EUR-Lex Access to European Union law

Back to EUR-Lex homepage

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 52010AE0972

Avis du Comité économique et social européen sur «Les conséquences du vieillissement de la population sur les systèmes de santé et de protection sociale» (avis exploratoire)

JO C 44 du 11.2.2011, p. 10–16 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

11.2.2011   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 44/10


Avis du Comité économique et social européen sur «Les conséquences du vieillissement de la population sur les systèmes de santé et de protection sociale» (avis exploratoire)

2011/C 44/02

Rapporteure: Renate HEINISCH

Dans une lettre en date du 18 septembre 2009, Mme Margot WALLSTRÖM, vice-présidente de la Commission européenne, a demandé au Comité économique et social européen, conformément aux dispositions de l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, d'élaborer un avis exploratoire sur le thème suivant:

«Les conséquences du vieillissement de la population sur les systèmes de santé et de protection sociale».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 16 juin 2010.

Lors de sa 464e session plénière des 14 et 15 juillet 2010 (séance du 15 juillet 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 89 voix pour et 5 abstentions.

1.   Recommandations

1.1   Le CESE considère qu'il convient d'adopter les mesures suivantes pour faire face aux conséquences du vieillissement de la population sur les systèmes de santé et de protection sociale:

1.1.1

Au niveau national:

promouvoir «le vieillissement en bonne santé» en tant que thématique transversale,

renforcer la prévention, promouvoir la santé et l'éducation à la santé dans tous les groupes d'âge,

améliorer la qualité des soins et de l'assistance aux personnes âgées,

intégrer les soins palliatifs dans les prestations d'assistance,

développer et adapter des thérapeutiques en fonction de l'âge du patient en prenant en compte les personnes âgées dans des études cliniques et des études sur la comorbidité,

développer des structures de soin et d'assistance adaptées aux personnes âgées, ainsi que des alternatives en matière de logement,

apprécier, en appliquant l'évaluation des technologies de la santé (Health Technology Assessment – HTA), la téléassistance et les solutions technologiques, dont l'assistance à l'autonomie à domicile (AAD) et autres technologies de la santé (environnement de soin), qui cherchent à promouvoir l'autonomie et à améliorer l'efficacité et la qualité des soins dispensés aux personnes âgées,

créer un réseau étendu et décentralisé de structures proches du domicile qui permettent un contact direct entre les personnes âgées et le personnel médical et soignant («désinstitutionnalisation»),

favoriser les réseaux régionaux et locaux des acteurs concernés dans le but de réaliser l'objectif «Vieillir en bonne santé»,

introduire un dispositif de couverture obligatoire garantissant l'assistance aux personnes âgées (par ex. une assurance-dépendance), en légiférant au niveau national,

ouvrir les systèmes nationaux de santé et de protection sociale aux essais sur modèle, clôturés par une évaluation, afin de permettre à ces systèmes d'évoluer,

assouplir les systèmes de participation aux coûts des prestations et d'assurance complémentaire,

élaborer et mettre en œuvre des stratégies et politiques nationales en faveur de l'apprentissage tout au long de la vie au niveau national, régional et local,

veiller à ce qu'il soit possible de concilier vie familiale, vie professionnelle et assistance,

renforcer le bénévolat,

reconnaître la valeur des soignants et leurs besoins.

1.1.2

Au niveau européen:

élaborer un plan d'action en faveur du vieillissement en bonne santé et dans la dignité, en prenant appui sur les conclusions du Conseil «Emploi, politique sociale, santé et consommateurs» (EPSCO) du 30 novembre 2009,

accorder la priorité au thème «Vieillir en bonne santé, dans la dignité et de manière active» dans le contexte de la stratégie Europe 2020,

harmoniser impérativement la terminologie, les définitions, outils d'évaluation, vademecums, critères, procédures, etc. Ce problème est apparu pour la première fois il y a vingt ans maintenant, mais aucun progrès important n'a encore été accompli dans ce domaine,

mettre en exergue le thème «Vieillir en bonne santé, dans la dignité et de manière active» à l'occasion des Années européennes 2010 (Année européenne de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale), 2011 (Année européenne du volontariat) et 2012 (Année européenne du vieillissement actif et en bonne santé et de la solidarité intergénérationnelle), ainsi qu'au cours des présidences correspondantes du Conseil,

intégrer l'évolution démographique dans la programmation conjointe de la Commission européenne en matière de recherche (joint programming),

