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Document 52011AE1854

Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Renforcer les droits des victimes dans l'Union européenne» [COM(2011) 274 final] et la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité» [COM(2011) 275 final — 2011/0129 (COD)]

JO C 43 du 15.2.2012, p. 39–46 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

15.2.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 43/39


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Renforcer les droits des victimes dans l'Union européenne»

[COM(2011) 274 final]

et la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité»

[COM(2011) 275 final — 2011/0129 (COD)]

2012/C 43/09

Rapporteure: Mme Kathleen WALKER SHAW

Le 18 mai et le 29 juin 2011, respectivement, la Commission européenne et le Conseil ont décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: Renforcer les droits des victimes dans l'Union européenne»

COM(2011) 274 final

et la

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité»

COM(2011) 275 final.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 novembre 2011.

Lors de sa 476e session plénière des 7 et 8 décembre 2011 (séance du 7 décembre 2011), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 142 voix pour et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le CESE demande instamment à la Commission de procéder à une évaluation plus précise des effets de la crise sur les victimes de la criminalité, et de présenter des mesures d'accompagnement à partir des résultats obtenus.

1.2   Le CESE est préoccupé par le faible niveau de confiance des victimes envers le système de justice pénale et considère qu'il est nécessaire de renforcer la capacité des victimes, et notamment des victimes d'atteintes répétées, ainsi que de développer la confiance des citoyens pour briser le cercle vicieux des préjudices subis. À cette fin, il demande à la Commission d'envisager des mesures d'accompagnement et des financements.

1.3   Le CESE suggère à la Commission de modifier la définition de «victime» afin de renforcer les droits et la reconnaissance de la famille ou du représentant de la victime.

1.4   Le CESE demande à la Commission de procéder à une analyse approfondie concernant la protection des victimes qui subissent des préjudices sur leur lieu de travail en raison d'actes criminels, et de présenter des mesures d'accompagnement pour garantir à ces victimes un minimum de droits et de reconnaissance dans l'ensemble de l'UE, tant dans le secteur public que privé.

1.5   Le CESE recommande à la Commission de mener une étude poussée sur les victimes d'infractions de la route et de proposer des mesures visant à garantir justice, soutien et indemnisation.

1.6   Le CESE suggère à la Commission d'introduire dans ses propositions des garanties plus efficaces pour lutter contre la discrimination directe et indirecte des victimes.

1.7   Le CESE appelle à un important changement de culture afin que le rôle de la victime soit accepté; ce processus devrait être soutenu par la formation des professionnels et des praticiens à tous les niveaux du système judiciaire et des autres autorités concernées, dans le respect du principe de subsidiarité. La même démarche devrait s'appliquer au traitement des victimes par les médias en général et viser à empêcher l'exploitation des victimes à des fins politiques.

1.8   Le CESE reconnaît que certaines victimes sont particulièrement vulnérables et doivent bénéficier d'un traitement spécifique, mais estime que la Commission, plutôt que de faire un recensement des «victimes vulnérables» susceptible de créer une hiérarchie des victimes, devrait proposer que toutes les victimes de la criminalité aient accès à des mesures spéciales, moyennant une évaluation personnalisée qui permettrait, en conformité avec des procédures nationales, de déterminer leur degré de vulnérabilité en fonction de leurs caractéristiques personnelles, de la nature de l'infraction subie et de leurs relations avec le suspect.

1.9   Le CESE demande que soient prises des mesures d'accompagnement pour renforcer et officialiser le réseau de services d'aide aux victimes dans l'UE, et suggère que ce réseau soit financé sur une base stable par le budget de l'Union européenne. Le CESE recommande également d'élargir la mission des services d'aide aux victimes, de sorte qu'ils prennent en charge les victimes de délits survenus à l'étranger ainsi que leurs familles à leur retour dans leur pays de résidence. Le CESE estime par ailleurs que les services d'aide aux victimes devraient être souples et capables de canaliser les ressources jusqu'aux points chauds potentiels à l'échelle régionale.

1.10   Le CESE reconnaît que la société civile a un rôle plus large à jouer pour mettre en place des mesures concrètes d'assistance aux victimes de la criminalité; il encourage la Commission à présenter des mesures d'accompagnement ainsi que des financements pour faciliter ce processus.

1.11   Le CESE demande instamment à la Commission d'apporter, dans la prochaine révision de la directive, des améliorations amples et nécessaires aux dispositions relatives à l'indemnisation des victimes, et notamment d'envisager un régime européen d'indemnisation des victimes d'infractions pénales. Il invite également la Commission à indiquer clairement aux États membres que la directive prévoit des normes minimales et garantit un socle de droits tout en leur permettant d'adopter à l'échelle nationale une législation de mise en œuvre offrant une meilleure protection.

1.12   Le CESE accueille favorablement les propositions relatives à la justice réparatrice et demande à la Commission de contribuer au financement de projets pilotes visant à développer des normes et des formations en la matière dans l'ensemble de l'UE.

1.13   Le CESE appelle la Commission européenne à élaborer des procédures communes, assorties de délais précis et limités (1), pour le transport et le rapatriement des dépouilles mortelles des victimes décédées dans un autre État membre, procédures qui prendraient le pas sur les règles nationales ou provinciales.

