ISSN 1725-2431

doi:10.3000/17252431.C_2009.318.fra

Journal officiel

de l'Union européenne

C 318

European flag  

Édition de langue française

Communications et informations

52e année
23 décembre 2009


Numéro d'information

Sommaire

page

 

I   Résolutions, recommandations et avis

 

AVIS

 

Comité économique et social européen

 

456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009

2009/C 318/01

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Comment utiliser la flexicurité en matière de restructuration, dans le contexte du développement mondial (avis exploratoire demandé par la présidence suédoise)

1

2009/C 318/02

Avis du Comité économique et social européen sur la Coopération macrorégionale — Étendre la stratégie pour la mer Baltique à d'autres macrorégions en Europe (avis exploratoire)

6

2009/C 318/03

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Comment faire de la stratégie de l'UE relative aux dommages liés à l'alcool une stratégie durable, de long terme et multisectorielle (avis exploratoire)

10

2009/C 318/04

Avis du Comité économique et social européen sur Le lien entre l'égalité des sexes, la croissance économique et le taux d'emploi (avis exploratoire)

15

2009/C 318/05

Avis du Comité économique et social européen sur La diversité des formes d'entreprise (avis d'initiative)

22

2009/C 318/06

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Aliments du commerce équitable: autorégulation ou législation? (avis d'initiative)

29

2009/C 318/07

Avis du Comité économique et social européen sur la Dimension septentrionale des régions défavorisées (avis d'initiative)

35

2009/C 318/08

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Promouvoir les politiques et les programmes en faveur de l'efficacité énergétique à l'échelon des utilisateurs finaux (avis d'initiative)

39

2009/C 318/09

Avis du Comité économique et social européen sur L'impact de la crise mondiale sur les principaux secteurs manufacturiers et des services européens (avis d'initiative)

43

2009/C 318/10

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Travail et pauvreté: vers une approche globale indispensable (avis d’initiative)

52

2009/C 318/11

Avis du Comité économique et social européen sur le Rapport de Larosière

57

2009/C 318/12

Avis du Comité économique et social européen sur L’avenir de la politique agricole commune après 2013 (supplément d'avis)

66

 

III   Actes préparatoires

 

Comité économique et social européen

 

456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009

2009/C 318/13

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen: Vers une stratégie européenne en matière d'e-JusticeCOM(2008) 329 final

69

2009/C 318/14

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Des médicaments sûrs, innovants et accessibles: une vision nouvelle du secteur pharmaceutiqueCOM(2008) 666 final

74

2009/C 318/15

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil instituant un instrument européen de microfinancement en faveur de l’emploi et de l’inclusion (instrument de microfinancement Progress)COM(2009) 333 final — 2009/0096 (COD)

80

2009/C 318/16

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil modifiant la décision no 1672/2006/CE du Parlement européen et du Conseil établissant un programme communautaire pour l'emploi et la solidarité sociale — ProgressCOM(2009) 340 final — 2009/0091 (COD)

84

2009/C 318/17

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant les obligations des opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marchéCOM(2008) 644 final — 2008/0198 (COD)

88

2009/C 318/18

Avis du Comité économique et social européen sur le Livre vert sur la gestion des biodéchets dans l'Union européenneCOM(2008) 811 final

92

2009/C 318/19

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une approche communautaire de la prévention des catastrophes naturelles ou d'origine humaineCOM(2009) 82 final

97

2009/C 318/20

Avis du Comité économique et social européen sur le Livre vert — RTE-T: un réexamen des politiques. Vers une meilleure intégration du réseau transeuropéen de transport au service de la politique commune des transportsCOM(2009) 44 final

101

2009/C 318/21

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: L'UE, l'Afrique et la Chine: vers un dialogue et une coopération trilatérauxCOM(2008) 654 final

106

2009/C 318/22

Avis du Comité économique et social européen sur la Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: Une stratégie de l’Union européenne pour investir en faveur de la jeunesse et la mobiliser — Une méthode ouverte de coordination renouvelée pour aborder les enjeux et les perspectives de la jeunesseCOM(2009) 200 final

113

2009/C 318/23

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 998/2003 concernant les conditions de police sanitaire applicables aux mouvements non commerciaux d’animaux de compagnieCOM(2009) 268 final — 2009/0077 (COD)

