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Document 52011IE0805

Avis du Comité économique et social européen sur les «Machines agricoles et équipements de construction et de manutention: comment sortir de la crise ?» (avis d’initiative)

JO C 218 du 23.7.2011, p. 19–24 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

23.7.2011   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 218/19


Avis du Comité économique et social européen sur les «Machines agricoles et équipements de construction et de manutention: comment sortir de la crise ?» (avis d’initiative)

2011/C 218/04

Rapporteur: M. RANOCCHIARI

Corapporteur: M. PESCI

Le 15 juillet 2010, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l’article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d’élaborer un avis d’initiative sur les:

«Machines agricoles et équipements de construction et de manutention: comment sortir de la crise?»

La commission consultative des mutations industrielles, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 4 avril 2011.

Lors de sa 471e session plénière des 4 et 5 mai 2011 (séance du 4 mai 2011), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 151 voix pour, 3 voix contre et 8 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Les industries européennes des équipements de construction et des machines agricoles ont été frappées de plein fouet par la crise, au cours d’une période déjà marquée par un changement important de la demande mondiale. Néanmoins, le secteur appartient à un domaine d’activité de pointe très compétitif.

Il convient toutefois, pour assurer la pérennité et la compétitivité du secteur et éviter qu’il ne présente à long terme une surcapacité de production, de prendre au niveau de l’UE un certain nombre de mesures nécessaires, telles que:

un cadre juridique qui ne bride pas la capacité des constructeurs à innover et à concevoir des équipements répondant aux besoins des clients;

des conditions équitables au sein de l’Europe, grâce à une surveillance effective du marché. Il convient que les organes de surveillance du marché et les autorités douanières fassent effectivement appliquer le règlement no 765/2008 et durcissent les contrôles sur le marché européen;

une législation sur les produits et une politique commerciale qui assurent un accès libre aux marchés mondiaux;

une législation européenne qui tienne compte de la baisse relative du rôle des marchés européens. En effet, le centre de gravité du marché mondial se déplace de manière croissante vers l’Amérique du Sud et l’Asie; il convient donc d’envisager toutes les mesures nécessaires pour maintenir les usines des constructeurs européens dans l’UE, notamment une réduction des contraintes bureaucratiques et un soutien aux mesures volontaires prises par le secteur;

une harmonisation – à l’échelle européenne et mondiale – des exigences en matière de sécurité routière et de protection de l’environnement;

une amélioration des conditions de travail et des mesures d’application dans l’ensemble de l’UE afin de prévenir d’éventuels problèmes de sureffectifs et d’encourager le développement de nouveaux produits et d’idées novatrices sur l’organisation du travail, à partir des connaissances de toutes les parties prenantes;

un programme de financements et de mesures incitatives pour soutenir la compétitivité des PME.

1.2   Suite à l’audition qui s’est tenue le 11 novembre 2010 à Bologne à l’occasion de la manifestation EIMA International (Exposition internationale de machines pour l’agriculture) et a rassemblé de nombreuses parties prenantes, des recommandations complémentaires et plus détaillées sont formulées dans les chapitres suivants.

2.   Contexte de l’avis

2.1   L’industrie des machines agricoles et des équipements de construction fournit des solutions techniques pour répondre efficacement à des besoins élémentaires de l’humanité, tels que nourrir la population mondiale en augmentation, pourvoir aux logements et garantir l’infrastructure nécessaire.

2.2   En raison du coût élevé des terres en Europe, les secteurs européens de l’agriculture et de la construction font face à une demande de solutions hautement efficaces et novatrices, ce qui en fait des leaders mondiaux en matière de technologie.

2.3   Alors que la demande stagne en Europe, les marchés d’Asie, d’Amérique latine, d’Afrique et de la zone CEI sont en pleine croissance et continueront à croître rapidement. D’autres acteurs ont toutefois émergé au niveau mondial et deviennent compétitifs, y compris en dehors de leurs marchés nationaux.