2.   Introduction

2.1   Le train de propositions lancées par la Commission européenne le 18 mai 2011 étend les mesures déjà adoptées au niveau de l'UE concernant les droits des victimes. Les propositions visent à doter les victimes d'un ensemble de droits clairs et concrets, et à leur garantir reconnaissance, respect, protection, soutien et accès à la justice, quel que soit leur lieu de provenance ou de résidence dans l'UE.

2.2   Le CESE reconnaît que le traité de Lisbonne fournit désormais une base juridique claire permettant à l'UE d'établir des normes minimales concernant les droits et la protection des victimes de la criminalité. Les propositions sont basées sur le programme de Stockholm (2) et le plan d'action (3) qui le met en œuvre, et conformes à la feuille de route de Budapest (4).

2.3   Le CESE se félicite que la présidence polonaise ait fait du renforcement de la sécurité dans l'UE une priorité, ainsi que des efforts actuellement réalisés par la présidence pour faire avancer les travaux du Conseil sur le paquet «victimes».

2.4   Le CESE a entrepris un grand nombre de travaux sur cette problématique, notamment des avis sur l'indemnisation des victimes de la criminalité (5), sur la traite des êtres humains (6), sur les enfants victimes d'abus sexuels, d'exploitation sexuelle et de pédopornographie (7), sur les droits de l'enfant (8), sur la politique antiterroriste de l’UE (9), sur l'insertion numérique (10) et sur la cybercriminalité (11).

3.   Observations générales

3.1   Le CESE insiste sur le fait que les États membres ne peuvent ignorer l'impact de la crise économique et financière actuelle sur ce problème, et que c'est dans ce contexte qu'il faut comprendre les dynamiques de la criminalité. Dans le cadre de mesures d'austérité sévères, de nombreux États membres réduisent les budgets de leurs services de police, de santé et de sécurité sociale, ainsi que des organisations communautaires et des fonds destinés aux services d'assistance aux victimes et autres ONG concernées. De plus, les inégalités existantes se creusent, et les niveaux de pauvreté et de chômage, en croissance continue, risquent d'alimenter de nouveaux problèmes sociaux et de jouer un rôle de catalyseur de la criminalité.

3.2   À l'échelle de l'UE, les chiffres concernant les victimes de la criminalité sont alarmants. Chaque année, plus de 75 millions de personnes sont des victimes directes de la criminalité. Il est inacceptable que la plupart des délits concernent un même petit pourcentage de victimes, qui subissent sans arrêt des infractions répétées. Généralement, les victimes vivent dans des zones caractérisées par un taux de criminalité élevé, un sentiment d'insécurité élevé et un faible taux de dénonciation des infractions. Dans ces communautés, environ 90 % des délits ne font pas l'objet d'un dépôt de plainte.

3.3   Améliorer le soutien aux victimes de la criminalité dans l'UE constitue une pierre angulaire du développement de l'espace de liberté, de sécurité et de justice pour les citoyens européens. C'est un aspect essentiel, étant donné l'augmentation constante du nombre de personnes qui voyagent ou se déplacent vers d'autres pays de l'UE pour y vivre et y travailler, tendance qui est appelée à se confirmer.

3.4   Le CESE se félicite que les propositions permettent aux citoyens qui ont subi une infraction dans un autre État membre de porter plainte dans leur propre État membre d'origine ou de résidence. Cela est particulièrement important en cas de blessures ou d'accidents graves, ou encore pour la famille, en cas de décès.

3.5   Le CESE soutient l'approche horizontale adoptée dans la directive, qui englobe les droits de toutes les victimes.

3.6   Fait important, les propositions reconnaissent non seulement les souffrances et problèmes des victimes, mais aussi ceux auxquels est confrontée la famille de la victime. Toutefois, cet aspect devrait apparaître de manière plus cohérente dans l'ensemble des propositions.

3.7   De telles infractions ont des conséquences dévastatrices sur le plan physique, émotionnel et financier, lesquelles nécessitent un soutien tant pour les victimes que leurs familles. En effet, celles-ci jouent un rôle central pour soutenir les victimes ainsi que pour traiter avec les autorités et s'occuper de tout ce qui touche au soutien médical, au dédale administratif, aux poursuites contre le(s) suspect(s), et à la recherche de justice et d'indemnisation.

3.8   Le CESE estime qu'il faut prendre en compte les difficultés et le stress supplémentaires qui touchent les victimes et leurs familles dans les situations transfrontières, où elles doivent faire face en plus aux problèmes de la barrière linguistique et de procédures et cultures qui ne leur sont pas familières et peuvent leur paraître des obstacles insurmontables.

3.9   Plus généralement, 50 % des victimes de la criminalité ne dénoncent pas l'infraction à l'«autorité compétente». Cela peut s'expliquer par différentes raisons, par exemple par le fait que les victimes ne comprennent pas le système de dépôt de plainte, ou ne font pas suffisamment confiance aux autorités qui doivent leur fournir assistance, protection et soutien pour obtenir justice ou indemnisation. Le CESE souhaite que les propositions soient traduites en mesures concrètes destinées à trouver une solution au manque de confiance des victimes envers le système de justice pénale.

3.10   Les études confirment (12) que les mesures existantes n'ont pas permis de résoudre les nombreux problèmes pratiques et techniques que les victimes et leurs familles rencontrent lorsqu'elles sont dans une situation de haute vulnérabilité et ont besoin de soutien.