développer une charte européenne des droits des personnes ayant besoin d'assistance et de soins,

instaurer, au sein de la Commission, un groupe de travail interservices spécifique en charge du thème «Le vieillissement et la santé» (y compris «les soins de santé, l'assistance, les pensions et la durabilité financière»),

mettre en place, au CESE, une «table ronde», une «catégorie» ou un «groupe d'étude permanent» sur le thème «Vieillir en bonne santé, dans la dignité et de manière active dans le cadre du dialogue intergénérationnel» en vue d'élaborer une stratégie interdisciplinaire dans ces domaines,

intégrer la gérontologie et les études démographiques en tant que priorités dans le huitième programme-cadre de recherche,

mettre sur pied un projet intitulé «Personnes âgées et transfert de connaissances» dans le cadre du programme «Science et société»,

inventorier et comparer les objectifs des États membres en matière de santé et leur caractère contraignant,

soutenir les États membres dans la mise en œuvre des mesures susmentionnées au moyen de financements au titre des Fonds structurels et de cohésion et de la méthode ouverte de coordination,

appuyer l'échange de bonnes pratiques en matière de solutions personnalisées dans le domaine des technologies de l'information et de la communication (TIC), par exemple dans le cadre du programme Interreg, avec le soutien des Fonds structurels,

promouvoir l'évaluation multinationale des technologies de la santé (HTA) afin d'apprécier les nouvelles solutions proposées par les TIC concernant les besoins des personnes âgées en matière de soins,

sensibiliser en permanence à l'apprentissage tout au long de la vie, ainsi qu'à l'échange et à la coordination des programmes européens de formation et de formation continue en mettant l'accent sur «le vieillissement et la santé»: passer de l'apprentissage tout au long de la vie à l'«apprentissage pour une vie plus longue» (learning for a long life),

créer une nouvelle image de la vieillesse, notamment dans les médias,

élaborer des lignes directrices européennes sur la compatibilité entre vie familiale, vie professionnelle et assistance.

2.   Observations générales

2.1   Introduction

2.1.1   L'allongement de l'espérance de vie a pour corollaire le vieillissement de la population de l'Union européenne. D'après les prévisions d’Eurostat, le pourcentage de personnes âgées de 65 ans et plus, qui était de 17,1 % de la population en 2008, sera de 30 % en 2060. Le ratio moyen entre les personnes en âge de travailler (15-64 ans) et les personnes âgées de 65 ans et plus, qui est aujourd'hui de 4 pour 1, sera de 2 pour 1 en 2050.

2.1.2   Entre 2026 et 2030, une proportion importante de la population active quittera le marché du travail. Dès lors, avec un taux de naissances plus faible, le nombre d'inactifs s'accroîtra par rapport au nombre d'actifs.

2.1.3   Dans une communication récente consacrée à ce thème (1), la Commission européenne constate qu'il ne reste plus beaucoup de temps aux gouvernements pour mettre en œuvre des mesures visant à gérer les problèmes posés par le vieillissement avant que la génération du baby-boom n'arrive à la retraite. C'est dans le contexte ainsi tracé qu'elle a invité le CESE, le 18 septembre 2009, à élaborer un avis exploratoire afin de déterminer de quelle manière les efforts que consentent les États membres pour gérer ce problème pourraient être appuyés par des initiatives de l'Union dans le domaine de la santé. Cet avis s'appuie sur plusieurs avis élaborés précédemment par le CESE sur ce thème. (2)

2.1.4   Les présidences tchèque (premier semestre 2009), suédoise (second semestre 2009) et espagnole (premier semestre 2010) du Conseil ont fait du thème «Vieillir en bonne santé, dans la dignité et de manière active» une priorité de leurs programmes de travail.

2.1.5   La société et les responsables du secteur des soins de santé doivent développer une nouvelle image du vieillissement qui corresponde à l'évolution démographique et rende justice à la dignité des personnes âgées.

2.1.6   Ce n'est pas le vieillissement de la population en soi qui occasionne d'importantes dépenses mais le fait de ne pas vieillir en bonne santé. Aussi cet avis comportera-t-il essentiellement des recommandations pour vieillir en bonne santé.

