boeing, ainsi que des suppressions d'emplois aux États-Unis d'Amérique; iii) toute vente de DAC à un tiers qui n'exploiterait pas DAC en tant que constructeur d'avions serait anticoncurrentielle puisque l'opération aurait pour effet de créer une entreprise qui serait incitée et apte à augmenter ses prix et à réduire ses prestations en matière de fourniture de pièces détachées et de service assuré à la flotte en exploitation de DAC, dont une grande partie appartient à des compagnies aériennes américaines. La Commission a pris en compte ces préoccupations dans la mesure compatible avec le droit communautaire. Ainsi, en ce qui concerne les intérêts américains en matière de défense, la Commission a de toute façon limité la portée de son action à l'aspect civil de l'opération car il n'a pas été établi que la concentration envisagée renforçait ou créait une position dominante dans le secteur militaire. La Commission n'a pas maintenu les réserves qu'elle avait exprimées dans sa communication des griefs concernant l'effet de la concentration sur le marché international des avions de combat. Quant à DAC, la Commission n'a pas considéré, pour les raisons exposées ci-dessous, qu'une cession constituerait une solution aux problèmes de concurrence soulevés par la concentration.

VII. APPRÉCIATION SOUS L'ANGLE DE LA CONCURRENCE

A. MARCHÉS DE PRODUITS EN CAUSE

(13) La concentration affecte le marché des avions à réaction commerciaux de grande capacité.

1. Avions commerciaux de grande capacité neufs

(14) Du point de vue de la demande, toute décision d'achat comporte en général plusieurs phases, le client prenant d'abord en considération les critères d'exploitation, puis les exigences techniques et, finalement, les aspects économiques et financiers. Les critères d'exploitation comprennent les lignes à desservir (densité de trafic et distance), le nombre de sièges ou le chargement optimaux et la fréquence des vols (résultat d'un compromis entre la réalisation d'un moins grand nombre de vols avec de plus grands avions et l'inverse) et la disponibilité des créneaux horaires aux aéroports. Les caractéristiques techniques recouvrent le rayon d'action, la capacité, les performances et la fiabilité, l'interchangeabilité (c'est-à-dire la facilité avec laquelle les avions neufs peuvent être intégrés dans les flottes existantes) et les réseaux de maintenance et d'entretien. Enfin, l'opportunité d'acheter un autre avion sera évaluée sur la base de la valeur nette actualisée en fonction du prix d'achat, des prévisions de recettes et de coûts d'exploitation et de la valeur résiduelle.

(15) Il est largement admis que le marché des avions à réaction destinés au transport régional (comprenant, par exemple, les modèles Fokker, Bombardier et British Aerospace) est un marché distinct de celui des avions à réaction commerciaux de grande capacité sur lequel Boeing, MDC et Airbus sont actifs. Aucun de ces trois derniers constructeurs n'a d'appareil répondant aux critères de seuils maximaux de 100 sièges/1 700 milles nautiques de rayon d'action, considérés comme constituant plus ou moins les limites supérieures combinées pour les besoins spécifiques des compagnies de transport régional. Pour la plupart, les avions à réaction destinés au transport régional sont incompatibles avec la famille des avions à réaction de grande capacité en termes de rayon d'action, de caractéristiques d'exploitation, de transport de fret, etc. Les grandes compagnies aériennes qui acquièrent des avions à réaction pour le transport régional les destinent à des utilisations régionales précises ou à leurs filiales (ce qu'illustrent les exemples de British Airways et de Swissair/Crossair).

(16) De même, il est généralement admis que seuls les avions à réaction construits en Occident sont concernés, les avions non occidentaux (tels que les Iliouchine russes) n'étant pas concurrentiels sur le plan technique dans leurs versions actuelles, pour des raisons de fiabilité, de service après-vente et d'image de marque.

Pour la partie notifiante, les marchés de produits en cause sont les «avions à réaction commerciaux à fuselage étroit et à fuselage large». L'enquête menée par la Commission a révélé qu'avionneurs et clients ont des opinions divergentes quant à la segmentation du marché global qu'il convient d'adopter. La segmentation du marché des avions à réaction commerciaux de grande capacité ne saurait être définitive, vu la complexité des critères d'achat énumérés plus haut. Toutefois, la distinction entre fuselage étroit (ou à couloir unique) et fuselage large (ou à deux couloirs) proposée par la partie notifiante semble généralement acceptée comme une segmentation valable. Les avions à fuselage étroit ont comme caractéristiques d'exploitation un rayon d'action d'environ 2 000 à 4 000 milles nautiques et un nombre de places offertes correspondant à environ 100 à 200 passagers, alors que les paramètres correspondants pour les avions à fuselage large sont compris entre 4 000 et 8 000 milles nautiques et au-delà, et entre 200 et 400 passagers et au-delà. Une autre segmentation des deux marchés (avions à fuselage étroit et avions à fuselage large) est proposée plus loin (considérant 38).

La conclusion est donc qu'il existe deux marchés en cause distincts au sein du marché global des avions à réaction commerciaux de grande capacité: celui des avions à fuselage étroit et celui des avions à fuselage large. Puisque les marchés des «fuselages étroits» et des «fuselages larges» ont une structure similaire et que les problèmes de concurrence découlant de la concentration envisagée sont les mêmes dans un cas comme dans l'autre, la Commission appréciera les effets de la concentration sur ces deux marchés en même temps.

2. Avions d'occasion

(17) Comme indiqué plus haut, le marché de produits global est celui des avions à réaction commerciaux de grande capacité. Beaucoup de ces appareils sont vendus d'occasion. On estime qu'environ 30 % des avions de transport de passagers qui sont livrés changent de compagnie aérienne tout en conservant leur destination première; plus des deux tiers de la demande totale d'avions-cargos sont satisfaits par la transformation d'appareils d'occasion ayant servi au transport de passagers. Toutefois, comme l'a fait la Commission dans des cas précédents (décision 91/619/CEE de la Commission du 2 octobre 1991, dans l'affaire n° IV/M.053 - Aérospatiale-Alenia/de Havilland) (6), il y a lieu de considérer le marché des avions d'occasion comme un marché distinct de celui des avions neufs.

(18) Il convient d'abord de noter que, en tout état de cause, les contraintes imposées par la durée de vie intrinsèque des produits en question sont à distinguer des contraintes nées de la pression concurrentielle résultant de produits d'autres fournisseurs. Dans le secteur des avions à réaction commerciaux de grande capacité, où la durée de vie des produits peut dépasser vingt ans, l'existence d'une flotte en exploitation importante imposera, de fait, des limitations (probablement cycliques) sur les possibilités de ventes d'avions neufs de constructeurs.

(19) Les caractéristiques du marché de l'occasion des avions à réaction commerciaux de grande capacité indiquent que ce marché est distinct de celui des avions neufs. Les avions d'occasion coûtent moins cher à l'achat, mais leur coût d'exploitation tend à être plus élevé, et ils ont évidemment une durée de vie plus courte. L'enquête de la Commission a révélé que les avions d'occasion constituaient une solution de repli valable pour les petites compagnies aériennes, lorsqu'elles ne peuvent s'offrir d'autres équipements en raison de ressources financières limitées, mais que les grandes compagnies ne trouvaient généralement pas d'avions d'occasion en quantité suffisante ou présentant des caractéristiques suffisamment homogènes pour couvrir leurs besoins à long terme; s'il leur arrive d'utiliser ces appareils pour des besoins spécifiques et limités dans le temps, c'est le plus souvent en complément, et non à la place, d'avions neufs. Par conséquent, les ventes d'avions d'occasion doivent être considérées comme constituant un marché distinct et séparé du marché des avions neufs sur lequel opèrent Boeing et MDC. Le marché des avions d'occasion ne sera donc pas pris en compte dans les développements qui suivent.

B. MARCHÉ GÉOGRAPHIQUE EN CAUSE

(20) Les avions à réaction commerciaux de grande capacité sont vendus et exploités dans le monde entier dans des conditions de concurrence similaires. Proportionnellement à leur prix, les coûts de transport liés à la livraison sont négligeables. La Commission considère donc que le marché géographique à prendre en considération pour les avions à réaction commerciaux de grande capacité est le marché mondial.

C. EFFETS DE LA CONCENTRATION SUR LE MARCHÉ DES AVIONS À RÉACTION COMMERCIAUX DE GRANDE CAPACITÉ

I. Structure actuelle du marché des avions à réaction commerciaux de grande capacité

1. Concurrents

(21) Il existe actuellement trois concurrents sur le marché mondial des avions à réaction commerciaux de grande capacité: Boeing, Airbus et MDC.

(22) Boeing est un constructeur aérospatial entièrement intégré, actif dans tous les secteurs de l'industrie aérospatiale: commercial, militaire et spatial (voir ci-dessus). Boeing est le premier constructeur mondial d'avions à réaction commerciaux de grande capacité, lesquels représentent environ 70 % de son chiffre d'affaires.

(23) MDC est un autre constructeur aérospatial totalement intégré, également actif dans tous les secteurs de l'industrie aérospatiale (voir ci-dessus). MDC occupe le troisième rang mondial parmi les constructeurs d'avions à réaction commerciaux de grande capacité et est le premier constructeur d'avions militaires et la deuxième entreprise mondiale dans le secteur de la défense. Environ 70 % de son chiffre d'affaires de 1996 provenait d'activités liées aux domaines militaire et spatial, le reste ayant été réalisé dans le secteur des avions à réaction commerciaux de grande capacité.

(24) Airbus Industrie est le deuxième constructeur mondial d'avions à réaction commerciaux de grande capacité. Il a été créé en décembre 1971 sous la forme d'un groupement d'intérêt économique (GIE). Les membres du groupe Airbus sont le groupe allemand Daimler-Benz Aerospace Airbus (DASA) et British Aerospace, tous deux privés (respectivement 37,9 % et 20 %), le groupe français Aérospatiale (37,9 %) et le groupe espagnol CASA (4,2 %), entreprises publiques. Ce partenariat est unique en ce sens que chaque membre fonctionne dans le cadre de la législation du pays dans lequel il est constitué en société. Les partenaires financent leur propre recherche, développement et production d'avions, tandis qu'Airbus Industrie supervise la commercialisation des appareils et les services de soutien. Des sous-ensembles entièrement équipés sont fabriqués sur différents sites en Europe, puis transportés en France ou en Allemagne pour montage final. À titre d'exemple, Aérospatiale fabrique l'habitacle, DASA produit les sections du fuselage et les ailes sont fabriquées par British Aerospace. Le travail est réparti selon les compétences de base de chacun des partenaires.

2. Clients

(25) Les clients qui acquièrent des avions à réaction commerciaux de grande capacité sont les compagnies aériennes (compagnies aériennes régulières et compagnies charter) et les sociétés de crédit-bail. On a dénombré 561 compagnies aériennes exploitant des appareils occidentaux fabriqués par des constructeurs encore présents sur le marché, sur lesquelles 246 compagnies exploitent plus de cinq avions. Cependant, assez rares sont celles d'entre elles qui achètent des avions au cours d'une année donnée. Même à plus longue échéance, la demande a tendance à rester concentrée entre quelques très grosses compagnies; par exemple, au cours de la période 1992-1996, les cinq plus gros clients de Boeing ont représenté plus de [. . .] de ses ventes pour chacune de ces années. En outre, on estime que la moitié de la flotte des avions de ligne à réaction est exploitée par les douze plus grandes compagnies aériennes. Les sociétés de crédit-bail représentent environ 20 % de la demande.

(26) Dans le secteur de l'aviation civile, la demande d'avions à réaction de grande capacité est induite par la demande de transport aérien, laquelle, malgré son caractère cyclique, est en progression constante depuis l'apparition de ce type d'appareils à la fin des années cinquante. Parmi les principaux facteurs qui ont contribué récemment à la croissance de ce secteur, figurent le processus de libéralisation du cabotage aérien dans la Communauté et la demande supplémentaire en provenance de Chine et de l'ancien bloc de l'Est.

(27) Le marché est en expansion et l'on prévoit une forte croissance de la demande, bien qu'elle soit conditionnée par la nature cyclique du secteur. Dans l'édition 1997 de son Current Market Outlook (Perspectives actuelles du marché), Boeing prévoit que, au cours des dix prochaines années, le potentiel total du marché sera de 7 330 appareils, soit l'équivalent de 490 milliards de dollars des États-Unis (en dollars de 1996). La plus grande partie de cette demande émanera de trois grands ensembles géographiques: l'Asie-Pacifique (1 750 avions), l'Amérique du Nord (2 460 avions) et l'Europe (7); on s'attend à ce que les clients de cette dernière partie du monde achètent 2 070 avions, soit l'équivalent de 137 milliards de dollars des États-Unis. En d'autres termes, les clients européens représenteront plus de 28 % de la demande cumulée. Si ce pourcentage restait stable, dans vingt ans (dix-huit selon MDC), la valeur des achats européens atteindrait 307,5 milliards de dollars des États-Unis, sur un marché potentiel total atteignant 1 100 milliards de dollars des États-Unis.