2.4   La crise financière mondiale a considérablement touché les deux secteurs. L’éclatement de la bulle immobilière a conduit à une récession importante du secteur des équipements de construction, au deuxième semestre 2008. Il s’en est suivi une compression drastique des investissements dans le secteur de la construction, dont le chiffre d’affaires a chuté de 42 % en 2009. Cette réduction s’explique en grande partie par le manque de possibilités de financement pour les clients et la diminution des activités de construction.

2.5   Concernant le secteur des machines agricoles, les effets de la crise s’y sont fait ressentir plus tardivement. Toutefois, s’il a connu une baisse moins prononcée en 2009 (– 22 %), il n’a pas connu de reprise en 2010, contrairement à d’autres secteurs d’activité. Selon les estimations, la baisse du chiffre d’affaires est de 9 % pour l’ensemble de 2010. Là encore, le principal facteur a été le manque de possibilités de financement pour les clients, combiné à l’incertitude.

2.6   Nous assistons à un infléchissement croissant de la demande de produits: alors que les marchés extra-européens, soumis à des obligations légales beaucoup moins rigoureuses, sont en croissance, la demande de produits de l’UE, qui répondent à des normes environnementales et de sécurité toujours plus contraignantes, enregistre une baisse. Cela tend à complexifier davantage la gamme des produits disponibles, déjà complexe, et conduit à un déplacement des sites de production, les produits destinés à des marchés hors UE étant désormais produits plus près de l’origine de la demande, ce qui cause des pertes d’emplois dans l’Union.

3.   Machines agricoles et équipements de construction: importance stratégique du secteur, défis à venir, structure du marché

3.1   Des produits en quantité réduite, mais d’une grande diversité – une dépendance forte envers les fournisseurs

Les deux secteurs présentent de nombreuses similitudes, concernant la taille de leurs constructeurs et l’étendue de leur production.

De grandes entreprises multinationales produisent de vastes gammes de produits, correspondant à tous les types d’engins les plus largement utilisés, tels que les tracteurs agricoles, les excavatrices ou les chargeuses-pelleteuses.

Il existe en même temps des constructeurs de toutes tailles, depuis des entreprises régionales de taille appréciable jusqu’à des PME, qui produisent les types d’équipements les plus courants, mais parviennent à survivre en fournissant le marché en produits de niche hautement spécialisés.

Le degré de spécialisation et la variété des produits fournis sur le marché sont souvent disproportionnés par rapport à la taille réelle du fabricant. Il est relativement fréquent de rencontrer des fabricants qui présentent jusqu’à 200 modèles différents dans leur catalogue, avec des équipements conçus pour des tâches très spécifiques, dont ils vendent moins de 1 000 unités par an. De nombreux autres constructeurs parviennent à survivre en vendant des séries de moins de 100 unités par an pour chaque modèle.

3.2   Emploi et production

3.2.1   Le marché des machines agricoles reflète étroitement les tendances du secteur de l’agriculture.

Sans les derniers modèles de machines, il n’y aurait pas de secteur agricole moderne, efficace et compétitif. Ce sont aujourd’hui plus de 10 millions de personnes qui travaillent dans l’agriculture. Si le nombre de travailleurs du secteur est globalement en baisse, il est encore possible de percevoir des différences majeures entre les pays de l’UE à 15 et les «nouveaux» États membres, qui ont intégré l’Union à partir de 2004.

En effet, dans l’UE à 15, «seulement» 4,0 % des travailleurs sont employés dans le secteur agricole, alors que cette proportion s’élève à 13,4 % de l’ensemble de la main-d’œuvre dans les 12 nouveaux États membres.

Pour cette raison, le Comité est d’avis qu’il faut une PAC forte, non seulement pour les agriculteurs, mais aussi pour l’industrie, en lui permettant de poursuivre ses investissements dans la R&D tout en répondant aux contraintes réglementaires et à la demande des acheteurs.

Dans le secteur des machines agricoles, quelque 4 500 fabricants génèrent un chiffre d’affaires d’environ 28 milliards d’euros (chiffre de 2008). Le secteur représente 135 000 travailleurs, auxquels il faut ajouter 125 000 personnes qui travaillent dans la distribution et la maintenance.