2.2   Développement des systèmes de santé et de protection sociale, des services de santé et innovation dans ces domaines

2.2.1   L'évolution démographique exige que l'on continue à développer les systèmes de santé et de protection sociale, les services de santé ainsi que les services connexes du point de vue de leur organisation et de leur capacité, dans le but i) de prendre en compte les besoins des personnes âgées, ii) de garantir que les soins requis soient prodigués à toutes les personnes qui en ont besoin pour qu'elles puissent conserver leur autonomie et leur dignité et iii) de permettre à tous les groupes de population, sans distinction d'âge, de sexe, de situation financière et de domicile, d'accéder aux mêmes soins de qualité (comprenant la promotion de la santé, la prévention, le traitement, la réhabilitation et les soins palliatifs).

2.2.2   À cet égard, il ne faut pas seulement prendre en considération les attentes des personnes âgées à l'égard des systèmes de santé et de protection sociale, mais aussi la responsabilité qu'a chaque personne d'assumer en temps voulu et préventivement son propre vieillissement et, partant, les attentes de la société à l'égard des personnes vieillissantes.

2.2.3   Pour permettre à la politique communautaire de soutenir les soins de santé et les soins à long terme aux personnes âgées, l'UE devrait inventorier et comparer les objectifs des États membres en matière de santé (3) ainsi que leur caractère contraignant. Il convient également de déterminer dans quelle mesure la prévention et la promotion de la santé sont déjà des éléments à part entière des systèmes de santé.

3.   Observations particulières

3.1   Les domaines suivants requièrent une attention particulière:

3.1.1   La prévention

3.1.1.1   Le processus du vieillissement s'enclenche dès la naissance et se poursuit tout au long de la vie. Aussi est-il essentiel que la vie entière - dans la mesure du possible - se déroule dans de bonnes conditions. Il importe de bénéficier d'un bon début et d'une bonne fin de vie. Vieillir en bonne santé est un processus qui commence bien avant la retraite et est influencé par les conditions de vie et de travail ainsi que par la disponibilité de ressources. Si l'on est conscient de cette réalité, il n'est que logique de vouloir vieillir de manière responsable (4). Le vieillissement responsable exige un apprentissage tout au long de la vie. À cette fin, il convient d’élaborer, dans le domaine de l’éducation à la santé, de nouvelles stratégies et politiques nationales, régionales et locales en faveur de l’apprentissage tout au long de la vie, couvrant tous les types d’apprentissage (formel, non formel et informel). Cette démarche inclut tous les niveaux d’apprentissage, de l’éducation pré-primaire à la formation continue. Agir de manière responsable pour rester en bonne santé en appliquant activement des mesures de prévention (alimentation, sport, mode de vie sain, évitement des facteurs de risque), tout comme l'éducation à la santé et la promotion de celle-ci sont autant de facteurs qui contribuent à ce que les personnes âgées puissent rester le plus longtemps possible chez elles et dans un environnement social familier. Il convient de se préoccuper en permanence du rôle des technologies à cet égard et de l'évaluer de manière continue.

3.1.1.2   Les systèmes de soins de santé doivent davantage mettre l'accent sur la prévention. Celle-ci peut en effet permettre aux individus d'exercer une activité professionnelle plus longtemps mais aussi favoriser leur adaptabilité au marché de l'emploi. Un niveau élevé de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs ainsi que l'amélioration de l'ergonomie sur le lieu de travail peuvent contribuer sensiblement au prolongement d'une vie active en bonne santé et, partant, permettre notamment de relever le défi démographique.

3.1.1.3   Une évolution des tâches avec l’âge, en fonction des compétences et des besoins (par exemple le passage de tâches exécutives à des activités de préparation, de conseil, d’accompagnement, mais aussi de guidance et de planification) peut favoriser un tel allongement de la vie active. Elle implique que les personnes âgées restent plus longtemps intégrées dans le contexte social et socio-économique et continuent de recevoir des incitants qui les encouragent à rester performantes. De cette manière, il est possible de convertir les années de vie supplémentaires en bonne santé en années gratifiantes et productives. Cela signifie naturellement qu’il convient de prévoir les mesures de qualification et d’accompagnement requises pour lancer et développer les processus décrits précédemment (l’apprentissage tout au long de la vie, la qualification professionnelle, notamment la certification des compétences acquises au cours de la vie professionnelle, etc.). Les entreprises doivent prévoir des mesures en matière de promotion de la santé, de prévention des maladies et des accidents, afin de mettre en place des conditions de travail saines.