3. Parts de marché

(28) En ce qui concerne le calcul des parts de marché, la notification ne propose aucune méthode précise mais fournit des chiffres, pour chacune des dix dernières années, sur le carnet de commandes, les nouvelles commandes fermes et les commandes nettes, tant en valeur qu'en unités commandées. Les chiffres relatifs au carnet de commandes sont, dans une large mesure, considérés comme le meilleur indicateur de la position sur le marché dans ce secteur. Pour avoir un tableau complet du marché, il convient d'évaluer l'évolution de cet indicateur au cours des dix dernières années. Le carnet de commandes annuel reflète l'évolution des commandes nettes (nombre de nouvelles commandes fermes moins nombre de commandes annulées) sur une période donnée. Il convient également d'analyser ce carnet en termes de valeur et pas simplement d'unités commandées, afin de prendre en compte les différences de prix et de taille des divers types d'avions. Cela est nécessaire puisque, pour calculer les parts de marché, on ne peut donner le même poids, par exemple, à un Boeing 737-300, dont le prix varie entre 38 et 44 millions de dollars des États-Unis, et à un Boeing 747-400, dont le prix varie entre 156 et 182 millions de dollars des États-Unis. Les parts en valeur sont calculées en dollars des États-Unis, étant donné que, sur ce marché, les prix sont exprimés dans cette monnaie.

(29) Selon les chiffres fournis dans la notification et par Airbus, les parts de marché mondiales pour le marché global des avions à réaction commerciaux de grande capacité, exprimées en termes de valeur du carnet de commandes au 31 décembre 1996, sont les suivantes (voir annexe I):

>TABLE>

(30) Bien que la notification fasse apparaître la ligne de produits British Aerospace RJ et le Fokker 70/100 dans le segment des avions à fuselage étroit, la Commission est d'avis que ces types d'avions n'appartiennent pas au même marché (voir ci-dessus). En tout cas, l'inclusion ou non des avions British Aerospace et Fokker dans le marché des avions commerciaux de grande capacité ne saurait faire une grande différence, étant donné la position marginale qu'ils occupent. De même, les avions russes actuels (tels que l'Iliouchine) ne doivent pas y figurer non plus puisque, bien qu'ayant atteint un certain degré de développement technique, il semble qu'ils ne constituent pas encore une véritable alternative, pour des raisons de fiabilité, de service après-vente et d'image de marque.

(31) Pour la période allant de 1987 à 1996, les parts moyennes du carnet de commandes étaient les suivantes:

>TABLE>

(32) Comme le montrent le tableau de l'annexe I et le graphique de l'annexe II, la part d'Airbus a augmenté, passant d'environ 24 % en 1987 à environ 27 % en 1989. Depuis 1989, elle est restée plus ou moins stable. Celle de Boeing a diminué en 1989, avant de remonter au cours des années suivantes jusqu'en 1996 (de 57 à 64 %). Par contre, la part de MDC n'a cessé de baisser, passant d'environ 19 % en 1988 à environ 6 % en 1996.

(33) L'évolution, tant du marché des fuselages larges que de celui des fuselages étroits, a été similaire à celle du marché global (voir l'annexe I et les graphiques des annexes III et IV). En 1989, on a assisté, sur le marché des fuselages larges, à une augmentation importante - de 13 à 31 % - de la part détenue par Airbus, augmentation liée en grande partie aux commandes portant sur les nouveaux modèles A330 et A340; cette part s'est ensuite stabilisée aux environs de 30 %. La même année, Boeing a vu sa part de marché régresser fortement, jusqu'à environ 50 %, puis remonter régulièrement jusqu'à plus de 70 %. Quant à la part de marché détenue par MDC, elle n'a cessé de décroître, passant d'à peu près 20 % à environ 2 %. Sur le marché des fuselages étroits, la part d'Airbus est passée depuis 1989 à plus de 30 %. Celle de Boeing a été plus ou moins stable, à environ 55 %, tandis que celle de MDC a reculé de 19 à 11 %.

(34) La structure du marché au sein de l'EEE présente plus ou moins les mêmes tendances que celle du marché mondial (voir annexe V), comme l'illustre le tableau suivant:

>TABLE>

(35) Dans l'EEE, comme le montrent les tableaux de l'annexe V et les graphiques des annexes VI, VII et VIII, l'évolution du marché global ainsi que des marchés des fuselages larges et des fuselages étroits a été semblable à celle du marché mondial. Depuis 1989, Boeing n'a cessé d'accroître sa part de marché sur le marché global, laquelle est passée de 50 % environ à plus de 60 %. Après avoir enregistré une augmentation importante, de 20 à 33 %, la part de marché d'Airbus a légèrement fléchi en 1989, alors que celle de MDC n'a cessé de régresser depuis 1988, passant de 20 % environ à 2 %. Sur le marché des fuselages larges, on observe entre 1987 et 1989 une nette progression de la part détenue par Airbus, qui est passée de quelque 11 % à 36 % environ, puis s'est stabilisée à un niveau proche de 30 %. En 1989, Boeing a connu un net recul, jusqu'à 51 % environ, suivi d'une remontée continue jusqu'à environ 69 %. MDC a, quant à lui, vu sa part de marché s'amenuiser régulièrement, puisqu'elle est passée de 19 % environ en 1990 à plus ou moins 1 % en 1996. Sur le marché des fuselages étroits, la part de marché d'Airbus a progressé, depuis 1989, jusqu'aux alentours de 47 %, celle d'Airbus se maintenant plus au moins autour de 50 % et celle de MDC se voyant ramenée d'environ 19 à 2 %.

(36) L'appréciation globale au niveau mondial amène à conclure que, après s'être fortement améliorée à la fin des années quatre-vingt et au début des années quatre-vingt-dix, la position d'Airbus sur le marché des avions commerciaux de grande capacité s'est stabilisée. Au cours des années quatre-vingt-dix, la part de marché de Boeing est passée à plus de 60 %, tandis que celle de MDC a diminué constamment, notamment sur le marché des fuselages larges. La part de marché cumulée de Boeing et de MDC depuis 1989 est restée plus ou moins stable, aux alentours de 70 %.

(37) Le niveau très élevé des parts de marché détenues par Boeing est déjà le signe d'une position forte sur le marché global des avions commerciaux de grande capacité ainsi que sur les deux marchés proposés dans la notification. Qui plus est, après avoir empiété sur la position de Boeing dans les années quatre-vingt, Airbus n'a pas été en mesure d'améliorer sensiblement sa position au cours des années quatre-vingt-dix, alors que Boeing, qui partait déjà d'un niveau élevé, est parvenu à accroître sa part de marché plus ou moins continûment au cours de la même période. Cela montre qu'il était difficile pour Airbus d'attaquer la position de Boeing sur ce marché, même après être parvenu à s'adjuger une part de marché de près de 30 % dans les années quatre-vingt. Ce constat est aussi corroboré par le fait qu'Airbus n'a pas vraiment réussi à percer auprès des dix plus grandes compagnies aériennes mondiales (tableau du considérant 69). Le pouvoir de marché de Boeing, qui lui permet d'agir, dans une mesure appréciable, indépendamment de ses concurrents, est l'illustration d'une position dominante telle que l'a définie la Cour de justice des Communautés européennes dans son arrêt dans l'affaire 322/81: Michelin contre Commission (8).

4. Segments du marché

(38) Au sein du marché global des avions à réaction commerciaux de grande capacité, on peut distinguer plusieurs segments. Le tableau suivant propose une segmentation communément acceptée dans le secteur (9).

>TABLE>

D'après les informations transmises à la Commission par MDC, s'il existe une certaine mobilité entre ces différents segments, elle est généralement motivée par des considérations de coût liées à l'interchangeabilité relative des avions au sein d'une même flotte; il n'en reste pas moins que 70 % environ des avions sont utilisés d'une manière qui confirme la validité de cette segmentation. Ainsi, il existe très peu de possibilités de substitution entre les avions à fuselage étroit de 100-120 sièges et ceux de 120-200 sièges, car ce dernier segment présente des coûts d'exploitation par voyage plus élevés. À l'autre extrémité, dans le segment supérieur des fuselages larges, on ne trouve que les Boeing 747-400. En outre, il apparaît que, sur certaines lignes long-courrier très fréquentées, par exemple entre l'Europe ou les États-Unis d'Amérique et le Japon, le Boeing 747, qui allie la plus grande capacité et le plus long rayon d'action de tous les avions actuels, est actuellement le seul appareil envisageable. Il en va de même pour certaines liaisons intérieures ayant une densité de trafic importante et soumises à de fortes contraintes en termes de créneaux horaires.

D'après la notification de Boeing, les décisions d'achat des compagnies aériennes se font de plus en plus en fonction des «familles d'avions», les compagnies choisissant d'abord la famille, puis le modèle. Même si Boeing affirme qu'Airbus serait tout autant que lui en mesure de proposer de telles familles, il ressort clairement du tableau présenté ci-dessus que seul Boeing jouit des avantages liés à la possibilité d'offrir une famille complète d'avions, puisqu'il est présent sur tous les segments, ce qui n'est pas le cas d'Airbus.

(39) Un autre segment du marché global des avions commerciaux de grande capacité est celui des avions-cargos. Alors que ceux-ci ont des spécifications conceptuelles de base similaires à celles des modèles d'avions de transport de passagers, ils doivent être adaptés pour pouvoir accueillir de grandes portes de chargement sur le pont principal, des renforcements de structure pour une charge marchande accrue et des systèmes adaptés pour le chargement et les cabines. Du point de vue de la demande, les configurations «cargo» des avions commerciaux de grande capacité ne peuvent être remplacées par des configurations «passagers». Cependant, la Commission est d'avis que les avions-cargos ne constituent pas un marché en cause distinct, étant donné le degré élevé de souplesse qui existe du côté de l'offre entre les avions de transport de passagers et les avions-cargos. Des avions neufs et des appareils reconvertis pourraient être mis rapidement sur le marché sans que cela entraîne une augmentation sensible des coûts ou des risques.

5. Flotte en exploitation

(40) La société Boeing, comme elle l'affirme elle-même dans son rapport annuel de 1995, est depuis plus de trois décennies le premier constructeur mondial d'avions commerciaux et elle a construit plus d'avions à réaction que tous les autres avionneurs réunis. Étant donné la longue durée de vie de ce type de produits, Boeing possède de loin la clientèle la plus large, ce qui lui confère un avantage concurrentiel décisif.

(41) On estime que Boeing détient une part équivalant à environ 60 % de la flotte mondiale actuellement en service d'avions de transport de passagers de grande capacité construits en Occident. La part détenue par MDC se situe aux alentours de 24 % et celle d'Airbus ne s'établit qu'à environ 14 %, même après plus de vingt-cinq ans d'activité. Les 2 % restants correspondent aux appareils Lockheed encore en service; or, Lockheed ne construit plus d'avions commerciaux depuis 1984. Il est vrai que l'existence d'une grande flotte en exploitation n'est pas un gage de réussite pour un fournisseur d'avions commerciaux, surtout si ce fournisseur n'offre qu'une gamme limitée de types d'avions. Toutefois, si, à une flotte en exploitation importante, s'ajoute une large gamme de produits, cette flotte en exploitation peut être un élément clé souvent à même de conditionner les décisions que doivent prendre les compagnies aériennes en matière de planification de leur flotte ou d'acquisitions. Les économies découlant de la similitude des caractéristiques techniques, telles que le stock des matériels techniques de rechange et les qualifications du personnel navigant technique, exercent une influence décisive sur les décisions d'une compagnie aérienne en matière de choix des types d'avions et peuvent fréquemment entraîner l'acquisition d'un certain type d'appareil, même si le prix des produits concurrents est plus bas. Toutes les compagnies qui ont répondu aux questions posées par la Commission sur ce point ont souligné l'importance de la flotte actuellement en service pour le choix de nouveaux avions.

(42) Dans ce contexte, il convient de souligner que Boeing ne possède pas seulement de loin la plus grande flotte en exploitation, mais aussi de loin la plus grande gamme de produits, et qu'il offre une famille d'avions qui recouvre tous les segments imaginables des avions commerciaux de grande capacité.

6. Accords d'exclusivité

(43) Boeing a récemment conclu des accords exclusifs de fourniture d'avions à réaction commerciaux de grande capacité à American Airlines (American), Delta Airlines (Delta) et Continental Airlines (Continental). En novembre 1996, American et Boeing sont convenus d'un partenariat à long terme qui fera de Boeing le fournisseur exclusif d'avions à réaction d'American jusqu'en 2018. American a passé des commandes fermes portant sur 103 avions, dont 75 sur la famille d'avions de ligne à réaction des 737 de la prochaine génération, 12 sur des 777-200, 12 sur des 757 et 4 sur des 767-300ER. Sur la base des prix catalogue de Boeing, cette commande est évaluée à environ 6,6 milliards de dollars des États-Unis. American a également obtenu des droits d'option d'achat assortis d'une clause de protection en matière de prix pour 527 avions à réaction supplémentaires, qu'elle peut exercer au cours de cette période d'exclusivité, d'une durée supérieure à vingt ans. Ces droits d'option d'achat permettent à American de déterminer à quel moment elle souhaite exercer ses droits d'option pour acheter des avions, avec un préavis ne dépassant pas quinze mois avant la livraison d'avions à fuselage étroit et dix-huit mois avant la livraison d'avions à fuselage large, au lieu du délai de livraison habituel de dix-huit à trente-six mois. American n'aurait, dit-on, rien dû payer pour ces droits mais les aurait reçus contre l'engagement de n'acheter que des avions à réaction de la marque Boeing. Dans le même temps, il s'avère que Boeing a offert des réductions de prix rétroactives sur les avions achetés par American lors de précédentes campagnes.