Les deux tiers de la production de machines dans l’UE à 27 se concentrent en Allemagne, Italie, France, Espagne et Royaume-Uni, tandis que l’ensemble des 12 «nouveaux» membres ne représente que 7 % de la production.

3.2.2   Le secteur de la construction emploie 7,1 % de la population active de l’UE.

La production d’équipements de construction suit le même modèle que les machines agricoles: l’Italie, l’Allemagne, la France, l’Espagne et le Royaume-Uni assurent près des trois quarts de l’ensemble de la production européenne. En tout, cela représente environ 1 200 sociétés en Europe, avec un chiffre d’affaire total de 31 milliards d’euros en 2008, qui a chuté à 18 milliards en 2009, soit une baisse de 42 %.

Le secteur employait alors directement 160 000 personnes. Mais l’on estime que 450 000 emplois supplémentaires dépendaient indirectement du secteur, dans la chaîne de production et le réseau de distribution et de maintenance. En 2010, les estimations du secteur font état d’une baisse de 35 % pour les emplois directs et de 20 % pour les emplois indirects.

Il y a toutefois un manque évident de personnel jeune et qualifié. Une enquête sur la main-d’œuvre, réalisée par Industries technologiques de Finlande (Technology Industries of Finland, association de PME), montre qu’il est devenu plus difficile de recruter du personnel qualifié. Cette pénurie concerne des professions très recherchées depuis plus de dix ans: fondeurs, transformateurs de métaux, mécaniciens et ingénieurs.

3.3   Dépendance envers les fournisseurs de composants et de moteurs

Les constructeurs européens des deux secteurs ont toujours dominé le marché mondial en matière de technologie de pointe et de qualité des équipements proposés. Dans les secteurs considérés, les technologies avancées doivent être à la pointe du progrès, depuis les fonctions hautement automatisées ou les systèmes de GPS haute résolution destinés à l’agriculture de précision, jusqu’aux transmissions à variation continue et aux composants électroniques.

D’autre part, la nécessité d’opérer dans des conditions extrêmes (poussière, boue, glace, chaleur ou froid extrêmes) implique qu’on ne peut pas utiliser de composants standards, qui ne répondent pas aux exigences requises et ne permettent pas d’atteindre les niveaux de performance spécifiques attendus.

Il y a une inquiétude croissante quant à l’éventualité de connaître à l’avenir une pénurie de partenaires européens indispensables pour la fourniture de composants, capables d’assurer grâce à leur travail commun le maintien de la position dominante de l’Europe en matière de technologie.

Seules les grandes entreprises multinationales disposent de structures permettant la production de moteurs, qui sont les composants clés pour le développement de produits et leur conformité à la législation.

Le nombre de motoristes indépendants est en baisse, et leur position sur le marché est marginale; pour résoudre ce problème, la majorité des équipementiers doit souvent se résoudre à dépendre de fournisseurs de moteurs qui sont aux mains de leurs concurrents.

3.4   Importance du réseau de distribution et de maintenance

La réussite d’un constructeur dépend largement de la qualité de son réseau de revendeurs et de maintenance. Des machines d’une complexité si extrême peuvent présenter des risques pour la sécurité et la santé, à défaut d’une utilisation et d’une maintenance appropriées. Il faut pouvoir disposer d’un système de distribution bien rodé, qui puisse aider à sélectionner les technologies les plus appropriées et fournir un niveau de maintenance et de réparation de haute qualité, afin d’assurer le service rapide et fiable qu’exigent les équipements complexes, les attentes élevées des consommateurs en termes de performances, mais aussi les conditions climatiques de certaines zones, où les pics saisonniers et les délais stricts sont des paramètres importants.