3.1.1.4   L'intégration sociale et socioculturelle de toute personne qui part à la retraite est essentielle. Prévenir l'isolement social, c'est prévenir les dépressions. Les personnes âgées sont particulièrement bien placées pour mettre en œuvre leurs aptitudes et leur expérience sociales, par exemple en exerçant une activité bénévole. Cela étant, toute personne devrait être encouragée à exercer des activités bénévoles dès sa jeunesse.

3.1.2   Prestations de soins de santé

3.1.2.1   Une importance de plus en plus grande est accordée à la prestation de soins de santé axés sur le patient et à la garantie que celui-ci soit associé à leur élaboration et à leur conception.

3.1.2.2   La fréquence des maladies chroniques (diabète, rhumatismes, maladies cardiovasculaires), des maladies dégénératives du système nerveux (démence et maladie d'Alzheimer), de l'appareil locomoteur et des yeux, mais aussi des cancers augmente avec l'âge. Cette réalité pose des défis particuliers aux professions de la santé ainsi que sur le plan des diagnostics, des traitements et des soins de santé en tant que tels.

3.1.2.3   Il convient de développer des services de santé favorisant les soins intégrés et personnalisés, centrés sur le patient.

3.1.2.4   Les professionnels de la santé doivent bénéficier d'une formation plus spécifique et de meilleure qualité: les membres de ces professions (médecins, pharmaciens, personnel soignant) et les chercheurs doivent être davantage familiarisés avec les spécificités de la médecine gériatrique et recevoir une formation initiale et continue renforcée dans ce domaine. Les professionnels de la santé devraient également recevoir une formation spécifique concernant l'importance des mesures de prévention et des mesures visant à promouvoir la santé à un âge avancé (p.ex. prévention des chutes, alimentation saine, etc.).

3.1.2.5   Développement et adaptation de thérapeutiques en adéquation avec l'âge du patient: les pathologies multiples, les modifications du métabolisme avec l'âge et, souvent, les multithérapies, exigent une connaissance exacte des interférences entre les organes et les systèmes du corps des personnes âgées. Elle requiert une gestion spécifique de la médication ainsi que la sélection et l'adaptation des médicaments et de leur dosage au métabolisme des personnes âgées. Des conseils personnalisés dans les pharmacies publiques, assortis d'une vérification des interactions et de TIC performantes permettant de disposer d'informations sur les médicaments et leurs interactions, peuvent contribuer à réduire au maximum les effets secondaires indésirables de certains médicaments et optimaliser le succès du traitement.

3.1.2.6   Promotion du contact direct et permanent entre les personnes âgées et les professionnels de la santé: plus la personne âgée est dépendante, plus ce contact est important si l'on veut assurer le succès du traitement et éviter l'isolement et la dépression.

3.1.3   Prestations d'assistance

3.1.3.1   La qualité des prestations d'assistance devrait être garantie par des normes, être contrôlable et faire l'objet d'une évaluation. Il serait opportun d'élaborer une charte européenne des droits des personnes ayant besoin d'assistance et de soins, qui devrait notamment englober la protection contre les maltraitances commises dans le contexte des soins. Les nouvelles technologies (notamment l'assistance à l'autonomie à domicile ou AAD) qui permettent de mener une vie autonome peuvent apporter une contribution à cet égard. Les nouvelles technologies éventuelles doivent toutefois être jugées adéquates et ne doivent en aucun cas entraîner de nouvelles inégalités en matière de soins de santé et d'assistance fournis au niveau national.

3.1.3.2   Pour les personnes âgées, la réadaptation doit primer sur les soins. Les soins institutionnalisés ne sauraient être une voie à sens unique: il faut que les personnes âgées puissent quitter les institutions et rentrer chez elles. Actuellement, les institutions de santé et de soins satisfont encore trop peu à cette exigence.

3.1.3.3   Développement d'institutions de santé et de soins adaptées aux personnes âgées et autres possibilités de logement: il importe d'instaurer un système de transition aisé et réversible entre la santé, la maladie, les soins et la vie sociale, qui offre, en cas de besoin, une aide médicale et une assistance de qualité et qui permette aux personnes âgées de rester le plus longtemps possible dans un environnement «normal», c'est-à-dire multigénérationnel. Ceci implique une bonne coordination entre soins de santé et assistance. Dans le même temps, il convient de prévoir, à côté des institutions pour les soins de longue durée, davantage de centres de soins palliatifs et d'accompagnement des personnes en fin de vie, tant ambulatoires que stationnaires, et de veiller à entretenir une «culture des soins palliatifs».