(44) Le 20 mars 1997, Boeing a conclu un second accord exclusif à long terme avec une grande compagnie aérienne, Delta, celle-ci ayant accepté de n'acheter que des avions Boeing pendant les vingt prochaines années. Delta a passé 106 commandes fermes d'avions jusqu'en 2006, dont 10 767-300ER, 5 biréacteurs 757-200, 70 appareils 737 de la prochaine génération et 21 appareils 767-400ERX. La commande totale est estimée à 6,7 milliards de dollars des États-Unis. Le projet comporte également 124 options, d'une valeur estime à 8,3 milliards de dollars des États-Unis, ainsi que 414 options glissantes portant sur l'achat d'avions jusqu'en 2018. Enfin, le 10 juin 1997, Continental a donné son accord de principe pour 35 commandes fermes et différentes options d'achat auprès de Boeing, assorties d'une condition selon laquelle Continental devra faire appel exclusivement à Boeing, durant les vingt prochaines années, pour ses achats d'avions de grande capacité.

(45) Le fait que trois des plus grandes compagnies aériennes du monde se soient liées à un seul fournisseur par un accord de fourniture valable vingt ans est déjà le signe que Boeing jouit d'une position dominante sur le marché des avions commerciaux de grande capacité. En outre, il est probable que ces trois opérations ont été facilitées par le projet de concentration (voir ci-après). Bien que, comme cela a été mentionné, les clients soient censés retirer des avantages économiques de ces accords, ces avantages seront sans doute plus que neutralisés par la rigidité qu'impose le fait d'être lié à un unique fournisseur sur une si longue période, au cours de laquelle les prix des concurrents pourraient devenir plus intéressants et leur technologie et leurs services connexes supérieurs.

(46) Les accords d'exclusivité qui lient Boeing et les trois compagnies en question auront de forts effets d'exclusion, durant les vingt prochaines années, sur le marché mondial des avions à réaction commerciaux de grande capacité. On estime que 14 400 avions neufs seront livrés dans le monde entier entre 1997 et 2016, dont 2 400 environ ont fait l'objet d'une commande ferme auprès de Boeing, de MDC ou d'Airbus. Il reste donc un marché potentiel portant sur environ 12 000 avions. Cependant, les accords exclusifs conclus par Boeing, y compris les options et les droits d'option d'achat, représentent 13 %, selon les estimations, de ce marché potentiel (et plus de 30 % du marché américain).

7. Perspectives de croissance du marché

(47) Les parties affirment que l'offre d'avions d'occasion et la puissance d'achat des compagnies aériennes limitent déjà, et continueront de limiter, le pouvoir de marché de Boeing.

Comme il a été expliqué plus haut, la Commission est convaincue que, en général, les avions d'occasion ne peuvent pas véritablement remplacer les avions neufs. Cela devrait tout particulièrement se vérifier durant les vingt prochaines années, où la demande d'avions devrait augmenter de plus de 80 %. Les avions d'occasion ne pourront alimenter qu'une fraction de cette demande croissante, d'autant plus qu'une grande partie de la flotte mondiale actuellement en service (plus de 80 %) devra être remplacée durant cette période.

La croissance prévisible du marché réduira aussi la puissance d'achat des compagnies aériennes, quelle qu'elle soit. Durant cette période, où le transport aérien devrait connaître un développement considérable (on prévoit 5 % de croissance annuelle), les compagnies aériennes, dans leurs efforts pour répondre à cette demande, seront amenées, dans une certaine mesure, à rivaliser les unes avec les autres pour l'obtention d'avions neufs, ce qui affaiblira leur position lors des négociations avec les fournisseurs. En outre, la puissance d'achat des compagnies aériennes vis-à-vis de Boeing est de toute façon limitée, du fait du monopole que détient l'avionneur dans le segment supérieur des fuselages larges et, tout au moins une fois que le projet de concentration aura été réalisé, dans le segment inférieur des fuselages étroits.

8. Concurrence potentielle

(48) Dans sa notification, Boeing affirme qu'il existe de nouveaux entrants potentiels sur le marché des avions à réaction commerciaux de grande capacité, et notamment des constructeurs situés en Russie, en Inde et en Extrême-Orient (Chine, Japon, Corée du Sud et Indonésie).

(49) Toutefois, Boeing lui-même reconnaît effectivement qu'il existe des barrières très importantes à l'entrée sur ce marché. Les coûts initiaux de développement et d'investissement sont colossaux (plus de 10 milliards de dollars des États-Unis pour développer un nouvel avion à réaction à fuselage large, selon Boeing). Le processus de production lui-même se caractérise par des effets de courbe d'apprentissage très prononcés et de très fortes économies d'échelle et d'envergure, qu'un concurrent doit parvenir à atteindre s'il veut rester véritablement concurrentiel au cours du temps. Il est par ailleurs impératif de respecter des normes de sécurité très strictes mises en place aux États-Unis d'Amérique, en Europe et dans d'autres pays.

(50) Là encore, les nouveaux entrants potentiels mentionnés dans la notification présentée par Boeing sont, selon toute probabilité, actifs principalement sur le marché des avions à réaction destinés au transport régional et, en tant que tels, ne seront pas des concurrents sur le marché des avions à réaction commerciaux de grande capacité (voir ci-dessus la définition du marché). Cette analyse est confirmée par les réponses qu'ont envoyées (par exemple) les constructeurs d'Extrême-Orient à la Commission; ceux-ci sont actifs sur le marché des avions à réaction destinés au transport régional ou sont des sous-traitants de Boeing pour des programmes de construction de grands avions à réaction.

(51) On peut donc exclure l'éventualité qu'une concurrence potentielle ait des effets importants, dans un avenir prévisible, sur la situation concurrentielle actuelle.

9. Conclusion

(52) Vu les diverses caractéristiques de la structure actuelle des marchés des avions à réaction commerciaux de grande capacité, qui a été décrite ci-dessus, et notamment les parts de marché actuellement détenues par Boeing, la taille de sa flotte en exploitation, la conclusion récente d'accords de fourniture exclusifs à long terme avec de très gros clients et l'absence de nouveaux entrants potentiels, la Commission est parvenue à la conclusion que Boeing détient déjà une position dominante sur le marché global des avions commerciaux de grande capacité ainsi que sur les marchés des avions à fuselage étroit et à fuselage large.

II. Renforcement de la position dominante de Boeing

(53) Le projet de concentration pourrait entraîner le renforcement de la position dominante de Boeing sur le marché des avions commerciaux de grande capacité pour les deux raisons suivantes:

- la capacité concurrentielle de MDC dans le secteur des avions commerciaux de grande capacité s'ajouterait à celle que Boeing possède déjà sur ce marché,

- l'accroissement important des ressources globales de Boeing et de ses activités dans le secteur militaire et spatial aurait des répercussions très sensibles sur sa position dans le secteur des avions commerciaux de grande capacité et la rendrait encore moins attaquable.

1. Incidence de l'intégration des activités de MDC dans le domaine des avions commerciaux

(54) Les effets immédiats du projet de concentration seraient les suivants:

a) la part de Boeing dans le marché global des avions commerciaux de grande capacité passerait de 64 à 70 %;

b) en reprenant les activités de MDC, Boeing ne se heurterait plus à l'avenir sur ce marché qu'à un seul concurrent;

c) la part de Boeing dans la flotte mondiale passerait de 60 à 84 % des appareils exploités;

d) Boeing développerait sa capacité dans le domaine des avions commerciaux, en particulier en termes de main-d'oeuvre qualifiée;

e) Boeing serait davantage à même d'inciter les compagnies aériennes à conclure des contrats d'exclusivité, cloisonnant ainsi davantage le marché.

a) Accroissement des parts de marché

(55) La part de Boeing dans le marché global des avions commerciaux de grande capacité (en termes de carnets de commandes) passera de 64 à 70 %. Sa part de marché des appareils à fuselage large passera de 71 à 73 % et celle du marché des appareils à fuselage étroit de 55 à 66 %.

(56) De plus, Boeing détiendra, outre le monopole dont il jouit déjà sur le segment supérieur des fuselages larges, un autre monopole sur le segment inférieur des appareils à fuselage étroit, d'une capacité de 100-120 sièges. Ce segment est particulièrement important, car il permet dans une large mesure aux grandes compagnies aériennes d'alimenter leurs aéroports pivots et de réaliser des bénéfices sur les lignes peu fréquentées, sur lesquelles il est difficile de remplacer des avions d'une capacité de 100-120 sièges par de plus gros appareils à fuselage étroit tels que des Airbus 319, dont le coût d'exploitation par voyage est supérieur. Pour le moment, les seuls avions en concurrence sur le segment inférieur des fuselages étroits sont les Boeing 737-500 et 737-600 et le MD-95. Il convient de noter que, même si Airbus a entamé des pourparlers avec la Chine et d'autres constructeurs asiatiques au sujet du développement d'un appareil de 100 places, ces négociations n'en sont qu'au stade initial et la décision d'investissement dépendra des scénarios envisagés en matière de marché et de développement; aussi est-il peu probable que ce projet ait une incidence sur le marché dans un avenir prévisible. Boeing obtiendrait également un quasi-monopole sur le segment des avions-cargos. En ce qui concerne les livraisons d'avions-cargos neufs sur la période 1990-1996, la part annuelle moyenne du marché mondial détenue par Boeing et MDC a été de 67 et 23 % respectivement, soit une part de marché cumulée de 90 %.

(57) Toutefois, étant donné, comme exposé ci-dessous, que MDC n'exerce plus d'influence réelle sur le marché des avions commerciaux, et en l'absence d'autre repreneur potentiel pour ses activités sur ce marché, Boeing aurait, selon toute probabilité, obtenu à terme un monopole dans le segment des 100-120 sièges et un quasi-monopole dans celui des avions-cargos, même sans la concentration en question.

b) Potentiel concurrentiel de MDC

i) L'impact de MDC sur la concurrence a été dans le passé plus important que ne le reflétait sa part de marché

(58) Bien que, comme souligné précédemment, la part de marché de MDC n'ait cessé de diminuer, il semble que l'impact de MDC sur les conditions de concurrence sur le marché des avions commerciaux de grande capacité ait été plus fort que ne le reflétait sa part de marché en 1996.

La Commission a reçu des réponses de 31 compagnies aériennes qui ont toutes acheté ces cinq dernières années des avions commerciaux de grande capacité neufs. Deux d'entre elles n'ont acheté que des avions construits par MDC. Sur les 29 compagnies restantes, 20 ont déclaré que, lorsqu'elles avaient passé des commandes à Boeing ou à Airbus, MDC avait présenté une offre pour une partie ou pour l'ensemble de ces commandes. Sur ces 20 compagnies, 13 ont déclaré que la concurrence exercée par MDC avait eu une incidence sur l'issue de leurs négociations avec le constructeur retenu en leur permettant d'obtenir un prix plus avantageux ou des conditions d'achat plus favorables. Deux compagnies ont déclaré que cette incidence avait été décisive, trois l'ont jugée faible et sept autres non négligeable.

Ces déclarations sont confirmées par une étude menée par Lexecon Ltd pour le compte d'Airbus et présentée lors de l'audition. Cette étude a analysé 52 appels d'offres pour la fourniture d'avions entre 1994 et 1996, en effectuant une comparaison entre ceux auxquels a participé MDC et les autres. L'étude a conclu que la participation de MDC avait entraîné une réduction de plus de 7 % du prix final par rapport au prix catalogue en ce qui concerne les commandes passées auprès d'Airbus.

ii) Toutefois, MDC n'exerce plus aujourd'hui, de manière autonome, d'influence réelle sur le marché de la vente d'avions neufs

(59) The Douglas Aircraft Company (DAC), qui gère les activités de MDC dans le secteur des avions commerciaux, a dégagé, en 1996, 100 millions de dollars des États-Unis de bénéfices d'exploitation, contre 39 millions en 1995 et 47 millions en 1994. En outre, DAC continue d'avoir un carnet de commandes fermes d'avions commerciaux représentant 7 milliards de dollars des États-Unis. Il apparaît toutefois que les bénéfices d'exploitation de DAC ont été essentiellement liés à ses activités dans le secteur des pièces de rechange et du soutien au produit plutôt que dans la vente d'avions neufs. Contrairement à Boeing et à Airbus, qui offrent des familles d'avions plus étendues et plus modernes, DAC n'offre actuellement que trois types d'avions à fuselage étroit et un type d'avion à fuselage large, qui ne présentent pas, d'après Boeing, d'avantages importants du point de vue de l'interchangeabilité relative des avions au sein des flottes et sont tous eux-mêmes des dérivés d'anciens modèles Douglas et non pas des modèles entièrement nouveaux. Il semble que la diminution constante des parts de marché de DAC soit essentiellement imputable à ces facteurs. En outre, le carnet de commandes actuel ne permettra d'assurer qu'une période de production limitée. Depuis l'abandon du programme MDXX en octobre 1996, DAC n'a quasiment pas reçu de nouvelles commandes fermes. Cette situation reflète le sentiment des compagnies aériennes selon lequel MDC n'est plus engagé dans le secteur des avions commerciaux et pourrait à terme quitter le marché. Dans ce contexte, il importe également de noter que DAC a perdu au cours des neufs derniers mois le noyau dur de ses clients, American, Northwest Airlines, Delta et Continental, les quatre plus gros exploitants d'avions DAC. La perte de clientèle que représentent ces grandes compagnies aériennes, qui servent de références à d'autres (l'une d'entre elles, Delta, a même été le premier client à lancer le MD-90), a conforté l'idée, chez les acteurs du marché, que DAC n'a pas d'avenir sur le marché des avions commerciaux de grande capacité. Dans ces conditions, la conclusion s'impose que, aujourd'hui, DAC n'exerce plus, de manière autonome, une influence réelle sur le marché.