3.5   Les effets de la crise économique sur la croissance et la production

La crise économique a frappé les deux secteurs de plein fouet, à un moment où la demande mondiale était à un niveau très élevé. Pour les équipements de construction, la demande s’est effondrée à l’échelle mondiale au dernier trimestre 2008. En 2009, l’ensemble des ventes des constructeurs européens a chuté de 42 %, avec pour conséquence des stocks énormes et une utilisation très faible des capacités. Sur l’ensemble de 2010, une baisse supplémentaire de 9 % a été enregistrée, comme il a déjà été indiqué, tandis que fin 2010, la demande asiatique a connu une reprise.

Dans le secteur des machines agricoles, les effets de la crise se sont fait sentir plus tard, l’agriculture étant moins dépendante des tendances économiques générales. Toutefois, les ventes du secteur ont chuté de 22 % en 2009, et ont connu une baisse supplémentaire de 9 % en 2010.

Pour les deux secteurs, l’on prévoit en 2011 une croissance à un seul chiffre, c’est-à-dire très inférieure à ce qu’il faudrait pour revenir aux niveaux d’avant la crise.

Pendant la crise, le principal facteur limitant a été le manque de disponibilité de crédit, surtout pour les clients, incapables de financer l’achat de nouvelles machines, mais également pour les constructeurs. S’ajoute évidemment à cela le ralentissement de l’activité, qui a, particulièrement dans le secteur de la construction, restreint la demande de nouveaux équipements. Dans les deux secteurs, la demande s’est montrée très volatile.

4.   Difficultés et défis à affronter après la crise

La crise économique a mis en évidence certaines particularités des deux secteurs et les a conduits dans une situation très difficile qui exige une intervention au niveau politique.

4.1   Insuffisance du nombre de fournisseurs et du savoir-faire

Il importe de souligner que le secteur des équipements de construction est actuellement confronté à des changements substantiels et radicaux.

Le centre de gravité du marché mondial se déplace petit à petit vers l’Amérique du Sud et l’Asie.

L’Europe, qui enregistrait 20 % de la demande mondiale d’équipements de construction en 2005, ne représentera que 14 % de cette demande en 2014 (1).

Le changement le plus spectaculaire concerne la Chine et l’Inde. Selon les estimations, la demande chinoise d’équipements de construction représentera 34 % de la demande mondiale en 2014, contre seulement 18 % en 2005, soit un doublement de cette demande sur neuf ans.

Les conséquences d’un tel changement sont d’une importance capitale puisque les États-Unis et l’UE ne représenteront plus à eux deux que 29 % de la demande mondiale.

En raison de la crise, la tendance à délocaliser massivement la production en la rapprochant des nouveaux marchés extra-européens s’est considérablement accélérée. En conséquence, le nombre de fournisseurs européens de composants clés a lui aussi connu une baisse spectaculaire. Il ne s’agit pas seulement d’un transfert de sites de production, mais aussi du savoir-faire nécessaire.

Les marchés étrangers ayant des besoins et des spécifications différents des marchés européens, il y a une inquiétude croissante quant à l’éventualité de connaître à l’avenir dans l’UE une pénurie de fournisseurs de composants essentiels, capables de répondre aux besoins européens à coût raisonnable.

Un autre problème est celui de l’approvisionnement en acier dans le contexte actuel de reprise économique mondiale: les augmentations de prix et les mesures protectionnistes pourraient avoir un effet négatif sur le secteur, comme les chiffres d’avant la crise le montrent.

4.2   Les effets sur l’emploi: main d’œuvre vieillissante, manque de personnel qualifié et fuite des cerveaux

Le secteur de la construction mécanique emploie 3,6 millions de personnes en Europe (2).

Parmi celles-ci, 10 % travaillent dans les secteurs des machines agricoles et des équipements de construction. Cette main-d’œuvre est généralement vieillissante: seulement 20,1 % des travailleurs ont moins de 30 ans, alors que cette proportion est d’environ 25 % en moyenne dans les autres secteurs de production de biens non financiers.

Du côté des utilisateurs, les agriculteurs connaissent un problème similaire: seuls 7 % de l’ensemble des agriculteurs européens ont moins de 35 ans. Le secteur de l’agriculture et de la construction attire moins de personnes que d’autres, le travail étant plus fatigant et moins rémunérateur que bien d’autres emplois en Europe.