121

FR

 


I Résolutions, recommandations et avis

AVIS

Comité économique et social européen

456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009

23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/1


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Comment utiliser la flexicurité en matière de restructuration, dans le contexte du développement mondial» (avis exploratoire demandé par la présidence suédoise)

2009/C 318/01

Rapporteur: M. SALVATORE

Corapporteur: M. CALVET CHAMBON

Dans son courrier daté du 18 décembre 2008, et conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, Cecilia MALMSTRÖM, vice-premier ministre adjoint chargé des affaires européennes, a demandé au CESE, au nom de la future présidence suédoise, d'élaborer un avis exploratoire sur le thème:

«Comment utiliser la flexicurité en matière de restructuration, dans le contexte du développement mondial».

La commission consultative des mutations industrielles, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 septembre 2009 (rapporteur: M. SALVATORE; corapporteur: M. CALVET CHAMBON).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre 2009 et 1er octobre 2009 (séance du 1er octobre 2009), le Comité économique et soccial européen a adopté le présent avis par 111 voix pour, 0 voix contre et 9 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

La Commission a défini la «flexicurité» comme «une stratégie intégrée visant à améliorer simultanément la flexibilité et la sécurité sur le marché du travail». Dans le présent document de discussion, le CESE souligne certains aspects du concept de flexicurité qu'il considère, en ces temps de crise, comme particulièrement utile pour permettre au plus grand nombre possible de travailleurs de conserver leur emploi et pour donner aux personnes se trouvant en dehors du marché de l'emploi les meilleures chances de retrouver une activité dans les meilleurs délais. Employeurs et employés doivent travailler ensemble dans le cadre du dialogue social pour assurer qu’autant de travailleurs que possible soient retenus sur le marché du travail.

1.2

Dans ces temps de crise profonde et de forte croissance du chômage, il est d'autant plus nécessaire de ne pas considérer la flexicurité comme un ensemble de mesures destinées à faciliter le licenciement des travailleurs actuellement actifs ou à mettre à mal la protection sociale en général et celle des chômeurs plus spécifiquement. Le CESE considère que les mesures renforçant les aspects liés à la sécurité (dans son acception la plus large) propres à la flexicurité doivent être placées en tête des priorités.

1.3

Le CESE a souligné la portée de la flexicurité interne dans ses précédents avis. La crise met en exergue l'importance des mesures de flexicurité interne permettant aux entreprises de s'adapter à la brusque diminution des commandes sans qu'elles soient contraintes de licencier leurs employés. Les entreprises disposant de comptes épargne temps approuvés par les partenaires sociaux sont nettement plus aptes à réagir rapidement à la nouvelle donne du marché, conséquence de la crise, que celles qui ne peuvent compter sur ce type d'outil. L'une des leçons évidentes tirées de la crise est que les comptes d'épargne temps et l'aménagement du temps de travail doivent être promus par les partenaires sociaux. Le CESE considère qu'il est nécessaire de rendre ces instruments aussi attrayants que possible pour les entreprises et les employés.

1.4

La flexicurité ne peut fonctionner que si les employés ont une bonne formation. Il existe un lien étroit entre de nouvelles compétences et la création de nouveaux emplois. Les entreprises ont tout intérêt à investir dans la formation continue de leur personnel. Il est de la responsabilité des travailleurs de continuer à se former. Il est à espérer que la stratégie «Lisbonne 2010 plus» apportera des réponses à ces problèmes.

1.5

La crise met en lumière l'importance du dialogue social. Les derniers mois ont montré le degré d'engagement des partenaires sociaux pour trouver conjointement des solutions aux problèmes urgents. Le CESE propose à la présidence suédoise du Conseil de l'Union européenne et à la Commission européenne de créer une plateforme Internet destinée à favoriser l'échange d'expériences menées dans le cadre de ces initiatives des partenaires sociaux, tout en respectant la diversité des situations aux niveaux national, régional et local.

1.6

À l'échelon européen, les partenaires sociaux négocient actuellement un accord-cadre autonome sur des marchés du travail propices à l'intégration sociale. Le CESE est d'avis qu'un futur accord peut apporter une valeur ajoutée réelle en vue d'aider les personnes les plus vulnérables ayant perdu leur emploi pendant la crise à retrouver une activité professionnelle. Le CESE nourrit des espoirs vis-à-vis du suivi et de l'évaluation conjoints de la mise en œuvre de la flexicurité, pour lesquels les partenaires sociaux européens se sont engagés dans leur programme de travail 2009-2010.