iii) Il est peu probable qu'un tiers achète les activités de MDC dans le secteur des avions commerciaux

(60) Sans la concentration, DAC aurait pu, théoriquement, être racheté par d'autres entreprises aérospatiales [. . .]. En 1997 toutefois, sa position sur le marché s'est détériorée de manière spectaculaire. Les enquêtes approfondies réalisées par la Commission ont montré qu'il était très peu probable, en pratique, qu'un tiers se porte acquéreur de DAC, et ce notamment en raison de l'aggravation de sa situation. Ni Airbus, le seul concurrent restant en lice sur le marché des avions commerciaux de grande capacité, ni aucune de ses sociétés mères ne se sont montrés intéressés par une telle acquisition. En outre, aucun autre acheteur potentiel n'a souhaité, par le rachat de DAC, pénétrer sur le marché des avions commerciaux de grande capacité. Il s'avère par conséquent que, étant donné la situation concurrentielle actuelle de DAC, seul Boeing est disposé à reprendre les activités de MDC dans le segment des avions commerciaux.

iv) La capacité concurrentielle de MDC dans le secteur des avions commerciaux peut néanmoins être importante, une fois que ses activités dans ce secteur seront intégrées au groupe Boeing

(61) Boeing a déclaré qu'il ne pourra se prononcer sur la poursuite ou l'arrêt des lignes de produits de DAC que lorsqu'il aura eu connaissance des données internes de la société. Selon Boeing, cette décision dépendra en outre de plusieurs facteurs, notamment de considérations sociales et politiques. Il semble cependant que Boeing, malgré la situation actuellement difficile de DAC, pourrait décider de maintenir la totalité ou une certaine partie des lignes de produits DAC, au moins pendant un certain temps. Si Boeing poursuit la production d'avions DAC, la vision pessimiste de l'avenir de MDC pourrait se dissiper. Les compagnies aériennes hésiteront moins, de ce fait, à acheter des avions DAC car elles seront rassurées sur l'avenir des activités de cette société dans le secteur de l'aviation commerciale. Dans la mesure où DAC fera partie du groupe Boeing, ses appareils pourront être commercialisés parallèlement aux Boeing, et Boeing sera à même de décider du moment où les appareils DAC seront ou non mis en concurrence.

Si, en revanche, Boeing devait décider de cesser, à plus ou moins longue échéance, la production de la totalité ou d'une partie des avions DAC, il serait mieux placé qu'Airbus pour conquérir les parts de marché ainsi libérées. Boeing continuant, comme cela est souligné ci-dessous, à avoir accès de façon privilégiée à la vaste clientèle existante de DAC, il serait bien placé pour remplacer à terme les avions DAC actuellement exploités.

c) Flotte en exploitation

(62) La part que détient Boeing des flottes actuellement en service passerait de 60 à 84 % (contre 14 % seulement pour Airbus); il développerait de ce fait avec la clientèle des relations durables et améliorerait sa position en ce qui concerne les services de soutien à la clientèle. Sa clientèle s'élargirait également fortement. Il apparaît que, sur les 561 compagnies aériennes exploitant des avions Boeing, des MDC ou des Airbus à la fin de 1996, 75 n'utilisaient que des avions MDC et 10 que des MDC et des Airbus. En plus des 316 compagnies exploitant uniquement des Boeing, des 50 compagnies exploitant des Boeing et des MDC, des 62 exploitant des Boeing et des Airbus et des 26 exploitant des Boeing, des MDC et des Airbus (seules 22 compagnies exploitent exclusivement des Airbus), Boeing aurait également accès à 85 autres compagnies qui n'exploitent pas à l'heure actuelle d'avions Boeing.

(63) La possibilité de nouer des contacts plus étroits avec ces compagnies grâce au suivi que permettent les services de soutien pourrait offrir à Boeing à l'avenir l'occasion de conclure des ventes en lui permettant d'influer sur les choix de la clientèle. Il est toutefois admis que Boeing entretient déjà des contrats étroits avec un certain nombre de compagnies aériennes, par le biais de ses propres services de soutien.

(64) D'une manière générale, l'acquisition des activités de MDC dans le domaine des pièces détachées et de la maintenance pourrait conférer à Boeing une influence supplémentaire considérable sur les utilisateurs d'appareils MDC, dont le parc total d'appareils MDC représente, comme on l'a vu, 24 % de l'ensemble de la flotte mondiale.

d) Utilisation de la capacité de MDC

(65) Selon ses déclarations, Boeing n'utilise ses installations de production qu'à [. . .]; les capacités disponibles sont donc de [. . .]. Il semble toutefois que ces chiffres ne concernent que la capacité de l'outil de production et non la main-d'oeuvre existante. Boeing, semble-t-il, cherche en particulier à s'adjoindre les ingénieurs de MDC pour le développement et la production de ses propres avions commerciaux. Le rapport annuel de 1996 de MDC mentionne, au sujet d'un projet de construction d'un nouvel avion à réaction commercial, que plusieurs centaines d'ingénieurs de MDC ont commencé à travailler sur ce projet pour le compte de Boeing en décembre 1996.

(66) La Commission admet qu'il est relativement difficile de transférer des ingénieurs travaillant à la fabrication d'avions de combat sur celle d'avions commerciaux. Néanmoins, cela ne pose pas de problème majeur pour les ingénieurs qui travaillent sur les avions de transport militaire. En fait, MDC reconnaît que, compte tenu des fluctuations dans les programmes de construction d'avions commerciaux et d'avions de transport militaire (programme C17), le personnel affecté à la production a parfois dû passer d'un programme à l'autre.

(67) Dans le secteur aéronautique, la souplesse d'utilisation des capacités, en d'autres termes la possibilité d'augmenter ou de diminuer facilement la production, est un facteur important. Pour les compagnies aériennes, il est clair qu'un constructeur en mesure de livrer dans les délais requis en période de rapide accroissement de la demande est avantagé. Or, l'une des conditions essentielles de l'accroissement rapide des capacités est la présence d'un personnel qualifié, dont Boeing disposerait en plus grand nombre du fait de son accès à la main-d'oeuvre de MDC.

e) Contrats exclusifs

(68) Du fait de ce projet de concentration, la capacité de Boeing de conclure des accords tels que ceux qui ont été négociés avec American, Delta et Continental serait considérablement accrue. Il convient de noter que ces compagnies aériennes figurent parmi les plus grandes du monde et sont celles qui «lancent» les nouveaux modèles d'avions; ce sont en effet les seules compagnies aériennes à disposer des ressources suffisantes pour s'engager à acheter des modèles d'avions entièrement nouveaux ou de nouvelles familles d'avions. Les compagnies aériennes qui exploitent à l'heure actuelle à la fois des Boeing et des avions MDC pourraient en particulier se voir proposer également par Boeing, dans le cadre d'un contrat d'exclusivité, la fourniture d'autres avions MDC ainsi que des pièces détachées et des services de soutien pour les appareils MDC plus anciens. En revanche, si des compagnies aériennes ayant commandé des avions MDC souhaitaient rationaliser leur flotte, Boeing, qui contrôlerait MDC, annulerait purement et simplement ces commandes, et les frais de dédit que les compagnies aériennes doivent normalement acquitter en ce cas seraient symboliques. Boeing aurait d'ailleurs proposé, dans le cadre du contrat d'exclusivité, de reprendre les MD90 déjà livrés à Delta et d'annuler les commandes existantes d'autres appareils de ce type. Néanmoins, lorsque la Commission a interrogé Boeing sur ce point, ce dernier n'a pas été en mesure de confirmer ou de démentir l'existence de telles propositions.

(69) Le lien tant actuel que potentiel qui existe entre la taille de la flotte MDC exploitée par les grandes compagnies et les possibilités accrues qui s'offriront après la concentration à Boeing de conclure avec ces compagnies de nouveaux accords d'approvisionnement exclusif est illustré par le fait que American, Delta et Continental, avec lesquelles Boeing a déjà signé des accords d'approvisionnement exclusif (10), se situent respectivement en première, troisième et quatrième position pour ce qui est de la taille du parc d'appareils MDC qu'elles exploitent.

>TABLE>

Il est également intéressant de constater que, avant ces accords, des accords exclusifs n'avaient jamais été conclus dans le secteur des avions commerciaux de grande capacité et que leur durée elle-même est sans précédent.

(70) De façon plus générale, Boeing serait davantage à même d'inciter les compagnies aériennes à conclure des accords exclusifs en raison de la conjugaison de trois facteurs: l'élargissement de sa gamme de produits consécutif à la concentration, ses ressources financières et l'accroissement de sa capacité qui lui permet d'effectuer, dans les plus brefs délais, les livraisons requises par les compagnies aériennes. Il convient de noter qu'il serait impossible pour Airbus de proposer des accords exclusifs car il n'est pas en mesure d'offrir une «famille» complète d'appareils.

(71) La conclusion de ces accords exclusifs avec les dix premières compagnies mondiales pourrait avoir comme effet de «réserver» plus de 40 % du marché mondial (si l'on se fonde sur la flotte exploitée par ces compagnies en pourcentage de la flotte mondiale). Ce scénario est tout à fait plausible car il pourrait se produire un effet d'entraînement, d'autres grandes compagnies ne voulant pas laisser échapper les avantages dont jouissent apparemment leurs concurrents qui ont déjà conclu des accords exclusifs. Il pourrait en résulter un fractionnement du marché mondial: les grandes compagnies dotées des flottes les plus importantes se trouveraient, après la concentration, sous le contrôle exclusif de Boeing et la concurrence ne pourrait plus s'exercer que pour satisfaire les besoins en aéronefs des compagnies plus petites.

L'effet de ces accords risque en outre de se prolonger au-delà de leur durée officielle, déjà très longue, compte tenu de la durée de vie utile très importante des produits de ce secteur. Ainsi, selon Boeing, la durée de vie utile des avions conçus après 1980 peut aller de vingt-huit à trente et un ans, ce qui laisse supposer que les acquisitions d'avions effectuées au cours des dernières années de l'accord - même s'il n'est pas renouvelé - pourraient couvrir les besoins de compagnies jusqu'en 2045-2047. En outre, il est également légitime de penser que, après s'être approvisionnées de manière exclusive auprès de Boeing pendant une période aussi longue, les compagnies aériennes ne seront vraisemblablement pas disposées à supporter les coûts du passage à une autre famille d'avions.

2. Effets globaux de la reprise des activités de MDC dans le secteur militaire et spatial

(72) La reprise des activités de MDC dans le secteur militaire et spatial pourrait entraîner un renforcement de la position dominante de Boeing du fait de son incidence globale en termes d'accroissement:

a) de l'ensemble des ressources de Boeing;

b) de l'accès de Boeing à la recherche et au développement financés par l'État et du portefeuille de droits de propriété intellectuelle;

c) du pouvoir de négociation de Boeing vis-à-vis de ses fournisseurs;

d) des possibilités de compensation et de ventes groupées.

a) Ressources

(73) À l'issue de la concentration, Boeing deviendra le premier constructeur mondial intégré dans le secteur aérospatial, avec un chiffre d'affaires estimé en 1997 à plus de 48 milliards de dollars des États-Unis. Selon les chiffres de 1995, les activités de Boeing dans le secteur des avions commerciaux représentaient environ 70 % de l'ensemble de ses activités. En ce qui concerne MDC, le pourcentage est exactement inverse: environ 70 % de l'ensemble de ses activités était exercé dans le secteur militaire et spatial. Sans tenir compte de l'acquisition récente de Rockwell Defense and Aerospace, le projet de reprise de MDC permettra à Boeing de multiplier à peu près par trois ses activités dans le domaine militaire et spatial. Boeing sera ainsi bien mieux armé pour faire face aux fluctuations conjoncturelles dans le secteur des avions commerciaux car, en dépit des contraintes budgétaires de ces dernières années, les recettes dégagées par le secteur militaire et spatial semblent bien plus stables que celles du secteur des avions commerciaux.

(74) Étant donné qu'Airbus est un groupement d'intérêt économique (GIE) et que, en cette qualité, il ne publie pas ses propres comptes financiers, une comparaison détaillée des résultats d'Airbus, de Boeing et de MDC n'est pas possible. Le chiffre d'affaires total de ces trois groupes en 1996 donne néanmoins une idée de leur poids respectif:

>TABLE>

En 1996, le chiffre d'affaires réalisé par chacun des quatre partenaires d'Airbus dans le secteur aérospatial était le suivant:

>TABLE>

On soulignera cependant qu'il ne convient pas d'englober dans le chiffre d'affaires d'Airbus celui des quatre partenaires d'Airbus, malgré les arguments avancés par Boeing pour prouver le contraire. En ce qui concerne le chiffre d'affaires tiré de l'aviation militaire, il y a lieu de rappeler que les partenaires d'Airbus regroupés ne constituent pas un ensemble commercial homogène comme c'est le cas pour Boeing et MDC, qui sont des sociétés autonomes. De plus, le seul partenaire d'Airbus ayant des activités non négligeables dans un secteur autre que l'aérospatiale est DASA, qui appartient au groupe Daimler-Benz. Il est évident que, pour Daimler-Benz, il ne serait pas économiquement rationnel de se servir de ses autres activités (essentiellement la construction de véhicules à moteur) pour subventionner Airbus de manière importante, d'autant que sa participation n'atteint que 37 % environ (voir ci-dessus).

(75) La solidité des structures financières de Boeing comme de MDC est attestée par leur ratio dette/fonds propres (qui est, respectivement, en milliards de dollars des États-Unis, de 4,1/10,5 et de 3,4/3,0) (11).