3.1.3.4   À cette fin, il convient de créer un réseau étendu, décentralisé et de proximité pour les soins à domicile (désinstitutionnalisation). Il faut encourager la mise en place d'un réseau de soins non institutionnel qui englobe tous les services nécessaires (soins ambulatoires, soins à domicile, petite assistance). Ceci doit se traduire par une organisation au niveau régional et un meilleur financement structurel dans le but de garantir l'existence d'institutions et de structures adéquates dans les villes mais aussi sur l'ensemble du territoire, y compris dans les campagnes.

3.1.3.5   La valeur d'une société se mesure à la manière dont elle traite ses personnes âgées. Pour ce qui est de ce traitement comme de l’assistance aux personnes âgées, le bénévolat a pris une place importante. Chaque citoyen doit, dans les limites de ses possibilités, assumer à l'avenir une responsabilité envers les personnes malades, handicapées et âgées – mais aussi être récompensé pour son engagement.

3.1.4   Recherche dans les domaines susmentionnés

Il convient d’intégrer l’évolution démographique dans la programmation conjointe de la Commission européenne en matière de recherche (joint programming). Dans le prolongement des projets «WhyWeAge» et «Futurage» du septième programme-cadre, le huitième programme-cadre devrait accorder la priorité à la gérontologie (étude de la vieillesse et du vieillissement) et à la recherche démographique. Il serait également opportun d’introduire une section thématique intitulée «Personnes âgées et transfert de connaissances» dans le programme «Science et société» de la direction générale de la recherche. Les activités de recherche suivantes sont impératives à cet égard:

3.1.4.1   Recherche en matière de prévention

Quelles sont les mesures de prévention cruciales pour l'avenir qui permettent de préserver la santé au travail?

Quelles sont les conséquences à long terme de certains modes de vie sur l'état de santé en général et certaines maladies en particulier?

Quelles sont les incidences des différences de modes de vie résultant du genre, de la culture et du bagage migratoire sur un vieillissement en bonne santé?

Comment éviter les chutes et les fractures?

Quelles sont les mesures de prévention utiles pour préserver les capacités physiques, sensorielles, cognitives et sociales?

Comment motiver les personnes pour qu'elles adoptent un comportement responsable concernant leur santé et leur vieillissement? (Promouvoir les comportements sains, inciter les personnes âgées à recourir à des mesures et offres visant à préserver leur santé).

Comment motiver les personnes pour qu'elles modifient leur comportement en vue d'une meilleure adaptation au milieu social?

3.1.4.2   Recherche médicale et thérapeutique

sur l'épidémiologie et l'étiologie des pathologies liées à l'âge, l'amélioration des mesures prophylactiques;

sur le processus de vieillissement biologique du début à la fin de la vie;

sur les pathologies multiples, les maladies chroniques, le cancer, les maladies cardiovasculaires, les rhumatismes et les maladies de l'appareil locomoteur, les pathologies affectant la vue (par exemple la cataracte), les maladies neurodégénératives comme l'Alzheimer, etc. À cet égard, il convient également de prendre en compte l'amélioration des moyens diagnostiques afin de poser un diagnostic précoce et, partant, pouvoir commencer rapidement un traitement;

sur les possibilités de traitement des personnes âgées souffrant de pathologies spécifiques à la vieillesse: les processus biochimiques ayant une incidence sur la résorption, le métabolisme, l'efficacité des médicaments ainsi que sur la médication et le dosage doivent être mieux compris et pris en compte dans le traitement. Les bases thérapeutiques nécessaires font largement défaut, étant donné que les essais cliniques et les tests de médicaments ne sont la plupart du temps réalisés que sur de jeunes adultes.

3.1.4.3   Recherche en matière d'assistance

Comment développer de nouvelles technologies qui répondent aux besoins des personnes âgées?

Quels sont les meilleurs environnements et formes d'administration de soins?

Comment améliorer les qualifications et les conditions de travail du personnel soignant, notamment en relation avec les nouvelles technologies?

Comment les solutions techniques (par exemple la robotique) peuvent-elles contribuer à soulager les proches aidants naturels et améliorer les conditions de travail du personnel soignant, sans porter atteinte à l'intégrité et la dignité de la personne soignée?