3.11   Les propositions à l'examen constituent un premier pas important pour garantir que la victime et sa famille sont prises en compte au premier chef, qu'elles sont reconnues, traitées avec respect et dignité, et reçoivent la protection, le soutien et l'accès à la justice qu'elles méritent de droit. Dans ces circonstances où elles sont vulnérables, elles ne devraient jamais se sentir seules.

4.   Observations particulières

4.1   Actuellement, les dispositions qui existent dans les différents pays de l'UE n'ont aucune cohérence entre elles, sur le plan de la sévérité et de l'efficacité. Il est donc nécessaire d'opérer un changement radical de sorte à garantir des normes acceptables de soutien, de protection et de droits sur lesquelles les citoyens européens puissent se reposer, qu'ils soient dans leur propre pays ou dans un autre État membre. Il n'est pas acceptable que le niveau de soutien reçu par un citoyen dépende, de manière aléatoire, de l'endroit de l'UE où il est victime d'une infraction.

4.2   Le CESE reconnaît que ses membres occupent une position exceptionnelle pour contribuer à garantir que ces propositions soient effectivement appliquées, s'agissant des mesures d'accompagnement mentionnées dans la communication, et appelle la Commission à continuer à collaborer avec lui pour encourager les organisations auxquelles ils appartiennent, le cas échéant, à mettre concrètement en place des structures, politiques et procédures destinées à soutenir plus systématiquement et plus efficacement les victimes de la criminalité et leurs familles.

4.3   Reconnaissance et protection

4.3.1   Dans la directive, la définition de la «victime» couvre uniquement «tout membre de la famille d'une personne dont le décès résulte d'une infraction pénale». Le CESE estime que cette définition est trop étroite et ignore le fait que de nombreuses victimes survivantes sont si grièvement blessées qu'elles peuvent avoir besoin d'un soutien important pour exercer leur capacité juridique et déposer plainte ou engager un processus judiciaire pour demander réparation et indemnisation, ces démarches revenant dès lors aux membres de la famille ou à d'autres personnes de soutien. Ils doivent donc être également reconnus. Le CESE recommande d'amender l'article 2 («Définitions») du document de la Commission COM(2011) 275, en y ajoutant un nouveau paragraphe 2 a) iii libellé comme suit: «la personne de soutien reconnue, qu'il s'agisse d'un membre de la famille ou de toute autre personne employée par une victime ayant besoin d'un soutien important pour exercer sa capacité juridique avant ou après l'infraction;»

4.3.2   Malgré les efforts fournis pour que les propositions soient conformes aux règles en matière de santé et de sécurité au travail, le CESE est préoccupé par le fait que celles-ci omettent la question de la protection des victimes de comportements criminels subissant des préjudices au travail, y compris les personnes travaillant sur la route ou dans d'autres types de transports. Toutefois, les États membres ont des approches différentes pour déterminer ce qu'est une infraction pénale en matière de violation des droits du travail et des règles de protection, et ces différences pourraient être une entrave à la garantie de normes minimales dans l'UE. Cela a aussi des implications pour les travailleurs détachés. Le CESE demande par conséquent à la Commission de procéder à une analyse approfondie de cette problématique et de présenter des mesures d'accompagnement pour garantir des droits minimaux aux victimes de comportements criminels sur leur lieu de travail, qui s'appliqueraient à la fois aux secteurs public et privé.

4.3.3   Le CESE s'inquiète du fait que la définition d'une victime en tant que «personne physique» ne permettra pas à des organisations ou à des entreprises qui subissent des actes criminels d'exercer leurs droits en vertu de la directive. Le CESE suggère à la Commission de mener une étude en vue d'évaluer le besoin de mesures spécifiques dans ce domaine, notamment s'agissant des PME, pour améliorer la protection des victimes d'infractions répétées.

4.3.4   Le CESE estime que la Commission n'a pas abordé de manière appropriée le problème important de la discrimination directe et indirecte des victimes, y compris la discrimination culturelle; il lui recommande d'introduire dans ses propositions des mesures de sauvegarde plus efficaces pour répondre à ce problème. Les victimes subissent parfois simultanément un préjudice et une discrimination, lorsqu'elles sont visées en raison de leur race, religion, croyance, orientation sexuelle, handicap, sexe ou situation sociale, ce qui est l'une des principales raisons du taux élevé de cas d'infraction non signalés. Les victimes peuvent alors faire l'objet d'une discrimination en étant traitées de manière inacceptable par les pouvoirs publics et le système judiciaire, à savoir lorsqu'elles ne sont pas crues, ou qu'elles sont traitées avec un manque de dignité, de respect et de reconnaissance.

4.3.5   Le CESE appelle à un important changement de culture afin que le rôle de la victime soit accepté dans le système judiciaire. Une première étape importante consiste à former les professionnels et les praticiens de manière appropriée, tout en respectant le principe de subsidiarité. Le CESE recommande à la Commission de recourir à des programmes de financement pour réaliser ce changement de paradigme dans les principales instances.

4.3.6   Les propositions doivent accorder une importance centrale à la protection des victimes de la criminalité. Cette protection est d'une importance capitale lorsque la victime et les membres de sa famille se trouvent à proximité de la personne poursuivie, ou dans le même bâtiment qu'elle, qu'il s'agisse de l'hôpital, du tribunal ou du poste de police. Il convient d'adopter des procédures normalisées pour garantir (plutôt qu'«établi[r] progressivement», comme indiqué dans les propositions) que tout contact soit évité entre la victime ou les membres de sa famille et le(s) suspect(s), en les accueillant dans des pièces séparées et en leur donnant accès à des installations et services séparés.