(76) Les résultats d'exploitation pour 1996 qui figurent ci-dessous indiquent (en milliards de dollars des États-Unis) (12) la surface financière de Boeing et de MDC, considérés isolément, puis ensemble.

>TABLE>

(77) Selon les prévisions de Lehman Brothers, après intégration de MDC, les bénéfices avant impôts de Boeing passeraient de 4,4 milliards de dollars des États-Unis en 1997 à 7,3 milliards en l'an 2000, pour un chiffre d'affaires atteignant à cette date 54,8 milliards de dollars des États-Unis. En ce qui concerne sa trésorerie, Boeing pourrait, toujours selon Lehman Brothers, avoir, d'ici la fin de la décennie, 15 milliards de dollars des États-Unis inscrits à son bilan, et au début du siècle prochain, entre 20 et 30 milliards (13).

(78) Les comptes de Boeing et de MDC manquent de transparence en ce qui concerne la marge bénéficiaire dégagée sur leurs différents modèles d'avions. D'après les calculs des experts financiers, les marges bénéficiaires de Boeing divergent très sensiblement selon les modèles. En particulier, ces marges sont, selon leurs estimations, bien plus élevées (aux alentours de 30 %) sur les modèles 737 et 747 (qui appartiennent respectivement aux segments inférieur et supérieur) que sur les modèles 757 et 767 (segment des appareils de capacité moyenne), où elles avoisinent 18 % (14). Cela reflète probablement la position quasi monopolistique de Boeing sur les segments inférieur et supérieur (voir ci-dessus la définition du marché des avions de transport de passagers). Il est donc probable que Boeing est en mesure, par un jeu de subventions croisées, de soutenir les ventes des avions de moyenne capacité, segment où la concurrence est plus âpre, grâce aux marges plus élevées qu'il obtient sur les segments inférieur et supérieur où la concurrence est moindre, voire inexistante. On peut par conséquent s'attendre à ce que l'apport des produits de MDC offre à Boeing la possibilité, quand il le juge bon de vendre ses produits sans bénéfice ou à perte sur le segment des appareils de moyenne capacité, grâce aux marges plus élevées obtenues sur les segments inférieur et supérieur. Grâce, d'une part, au chiffre d'affaires et aux bénéfices qu'il réalise ainsi qu'à son encaisse disponible et, d'autre part, au doublement de ses activités de recherche et de développement dans le domaine militaire financées par l'État et au triplement des recettes globales qu'il tire du secteur militaire et spatial, Boeing disposera d'une plus grande latitude pour soutenir, au moyen de subventions croisées, les ventes d'avions commerciaux lorsqu'il voudra faire face à une concurrence spécifique (par exemple, sur le segment des appareils de moyenne capacité du marché des fuselages larges).

(79) Boeing s'est déjà livré à de telles pratiques tarifaires, par exemple pour le 737. On a ainsi pu lire dans le Washington Post (15), au sujet d'une commande portant sur de nouveaux avions à réaction commerciaux passée par Scandinavian Airline System (SAS) en mars 1995, que le comité d'évaluation interne de SAS avait recommandé d'acheter 50 des nouveaux avions à réaction MD-95 de 100 sièges proposés par Douglas, au prix unitaire de 20 millions de dollars des États-Unis. À la place, le président de SAS avait déclaré que SAS commanderait 35 exemplaires de la nouvelle version du vénérable Boeing 737, au prix unitaire d'environ 19 millions de dollars des États-Unis, soit une forte réduction par rapport au prix catalogue de Boeing. La stratégie de Boeing, rappelait l'un des vendeurs qui était sur les rangs, était manifestement d'empêcher Douglas une fois pour toutes de lancer le MD-95.

(80) Selon les informations fournies par Boeing, le prix de vente le plus bas publié en 1996 pour l'achat d'un 737 de 100 sièges aurait été de 32 millions de dollars des États-Unis. Si l'on suppose que les calculs des experts financiers donnant une marge bénéficiaire d'environ 30 % sur un Boeing 737 sont relativement exacts (16), le prix de vente effectif de 19 millions de dollars des États-Unis par unité consenti à SAS semblerait indiquer que Boeing n'aurait pas réalisé le moindre profit sur cette transaction (32 millions de dollars des États-Unis - 30 % = environ 22 millions de dollars des États-Unis).

(81) Il est évident que, comme cela a déjà été dit, l'apport des produits de MDC (en particulier des appareils MD-95 du segment inférieur) et le net accroissement de ses ressources totales feraient que Boeing serait davantage à même de se livrer à ce type de pratiques tarifaires, compte tenu en particulier de la situation déjà solide et de plus en plus florissante de sa trésorerie (voir ci-dessus).

(82) Une lettre adressée par Boeing à une société japonaise de location d'aéronefs à l'occasion de la signature d'une commande d'Airbus témoigne du fait que Boeing est prêt à user de toute la puissance que lui confèrent ses ressources pour exercer des pressions non seulement sur ses concurrents mais également sur ses clients, comme cela a été souligné lors de l'audition:

On peut lire dans cette lettre du 17 décembre 1996, signée par M. Ronald Woodard (Boeing Commercial Airplane, Group President), les déclarations suivantes:

«Je tiens à vous faire savoir que la société Boeing est vivement préoccupée par cette décision qui non seulement nous a stupéfiés, mes collègues et moi-même, mais qui affectera certainement les bonnes relations que nos deux sociétés entretenaient depuis de nombreuses années.»

«. . . Plus important encore, elle pourrait avoir des effets fâcheux sur la coopération dans le secteur aérospatial entre le Japon et les États-Unis d'Amérique.»

b) Accès à la recherche et au développement financés par l'État

(83) Grâce à la forte augmentation de ses activités militaires et spatiales, Boeing bénéficiera d'un accès accru à la recherche et au développement financés par le ministère américain de la défense (DoD), l'administration fédérale de l'aéronautique et de l'espace (NASA) ou d'autres organismes publics. C'est le cas, en particulier, en ce qui concerne la recherche et le développement dans le domaine des avions militaires.

i) Aux États-Unis d'Amérique, la recherche et le développement dans le secteur aérospatial sont, dans une large mesure, financés par l'État

(84) D'après les statistiques établies par l'association américaine des industries aérospatiales, aux États-Unis d'Amérique, l'ensemble de la R& D (financée tant par l'État que par les entreprises) menée par l'industrie représente en moyenne 3 à 4 % du chiffre d'affaires net des entreprises du secteur manufacturier. Dans le secteur aérospatial, en revanche, l'ensemble de la R& D industrielle y représente 12 à 14 % du chiffre d'affaires net. Dans l'ensemble de l'industrie, les entreprises financent environ 80 % de toutes les activités de R& D industrielle, le financement de l'État fédéral représentant environ 20 %. Dans le secteur aérospatial, le pourcentage là encore est complètement différent: près de 60 % de l'ensemble de la R& D industrielle est financé par le gouvernement américain et 40 % seulement par les entreprises elles-mêmes.

(85) En 1994, le financement accordé par l'État fédéral à la R& D industrielle dans l'ensemble du secteur aérospatial s'est élevé à 8,8 milliards de dollars des États-Unis. Sur ce montant, environ 8 milliards ont été consacrés au développement, le reste étant affecté à la recherche fondamentale et appliquée. Le DoD et la NASA ont apporté l'essentiel du financement de la R& D industrielle. Le budget total affecté par le DoD à la R& D dans le secteur aéronautique (avions et équipements connexes) a représenté 6,8 milliards de dollars des États-Unis et celui de la NASA 1,5 milliard. Les chiffres pour 1995 ont été respectivement de 7,1 milliards et de 1,3 milliard de dollars des États-Unis. Les marchés (hors sous-traitance) passés par le DoD pour la recherche, le développement, les essais et l'évaluation dans le secteur aéronautique ont représenté 5,8 milliards de dollars des États-Unis en 1994 et presque autant en 1995.

(86) D'une manière générale, les dépenses de R& D du DoD sont bien plus importantes que celles de ses homologues européens: en 1996, l'ensemble des crédits affectés par le DoD à la R& D s'est élevé à 34,8 milliards de dollars des États-Unis, alors que l'enveloppe totale consacrée à la R& D par les ministères de la défense des pays de la Communauté a représenté 11,7 milliards de dollars des États-Unis (ce chiffre ne prend pas en compte l'Autriche, la Suède et la Finlande). Sur cette somme, 10,6 milliards de dollars des États-Unis ont été versés par les ministères de la défense de la France, de l'Allemagne et du Royaume-Uni, pays des principaux partenaires du consortium Airbus. En ce qui concerne les activités spatiales, le rapport est du même ordre: en 1996, le budget total de la NASA a atteint 13,8 milliards de dollars des États-Unis, contre une contribution de 3,1 milliards de dollars des États-Unis des États membres au budget de l'Agence spatiale européenne (ASE), qui représente de loin l'essentiel de l'enveloppe affectée aux activités spatiales dans la Communauté. Ces chiffres entre lesquels il existe un écart très net ne sont en réalité pas rigoureusement comparables du fait que, au sein de la Communauté, les ministères de la défense ne coordonnent pas toujours systématiquement leur stratégie.

ii) Aux États-Unis d'Amérique, la R& D dans le secteur militaire et dans le secteur spatial public est normalement financée intégralement par l'État

(87) À la différence des programmes de production ou de fourniture, qui sont en général exécutés dans le cadre de marchés à prix forfaitaires, les programmes de développement dans le secteur militaire et spatial sont normalement menés dans le cadre de marchés en régie. Les principaux marchés dans le domaine de la R& D sont ceux qui concernent l'ingénierie et la mise au point de la fabrication; ils servent à financer la conception et la mise au point de la fabrication d'un système avant le lancement de la phase de production du programme. Il s'agit en général de contrats en dépenses contrôlées avec primes ou de contrats en dépenses contrôlées avec intéressement.

(88) Les contrats en dépenses contrôlées avec primes prévoient le remboursement des frais et une prime en fonction de la réalisation d'un programme négocié au début du contrat. Les contrats en dépenses contrôlées avec intéressement prévoient le remboursement des frais et un intéressement en fonction du respect d'objectifs de résultats et de calendrier. Il se peut dans certains cas qu'une entreprise contractante ait investi ses propres fonds dans la R& D dans les phases initiales d'un programme militaire. Ces frais initiaux de R& D sont en général inclus dans le total des coûts du programme lorsque l'entreprise se voit ultérieurement attribuer par le DoD un marché en vue de la fabrication du produit considéré. En outre, le programme de R& D du DoD (recherche et développement indépendants/remboursement des frais) permet aux entreprises retenues par le DoD de récupérer une partie des coûts de la R& D qu'elles ont menée, de manière indépendante, en interne, en étant remboursées de leurs frais généraux pour tous les marchés en dépenses contrôlées passés avec le DoD. Depuis 1991, la définition des projets autorisés de R& D indépendants englobe tous les projets susceptibles de présenter un intérêt pour le DoD. Il s'ensuit que la majeure partie de la R& D concernant les produits militaires, ou ayant des applications possibles dans le domaine militaire, est financée par le DoD. De même, la R& D concernant des programmes militaires, des technologies et des programmes dans le domaine spatial bénéficie souvent d'un financement intégral, en particulier si le principal client du programme est le gouvernement américain.

iii) Le projet de concentration permettra en particulier à Boeing d'augmenter considérablement le nombre de ses contrats de R& D dans le secteur militaire

(89) Au cours de ces cinq dernières années, les contrats de R& D passés avec l'État fédéral ont procuré à Boeing un volume annuel moyen de recettes avoisinant [. . .]. En moyenne, [. . .] de ces recettes ont été tirés de la R& D concernant des programmes spatiaux de la NASA (en particulier l'«International Space Station»). Bien que, à l'heure actuelle, Boeing ne construise que quelques avions militaires (AWACS, avion ravitailleur KC-135) et aucun avion de combat, le deuxième plus gros segment d'où il tire ses recettes de R& D est celui des avions militaires. En moyenne, ce segment a rapporté à Boeing [. . .] de ses recettes de R& D dans le cadre de contrats avec le gouvernement américain. Cela s'explique par la participation de Boeing à de vastes programmes de développement d'avions militaires, tels que le chasseur F-22, l'avion d'attaque interarmées (Joint Fight Striker) et l'avion V-22 à rotors basculants. Quant aux recettes annuelles moyennes de MDC, elles ont été, ces cinq dernières années, comprises entre [. . .] et [. . .], dont près de [. . .] dans le secteur des avions militaires. Par conséquent, à l'issue du projet de concentration, les recettes tirées par Boeing de la R& D menée sur le segment des avions militaires seront plus ou moins multipliées par deux.

(90) On notera que l'entité née de la fusion participera, à des degrés divers, à tous les programmes actuels du DoD bénéficiant des budgets de R& D les plus élevés. On trouvera ci-dessous la liste de ces programmes et le budget affecté à la R& D.