Comment mieux adapter les offres en matière de soins de santé aux attentes et aux besoins des personnes âgées dépendantes?

Quels sont les nouveaux concepts susceptibles de contribuer au développement et à la promotion des soins à domicile? En font notamment partie les aides financières et la reconnaissance sociale des proches aidants naturels (par exemple, la possibilité, pour le salarié, de conclure un accord avec son employeur dans le but de réduire temporairement son temps de travail pour prodiguer des soins, reconnaissance de périodes d'assistance aux fins de l'assurance-dépendance, allocation dépendance, etc.).

Quelles sont les nouvelles pistes en matière de conception des soins, du traitement de la douleur et de soins palliatifs pour que la personne âgée termine sa vie dans la dignité?

3.1.4.4   Recherche en matière des systèmes de santé

Dans le secteur de la santé publique, la recherche devrait mettre l'accent sur les systèmes de soins de santé et de soins de longue durée ainsi que sur l'intégration de services et mettre au point une «feuille de route» pour la recherche sur le vieillissement. Il y a lieu d'évaluer si les systèmes de santé et de protection sociale des États membres sont préparés aux défis que pose l'évolution démographique. Quelle est la place accordée par exemple à la prévention? Quel est le pourcentage des dépenses de santé qui y est consacré? Quelle est la proportion de personnes soignées à domicile ou en institutions?

Quelle est l’importance des ressources économisées grâce au travail et à l’assistance bénévoles, et du travail non rémunéré presté à domicile, en particulier par les femmes?

Compte tenu notamment du recours aux nouvelles technologies et à la santé en ligne, il est nécessaire de mener des recherches sur l'effet de celles-ci sur la santé et d'évaluer les technologies de la santé avant d'y avoir recours pour traiter et soigner les personnes âgées. Ces technologies tiennent-elles leurs promesses dans la pratique? Les groupes les plus vulnérables tirent-ils profit de leur utilisation?

Il conviendrait de réaliser, en coopération avec les États membres, une étude clinique et socio-économique sur l'efficience et l'efficacité des investissements consentis dans l'amélioration des systèmes de soins et de santé destinés aux personnes âgées.

Comment améliorer les interfaces entre les soins de santé et l'accompagnement social?

3.1.5   Développement de nouvelles technologies

3.1.5.1   Les charges liées à l'évolution démographique sont toutefois contrebalancées par un potentiel énorme, essentiellement concernant de nouveaux produits et services destinés à une société vieillissante. Le facteur économique «âge» peut ainsi devenir un moteur économique source de croissance et d'emploi dans le secteur des services de santé, des nouvelles technologies, des médicaments, des produits médicaux et des technologies médicales mais aussi du tourisme et du bien-être. Selon des estimations de la Commission, les conséquences de l'évolution démographique sur les dépenses de santé peuvent être considérables. En effet, les projections indiquent que les dépenses publiques en matière de santé dans l'UE augmenteront de 1,5 point de pourcentage du PIB. De nouveaux produits et services devraient être développés et mis sur le marché; la valeur ainsi créée sera fonction du volume du marché, du prix ainsi que du degré de valeur ajoutée.

3.1.5.2   Alors que pour le «marché primaire de la santé», les économies potentielles sur les coûts sont prioritaires et détermineront si l'AAD prendra place ou non dans le catalogue des prestations des caisses de maladie ou de dépendance, le «marché secondaire de la santé» jouit en l'occurrence d'une liberté d'action et d'une flexibilité sensiblement plus grandes. À cet égard, il est nécessaire de développer des modèles économiques solides et abordables, financés par la vente, la location ou la location avec option d'achat. Dans le même temps, il convient de veiller à ce que le «marché secondaire de la santé» évite de créer des inégalités.

3.1.5.3   Il y aurait lieu de promouvoir la collecte et l'échange de données socio-économiques sur les conséquences de l'introduction des technologies d'assistance, en se fondant par exemple sur les projets pilotes en cours lancés dans le cadre du programme pour la compétitivité et l'innovation. En parallèle, il conviendrait de soutenir également l'échange de bonnes pratiques en matière de TIC concernant les solutions visant à améliorer la qualité de vie des personnes âgées, par exemple dans le cadre du programme Interreg et avec le soutien des Fonds structurels. Dans le cadre de cette recherche, il serait bon de procéder à une évaluation de ces technologies en recueillant l'avis des utilisateurs notamment sur la convivialité et les avantages qu'elles présentent.