4.3.7   Il importe également d'éviter que les personnes deviennent des victimes potentielles. Le CESE invite la Commission à encourager la surveillance des nouvelles formes de victimisation qui se font jour, par exemple la cybercriminalité, et à procéder à une évaluation afin de déterminer quelles sont les mesures nécessaires pour protéger et soutenir les victimes. Pour réduire le nombre de victimes, il est essentiel de développer des programmes de sensibilisation aux menaces potentielles, qui pourront s'appuyer sur des réussites comme le programme Daphné, et de prendre des mesures préventives lorsqu'une menace se présente.

4.3.8   Les statistiques montrent qu'une personne ayant déjà été victime est largement exposée à le devenir à nouveau. De nombreuses victimes, qui ont souffert de maltraitance dans leur enfance au sein de leur foyer ou d'institutions publiques ou autres, en subissent les préjudices toute leur vie. Parmi elles, nombreuses sont celles qui ont des difficultés à parler de leur situation et à franchir le pas du dépôt de plainte. Le CESE souhaite que l'UE prévoie des mesures d'accompagnement et des financements ciblés destinés à renforcer les capacités des victimes et des témoins d'infractions, afin de briser le cercle vicieux des préjudices répétés et de développer la confiance des citoyens, notamment dans les communautés où le taux de criminalité est élevé.

4.3.9   Tout en reconnaissant que certaines victimes, par exemple les enfants et les adultes présentant un handicap, sont particulièrement vulnérables et doivent bénéficier d'un traitement spécifique, le CESE craint que la Commission, en recensant certaines «victimes vulnérables», n'encourage la création d'une hiérarchie des victimes qui pourrait conduire à une discrimination à l'égard des autres victimes. Toutes les victimes sont vulnérables, et le CESE estime qu'une meilleure approche pourrait consister à proposer que toutes les victimes de la criminalité aient accès à des mesures spéciales, moyennant une évaluation personnalisée conforme aux procédures nationales, qui permettrait de déterminer leur degré de vulnérabilité en fonction de leurs caractéristiques personnelles, de la nature de l'infraction subie et de leurs relations avec le suspect. Il est essentiel de développer des méthodologies axées sur la reconnaissance et la compréhension de l'environnement social et des conditions de vie de la victime, ainsi que sur une approche de soutien à cet égard. Le CESE recommande d'amender l'article 18 du document COM(2011) 275 comme suit: suppression des paragraphes 1, 2 et 5 et adaptation en conséquence des références et de la formulation du reste du texte, avec en plus la suppression de «toutes les autres» à la première ligne de l'actuel paragraphe 3.

4.3.10   Le CESE accueille favorablement la proposition de règlement relatif à la reconnaissance mutuelle des mesures de protection en matière civile et reconnaît qu'il s'agit d'un complément législatif indispensable à la proposition de directive (CSL 00002/2010) relative à la décision de protection européenne (en matière pénale). Le CESE prend acte du fait que cette proposition a fait l'objet d'un accord entre le Conseil des ministres et le Parlement européen. Le CESE estime qu'il conviendrait de normaliser autant que faire se peut l'utilisation et le format des deux mesures afin de faciliter le processus. Il est nécessaire de mettre en place des dispositions pour garantir l'application effective des mesures de protection.

4.3.11   Le CESE reconnaît que les médias peuvent jouer un rôle positif pour soutenir le droit des victimes et leur reconnaissance; il souhaite que les propositions prévoient des mesures pour garantir un équilibre entre la reconnaissance de ce rôle positif et la protection de la vie privée des victimes et de leurs familles durant la procédure juridictionnelle, notamment pour les préserver d'une attention médiatique intrusive et non désirée, y compris à des fins politiques. Il arrive trop souvent que des images, des photographies et des informations privées soient publiées sans leur consentement; il s'agit d'une intrusion inacceptable dans la vie privée et familiale. Il est essentiel de garantir le respect, l'intégrité et les droits humains des victimes et de leurs familles au moment où elles sont les plus vulnérables. En cas de violation de ces droits, les médias responsables devraient être tenus de réparer leur erreur en la reconnaissant publiquement et en lui accordant une attention similaire à celle qu'ils avaient consacrée à l'infraction subie par la victime.

4.3.12   Le CESE souhaite également que les propositions mentionnent l'obligation pour les organismes publics, et notamment la police, de protéger eux aussi la vie privée de la victime et de sa famille. Cet aspect exige une attention particulière, étant donné que la police est la plus grande pourvoyeuse d'informations auprès des médias. Les révélations choquantes concernant les écoutes téléphoniques de victimes et de leurs familles ont récemment donné lieu à un scandale au Royaume-Uni. L'UE doit assurer une plus grande protection des victimes et de leurs familles dans ce domaine, dans leur pays comme à l'étranger.