>TABLE>

(91) Il semble que les programmes les plus importants de construction d'avions dans un avenir prévisible soient ceux qui concernent l'avion d'attaque interarmées (JSF), le F-22 et le F/A-18. MDC est chef de file des systèmes pour le F-18; Lockheed et Boeing travaillent tous deux au développement du F-22. Boeing et Lockheed se trouvent en concurrence pour l'obtention du contrat final de construction du JSF. La Commission estime que la nouvelle entité sera, après la concentration, mieux placée pour devenir maître d'oeuvre en ce qui concerne le développement du JSF, grâce à la mise en commun des moyens technologiques de Boeing et de MDC.

iv) Le développement important des activités de R& D militaire de Boeing apportera à l'entreprise un certain nombre d'avantages concurrentiels d'ordre général

(92) Comme expliqué ci-après, la R& D militaire peut apporter à un constructeur d'avions commerciaux un avantage évident, par les possibilités de transfert, vers le secteur commercial, de technologies mises au point grâce à des fonds publics. Mais l'avantage ne s'arrête pas aux transferts de technologies. La participation massive de sociétés privées à des projets de R& D militaire de très haute technologie contribue à la formation du personnel technique de ces entreprises et élargit donc leur savoir-faire. La R& D militaire finance aussi des équipements de base, par exemple des outils très spécialisés, qui peuvent ensuite être utilisés en aéronautique commerciale. Même lorsqu'un projet de R& D militaire ne confère aucune avance technologique particulière (c'est-à-dire en cas d'échec du programme), il peut avoir une utilité commerciale pour l'entreprise qui l'a réalisé, en lui indiquant les impasses à éviter en matière de recherche.

(93) Cet accroissement global du savoir-faire se produira notamment dans les domaines des procédés de conception et de fabrication. Le DoD finance par exemple un grand programme relatif à l'utilisation des techniques de conception d'environnements synthétiques qui associent des systèmes de conception assistée par ordinateur (CAO)/publication assistée par ordinateur (PAO) avancés à la modélisation et à la simulation des produits, et qui auront pour effet de diminuer sensiblement la durée nécessaire au démarrage de la production d'un nouvel avion et les risques que cela comporte. Ces techniques sont également applicables aux programmes civils. De même, le savoir-faire relatif à l'application des technologies en matière de nouveaux matériaux composites aux programmes militaires tels que le V-22, F-22 et le B-2 a fourni les connaissances nécessaires au développement et à la construction des structures composites utilisées actuellement pour le B-777; autre exemple, le «Design Manufacturing and Producibility Simulation» (simulation de la conception/fabrication et de la productibilité), un système d'ingénierie mis au point par MDC dans le cadre de ses programmes militaires, a permis de réduire sensiblement la durée du cycle global de développement et a servi de modèle à la mise au point du MD-XX. Il convient de noter, à cet égard, que, dans sa réponse à la communication des griefs en application de l'article 18, Boeing a déclaré avoir utilisé pour des programmes militaires tels que le F-22, le V-22 et le RAH-66 du savoir-faire issu de ses programmes commerciaux, obtenu dans le domaine des applications informatiques et logicielles, des systèmes d'outillage, de construction et d'automation avancés, afin de fabriquer des produits électroniques. Malgré les affirmations de Boeing selon lesquelles le secteur commercial ne retire pas d'avantages importants du savoir-faire acquis grâce aux programmes militaires, ces exemples attestent cependant de l'existence d'une fertilisation croisée du know-how entre les deux secteurs.

v) La fusion envisagée renforcera considérablement les avantages tirés par Boeing du transfert de technologies militaires dans le secteur de l'aéronautique commerciale

(94) La plupart des technologies mises au point dans le secteur de la défense trouvent des applications dans le domaine de l'aéronautique commerciale. Le développement des activités de R& D militaire de Boeing concernera surtout les appareils militaires, et en particulier les avions de combat. Même si la technologie relative à ces derniers n'est pas intégralement transférable, en raison du recours à des systèmes plus compacts, les possibilités de transfert sont importantes. La liste suivante, fondée sur des estimations de Lockheed Martin, indique le pourcentage de systèmes ou de technologies qui entrent dans la fabrication des avions de combat et qui peuvent avoir des applications commerciales:

>TABLE>

(95) Il est vrai, comme le précisent Boeing et MDC, que les entreprises qui se voient allouer des fonds publics pour des travaux de R& D militaire sous-traitent souvent une bonne partie de ces travaux. Mais cela ne limite en rien la possibilité, pour un maître d'oeuvre comme Boeing ou MDC, de mettre à profit le savoir-faire et l'expertise technologique générés par ces programmes, puisque le maître d'oeuvre aura toujours accès aux moindres détails des travaux. Il est d'ailleurs difficile de savoir exactement dans quelle mesure les activités de R& D financées par les pouvoirs publics font l'objet d'une sous-traitance. Par exemple, MDC a déclaré que les matériaux composites sont généralement développés par des fournisseurs de matériaux et non par Boeing ou MDC. Toutefois, dans le cadre du programme de recherche technologique (Manufacturing Technology Program) du DoD, le développement de matériaux composites à faible coût a été confié à Boeing pour les fuselages et à MDC pour les ailes d'avions. Ce programme, d'un montant total de 1 768 millions de dollars des États-Unis, constitue le plus gros poste du budget que le DoD a consacré aux programmes de transfert de technologies en 1996.

(96) Outre sa position de leader dans le domaine des avions de combat, MDC fait aussi partie des principaux constructeurs d'avions de transport militaire. Or, il s'avère que l'intégralité des techniques mises au point dans ce secteur peuvent trouver des applications commerciales. MDC a d'ailleurs annoncé récemment sa décision de produire une version commerciale de son appareil de transport militaire C17. Dans ce contexte, il convient de rappeler l'exemple historique du Boeing 747, qui avait été conçu, à l'origine, pour concurrencer des appareils de transport militaire.

(97) En ce qui concerne les applications commerciales de la technologie militaire, Boeing a déclaré que, depuis 1993, conformément à l'accord bilatéral de 1992 entre la Communauté et les États-Unis d'Amérique sur le commerce des aéronefs civils de grande capacité, ses programmes militaires et autres programmes destinés au gouvernement américain ne lui avaient conféré aucun avantage identifiable pour la réalisation de ses programmes commerciaux. Or, à l'audition du 13 juin 1997, Boeing a reconnu qu'il existait une certaine analogie entre les applications de la recherche militaire et celles de la recherche commerciale. Boeing a soutenu que cette analogie bénéficiait à l'ensemble du secteur, et pas seulement à quelques constructeurs comme lui. Cela paraît toutefois d'autant moins probable que les contrats de recherche militaire sont soumis à des règles de sécurité et de confidentialité. La NASA, en particulier, a recours à des clauses instaurant des «droits exclusifs limités» (limited exclusive rights provisions), afin d'empêcher les partenaires privés avec qui elle passe des contrats d'accéder à certaines informations. Bon nombre des programmes relatifs à l'avion de transport civil à grande vitesse (HSCT), qui est censé succéder au Concorde, ne peuvent par exemple être divulgués au public pendant au moins cinq ans.

(98) Sur ce point, la Commission souligne que l'objet de la présente décision n'est pas d'interpréter la notion de «soutien indirect» visée à l'article 5 de l'accord susmentionné, mais de procéder à une analyse économique aux fins du règlement sur les concentrations. À cet égard, il n'est pas indispensable de savoir si, au cours des trois dernières années, Boeing a bénéficié d'une quelconque réduction de coûts pour l'un de ses programmes commerciaux actuels. Pour l'application de la procédure prévue par ce règlement, seul importe le fait que l'accroissement considérable des activités de R& D militaire de Boeing lui donnerait, à terme, un net avantage concurrentiel sur le seul concurrent encore en lice pour les avions commerciaux de grande capacité.

(99) La Commission en est d'autant plus convaincue que, aux États-Unis d'Amérique, la frontière entre programmes militaires et programmes civils est beaucoup moins nette que dans l'Union européenne, la politique des États-Unis d'Amérique consistant à maintenir des liens étroits entre les technologies militaire, spatiale et commerciale. Ainsi, le Conseil national des sciences et technologies (National Science and Technology Council) déclarait, en août 1995:

«La grande similitude technique qui existe, à la base, entre les produits et services aéronautiques militaires et ceux destinés à l'aviation civile doit être mise à profit pour accroître la productivité et l'efficience de nos activités de R& D. Cela suppose que le gouvernement et les constructeurs s'efforcent conjointement de définir des objectifs technologiques communs aux applications civiles et militaires. (. . .) Le ministère de la défense, la direction de l'Aviation fédérale (FAA) et la NASA doivent intensifier leurs efforts pour encourager l'examen, dès le début des programmes de développement technologique, des possibilités d'applications à double usage».

De même, le service de la recherche du Congrès déclarait dans un rapport de décembre 1995:

«Le ministère de la défense a mis l'accent sur le développement des technologies à double usage, à la fois pour élargir la capacité de production commerciale pouvant servir à la fabrication de produits militaires et pour permettre l'exploitation des technologies militaires à des fins civiles.»

Il existe de nombreux autres exemples de l'importance accordée par l'administration américaine aux technologies à double usage; s'il n'y avait aucune possibilité de transfert entre les applications militaires et civiles du secteur aéronautique, une telle politique serait dénuée de sens.

De fait, nombreux sont les cas de transferts directs de produits finis du militaire vers le commercial; ainsi:

- le B52 (pour l'aérodynamique) et le KC135 (pour les ailes, le cockpit et la conception du moteur) ont été mis à profit pour développer le B707, puis le B727, le B737 et le B757,

- le B777 a bénéficié des technologies sur l'intégration des systèmes mises au point pour le développement de l'AWACS,

- le MD11 a bénéficié, au niveau de la ligne d'assemblage, de la production du KC10.

Toutefois, c'est au niveau des technologies de base que les transferts d'applications militaires vers le civil donnent les résultats les plus importants, ce qui débouche sur d'importantes hausses de productivité et réductions de coûts.

(100) On peut objecter que les avantages apportés à Boeing par les travaux de R& D réalisés dans les domaines militaire, spatial et civil grâce à des fonds publics, ainsi que le renforcement de ces avantages après la fusion, devraient être comparés aux aides publiques dont pourra bénéficier dans l'avenir son seul concurrent, Airbus, pour le développement d'avions commerciaux. En ce qui concerne la R& D militaire et spatiale, il y a, comme on vient de le voir, et il continuera d'y avoir, à l'avantage de Boeing, un écart considérable entre les sommes consacrées à ces travaux aux États-Unis d'Amérique et en Europe. Quant à la R& D civile, le niveau de financement consenti par le gouvernement américain, et en particulier par la NASA, est largement supérieur au niveau de financement accordé en Europe pour des activités similaires. Ainsi, en Allemagne, le pays de l'un des principaux partenaires d'Airbus, le budget fédéral consacré à la R& D en aéronautique civile s'est élevé en 1995 à 142 millions de marks allemands (environ 90 millions de dollars des États-Unis). La même année, le budget de la NASA dans ce domaine atteignait 1,3 millions de dollars des États-Unis. En 1995 également, l'État fédéral allemand allouait 208 millions de marks allemands (quelque 130 millions de dollars des États-Unis) à la recherche en aviation générale, contre cependant 2,2 milliards de dollars des États-Unis attribués par l'administration fédérale américaine de l'aviation pour la recherche, l'ingénierie et le développement. De nombreuses déclarations de responsables du gouvernement américain, et en particulier de la NASA, soulignent également l'effort croissant qui est fait pour faciliter les applications commerciales de ces travaux, et cela exclusivement au profit de l'industrie américaine. Ce constat est valable aussi bien pour les avions subsoniques que pour le HSCT, qui bénéficie de programmes de R& D spécifiques, largement financés par les pouvoirs publics. Le tout, sans aucune obligation de remboursement.

En revanche, l'accord de 1992 entre la Communauté européenne et les États-Unis d'Amérique sur le commerce des aéronefs civils de grande capacité impose, entre autres, des limites et des conditions de remboursement précises pour ce qui est et restera sans doute, dans le domaine aéronautique, la forme de concours public la plus fréquente en Europe, à savoir l'octroi de prêts remboursés sous la forme de redevances, c'est-à-dire par prélèvement sur les ventes. Ces prêts ne peuvent dépasser un tiers des dépenses totales relatives au développement d'un avion civil de grande capacité et sont assortis d'intérêts et d'obligations de remboursement.

(101) Cette disproportion entre les niveaux de soutien public à la R& D existait déjà avant le projet de fusion, mais ses effets étaient atténués, du moins en partie, par le fait que les avantages découlant de la R& D financée par le gouvernement américain se répartissaient entre deux entreprises concurrentes et, dans le cas de MDC, ne concernaient d'ailleurs qu'un volet commercial limité. Après la fusion, l'ensemble des activités de R& D de Boeing et de MDC financées par les pouvoirs publics sera regroupé dans une seule entité qui sera, et de loin, le premier constructeur d'avions commerciaux au monde.

vi) Propriété intellectuelle

(102) Dans un secteur de haute technologie comme l'aéronautique commerciale, la propriété intellectuelle, tant sous forme de brevets que de savoir-faire non brevetés, est absolument déterminante pour la compétitivité des entreprises. La fusion du premier constructeur mondial d'avions commerciaux et du premier constructeur d'avions militaires entraînera la fusion de deux imposants portefeuilles de droits de propriété intellectuelle. Boeing possède plus de 500 brevets pouvant présenter un intérêt pour l'aéronautique commerciale et MDC en détiendrait, selon les estimations, environ 150 (17). Or, 86 des brevets de Boeing et 26 des brevets de MDC pourraient, à l'avenir, restreindre l'accès à d'importantes technologies, notamment dans les domaines suivants:

- les cellules d'avions, domaine où des efforts considérables ont été faits en matière de R& D pour produire des matériaux plus légers et plus résistants, qui permettent d'accroître le rayon d'action, la vitesse et la charge marchande des appareils, prolongent leur durée de vie et réduisent les frais de maintenance. Il apparaît que Boeing et MDC ont tous deux déposé des brevets afin de pouvoir exploiter en exclusivité certains de ces résultats,

- les matériaux composites, qui associent au moins deux matériaux différents, et qui améliorent considérablement les performances des cellules d'avion, en les allégeant, en les rendant particulièrement solides et rigides, en améliorant leur résistance à l'usure et en offrant plus de liberté dans la conception (voir, par exemple, les ailes B-2 de Boeing, entièrement fabriquées en matériaux composites),

- l'aérodynamique, domaine où des innovations récentes ont permis de réduire la consommation de carburant, ainsi que les nuisances sonores au décollage et à l'atterrissage, d'accroître le rayon d'action et la vitesse des avions et d'écourter les cycles de développement,

- les commandes de vol, qui font partie des domaines où les progrès techniques ont été les plus spectaculaires ces dernières années. Boeing et MDC y ont participé activement, notamment dans le cadre du programme de technologie subsonique avancée (Advanced Subsonic Technology Program) de la NASA, et Boeing a déjà fait breveter des technologies dans le domaine des commandes optoélectroniques,

- l'électricité et l'électronique, qui sont essentielles à la sécurité et à la maîtrise des coûts et sur lesquelles Boeing et MDC ont tous deux effectué d'importants travaux de R& D, notamment dans le cadre de contrats passés avec des agences fédérales.