Le secteur souffre: d’une mauvaise image auprès du grand public, qui méconnaît son importance pour l’ensemble de la communauté; de la raréfaction des ouvriers et ingénieurs qualifiés; du déséquilibre entre les compétences recherchées et celles qui sont disponibles sur le marché du travail; de la diversité et de la disparité des nomenclatures des qualifications et des titres nationaux pour différents diplômes; de l’absence de formation d’élite en sciences naturelles et sciences de l’ingénieur. Ces traits négatifs ont encore été renforcés par la crise économique.

Le secteur a essayé autant que possible de limiter les pertes d’emplois. Toutefois, comme il a déjà été indiqué, la main-d’œuvre employée dans l’industrie des équipements de construction a été réduite de 35 % par rapport à 2008 (3).

La crise a également engendré une fuite des cerveaux vers l’Asie orientale et l’Amérique du Sud, où les marchés sont plus florissants et où la crise s’est fait ressentir de manière moins criante.

5.   Actions nécessaires au niveau de l’UE

5.1   Garantir l’application des mesures destinées à combattre la concurrence déloyale.

L’importation, la vente et l’utilisation dans l’UE d’équipements de construction qui ne respectent pas les normes reste un problème majeur pour le secteur européen des équipements de construction. Il faut exiger que les matériels introduits pour la première fois sur le marché européen respectent toutes les exigences en vigueur en matière de sécurité et d’environnement. Des matériels ne respectant pas ces exigences sont non conformes, et les États membres doivent empêcher leur introduction sur le marché de l’UE.

Il s’agit là d’une source de concurrence déloyale, qui dissuade les fournisseurs en règle d’entreprendre des activités de R&D. Cela constitue de plus une menace pour la compétitivité du secteur européen des équipements de construction et pour les emplois qu’il procure. Les matériels non conformes sont davantage sujets à causer des accidents et ne respectent généralement pas les normes environnementales imposées par l’UE.

Les constructeurs qui respectent les réglementations de l’UE ont actuellement à faire face à la concurrence de produits introduits sur le marché européen suivant des conditions déloyales et à un prix dérisoire par rapport à celui des produits conformes. Les pouvoirs publics ne disposent pas des moyens et des ressources nécessaires pour combattre cet état de fait, alors même que la législation n’est pas toujours claire dans sa défense des produits légaux.

De plus en plus de matériels non conformes sont introduits sur le marché européen en toute illégalité, sans que les organes de surveillance du marché et les autorités douanières n’engagent d’action efficace, bien qu’une législation plus stricte soit entrée en vigueur le 1er janvier 2010 (règlement no 765/2008).

Recommandation: le CESE appelle la Commission européenne ainsi que les autorités des États membres à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer une concurrence loyale au sein du marché de l’UE et garantir des conditions équitables aux fabricants soumis à la concurrence internationale.

5.2   Il convient de prendre les bonnes décisions pour améliorer l’environnement.

Comme c’est le cas pour le secteur automobile, un des plus grands défis auxquels sont confrontés les deux secteurs est la législation relative aux émissions des engins mobiles. Par rapport au secteur automobile, les coûts de conformité unitaires des engins mobiles sont extrêmement élevés, dans la mesure où le volume de production et de ventes est beaucoup plus bas et où le nombre de modèles existants est beaucoup plus important.

Avec la prochaine phase de réduction des émissions, qui démarre en 2011 (IIIB), puis la phase ultérieure déjà prévue pour 2014 (phase IV), les principaux polluants atmosphériques devront être réduits de plus de 90 % par rapport aux niveaux actuels. Ces modifications concerneront les moteurs, mais imposeront également un redéploiement complet de toute la conception des matériels.

Pour respecter ces niveaux d’émission, il faudra recourir à des technologies qui requièrent l’usage de carburants à teneur en soufre extrêmement basse, difficiles à obtenir en Europe pour le secteur non routier, et absolument introuvables hors d’Europe. Cela empêchera les ventes hors d’Europe, tant pour les équipements neufs que d’occasion.