4.4   Droit à l'information, droit d'être compris, droit à l'interprétation et à la traduction

4.4.1   Le CESE accueille favorablement les propositions visant à doter les victimes d'un ensemble de droits clairs et détaillés, notamment celui d'obtenir en temps utile des informations pertinentes sur leur cas spécifique, et d'être informées régulièrement des avancées de leur affaire. Il arrive trop souvent que les affaires donnent lieu à un gaspillage de temps précieux, ou à une perte d'informations et de preuves, notamment dans les cas où il n'est pas d'emblée manifeste qu'il y a eu crime, par exemple en cas de disparition, de noyade, ou de mort inexpliquée. Dans des affaires transfrontières, les retards peuvent être plus importants, notamment quand l'infraction n'a pas eu de témoin. Cela ne peut justifier un retard dans la prise en charge de la victime et les mesures de protection la concernant. Les enquêtes qui recourent à Eurojust ou à un traité d'entraide judiciaire réciproque sont limitées, ce dernier ne portant que sur les affaires criminelles. Le CESE souhaiterait que l'UE prévoie des mesures d'accompagnement afin de lever les obstacles aux demandes d'ouverture d'enquêtes.

4.4.2   Il importe de savoir où trouver des informations et comment dénoncer une menace ou une infraction. Dans des situations transfrontières, il convient que de telles informations soient plus aisément accessibles auprès des autorités compétentes telles que la police, les consulats/ambassades, les hôpitaux et services administratifs locaux, ainsi que sur leurs sites Internet respectifs. Il convient que ces informations figurent également sur les documents de voyage délivrés par les agences de voyage et les compagnies aériennes, avec un duplicata détachable que les voyageurs peuvent laisser à leur famille proche ou amis.

4.4.3   Dans les affaires transfrontières, la coordination et la coopération entre les autorités compétentes des différents pays sont actuellement insuffisantes: la diversité des systèmes juridiques et des cultures crée souvent des obstacles ou rend les autorités réticentes à partager des informations et à coopérer. Le CESE souhaite un renforcement de la coopération entre les ministères de la justice et ceux des affaires étrangères des pays de l'UE, de sorte qu'ils mettent en place des protocoles d'accord visant l'échange d'informations de police à police, par l'intermédiaire du personnel consulaire, afin de répondre aux questions légitimes que la victime et sa famille se posent sur une enquête. Dans ce dispositif, les autorités compétentes devraient s'engager à fournir les coordonnées du service/ de l'officier chargé de l'enquête à un homologue désigné dans une autre juridiction, lequel pourrait entrer en contact avec la victime et sa famille pour leur fournir des informations, avec le cas échéant des restrictions sur la divulgation d'informations.

4.4.4   La plupart des pays ne disposent pas, au sein de leurs forces de police ou parmi leurs juges d'instruction, de système de liaison avec les familles, ce qui oblige une famille à engager un avocat pour la représenter, avant que les informations ne lui soient divulguées; cela peut être très coûteux, et au-delà des moyens de bien des familles. Le CESE recommande à la Commission de prévoir des mesures d'accompagnement pour développer les meilleures pratiques en la matière et les faire adopter plus uniformément à l'échelle de l'UE.

4.4.5   Il convient d'exiger des États membres qu'ils publient largement et régulièrement des informations sur les droits des victimes, en indiquant les lieux où celles-ci peuvent recevoir un soutien. Ils devraient également être tenus de coopérer au niveau de l'UE afin de fournir une version multilingue de ces informations, ce qui permettrait de réduire les coûts.

4.4.6   Le droit de comprendre et d'être compris est essentiel dans l'exercice de la justice. Le CESE suggère que les États membres entreprennent une évaluation des besoins en communication des victimes et de leurs familles engagées dans des procédures pénales, afin de garantir qu'elles reçoivent le soutien requis pour comprendre et être comprises.

4.4.7   Le droit étendu à disposer de services d'interprétation et de traduction gratuits dans le cadre des procédures judiciaires fait partie des droits humains fondamentaux, et est particulièrement essentiel pour les victimes aux prises avec des affaires transfrontières, ainsi que leurs familles. Le CESE se félicite que ces droits soient désormais étendus aux victimes. Il ne faut pas s'alarmer des coûts qu'occasionneraient de tels services, dans la mesure où de nombreux États membres répondent déjà à ce genre de demandes des victimes.

4.4.8   Le CESE accueille favorablement la garantie que les victimes et leurs familles aient le droit de contester toute décision concluant à l'inutilité d'assurer de tels services et aient la possibilité de se plaindre de la qualité insuffisante de l'interprétation pour exercer leurs droits dans le cadre de la procédure. Le CESE soutient l'adoption d'un registre national d'interprètes et de traducteurs qualifiés qui serait reconnu comme le vivier officiel à utiliser par les avocats-conseils et les autorités compétentes, comme l'exige la directive 2010/64/UE relative au droit à l’interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales. Le CESE craint que certains États membres ne tiennent des registres tout en accordant des contrats à des agences pour de tels services, en contournant ledit registre et en sapant ainsi l'esprit de la directive. Il souhaite que cessent ce genre de pratiques.

4.5   Accès aux services d'aide aux victimes

4.5.1   Les propositions prévoient un niveau minimum de services devant être fournis dans l'ensemble de l'UE pour garantir que les victimes de la criminalité et leurs familles connaissent les possibilités en matière de soutien rapide et efficace, partout dans l'UE, en cas de besoin. Il est essentiel que ces services soient gratuits, confidentiels, et fournis par un personnel hautement qualifié, qu'il s'agisse de services publics ou privés.