1.7

La propagation très rapide et le fort impact du ralentissement économique induisent beaucoup d'employeurs à se souvenir des années d'expansion économique, lorsqu'ils ont découvert à quel point il est difficile de recruter un nombre suffisant de travailleurs disposant des qualifications nécessaires. Compte tenu que ces employeurs se projettent à l'heure actuelle dans un avenir plus lointain et s'attendent à un redressement économique qui interviendra très certainement, ils ne procèdent pas à la suppression irréfléchie de trop nombreux postes, que le seul souci d'économie à court terme pourrait provoquer. Cependant, aucune entreprise ne peut ignorer les règles de base de l'économie. En définitive, toute entreprise doit avant tout veiller à assurer sa pérennité. Pour les travailleurs concernés, un retour à l'emploi le plus rapide possible revêt une importance cruciale. Le CESE souligne la nécessité de leur apporter une aide rapide et de qualité élevée. Les États membres devraient envisager sérieusement d'accroître la quantité et la qualité du personnel des agences de placement afin qu'elles aident les travailleurs à retrouver un emploi le plus rapidement possible.

1.8

Compte tenu des spécificités nationales et régionales, ainsi que des différences entre secteurs industriels, l'Union devrait, selon les vœux du Comité, poursuivre ses travaux dans une perspective européenne et dans le respect du principe de subsidiarité. C’est ainsi que sera créé le cadre européen nécessaire à garantir le renforcement d’un modèle social européen qui est en pleine évolution d’un modèle théorique à une réalité incontournable (1). Il est nécessaire d’envisager un processus post-Lisbonne (Lisbonne 2010 plus) pour répondre aux objectifs pas encore atteints et à ceux qui vont apparaître au cours de la crise, dont la traversée pourrait s'avérer longue et pénible. La flexicurité devrait jouer certainement un rôle important. Le Comité est d’avis que les dimensions de la flexicurité dans son application doivent être équilibrées.

1.9

Le CESE souligne que les réformes des marchés du travail dans les États membres doivent éviter que le nombre de postes d’emplois précaires caractérisés par un excès de flexibilité au détriment de la sécurité, qui n’a pas cessé d’augmenter dans les dernières années, ne continue pas s'accroître. Le CESE partage l'inquiétude exprimée par le Comité des régions dans son avis du 7 février 2008 (2). Une prédominance de la flexibilité externe risque d’«ouvrir la voie à une vaste déréglementation des relations contractuelles de travail normales qui irait dans le sens d’une extension des contrats de travail précaires».

2.   Contexte

2.1

La présidence suédoise invite le CESE à exprimer son opinion sur le sujet de la «flexicurity» sur lequel il s’est déjà prononcé (3), mais qui se présente dans un contexte nouveau. L’urgence d’un réexamen dans la perspective de la crise financière s’est confirmée lors d’une audition organisée par la présidence suédoise le 7 juillet 2009 à Stockholm.

2.2

Le concept de la flexicurité connaît des approches différentes. La Commission européenne l’a définie dans sa communication (COM(2007) 359 final) comme une «stratégie intégrée visant à améliorer simultanément la flexibilité et la sécurité sur le marché de travail» (4). Puisque cette définition a aussi servi aux conclusions du sommet exceptionnel de Prague du 7 mai 2009, cet avis se base également sur cette interprétation commune.

2.3

Le CESE insiste sur le fait que les politiques du marché du travail relèvent de la responsabilité des États membres, conformément au principe de subsidiarité. Une tentative d'harmoniser les lois du travail s'opposerait à ce dernier principe et se révélerait inopportune car elle serait dommageable aux traditions et aux structures géographiques qui ont prouvé leur pertinence et solidité. De plus, il faudra tenir compte que les économies des États membres n’ont pas toutes le même niveau de développement. Ceci se reflète dans leurs systèmes sociaux respectifs. Dans ce contexte, d'après le CESE, les défis de l'U.E. devraient être:

promouvoir la coopération entre les États membres par le biais de la stratégie européenne pour l'emploi qui s'est intégrée au mécanisme de guidage pour la stratégie de Lisbonne depuis 2005. Dans la «ligne directrice» 21 de la politique de l'emploi les États membres s'accordent pour promouvoir la sécurité de l’emploi et la flexibilité de manière équilibrée. L’UE doit servir de catalyseur pour que les États membres tiennent leurs engagements et, simultanément, fassent connaître et échangent leurs meilleures pratiques dans le cadre de la politique européenne de l’emploi.