(103) En résumé, la Commission considère que la fusion des savoir-faire et des portefeuilles de brevets de Boeing et de MDC contribuera à renforcer la position dominante de Boeing sur le marché des avions commerciaux de grande capacité.

c) Pouvoir de négociation vis-à-vis des fournisseurs

(104) Les constructeurs d'avions dépendent de nombreuses entreprises tierces pour la fourniture de différents biens et services, allant des matériaux et composants aux systèmes, en passant par les pièces de cellules et de moteurs. Souvent, ces fournisseurs participent aussi à la conception et au développement de l'avion. Les gros fournisseurs, en particulier les fabricants de cellules, passent parfois avec les constructeurs d'avions des accords de partage des recettes et des risques.

i) Le projet de fusion augmentera considérablement la puissance d'achat de Boeing

(105) Selon les estimations, un constructeur d'avions s'approvisionne chez des tiers pour au moins 50 % de ses activités. En 1996, le chiffre d'affaires de Boeing dans le domaine aéronautique a atteint quelque [. . .] et celui de MDC environ 11 milliards de dollars des États-Unis. Il est évident que la fusion de ces activités aéronautiques renforcerait considérablement la puissance d'achat de Boeing vis-à-vis de ses fournisseurs. Boeing a fourni une liste des fournisseurs ayant réalisé au moins 10 millions de dollars des États-Unis de chiffre d'affaires avec Boeing Commercial Airplane Group, en donnant pour chacun une estimation du pourcentage de ses ventes à Boeing, MDC et Airbus, par rapport à son chiffre d'affaires total. Sur les [. . .] fournisseurs pour lesquels Boeing a pu fournir une estimation, [. . .] sociétés approvisionnaient à la fois Boeing et MDC, et [. . .] d'entre elles réalisaient avec ces deux constructeurs au moins 50 % de leur chiffre d'affaires total, ou de leur chiffre d'affaires pour l'ensemble du secteur aérospatial, voire, dans certains cas, pour la branche aéronautique commerciale. Mais le nombre de fournisseurs réalisant au moins 50 % de leurs ventes avec Boeing et MDC doit être, en réalité, nettement supérieur, puisque Boeing n'a pas pu intégrer dans ses calculs toutes les ventes relevant du domaine militaire et spatial. Par conséquent, seule une partie des livraisons destinées à l'importante activité militaire de MDC a pu être prise en compte. Dans ce contexte, il convient aussi de noter que la plupart des fournisseurs du secteur aérospatial interrogés par la Commission ont indiqué que la perte de la clientèle de Boeing/MDC leur serait très préjudiciable.

ii) Le renforcement de la puissance d'achat de Boeing pourrait affaiblir considérablement la position concurrentielle d'Airbus

(106) La concentration aurait notamment pour effet de renforcer la puissance d'achat de Boeing vis-à-vis des nombreux fournisseurs de pièces d'appareils civils et militaires. En venant consolider la position déjà confortable de Boeing sur le marché des avions commerciaux, la puissance d'achat de MDC, notamment dans le secteur militaire, ne ferait qu'accroître la dépendance des fournisseurs à l'égard de Boeing et pourrait les contraindre à donner à Boeing la priorité sur Airbus. Boeing pourrait exercer des pressions sur de nombreux fournisseurs afin de les dissuader de travailler avec Airbus, désormais son seul concurrent, ou de les amener à lui accorder systématiquement la préférence sur ce dernier.

(107) Il semblerait que la puissance d'achat actuelle de Boeing ait influé sur la capacité d'Airbus à s'associer à des fournisseurs dans le cadre d'accords de partage des risques. Ainsi, il est de notoriété publique que, au début de l'année, la société Northrop Grumman a refusé de participer au développement du A3XX sur la base d'un partage des risques. Après ce refus, cette même société a annoncé que Boeing l'avait choisie pour un contrat de sous-traitance de 262 millions de dollars des États-Unis portant sur le perfectionnement du radar AWACS. Récemment, Boeing a encore passé avec Northrop Grumman un contrat de 400 millions de dollars des États-Unis pour la fourniture de portes passager et cargo destinées aux Boeing 737, 757 et 767. À ce propos, il convient aussi de noter que les livraisons à Boeing représentent, et de loin, la plus grande partie des activités de Northrop Grumman dans le domaine de l'aéronautique commerciale. Après la fusion, ces livraisons seraient regroupées avec celles destinées à la branche militaire de MDC, qui sont encore supérieures en valeur absolue.

(108) De manière générale, il est clair que l'accroissement de la puissance d'achat de Boeing pourrait affaiblir très sensiblement la position concurrentielle d'Airbus et, par voie de conséquence, renforcer celle de Boeing.

d) Opérations de compensation et ventes groupées

(109) Les opérations de compensation sont un mécanisme dans le cadre duquel une entreprise fournit à un pays, en contrepartie de l'achat de son produit, des technologies ou des installations de production. On parle de compensation directe lorsque la production ou la technologie est liée au produit vendu. Dans la compensation indirecte, la contrepartie est sans rapport avec le produit, mais elle relève généralement d'un domaine technologique connexe.

(110) Les accords de compensation sont moins fréquents dans les ventes d'avions commerciaux que dans les ventes d'avions militaires, où ils constituent la règle. Pour les appareils commerciaux, en outre, les compensations sont limitées par un accord international. Elles jouent néanmoins un rôle non négligeable dans ce secteur, surtout dans les pays possédant une compagnie aérienne nationale. Deux cas récents peuvent à cet égard être cités en exemple. En 1996, Malaysian Airlines a commandé 25 avions à Boeing dans le cadre d'un programme de compensation destiné à aider la Malaysia à développer ses propres activités dans les domaines de l'avionique et des matériaux composites; en Afrique du Sud, le ministère du commerce et de l'industrie aurait, selon la presse, imposé récemment une compensation de 50 % sur toutes les commandes publiques à long terme. Cette nouvelle politique s'appliquera aussi à South African Airways, qui a dû suspendre ses négociations concernant l'achat de sept Boeing neufs jusqu'à l'adoption formelle des nouvelles règles de compensation. La société Boeing a elle-même déclaré qu'elle avait, dans le passé, conclu plusieurs accords de compensation.

(111) De manière plus générale, il apparaît que la possibilité de conclure des accords de compensation confère déjà un net avantage concurrentiel aux constructeurs américains du secteur de l'aérospatiale civile. Dans un rapport de l'Union des constructeurs (Manufacturers Alliance) de février 1997 sur la compensation dans les ventes de matériel militaire et civil à l'étranger, on peut lire la déclaration suivante du directeur de l'Office de l'aérospatiale (Office of Aerospace) du ministère américain du commerce:

«L'administration constate que, comme pour les contrats de défense, le fait de pouvoir plus facilement offrir une compensation donne aux constructeurs américains un net avantage sur la concurrence. Ainsi, il est difficile pour Airbus, qui associe quatre gouvernements différents, de s'approvisionner en composants dans des pays tiers, puisque le travail est censé être partagé entre les quatre pays. Grâce à leur plus grande souplesse dans ce domaine, Boeing et McDonnell Douglas ont eu plus de succès, par exemple, sur les marchés de l'Asie du Sud-Est.»

(112) Boeing bénéficie déjà d'une capacité de compensation importante, compte tenu de l'ampleur de ses activités d'aéronautique commerciale. L'ajout des activités militaires de MDC renforcerait nettement cette capacité, ce qui donnerait encore à Boeing un avantage supplémentaire sur la concurrence. De même, la concentration multiplierait les possibilités de ventes groupées dans certains pays, en permettant à Boeing de commercialiser ensemble ses appareils commerciaux et les appareils militaires de MDC.

VIII. CONCLUSION

(113) Pour les raisons qui viennent d'être énoncées, la Commission est parvenue à la conclusion que la concentration envisagée entraînerait le renforcement d'une position dominante ayant comme conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le marché commun, au sens de l'article 2 paragraphe 3 du règlement sur les concentrations.

IX. REMÈDES AUX PROBLÈMES DE CONCURRENCE

A. ENGAGEMENTS PRIS PAR BOEING

(114) Boeing a pris vis-à-vis de la Commission les engagements suivants, en vue de remédier aux problèmes soulevés au regard de la concurrence.

(115)

Proposition de Boeing quant à son influence sur la flotte DAC

1. Du point de vue structurel, Boeing propose la solution suivante: Boeing s'engage pour une période de dix ans à laisser à DAC son statut d'entité juridique distincte et à présenter à la Commission un rapport, certifié par un auditeur indépendant, faisant état des performances et des résultats commerciaux obtenus par DAC dans le cadre de la poursuite de ses activités dans le secteur civil. Ce rapport sera également rendu public. Dès lors que ces conditions seront remplies, Boeing aura le droit de gérer comme il l'entend l'entité juridique distincte et de prendre toutes les décisions qu'il jugera appropriées en matière commerciale. La durée de la période susmentionnée pourra être réduite, en accord avec la Commission, dans le cas où Boeing ne conserverait pas deux au moins des programmes de construction d'avions DAC.

2. Boeing s'engage à offrir, pour les appareils DAC, un service de soutien à la clientèle d'une qualité aussi élevée que pour ses propres appareils et recouvrant la totalité des services habituels assurés régulièrement par Boeing pour ses propres avions [à savoir actuellement un réseau mondial d'agents locaux, un service de liaison technique fonctionnant 24 heures sur 24, une assistance pour tout ce qui touche aux pièces détachées, y compris leur expédition le jour suivant, une assistance au sol (AOG support) de qualité, une maintenance et un entraînement en vol de niveau mondial]. De même, Boeing appliquera ses propres directives et procédures en ce qui concerne la mise à disposition et le prix des pièces détachées et assurera un soutien technique approprié.

3. Boeing promet de ne pas refuser ou menacer de refuser d'assurer son service de soutien pour les appareils DAC (y compris les pièces détachées) et de ne pas pénaliser ou menacer de pénaliser un transporteur eu égard aux services de soutien afférents à des appareils DAC (notamment par une augmentation des prix ou un allongement de la durée de livraison des pièces), au motif que ce transporteur envisage d'acheter des appareils d'un autre avionneur. Boeing s'engage à continuer à rendre publiques les informations (y compris sur les prix) actuellement disponibles dans le catalogue des pièces détachées de DAC.

4. Boeing ne mettra pas à profit son accès privilégié à la flotte existante d'appareils DAC en service pour multiplier les possibilités de convaincre les transporteurs qui exploitent actuellement des appareils DAC d'acheter des Boeing. Ainsi, Boeing s'abstiendra de proposer, en matière de fourniture de pièces ou de services de soutien afférents au produit, des conditions plus avantageuses à certains exploitants d'appareils DAC par rapport à d'autres, de manière à les persuader d'acheter des avions Boeing.

(116)

Proposition de Boeing sur les accords exclusifs

Boeing ne signera aucun nouvel accord exclusif d'ici le 1er août 2007, sauf pour les campagnes de vente dans le cadre desquelles un autre avionneur a proposé de conclure un accord d'exclusivité.

Boeing ne fera pas jouer les clauses d'exclusivité prévues par les accords conclus avec American, Delta et Continental et annoncés les 21 novembre 1996, 20 mars 1997 et 10 juin 1997 respectivement.

Aux fins de cet engagement, il faut entendre par accord exclusif l'engagement contractuel du client de ne pas acheter ou louer d'avions à réaction commerciaux d'un autre constructeur, ou au sein d'une gamme spécifique de poids brut maximal au décollage, ou de ne pas acquérir un certain pourcentage d'avions auprès d'un constructeur.

(117)

Proposition de Boeing relative aux brevets

Si un constructeur d'avions commerciaux lui en fait la demande, Boeing accordera à ce constructeur une licence non exclusive, soumise au paiement d'une redevance équitable, sur tout «brevet financé par le gouvernement» (government-funded patent), pouvant être utilisé pour la construction ou la vente d'avions à réaction commerciaux. Boeing lui concédera également une licence sur le savoir-faire nécessaire à l'exploitation complète, efficiente et rapide dudit brevet.

Par «brevet financé par le gouvernement», il faut entendre un brevet portant sur une invention que Boeing a mise au point ou sur laquelle il a procédé à la première application industrielle dans le cadre d'au moins un de ses contrats conclus avec le gouvernement américain, et pour lequel il peut juridiquement accorder une licence.