3.1.5.4   Si le progrès technologique et les méthodes de reconnaissance et de traitement précoces qui ont été développées récemment sont l'une des principales causes de l'augmentation des coûts, la mise en œuvre judicieuse de ces avancées peut toutefois engendrer des économies à long terme. Il conviendrait de donner un rôle plus important à l'évaluation des technologies de la santé, afin de déterminer la portée et la prise en charge financière des prestations de santé et d'assistance. Aussi une utilisation effective et une gestion efficace de ces technologies sont-elles déterminantes pour l'évolution future des dépenses. Cela étant, les nouvelles technologies ne peuvent remplacer le contact direct entre les personnes âgées et le personnel soignant et doivent rester abordables.

3.1.6   Durabilité financière

3.1.6.1   Dans presque tous les États membres, les prestations et allocations de dépendance destinées aux personnes âgées sont financées par les systèmes de protection sociale, ce qui signifie que chacun de ces systèmes nécessite un financement durable et sûr.

3.1.6.2   La dépendance reste synonyme de risque de pauvreté, en particulier pour les retraités qui ont une petite pension ou de faibles revenus. En Europe, nombre de personnes âgées ne peuvent pas se permettre des soins adéquats. Aussi faut-il créer dans tous les pays de l'UE, en fonction de l'organisation de leurs systèmes de protection sociale (systèmes d'assurance sociale ou systèmes financés par la fiscalité), une couverture pour les soins de santé et adapter les couvertures existantes aux défis que posera l'évolution démographique dans les prochaines décennies, afin de garantir à chaque citoyen l'accès aux prestations de soins de santé, conformément au droit de l'UE, aux différentes dispositions et pratiques nationales et aux besoins individuels. La couverture des soins de santé devrait s'appliquer aux traitements stationnaires mais aussi aux traitements ambulatoires.

3.1.6.3   Le transfert d'une partie des soins de longue durée sur l'assurance-santé privée doit être faite d'une manière réfléchie en concertation avec les parties concernées, afin d'éviter que cette tendance complique l'accès à ces services. Il importe que les États membres continuent de s'assurer à l'avenir que les personnes âgées disposent d'un accès universel aux soins primaires et à la prévention. Cet objectif ambitieux exige la mobilisation de tous les instruments de financement disponibles, tant les systèmes de protection sociale prévus par la législation que les mécanismes complémentaires.

3.1.6.4   De nouvelles structures de remboursement devraient permettre également à des parents éloignés de percevoir une allocation au titre de l'assistance prêtée à des personnes dépendantes. Il importe toutefois que la qualité des soins soit garantie dans ces cas de figure aussi. En outre, par analogie avec le congé de maternité, il conviendrait d'introduire un congé pour assistance. Par ailleurs, sur le plan politique, il y a lieu d'élaborer en priorité et en concertation avec les partenaires sociaux dans le cadre du dialogue social (comme dans le cas du congé parental p.ex.), des mesures permettant de concilier vie familiale, professionnelle et assistance à des tiers.

3.1.6.5   Il est possible de réduire la pression financière sur les systèmes de protection sociale en prenant une série de mesures à l'échelon national, par exemple en recourant davantage aux médicaments génériques, en diminuant la taxe sur la valeur ajoutée sur les médicaments et en menant des négociations sur les prix avec l'industrie pharmaceutique.

3.2   Réseaux locaux – «L'unité la plus petite est la plus efficace et la plus proche du citoyen»

3.2.1   En fonction de leur état de santé, les personnes âgées peuvent offrir beaucoup à la société. Des circonstances personnelles ou professionnelles font qu'il est de plus en plus rare que les familles actuelles regroupent plusieurs générations sous le même toit. Des acteurs privés ou municipaux peuvent remédier à cette situation avec des réseaux locaux: les structures proposant des services d'intérêt général doivent être adaptées aux échelons régional et local pour garantir un bon niveau d'assistance et d'aide.

3.2.2   Les plateformes d'acteurs locaux, les partenaires sociaux, les ONG et les responsables du secteur de la santé qui apportent leur contribution à la coopération et à la coordination des services sont quelques exemples de réseaux locaux. Les initiatives de ce type offrent par ailleurs de bonnes possibilités pour un financement au titre des fonds structurels et de cohésion. L'UE devrait mettre en évidence les modèles de bonnes pratiques telles que les initiatives destinées à encourager «l'engagement citoyen» et l'autonomisation dans le secteur de l'assistance et des soins à domicile.