3.   Une nouvelle donne

3.1   La crise

3.1.1

Les effets de la plus grande crise économique dans l’histoire de la Communauté sont assez évidents à court terme: l’endettement public des États membres de l’UE s’accroît à une vitesse sans précédent. Bien que les banques centrales du monde aient inondé les marchés de liquidités, le système bancaire ne fonctionne toujours pas comme en temps normal. En particulier, les petites et moyennes entreprises (PME) ainsi que les travailleurs autonomes ont d’énormes difficultés à accéder à de nouveaux crédits. Les effets néfastes du chômage sur les sociétés et le marché intérieur ne tarderont pas à se faire sentir. En même temps, la création de nouveaux emplois est extrêmement rare et difficile.

3.1.2

Le CESE considère qu’il est indispensable d'adapter, à court terme, le modèle de la flexicurité au vu de la grave situation socioéconomique actuelle, bien que son dernier avis en la matière ne date que du printemps 2008. Le Comité se réjouit de la demande de la présidence suédoise d’examiner comment les États membres peuvent utiliser la flexicurité en matière de restructuration dans le contexte du développement mondial. Le développement mondial fait référence à la crise financière et ses retombées tragiques sur l'économie réelle et sur l'emploi. Cette crise s’est déjà avérée comme la crise économique la plus grave depuis 80 années. Ces effets vont très probablement marquer le 21e siècle entier. Elle est d’autant plus grave qu’elle est accompagnée par deux autres crises représentant des défis majeurs à l’échelle mondiale: la crise climatique et la crise démographique.

3.1.3

La crise change l’environnement socio-économique dans lequel des réformes du marché de travail peuvent être envisagées. Cela est évident quel que soit le jugement que l'on porte sur l’opportunité, la faisabilité, voire la nécessité ou l’impossibilité de telles réformes structurelles en temps de crise. Cependant, le CESE tient à souligner que l’inclusion et la réinsertion des chômeurs dans le marché de travail doivent être une des priorités absolues.

3.1.4

Toutefois, le Comité entend tirer des conclusions de ses observations afin de pouvoir formuler des propositions concrètes et positives à l’égard des paramètres constitutifs de la flexicurité, à savoir la flexibilité et la sécurité. Le Comité tient à souligner qu’une gestion équilibrée des mesures de flexibilité et de sécurité est indispensable si l’on veut éviter des conflits sociaux comme il y en a déjà eu en Europe.

3.2   La flexibilité interne et externe

3.2.1

La flexibilité interne doit être le résultat du dialogue social entre le management et les employés ou leurs représentants, les partenaires sociaux, au niveau de l’entreprise ou du secteur concerné. Elle évite la perte de postes de travail et peut ainsi, en période difficile, être un élément stabilisateur important pour la cohésion sociale en Europe. La bonne entente entre entrepreneurs et travailleurs est nécessaire pour que ce soit garantie un engagement des entreprises en matière de responsabilité sociale et le maintien des travailleurs sur le marché du travail en renforçant l'emploi. Pour soutenir ces mesures, le rôle des gouvernements est essentiel, mais il ne doit pas intervenir aux dépens de leur capacité à fournir les prestations sociales fondamentales, telles que la sécurité (que ce soit celle des produits alimentaires, celle du trafic aérien, celle de l’universalité des services d’intérêt général ou celle qu’offre la police) et l’éducation, désormais dans une logique d'apprentissage tout au long de la vie.