Boeing concédera également une licence non exclusive, soumise au paiement d'une redevance équitable, à tout brevet de blocage, y compris au savoir-faire connexe tel que défini au premier alinéa, à tout autre constructeur d'avions qui s'engage, dans les mêmes conditions, à concéder réciproquement des licences sur ses brevets de blocage.

Dans le cas où Boeing et l'autre constructeur d'avions commerciaux ne parviennent pas à s'entendre sur le montant de la redevance ou sur la question de savoir si le brevet est un «brevet financé par le gouvernement» pouvant être utilisé dans la construction ou la vente d'avions à réaction commerciaux, ou s'il s'agit d'un brevet de blocage, ce désaccord sera soumis à une instance d'arbitrage indépendante selon des modalités dont Boeing et l'autre avionneur conviendront d'un commun accord.

Pendant dix ans, ou durant le laps de temps plus court accepté par la Commission pour la fourniture d'informations similaires en application d'accords gouvernementaux bilatéraux, ou encore si les conditions de concurrence se trouvent sensiblement modifiées, notamment en ce qui concerne la part de marché et la ligne de produits, Boeing présentera à la Commission un rapport annuel sur ses brevets non encore expirés portant sur une invention mise au point par lui, ou ayant fait l'objet de sa part d'une première application industrielle dans le cadre d'au moins un de ses contrats conclus avec le gouvernement américain.

(118)

Proposition de Boeing en matière de transparence des projets de R& D

Afin d'accroître la transparence des projets de R& D menés par le gouvernement américain dans le secteur aéronautique et auxquels Boeing participe, Boeing présentera à la Commission un rapport annuel pendant dix ans, ou durant le laps de temps plus court accepté par la Commission pour la fourniture d'informations similaires en application d'accords gouvernementaux bilatéraux, ou encore si les conditions de concurrence se trouvent sensiblement modifiées en ce qui concerne la part de marché et la ligne de produits; pour les projets de R& D en aéronautique non classifiés (c'est-à-dire des projets qui ne relèvent pas des lois et réglementations du gouvernement américain sur la sûreté nationale), ce rapport comportera les informations suivantes:

- nom du projet,

- description du projet suffisante pour comprendre la nature de la R& D en cours,

- autorité passant contrat pour le projet,

- description des modalités de la participation de Boeing au projet,

- montant du contrat de Boeing,

- description de l'application des résultats de l'année que Boeing a intégrés ou envisage d'intégrer dans les avions commerciaux de grande capacité. Dans les rapports suivants, Boeing informera la Commission des résultats des projets de R& D recensés dans les rapports précédents, que Boeing a intégrés ou envisage d'intégrer dans les avions commerciaux de grande capacité. Sur demande de la Commission concernant un projet de R& D répertorié dans un rapport précédent, Boeing indiquera s'il étudie la faisabilité d'une application des résultats dans des avions commerciaux de grande capacité,

- description des brevets obtenus par Boeing cette année-là pour une invention mise au point par lui ou ayant fait l'objet de sa part d'une première application industrielle dans le cadre de son contrat.

Sur demande de la Commission, Boeing lui fournira une autre version du rapport, qui sera conforme à l'ensemble des lois et réglementations américaines applicables pour ce qui est de la divulgation d'informations que la Commission pourra transmettre à d'autres constructeurs d'avions.

(119)

Proposition de Boeing concernant ses fournisseurs

Boeing prend les engagements suivants en vue de dissiper les craintes exprimées par la Commission qu'il n'utilise les relations avec ses fournisseurs pour se livrer à des pratiques discriminatoires à l'encontre d'autres constructeurs d'avions commerciaux de grande capacité:

1) Boeing n'exercera pas ou ne tentera pas d'exercer une influence excessive ou injustifiée sur ses fournisseurs, directement ou indirectement, en promettant d'accroître les commandes ou les activités de R& D sous-traitées, ou en menaçant de les réduire, ou en influençant de toute autre manière les rapports avec ses propres fournisseurs, d'une manière qui obligerait ces derniers à:

- refuser de conclure ou de chercher à conclure des contrats de livraison avec d'autres constructeurs d'avions commerciaux de grande capacité;

- refuser d'accroître leurs livraisons à d'autres constructeurs d'avions commerciaux de grande capacité;

- refuser de conclure des contrats de sous-traitance en R& D avec d'autres constructeurs d'avions commerciaux de grande capacité,

- refuser de conclure des partenariats portant sur un partage de risques avec d'autres constructeurs d'avions commerciaux de grande capacité,

- retarder les activités de R& D menées pour d'autres constructeurs d'avions commerciaux de grande capacité ou les commandes qui leur sont destinées,

- réserver, sans justification économique valable, un traitement de faveur à Boeing en ce qui concerne le temps d'exécution des commandes ou la priorité accordée aux activités sous-traitées par Boeing.

2) Boeing conserve le droit de choisir ses fournisseurs, de faire exécuter ses contrats eu égard au prix, à la gestion de la qualité et à la livraison et de protéger ses informations confidentielles.

B. APPRÉCIATION

(120) Les problèmes de concurrence sont de deux ordres:

- le potentiel concurrentiel supplémentaire que représente MDC dans le secteur des avions commerciaux (effets horizontaux),

- l'accroissement important des activités de Boeing dans le domaine de la défense et de l'espace (effets globaux).

(121) Même si DAC, la branche «aviation commerciale» de MDC, n'a plus d'influence réelle sur le marché, l'opération de concentration aurait néanmoins pour effet de renforcer la position dominante de Boeing dans le secteur des avions commerciaux de grande capacité. À cet égard, les engagements pris par Boeing auront les conséquences suivantes:

- le renforcement des moyens dont disposera Boeing pour conclure des accords exclusifs deviendra sans objet dans un avenir prévisible, étant donné que Boeing ne sera pas autorisé à conclure de tels accords pendant dix ans. De plus, la renonciation aux droits d'exclusivité prévus dans les trois accords exclusifs existants mettra fin au cloisonnement du marché résultant de cette exclusivité,

- pour ce qui est des achats de nouveaux avions, les engagements pris par Boeing de ne pas utiliser le moyen de pression que constituent les services de soutien fournis pour la flotte DAC réduisent d'autant les avantages concurrentiels que représente l'accès de Boeing à la flotte en exploitation de DAC,

- l'exploitation de DAC en tant qu'entité juridique distincte, qui sera tenue chaque année de communiquer publiquement des informations certifiées par un auditeur indépendant, diminue le risque que Boeing puisse, en maintenant les lignes de production de DAC, utiliser les avions DAC comme avions «au rabais».

(122) En ce qui concerne le renforcement de la position dominante de Boeing consécutif à l'accroissement considérable de ses activités dans le domaine de la défense et de l'espace, les engagements pris par l'avionneur ont les conséquences suivantes:

- l'engagement pris sur les brevets autorise les autres avionneurs à accéder à la propriété intellectuelle obtenue par la R& D financée sur des fonds publics et répond, en ce qui concerne les brevets de blocage également, aux préoccupations générales soulevées par l'accroissement du portefeuille de brevets détenu par Boeing,

- l'engagement relatif à la transparence contribue à une discipline accrue dans le secteur de la R& D financée sur des fonds publics et à une plus grande transparence des retombées, sur le secteur civil, des activités de R& D menées dans le domaine militaire et spatial,

- les engagements pris en ce qui concerne les fournisseurs diminuent le risque que Boeing n'abuse de son pouvoir de négociation accru pour entraver l'activité de ses concurrents, par le biais notamment de contrats d'exclusivité conclus avec ces fournisseurs.

(123) En l'espèce, la Commission a pris en considération deux aspects précis de la présente affaire. Premièrement, une fois la concentration réalisée, ne subsisteront sur le marché des avions commerciaux de grande capacité que deux opérateurs, Boeing et Airbus. En l'absence de tout intérêt de la part d'Airbus pour acquérir DAC, mais aussi en l'absence de tout intérêt manifesté par d'autres sociétés pour entrer sur ce marché par l'acquisition de DAC, il est très peu probable que DAC puisse trouver un acquéreur. Par conséquent, un engage ment sur une cession n'aurait pas résolu les problèmes de concurrence consécutifs aux effets horizontaux. Deuxièmement, les retombées des activités menées dans les domaines militaire et spatial sur le secteur de l'aviation commerciale sont, par leur nature même, difficiles à quantifier, voire à recenser entièrement. Il s'agit d'une question qu'il est difficile de traiter de manière exhaustive dans le cadre de la présente procédure engagée sur la base du règlement sur les concentrations.

En outre, conformément à l'accord entre le gouvernement des États-Unis d'Amérique et la Commission des Communautés européennes concernant l'application de leur droit de la concurrence, la Commission a également pris en considération les intérêts importants des États-Unis d'Amérique, dont elle a été informée par le ministère américain de la défense et le ministère américain de la justice, au nom du gouvernement américain (voir considérant 12).

La série d'engagements présentés par Boeing comporte des éléments à la fois structurels et comportementaux. Dans les circonstances particulières exposées ci-dessus, et vu notamment l'absence manifeste de tout acheteur potentiel pour DAC, la Commission accepte cette combinaison d'engagements, qui doivent être considérés comme un tout, et estime, à cet égard, qu'ils répondent de manière adéquate aux problèmes de concurrence mis en évidence dans la présente décision et apaisent la crainte que Boeing renforce sa position dominante sur le marché des avions commerciaux de grande capacité. En application de l'article 8 paragraphe 2 deuxième alinéa du règlement sur les concentrations, la Commission contrôlera que Boeing respecte intégralement les engagements pris à son égard. Boeing autorisera en particulier la Commission, ou tout expert nommé par elle, à accéder aux données internes présentant un intérêt pour la mise en application de ce contrôle et, si la Commission le lui demande, prendra les dispositions nécessaires pour justifier le respect de ses engagements.

X. CONCLUSION FINALE

(124) En conséquence, la Commission conclut que, sous réserve du respect intégral des engagements pris par Boeing, tels qu'ils sont exposés aux considérants 114 à 119, la concentration envisagée ne crée ni ne renforce une position dominante ayant comme conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le marché commun ou une partie substantielle de celui-ci,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Sous réserve que Boeing respecte intégralement les conditions et obligations définies dans les engagements exposés aux considérants 114 à 119 de la présente décision, et qu'il se soumette au contrôle du respect de ces engagements, tel que défini au considérant 123, la concentration par laquelle The Boeing Company acquiert le contrôle de l'ensemble de McDonnell Douglas Corporation est déclarée compatible avec le marché commun et avec le fonctionnement de l'accord EEE.

Article 2

The Boeing Company

7755 East Marginal Way South

Seattle, WA 98108

États-Unis d'Amérique

est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 30 juillet 1997.

Par la Commission

Karel VAN MIERT

Membre de la Commission

(1) JO L 395 du 30. 12. 1989, p. 1.

JO L 257 du 21. 9. 1990, p. 13 (rectificatif).

(2) JO L 95 du 27. 4. 1995, p. 47.

(3) JO C 372 du 9. 12. 1997.

(4) Dans le texte de la présente décision destiné à la publication, certaines informations ont été omises, conformément à l'article 17 paragraphe 2 du règlement (CEE) n° 4064/89 concernant la non-divulgation des secrets d'affaires.

(5) Source: Ministère britannique du commerce et de l'industrie.

(6) JO L 334 du 5. 12. 1991, p. 42.

(7) Les prévisions du rapport Boeing portent sur l'Europe continentale, Turquie comprise, à l'exclusion des États de l'ancienne Union soviétique.

(8) Recueil 1983, p. 3461.

(9) Y compris par Boeing (1997 Current Market Outlook).

(10) Les accords concernant Delta et Continental ont été annoncés après la concentration, celui concernant American quelques semaines seulement avant la concentration.

(11) Source: Rapports annuels de Boeing et de MDC pour 1996.

(12) Source: Rapports annuels de Boeing et de MDC pour 1996.

(13) Source: Lehman Brothers, 22 avril 1996.

(14) Source: Lehman Brothers, 22 avril 1996.

(15) Source: Washington Post, 5 avril 1997.

(16) Source: Lehman Brothers, 22 avril 1996.

(17) Source: Informations communiquées à la Commission par Airbus.

ANNEXE I

IV/M.877 - BOEING/MDC Avions à réaction commerciaux de grande capacité Évolution en valeur des parts de marché (sur la base des carnets de commandes) - 1987-1996 - Au niveau mondial

>TABLE>

>TABLE>

>TABLE>

EMPLACEMENT TABLE>

ANNEXE II

Fuselage étroit et fuselage large - Évolution en valeur (au niveau mondial)

>PICTURE>

ANNEXE III

Fuselage étroit - Évolution en valeur (au niveau mondial)

>PICTURE>

ANNEXE IV

Fuselage large - Évolution en valeur (au niveau mondial)

>PICTURE>

ANNEXE V

IV/M.877 - BOEING/MDC Avions à réaction commerciaux de grande capacité Évolution en valeur des parts de marché (sur la base des carnets de commandes) - 1987-1996 - EEE

>TABLE>

>TABLE>

>TABLE>

>TABLE>

ANNEXE VI

Fuselage étroit et fuselage large - Évolution en valeur (EEE)

>PICTURE>

ANNEXE VII

Fuselage étroit - Évolution en valeur (EEE)

>PICTURE>

ANNEXE VIII

Fuselage étroit - Évolution en valeur (EEE)

>PICTURE>

Top