Pour atténuer l’effet de la crise, le secteur a demandé que soit adopté un instrument législatif permettant d’accroître le nombre de moteurs autorisé dans le cadre du mécanisme de flexibilité des directives existantes. Cela permettrait au secteur de faire des économies de coûts considérables au prix d’une augmentation ponctuelle des émissions de l’ordre de 0,5 %. La Commission européenne s’est montrée favorable à cette demande et a présenté deux propositions de modification des directives concernées. Ces propositions sont à l’examen au Conseil et au Parlement européen. Toutefois, les avancées en la matière sont trop lentes et pourraient en réduire les effets économiques escomptés.

Le CESE recommande que soient adoptées au plus vite, d’une part, les dispositions complémentaires quant à la flexibilité de la nouvelle phase législative sur les émissions des engins mobiles non routiers, et, d’autre part, une proposition similaire pour les tracteurs agricoles.

L’impératif de réduire à l’avenir les émissions de suies et de NOx exigera de recourir à des technologies particulières qui engendreront davantage de consommation de carburant et donc d’émissions de CO2. Les efforts consentis par les constructeurs ont empêché un accroissement véritable de la consommation de carburant grâce à une amélioration de l’efficacité des engins dans leur ensemble. Toute nouvelle législation sur la limitation/réduction des émissions de carbone devrait être harmonisée avec la législation en cours et n’être introduite qu’après un certain délai à l’issue de la phase de réduction d’émissions en cours.

Recommandation: avant d’envisager de mettre en place des mesures législatives nouvelles ou plus contraignantes pour de mêmes produits, il conviendrait de réaliser une évaluation d’impact au niveau de l’UE, en prenant en considération les éventuelles conséquences négatives de cette législation pour la compétitivité du secteur sur le marché mondial, et l’éventualité d’une amélioration très réduite en pratique pour ces équipements.

5.3   L’âge avancé des équipements utilisés - nécessité d’un programme de mise à la casse pour les engins mobiles

Les engins utilisés dans l’agriculture et la construction ont une longue espérance de vie. La durée de vie moyenne des tracteurs dépasse 15 ans. Par conséquent, l’amélioration constante des performances environnementales des nouveaux équipements n’a qu’un effet limité et lent à se faire sentir sur la performance environnementale globale des équipements utilisés. Des mesures incitatives pour retirer du marché les équipements très anciens et polluants permettraient d’obtenir des résultats plus rapides. Cette approche présente également des avantages évidents par rapport à la mise aux normes de vieux matériels avec des systèmes de post-traitement. Par ailleurs, adapter des filtres sur des anciens équipements crée nombre de problèmes supplémentaires et est inefficace tant sur le plan de la sécurité que de la performance.

Le CESE recommande de recourir à un programme de mise à la casse, qui serait une solution appropriée pour résoudre le problème des matériels anciens et polluants et contribuer à un environnement plus sain et à des conditions de travail plus sures.

Le CESE estime que tout programme de mise aux normes des pots d’échappement constitue une solution inadaptée au problème des matériels polluants utilisés dans les zones urbaines. Loin de résoudre le problème, ces systèmes maintiennent en activité des engins bruyants et peu sûrs, et leur installation par des mains incompétentes est même susceptible d’augmenter les risques.

S’agissant de la remise aux normes, le CESE recommande également d’harmoniser les exigences en matière de systèmes de post-traitement, non seulement parce que leur potentiel de réduction des gaz d’échappement est faible, mais aussi en vue de diminuer les risques qu’ils créent lorsqu’ils sont adaptés sur des équipements agricoles ou de construction.

5.4   Le secteur est capable de répondre au défi du CO2

De même que pour le secteur routier, c’est la consommation de carburant qui contribue le plus aux émissions de CO2 du secteur. Les possibilités de réduction des émissions de gaz à effet de serre doivent être évaluées en fonction des performances spécifiques des équipements en situation de travail, et pas simplement suivant la consommation de carburant au kilomètre, comme c’est le cas pour le secteur automobile.