3.2.2

Toute réforme sociale doit se placer dans son contexte socio-économique et politique. La flexicurité en période de crise pose sans aucun doute des questions difficiles si les sacrifices demandés pour une hypothétique employabilité ne donnent pas de garanties. Il faut donc être bien conscient que la flexicurité ne sera utile que si elle se traduit en une compréhension commune des partenaires sociaux et pas seulement d’un entre eux. Cela contraint, dans ce contexte, à se pencher très sérieusement sur la sécurité, et l'équilibre entre sécurité et flexibilité. Or, le Comité est d’avis que la Commission européenne devrait concentrer son analyse davantage sur les possibilités de la flexibilité interne qui peut être un outil efficace dans la flexicurité pour lutter contre le chômage. (5)

3.2.3

Le Comité est d’avis que les dimensions de la flexicurité doivent être équilibrées, elle ne doit pas être appliquée au détriment de la sécurité. Or, comment les États peuvent-ils garantir cet équilibre en temps de crise? Le Comité propose que les réformes fondées sur le modèle de la flexicurité soient soigneusement examinées en ce temps de crise pour qu’il n’y ait pas de répercussions sociales et politiques non désirées. Ces précautions doivent être renforcées dans le cas de la flexicurité dite «externe».

3.2.4

Conformément à qui vient d'être exposé, les mesures de flexicurité doivent être crédibles à tout point de vue, et en particulier en ce qui concerne l’aspect budgétaire. Ceci entraînera, probablement, des réorientations de priorités dans les dépenses budgétaires des États membres et, peut-être, un renforcement des aides communautaires. Car il ne peut pas y avoir de flexicurité sans sécurité.

3.2.5

Contrairement à l’usage prudent des formes de diverses de la flexibilité interne, il serait risqué dans la situation actuelle de forcer des réformes du marché de travail avec l’objectif de promouvoir plus de flexibilité externe. Les réflexions de la Commission européenne ont jusqu’à présent insisté sur cette dimension de la flexicurité. Beaucoup de conventions collectives en Europe comporte des dispositions organisant la flexibilité dans l'entreprise. Elle peut, entre autres, prendre l'aspect de l'aménagement du temps de travail, comportant des périodes de formation.

3.3   Le dialogue social

3.3.1

Le CESE maintient sa revendication que les partenaires sociaux soient les protagonistes d'un forum permettant la confrontation permanente des idées sur les réformes pour que les deux pôles, les employeurs et les employés, puissent veiller au maintien d'un équilibre permanent et dynamique entre flexibilité et la sécurité. Cette approche est importante et intéressante pour l'avenir de l’emploi en Europe. C’est justement pour cela que la société civile doit également être incluse dans le débat. Toute politique de l’emploi, toute réforme du marché du travail a un impact important sur la société. Or, ces réformes ne doivent pas être déconnectées des perspectives économiques, sociales et soutenables de la société.

3.3.2

La flexicurité est un outil important pour atténuer les effets de la crise financière et de l'économie réelle sur le travail et l'emploi. Il ne faut cependant pas en abuser en rendant les licenciements plus faciles dans des pays qui disposent d’un droit du travail garantissant un certain niveau de sécurité contre des pratiques que l’on appelle en anglais «hire and fire». Le Comité approuve la clarté avec laquelle la Commission européenne a affirmé que la flexicurité ne pouvait en aucun cas devenir un droit au licenciement.

3.3.3

Le Comité tient à souligner que toute réforme du droit du travail doit se faire avec les partenaires sociaux, sans cela, elle serait vouée à l’échec. Le dialogue social est un garant de la démocratie participative, moderne et sociale. L'aménagement du droit du travail doit résulter d'une négociation entre les partenaires sociaux. Le dialogue social permet, de plus, l'adoption de formes diverses de flexibilité interne, offrant beaucoup de souplesse aux entreprises, indépendamment de la tendance à la hausse ou à la baisse de leurs activités.

3.3.4

Le CESE se félicite de l’effort et des travaux conjoints réalisés par les partenaires sociaux européens en matière de flexicurité. Le CESE apprécie que les partenaires sociaux européens aient inscrit dans leur programme de travail 2009-2010 le suivi et l'évaluation de la mise en œuvre de la flexicurité. Le CESE est en attente du rapport de cette évaluation et compte sur le fait que l’évaluation commune puisse avoir un grand impact sur la conception des diverses applications de la flexicurité dans les différents États membres.

3.4   Objectifs européens à court et à moyen terme

3.4.1

À court terme, l'analyse et les possibilités d'application de la flexicurité, en prenant toujours en considération le préalable d'un dialogue social à tous les niveaux, les contraintes financières et le rôle des gouvernements, doivent se focaliser sur l'objectif visant à préserver un maximum d'emplois ayant la meilleure valeur ajoutée possible, et à renforcer la protection sociale d'ensemble de tous les travailleurs, quelle que soit leur situation sur le marché du travail.