3.2.3   Les maisons intergénérationnelles représentent une nouvelle forme d'échange entre plusieurs générations en dehors du cercle familial: elles regroupent sous le même toit les activités de jardins d'enfants, clubs de jeunesse et centres d'accueil de jour pour les personnes âgées (5).

3.2.4   D'autres services tels que l'assistance de jour et de nuit (surtout dans le cas de personnes atteintes de démence) doivent également être prévus.

3.3   Politique européenne de la santé

3.3.1   Les systèmes de santé des États membres doivent répondre aux enjeux de l'évolution démographique et être renforcés dans cette perspective. À cet égard, il convient de garder à l'esprit qu'en vertu du traité de Lisbonne, l'organisation et la gestion de ces systèmes sont l'affaire des États membres puisqu'ils relèvent de leur responsabilité et que le rôle de l'UE se borne à appuyer les États membres dans leur tâche. Les systèmes de santé des États membres sont extrêmement différents, en raison de leur organisation (des assurances privées coexistent avec des systèmes publics fondés sur les modèles de Beveridge, de Bismarck ou des modèles mixtes), de leur développement, des différences en matière de potentiel économique ainsi que des attentes et des exigences qui leur sont posées. Toutefois, comme l'exige notamment la Charte européenne des droits fondamentaux, l'accessibilité aux soins de santé doit être garantie.

3.3.2   La méthode ouverte de coordination (MOC) peut contribuer à une organisation et à une gestion plus efficaces de la politique de santé. La coopération devrait être axée sur l'échange d'expériences et la présentation d'exemples concrets concernant les trois thèmes principaux: «accès», «qualité» et «viabilité à long terme».

3.3.3   Conformément au principe de subsidiarité, c'est toujours aux États membres qu'appartient à titre principal la compétence en matière de politique sociale. L'UE peut toutefois aider ceux-ci au moyen de mesures d'appui, par exemple en complétant ou en encourageant la coopération entre les États. Dans le domaine social, la MOC est un instrument utile pour améliorer les principes d'accès, d'adaptation et de durabilité.

3.3.4   Le thème du «Vieillir en bonne santé, dans la dignité et de manière active» doit devenir une priorité de la stratégie Europe 2020, se reflétant dans l'élaboration d'un plan d'action. Ceci exige d'intensifier et de poursuivre encore la coopération entre les directions générales de la Commission. Il serait par conséquent opportun de créer un groupe de travail interservices spécifique sur «Le vieillissement et la santé», qui serait chargé des thématiques «soins de santé, assistance, pensions et durabilité financière». Il y a lieu de renforcer la prévention, la promotion de la santé et l'éducation à la santé et d'ancrer ces principes dans tous les domaines d'action de l'UE, afin que les États membres puissent s'inspirer de cet exemple.

3.3.5   Le CESE devrait continuer d'examiner en permanence le thème du «Vieillir en bonne santé, dans la dignité et de manière active» dans le cadre du dialogue intergénérationnel, en mettant en place une «table ronde», une «catégorie» ou un «groupe d'étude permanent», en vue d'élaborer une stratégie interdisciplinaire concernant la démographie.

3.3.6   L'UE devrait soutenir les États membres dans la mise en œuvre de mesures nationales au moyen de financements provenant des Fonds structurels et de cohésion.

3.3.7   Par ailleurs, le CESE plaide pour la poursuite du soutien à l'apprentissage tout au long de la vie dans le domaine du vieillissement et de la santé au niveau européen et pour le développement de stratégies spécifiques afin d'appliquer ce principe à l'échelon national, régional et local.

Bruxelles, le 15 juillet 2010.

Le président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  COM(2009) 180 final.

(2)  Voir liste des avis du CESE sur le site: http://www.eesc.europa.eu/sections/soc/index_fr.asp

(3)  Voir à ce sujet: Observatoire européen des systèmes et politiques de santé (http://www.euro.who.int/en/home/projects/observatory/activities/research-studies-and-projects)

(4)  «Enseigne-nous à bien compter nos jours, Afin que nous appliquions notre cœur à la sagesse» (Psaume 90,12).

(5)  http://www.mehrgenerationenhaeuser.de


Top