Les années passées ont permis de parvenir à des améliorations considérables et de produire des machines plus efficaces. La prise en compte des coûts sur toute la durée de vie du véhicule, dont le coût du carburant constitue une large part, est devenue un facteur important dans la décision d’achat des clients.

Toutefois, si l’on veut atteindre une réduction optimale des émissions de CO2, l’optimisation des matériels ne doit pas porter sur le seul moteur, en tant que source d’énergie, mais considérer l’engin dans son ensemble, avec ses usages et les tâches accomplies, en plus de l’efficacité opérationnelle et de l’utilisation possible d’autres sources énergétiques à faible teneur en carbone.

Le CESE appelle les représentants des institutions européennes et des États membres à soutenir une approche globale et fondée sur le marché en vue de réduire les émissions de CO2 des engins mobiles En l’absence de solution universelle, il serait pragmatique et judicieux de mettre au point des solutions adaptées aux types d’engins générant le plus d’émissions (tracteurs, moissonneuses-batteuses, etc.), en mesurant l’efficacité globale de l’engin (par exemple, consommation de carburant par tonne de céréales moissonnée, ou par kilomètre de route asphaltée).

5.5   L’harmonisation en matière de sécurité routière et d’environnement - au sein de l’Europe et à l’échelle mondiale - constitue la clé

Avec le déplacement des marchés hors d’Europe, l’importance d’une législation et d’une normalisation des produits harmonisées à l’échelle mondiale se fait de plus en plus pressante. Cela s’applique également à l’harmonisation des exigences en matière de sécurité routière, qui fait actuellement défaut pour les équipements de construction et certains véhicules agricoles.

De plus, l’industrie européenne est confrontée au défi des exigences de l’UE, toujours plus strictes par rapport au reste du monde, et qui font que les versions européennes des engins sont soit trop chères, soit incompatibles.

S’agissant par exemple de la protection de l’environnement, il serait souhaitable que toute décision de l’UE soit soigneusement pesée avant d’être adoptée et mise en œuvre au sein de l’Europe.

Le secteur des machines agricoles et des engins de construction aide à protéger l’environnement en réduisant les émissions de ses matériels, conformément à la directive 97/68/CE sur les engins mobiles non routiers et la directive 2000/25/CE sur les tracteurs. L’application de celles-ci permettra de réduire considérablement l’émission de particules (97 %), de NOx (96 %) et de CO (85 %).

Le secteur a consenti des efforts similaires concernant les émissions sonores: il a travaillé pendant 10 ans afin de respecter la législation sur les émissions sonores pour 22 types d’engins de construction.

De plus, des normes internationales concernant le cycle de vie des machines sont déjà mises en place par le secteur, qui a lui-même fait la promotion de normes de recyclage pour les engins de terrassement.

Afin de garantir à l’avenir la compétitivité des produits européens, il est d’une importance capitale de parvenir à une cohérence des lois et règlements au niveau international.

Le CESE appelle les représentants des institutions européennes et des États membres à soutenir la mise en place de normes internationales, à s’y investir et s’y employer. À cet égard, la convention CEE-ONU (4) semble être l’enceinte idéale pour mettre au point de telles normes.

5.6   Conditions de travail et dialogue social dans le secteur

Le secteur des machines agricoles et celui des engins de construction comprend une proportion considérable d’entreprises de petite et moyenne dimensions; partant, ils nécessitent des dispositions particulières en matière de dialogue social. La représentation du personnel et les possibilités d’échange transnational d’informations y sont moindres que dans les secteurs comprenant des comités d’entreprise européens. Toutefois, les entreprises diverses qui composent le secteur présentent une certaine unité et ont besoin d’une coordination et d’échanges qui fonctionnent de la même manière. Aussi est-il nécessaire de mettre à niveau le dialogue entre entreprises et salariés.