3.4.2

Le CESE rappelle les conclusions du rapport du Conseil des 8 et 9 juin sur la flexicurité en temps de crise. Il est fondamental pour les chômeurs de se réintégrer à l’emploi le plus vite possible. Le CESE souligne le besoin de leur fournir une aide, un soutien et une orientation efficaces très rapidement. Les États membres doivent être incités à mieux se servir des fonds européens existants et doivent être absolument engagés à améliorer la qualité de tous les instruments de promotion de l’emploi, par exemple des agences pour l’emploi de qualité, pour renforcer leur activité et leur efficience.

3.4.3

Le CESE partage l'opinion de la Commission d'après laquelle les accords concernant les allocations de chômage technique peuvent représenter un outil efficace à court terme pour préserver l'emploi, éviter le chômage et maintenir le pouvoir d'achat. Trois effets sont produits par ces dispositifs: le maintien du savoir-faire et des compétences du travailleur pour l'entreprise, la non-exclusion de l'employé du monde du travail, la stabilité de l'économie nationale qui évite une vague de chômeurs. La crise a prouvé le besoin de promouvoir les «working time accounts» et la gestion flexible du temps de travail. Les entreprises avec des «compte épargne temps» sont bien plus capables de réagir rapidement aux nouvelles situations du marché et de s’adapter à des chutes subites de la demande. Le CESE demande aux États membres et à l’UE de rendre cet instrument aussi attractif que possible aux employés et aux entreprises.

3.4.4

Le CESE encourage les partenaires sociaux, à tous les niveaux, y compris les niveaux micro-économiques, à axer le dialogue social, et les compromis qui en découlent pour tous les partenaires en ce temps de crise profonde, sur le maintien et la création d'emplois en préservant le pouvoir d'achat global des travailleurs. Les gouvernements doivent trouver les moyens de jouer un rôle de catalyseurs et de favoriser, voire récompenser, ce genre d'accords. Le CESE propose à la Présidence suédoise et à la Commission européenne d’établir une plateforme web qui puisse multiplier les échanges d’information et d’expériences d’initiatives des partenaires sociaux à un niveau pratique, tout en respectant la diversité des situations au niveau national, régional et local.

3.4.5

Le CESE estime que les quatre dimensions de la flexicurité et ses principes tels que la Commission européenne les a définis pourrait effectivement contribuer à une réduction du chômage en Europe. Néanmoins il est indispensable de veiller à ce que des emplois de qualité soient créés. Une protection sociale réelle y joue un rôle très important. Elle est fondamentale pour la cohésion sociale dans l’UE. Dans ce contexte, le CESE souligne que les réformes des marchés du travail dans les États membres doivent éviter que le nombre de postes d’emplois précaires caractérisés par un excès de flexibilité au détriment de la sécurité, qui n’a cessé d’augmenter dans les dernières années, ne continue à croître. La Commission devrait aider en faisant et diffusant un bilan périodique de la mise en pratique des principes de flexicurité dans les textes législatifs et réglementaires concernant le marché du travail. Le CESE est d’avis que les principes de la flexicurité devront être davantage intégrés dans l’agenda post-Lisbonne. De plus, le CESE suggère que les travaux des partenaires sociaux européens soient coordonnés avec cet agenda.

3.5   Un nouveau débat européen

3.5.1

Le CESE juge opportun que la présidence suédoise lance un débat sur les aspects de la flexicurité qui pourraient, à l’exemple de plusieurs États membres qui la pratiquent, contribuer à ce que l’Union traverse cette crise financière et économique mondiale en sauvegardant un maximum d'emplois pour ne pas mettre en péril sa cohésion sociale. L’UE a tout intérêt à ne pas perdre les qualifications de ses travailleurs, dont elle aura besoin après la crise. Ceci est d’autant plus vrai que l’évolution démographique réduira de manière considérable le potentiel de main-d’œuvre qualifiée dans la plupart des pays européens.