4.5.2   Le CESE s'inquiète du fait que les niveaux actuels des services d'aide aux victimes et leur qualité varient considérablement d'un État membre de l'UE à l'autre et qu'ils disposent bien souvent de financements inférieurs à ceux des services pour les personnes poursuivies ou suspectées d'un crime. Le CESE demande que soient prises des mesures d'accompagnement pour renforcer et officialiser les normes, la qualité et la couverture géographique des services d'aide aux victimes dans l'UE, et pour les financer sur une base stable et cohérente au moyen du budget de l'Union européenne. Cela permettra de faire des économies d'échelle, en développant des programmes communs de formation en ligne ainsi que des structures informatives et de communication, et en échangeant les meilleures pratiques. Cela permettra aussi d'assurer un suivi plus structuré des victimes, ainsi qu'une mise en œuvre et une application du train de mesures législatives, avec une meilleure efficacité.

4.5.3   Le droit d'accès aux services d'aide aux victimes est déterminant pour assurer le rétablissement de la victime et garantir son accès effectif à la justice. Même si de nombreux États membres ont été confrontés à de sérieuses difficultés en raison de la crise économique et financière, ils ne doivent pas se détourner de leurs obligations dans ce domaine. Ils doivent évaluer les coûts de mise en œuvre de ces services au regard des coûts de leur non-application, à savoir les coûts économiques et sociaux induits par le fait que les victimes mettent du temps à se rétablir de l'infraction subie, voire ne s'en rétablissent pas. Plusieurs pays financent leurs mesures nationales d'aide aux victimes avec le produit des amendes reçues pour infractions pénales. Le CESE suggère à la Commission européenne de commanditer une étude sur l'efficacité de tels systèmes en vue de leur extension éventuelle.

4.5.4   Le CESE reconnaît que le nombre de victimes de la criminalité varie suivant les pays et régions. Dans certaines régions, l'augmentation de la population pendant les hautes saisons touristiques, combinée à des agressions sous l'influence de l'alcool, peut entraîner des pressions supplémentaires. Le CESE est d'avis que le soutien devrait être suffisamment souple pour être disponible au niveau régional; il invite la Commission et les États membres à envisager de canaliser les ressources et les mesures de soutien jusqu'aux «points chauds», pour en améliorer la communication et les services. C'est un problème particulièrement important dans les endroits où le risque et la menace d'infractions violentes concernent surtout des suspects et/ou victimes qui n'appartiennent pas à la région ou au pays.

4.5.5   Il est indispensable de prévoir des obligations juridiques pour garantir l'orientation des victimes vers les services d'aide et l'existence de tels services. Dans l'UE, c'est généralement à la police qu'il incombe d'orienter les victimes vers ces services. Toutefois, à l'heure actuelle, leur immense majorité (13) n'est pas orientée vers les services appropriés. Il s'agit du principal obstacle à la fourniture de soutien aux victimes en Europe.

4.5.6   D'autres instances pertinentes en contact avec les victimes devraient également avoir la responsabilité, le cas échéant, d'adresser les victimes à des services de soutien, notamment les hôpitaux, les ambassades et consulats, les écoles et les services d'hébergement. Il faut noter que cela ne créerait pas de difficultés concernant les droits de protection des données.

4.5.7   Les victimes d'infractions à l'étranger, ou leurs familles, ne sont généralement pas assistées par les services d'aide aux victimes existants, lorsqu'elles sont de retour dans leur pays de résidence. Il convient de remédier à cette insuffisance. Une fois de retour, les victimes peuvent mettre du temps à se rétablir et encourir durablement des problèmes de santé ou des difficultés d'ordre juridique ou administratif. Le CESE demande que la mission des services d'aide aux victimes soit élargie, de sorte qu'ils fournissent ce type de soutien.

4.5.8   Le CESE souhaite que l'UE mette en place des mesures pour financer et encourager le renforcement des capacités et la coopération entre les services d'aide aux victimes et la police et les autorités judiciaires, les hôpitaux, les syndicats, les ONG et les entreprises, afin d'associer davantage la société civile à l'amélioration de l'aide aux victimes de la criminalité et de promouvoir de bonnes pratiques et des mesures concrètes en la matière. Les bénévoles subissant des préjudices en raison de comportements criminels dans le cadre de leurs fonctions d'assistance et de service devraient également être reconnus comme victimes d'actes criminels et soutenus à ce titre.

4.5.9   Tout en confirmant que les systèmes judiciaires et autres autorités publiques concernées ont un rôle de premier plan à jouer dans la protection et l'aide aux victimes, le CESE estime que les entreprises et organisations des secteurs concernés (voyagistes, compagnies d'assurances, sociétés aériennes, bancaires, de téléphonie mobile ou fixe, compagnies de location de voitures ou de taxis, syndicats et ONG du secteur social) peuvent aussi mettre en place, dans le cadre d'une coopération constructive, des stratégies et structures positives et concrètes d'aide aux victimes et à leurs familles pendant des moments de crise. Il ne faut pas voir ces initiatives comme des fardeaux mais plutôt comme des occasions de développer des politiques positives en matière de responsabilité sociale des entreprises.