Dans les secteurs du travail des métaux, comme dans d’autres secteurs, le travail précaire commence à faire son apparition. Il en résulte, entre autres, un appauvrissement de la formation professionnelle continue, et la menace permanente de perdre des ouvriers qualifiés et expérimentés qui se dirigent vers d’autres secteurs. Cette précarisation de l’emploi a également des conséquences négatives sur les conditions de travail.

Recommandation: Il est souhaitable que la Commission européenne encourage la création d’une analyse sectorielle orientée spécifiquement sur le niveau des conditions de travail. Nous recommandons également de mettre en œuvre des mesures pour améliorer les conditions de travail dans l’ensemble de l’UE. Enfin, il serait d’une importance capitale de mettre en place des mesures pour prévenir des problèmes de sureffectifs à l’avenir, comme ceux qui sont apparus pendant la crise, et d’encourager à nouveau le développement de nouveaux produits et d’idées novatrices sur l’organisation du travail, à partir des connaissances de toutes les parties prenantes.

5.7   Il est souhaitable de maintenir une main-d’œuvre jeune et qualifiée en Europe

Le manque de personnel qualifié, la main-d’œuvre vieillissante, la fuite des cerveaux vers d’autres continents font partie des problèmes touchant l’emploi dans le secteur des machines agricoles et des engins de construction. Il est de plus en plus difficile d’attirer des travailleurs jeunes et qualifiés vers ce secteur. Il serait souhaitable que le secteur lui-même et les pouvoirs publics continuent de faire les investissements nécessaires dans la formation, l’enseignement, la formation tout au long de la vie, ce secteur étant essentiel pour l’activité industrielle européenne.

Sans une éducation de grande qualité et sans compétences nouvelles, il n’y a pas d’avenir, or l’innovation technique a besoin d’ingénieurs hautement formés et créatifs. Il convient de mettre en œuvre, à différents niveaux, des programmes à l’attention des travailleurs, pour promouvoir auprès d’eux l’enseignement et la formation professionnelle et leur en montrer l’utilité, mais aussi d’expliquer la valeur ajoutée et les avantages dont peuvent jouir les employeurs lorsqu’ils investissent dans les travailleurs et leurs qualifications. De tels programmes seront mieux acceptés s’ils sont promus par les parties prenantes dans le cadre du dialogue social.

Recommandation: il convient que les États membres soutiennent davantage le secteur en matière d’enseignement et de formation initiale, d’apprentissage tout au long de la vie et d’acquisition de compétences en ingénierie mécanique. Il est vital pour l’avenir de mettre en place des programmes subventionnés de reconversion des travailleurs surnuméraires, avant que la situation ne se présente.

5.8   Les PME doivent rester au centre de l’innovation

Dans sa récente communication intitulée «Une politique industrielle à l’ère de la mondialisation», la DG Entreprise a clairement montré qu’un des principaux défis pour les PME, qui appelle des réponses politiques pour dynamiser les PME des différents secteurs (dont ceux des engins de construction et des machines agricoles) est l’accès aux financements, encore engorgé.

Alors que ce sont souvent les PME qui introduisent des innovations sur le marché, leurs possibilités d’investir dans l’innovation ont été sapées par la réduction de l’accès aux financements, qui est devenu plus difficile dans tous les États membres pendant la crise économique et financière. Plus précisément, les PME du secteur ont connu un resserrement de leurs conditions de crédit, auquel la plupart des gouvernements ont répondu par la mise en place ou l’extension de systèmes publics de garantie ou encore par des aides directes d’État. Cela n’est toutefois pas suffisant.

Aussi recommandons-nous aux États membres et à la Commission européenne de soutenir les PME du secteur des machines agricoles et des engins de construction par la mise en place de projets ou de fonds répondant à leurs besoins.

Bruxelles, le 4 mai 2011.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  Données fournies par la société de conseil Off Highway Research: www.offhighway.co.uk.

(2)  Données d’Eurostat: Entreprises européennes – Faits et chiffres («European business - Facts and figures»), édition 2009.

(3)  Données fournies par le Comité européen des matériels de génie civil (CECE).

(4)  Commission économique pour l’Europe de l’Organisation des Nations unies (Genève, www.unece.org).


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