3.5.2

Le licenciement de personnel qualifié, en temps de crise, constitue un danger dans la perspective de la relance à venir. Le manque de savoir-faire risque de s’amplifier. Pire encore, beaucoup d’entreprises européennes semblent réduire leurs emplois d’apprentis ou leurs postes de travail destinés aux jeunes diplômés. Par là-même, elles mettent en péril leur avenir. Par ailleurs, la flexicurité elle-même ne peut fonctionner que si les employés ont une bonne formation. Cesser de former irait alors à l'encontre de cet instrument de réforme. Il y a un lien étroit entre de nouvelles compétences et la création de nouveaux emplois. La stratégie «Lisbonne 2010 plus» devra donner des réponses à ces problèmes. Les entreprises sont sensées investir dans la formation continue de leurs employés. En même temps, il est évident qu’il est aussi de la responsabilité de chaque travailleur de continuer à se former.

3.5.3

L'apprentissage tout au long de la vie dans le cadre de la flexicurité doit s’inscrire dans la logique d’un développement durable des sociétés au sein de l’Union européenne et ainsi servir comme exemple dans le monde. La formation des travailleurs doit s’orienter vers les objectifs européens de créer davantage d’emplois de qualité et de s'efforcer de développer une économie durable.

3.5.4

La flexicurité repose fondamentalement sur une meilleure employabilité. Celle-ci est conditionnée par l'excellence des systèmes d’éducation et l'efficacité des pratiques de formation continue. Tant que les États membres se déclarent en faveur de l'apprentissage tout au long de la vie sans réformer leur système d’éducation, sans attacher plus d’importance à l’éducation préscolaire, sans accorder plus de moyens à l’enseignement et, enfin, sans encourager et faciliter par des moyens fiscaux la formation professionnelle et continue dans le cadre de l’emploi, une condition importante de la flexicurité ne peut pas être remplie. Le Comité appelle les gouvernements nationaux à faire de toutes ces questions relatives à l’éducation une priorité absolue. Le Comité est en faveur d’une action commune des États membres pour la promotion du secteur éducatif et de la formation en Europe.

3.6   La flexicurité dans la perspective du traité de Lisbonne

3.6.1

Le traité de Lisbonne auquel le Comité est attaché et qu'il espère voir adopté par les 27 États membres de l’UE, qualifie le marché intérieur d'économie sociale. L’article 2 du traité instituant la Communauté européenne cite «une économie sociale de marché» parmi les objectifs de la Communauté. C'est une nouveauté importante. Cette nouvelle orientation, qui accorde beaucoup plus de place à une interprétation sociale du droit communautaire, ne manquera pas d’avoir des effets sur la future législation européenne et, surtout, sur la jurisprudence de la Cour de justice européenne.

3.6.2

Il est vrai que certains développements politiques dans une minorité de pays européens suscitent des inquiétudes quant aux chances de réussite de l'adoption finale du traité. Mais le Comité maintient sa position optimiste, car il n’y a pas d’alternative, pas de «plan B». Tout particulièrement en temps de crise, il faut que les institutions puissent travailler selon un fonctionnement plus approprié que ne le permet le traité de Nice dans l'Union à 27. Dès lors, le Comité juge nécessaire que les institutions européennes préparent le dossier flexicurité dans la perspective d’une entrée en vigueur du traité de Lisbonne cette année encore ou au plus tard en 2010, ainsi qu'en fonction du déroulement de la crise. Cette entrée en vigueur aura, entre autres, pour conséquence qu'une nouvelle dimension plus actuelle de la «sécurité» sera prise en compte par le droit communautaire.

Bruxelles, le 1er octobre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 309 du 16.12.2006, page 119; avis d’initiative du CESE «Cohésion sociale: donner du contenu à un modèle social européen».

(2)  JO C 105 du 25.4.2008, page 16 (cf. pt. 22).

(3)  JO C 256 du 27.10.2007, page 108.

JO C 211 du 19.8.2008, page 48; avis du CESE sur la communication sur «Vers des principes communs de flexicurité: des emplois plus nombreux et de meilleure qualité en combinant flexibilité et sécurité».