4.5.10   Le CESE suggère à la Commission de mener une étude sur le secteur européen des assurances afin d'évaluer quelles sont les mesures de couverture, de protection et d'indemnisation pour les victimes d'infractions et d'accidents, de sorte à promouvoir les meilleures pratiques en matière d'aide juridique et administrative appropriée, d'indemnisation et de coûts, de manière à ce que les victimes ou leur famille puissent prendre part aux procédures pénales. La clarté des termes et des risques exclus dans les polices doit faire l'objet d'une évaluation, en tenant compte des différents niveaux d'alphabétisation et d'éducation des clients, et de leurs éventuels handicaps. Il conviendrait de fournir des informations claires sur certaines clauses des assurances de vacances, qui excluent totalement ou partiellement toute couverture si l'assuré a consommé de l'alcool et a, sous son influence, été impliqué dans une affaire. Simultanément, les compagnies d'assurance devraient être encouragées à trouver le juste milieu en la matière, étant donné que de nombreuses personnes boivent, avec modération, lorsqu'elles sont en vacances, et envisager le recours à des mesures bien établies pour tester les niveaux d'alcoolémie, comme celles appliquées à la conduite en état d'ébriété. Les États membres restent dans l'obligation de fournir une compensation conformément à la directive de l'UE en la matière. Cela ne dispense toutefois pas les compagnies d'assurance d'honorer leur responsabilité principale.

4.5.11   Le CESE estime qu'il conviendrait de créer un groupe de suivi au niveau de l'UE, comprenant des victimes et leurs familles, des groupes de soutien aux victimes et des ONG pertinentes, des représentants de syndicats et d'entreprises, afin d'assurer un suivi continu de ces problématiques, de mettre en place des formations et d'encourager ce changement de culture envers les victimes.

4.5.12   Là où c'est applicable, le droit aux services d'aide aux victimes devrait être intégré dans les autres politiques et propositions législatives de l'UE. Cela permettrait de garantir des progrès dans ce domaine.

4.6   Justice et indemnisation

4.6.1   Il faut parvenir à un meilleur équilibre entre les droits de la personne poursuivie et les droits de la victime. Actuellement, les victimes disposent d'un soutien et de droits qui sont inférieurs. Le CESE demande instamment à la Commission et aux États membres d'adopter des mesures pour offrir aux victimes un véritable recours en cas de défaut d'information, de soutien, ainsi que des autres droits minimaux et dispositions prévus par la directive.

4.6.2   Le droit pour la victime d'être entendue pendant la procédure pénale et de produire des éléments de preuve est une question de droits de l'homme et d'efficacité de la justice. Ce droit existe déjà dans certains États membres et doit être disponible dans l'ensemble de l'UE. Dans ce contexte, la législation de l'UE devrait prendre en compte et encourager fortement la mise en place de programmes efficaces de protection des témoins.

4.6.3   Les droits de la personne poursuivie doivent être garantis, mais il convient de reconnaître et de soutenir les intérêts légitimes de la victime et de sa famille. Les victimes devraient avoir droit au même niveau d'assistance juridictionnelle et administrative que les personnes poursuivies. Le CESE se félicite de la reconnaissance du droit pour la victime d'avoir accès à une aide juridictionnelle lorsqu'elle a la qualité de partie à la procédure, ce qui lui permet d'exercer ses droits conformément à la directive. Le CESE estime que ce type de soutien devrait également être disponible pour la famille de la victime et la personne de soutien reconnue si la victime est décédée ou a besoin d'une aide importante pour exercer sa capacité juridique et participer à la procédure judiciaire. Il demande à la Commission de procéder à une analyse des dispositions existantes dans l'UE en matière d'aide et d'assistance aux victimes et à leurs familles, afin de contribuer à d'éventuelles futures mesures destinées à étendre l'aide dans ce domaine.

4.6.4   Le CESE est préoccupé par les obstacles significatifs qui existent dans certains États membres en ce qui concerne le rapatriement des victimes décédées. Les familles des victimes se voient souvent refuser le droit de ramener leurs êtres chers dans leurs pays d'origine pour les y enterrer ou doivent attendre des années et se soumettre à des procédures juridiques compliquées avant que les dépouilles mortelles ne soient restituées. De telles situations provoquent des souffrances et des frustrations indicibles qui viennent s'ajouter au chagrin qu'éprouve la famille. Le CESE recommande à la Commission européenne d'élaborer des procédures communes, assorties de délais précis et limités (14), pour le transport et le rapatriement des dépouilles mortelles des victimes transfrontalières, procédures qui prendraient le pas sur les règles nationales ou provinciales.

4.6.5   Le CESE accueille favorablement le droit au remboursement des dépenses de voyage, d'hébergement et de séjour encourues par les victimes venues assister au procès, en tant que témoins ou victimes. Le CESE comprend que cette disposition s'applique à la famille d'une victime de meurtre, et souhaiterait la voir appliquer plus largement aux familles de victimes ainsi qu'aux personnes de soutien des victimes ayant besoin d'une aide importante pour exercer leur capacité juridique, et prise en charge par l'État.

4.6.6   La délivrance d'un accusé de réception du signalement d'un acte criminel devrait être une norme minimale de base. Conformément à une décision de la Cour européenne des droits de l'homme, la plainte des victimes devrait par ailleurs donner lieu à une enquête appropriée de la part de l'État.

4.6.7   Le CESE estime qu'en cas d'infractions perpétrées par un suspect dans un autre État membre, il devrait exister des dispositions garantissant que les procédures d'extradition ne sont pas entravées par les procédures nationales engagées contre le même suspect, si les charges qui pèsent contre lui dans son pays sont moins importantes que celles de l'affaire transnationale. Les procédures nationales devraient être accélérées, ou reportées après la fin des procédures étrangères.

4.6.8   Le CESE estime qu'en cas de décision de ne pas entamer de procédure judiciaire, la victime devrait bénéficier d'un droit à ce que ladite décision soit soumise à un examen indépendant. Il serait plus efficace que la victime ait le droit d'être consultée sur les décisions relatives aux poursuites.

4.6.9   Le CESE est conscient que l'indemnisation financière ne saurait réparer tout le préjudice causé par un crime, et que la victime a souvent avant tout besoin d'être reconnue et respectée. Les victimes ont un droit établi à l'indemnisation mais elles sont souvent inconscientes de ce droit, ou sont découragées par la complexité de la procédure de dépôt de plainte. Il est souvent impossible d'obtenir des indemnités pour infraction pénale dans des affaires transfrontières, à moins que la victime ou sa famille n'engage une procédure civile dans la juridiction étrangère, ce qui est complexe et dispendieux. Il faut s'employer davantage à garantir que les victimes puissent déposer plainte plus facilement et gratuitement. Le CESE demande instamment à la Commission de mettre à exécution la révision de la directive concernant l'indemnisation des victimes et de procéder à des améliorations amples et nécessaires dans ce domaine, notamment en envisageant un régime européen d'indemnisation des victimes d'infractions pénales.

4.6.10   Le CESE invite la Commission à examiner spécifiquement, dans le cadre de la révision évoquée ci-avant, le problème de l'indemnisation des victimes d'infractions routières. Le CESE fait remarquer qu'il existe dans certains États membres de bons exemples d'indemnisation et de soutien des victimes, notamment dans les pays où une partie importante du produit des amendes reçues pour infractions routières y est consacrée. Étant donné que les accidents de la route sont la première cause de handicap, il est souhaitable que les organisations représentant les personnes handicapées soient associées à la conception, à la mise en œuvre et à la gestion de ces dispositifs d'indemnisation.

4.6.11   Il convient d'envisager la possibilité d'effectuer des paiements anticipés pour aider les victimes et leurs familles dans la période qui suit immédiatement l'acte criminel, où les frais peuvent être particulièrement lourds.

4.6.12   Le CESE salue les propositions de la directive relatives à la justice réparatrice mais estime que la définition est trop étroite et devrait préciser que bon nombre d'options permettant d'obtenir réparation n'impliquent pas nécessairement une rencontre entre les personnes. Le CESE confirme que les souhaits de la victime et de sa famille, ainsi que leur protection, doivent être mis au premier plan dans tous les cas. Il est indispensable de prévoir des mesures de protection strictes, et les dispositions visant à garantir que l'État facilite l'orientation vers des services de soutien dûment formés sont les bienvenues. Le CESE constate qu'actuellement, très peu d'États membres octroient des fonds pour la justice réparatrice, et recommande à la Commission de soutenir des projets pilotes visant à développer des normes et des formations en la matière, de façon à créer des économies d'échelle et à favoriser l'échange de bonnes pratiques.

4.6.13   Le CESE fait remarquer que les services répressifs compétents vendent chaque année dans l'UE une grande partie des «objets volés» que la police n'a pas restitués à leurs propriétaires. Les retards inacceptables de restitution des biens constituent un autre problème (15). Le CESE souhaite que les dispositions sur la restitution de propriété soient renforcées par une obligation pour les autorités de fournir des informations spécifiques ainsi que les coordonnées des personnes ayant la responsabilité de ces biens, et de garantir que ces biens soient restitués aux victimes dans un délai court et déterminé.

4.7   Mise en œuvre et contrôle de l'application

4.7.1   La non-application des dispositions de la directive a des conséquences économiques et sociales considérables non seulement sur les victimes et leurs familles, mais aussi sur l'économie des États membres en raison des journées de travail perdues et de la pression pour les services de santé et autres services sociaux ou juridiques. Ainsi, il est vital de mettre dûment en œuvre ces nouvelles mesures pour soutenir les victimes et leurs familles, de sorte à leur garantir un prompt et meilleur rétablissement.

4.7.2   Le CESE estime que les propositions devraient comprendre des mesures énergiques visant à garantir le respect de normes minimales dans l'ensemble de l'UE. Cela nécessitera des mesures destinées à garantir une application efficace et un suivi continu, assorties de pénalités dissuasives en cas de non-application.

Bruxelles, le 7 décembre 2011.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  Un délai de 28 jours est proposé, ce qui permettrait que des autopsies et des analyses ADN soient effectuées par deux médecins légistes, ainsi qu'une demande de rapport indépendant par le consulat du pays d'origine du défunt.

(2)  http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/fr/ec/111886.pdf.

(3)  COM(2010) 171 final.

(4)  Adoptée par le Conseil des ministres le 10 juin 2011.

(5)  JO C 95 du 23.4.2003, pp. 40-44.

(6)  JO C 51 du 17.2.2011, pp. 50-54.

(7)  JO C 325 du 30.12.2006, pp. 60-64, JO C 317 du 23.12.2009, pp. 43-48, et JO C 48 du 15.2.2011, pp. 138-144.

(8)  JO C 325 du 30.12.2006, pp. 65-70.

(9)  JO C 218 du 23.7.2011, pp. 91-96.

(10)  JO C 318 du 29.10.2011, pp. 9–18.

(11)  JO C 97 du 28.4.2007, pp. 21-26.

(12)  COM(2011) 274 et SEC(2011) 580.

(13)  Selon les informations données par le réseau Victim Support Europe.

(14)  Voir note no 1.

(15)  Dans toute l'Europe, les services d'assistance aux victimes reçoivent régulièrement des plaintes de victimes concernant la lenteur des services répressifs qui tardent à leur restituer leurs biens.


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