(4)  Il convient de rappeler le libellé exact de la communication de la Commission Européenne qui élabore les quatre principes de la flexicurité: «La flexibilité, d’une part, c’est réussir les changements (les 'transitions') dans la vie: entre le système éducatif et le monde du travail, entre les emplois, entre le chômage ou l’inactivité et le travail, entre le travail et la retraite. Cela ne signifie pas seulement qu’il faut donner plus de liberté aux entreprises pour recruter ou licencier du personnel, ni que les contrats à durée indéterminée appartiennent au passé. Il s’agit de faciliter la progression des travailleurs vers de meilleurs emplois, de favoriser la 'mobilité ascensionnelle' et le développement optimal des talents. La flexibilité, c’est également celle de l’organisation du travail qui permet, avec rapidité et efficacité, de répondre à de nouveaux besoins en termes de production et de maîtriser les nouvelles compétences nécessaires, et de faciliter la conciliation des responsabilités professionnelles et privées. La sécurité, d’autre part, représente bien plus que l’assurance de garder son emploi. Il s’agit aussi de leur donner des indemnités de chômage adaptées pour faciliter les transitions. Enfin, cela inclut aussi des possibilités de formation pour tous les travailleurs (en particulier les travailleurs peu qualifiés et plus âgés) ».

(5)  JO C 105 du 25.4.2008, page 16. Le Comité des régions, déjà avant la crise financière, a exprimé ses doutes quant à la prédominance de la flexibilité externe dans l’approche de la Commission. Le Comité des régions «estime que certaines formulations du texte [de la Commission], et notamment la référence à une souplesse et sécurisation des dispositions contractuelles, donnent matière à préoccupation, car elles pourraient ouvrir la voie à une vaste déréglementation des relations contractuelles de travail normales qui irait dans le sens d’une extension des contrats de travail précaires».


23.12.2009   

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C 318/6


Avis du Comité économique et social européen sur la «Coopération macrorégionale — Étendre la stratégie pour la mer Baltique à d'autres macrorégions en Europe» (avis exploratoire)

2009/C 318/02

Rapporteur: M. SMYTH

Le 18 décembre 2008, Mme Cecilia MALMSTRÖM, ministre des affaires européennes, a demandé au Comité économique et social européen, au nom de la présidence suédoise, d'élaborer un avis exploratoire sur la

«Coopération macrorégionale – Étendre la stratégie pour la mer Baltique à d'autres macrorégions en Europe»

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 11 septembre 2009 (rapporteur: M. SMYTH).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 30 septembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l'unanimité.

1.   Conclusions

1.1

Le CESE soutient les objectifs matérialisés dans les quatre piliers de la stratégie de la mer Baltique visant à rendre la région prospère, sûre et sécurisée, durable du point de vue de l'environnement, attrayante et accessible.

1.2

Le Comité reconnaît le vaste processus de consultation qui a précédé la finalisation de la stratégie ainsi que la part prise dans ce processus par les partenaires sociaux et les acteurs concernés. Il souligne à nouveau le rôle crucial joué par la société civile organisée dans la mise en œuvre de la stratégie de la mer Baltique et réaffirme son soutien à l'établissement d'un forum de la société civile de la mer Baltique, qui contribuera à associer davantage la société civile à l'évolution de la stratégie.

1.3

Le CESE accueille favorablement le plan d'action de la stratégie qui comprend 15 mesures prioritaires et prévoit que la mise en œuvre de chacune de ses mesures incombe à un État membre de la région de la mer Baltique.

1.4

La stratégie de la mer Baltique a ses points forts et ses points faibles. Ses principales forces sont la nature globale du champ d'action qu'elle vise et le fait qu'elle sera révisée régulièrement par la Commission et le Conseil européen. Ses faiblesses résident dans sa complexité et dans les problèmes de gouvernance liés à sa mise en œuvre. La stratégie couvre les compétences de 21 directions générales, ainsi que le territoire de 8 États membres et de la Russie. Compte tenu des 4 piliers, des 15 mesures prioritaires et des nombreuses actions transversales, le cœur de la stratégie se caractérise par une «géométrie variable» complexe qui pourrait la rendre irréalisable. Le CESE estime nécessaire de tout mettre en œuvre afin de simplifier les accords de gouvernance concernant la mise en œuvre de la stratégie.

1.5

Le CESE a un rôle important à jouer en vue de garantir un esprit de collaboration dans les phases d'élaboration et de mise en œuvre de la stratégie. La création d'un forum de la société civile de la région de la mer Baltique constitue une avancée vers l'octroi à la société civile d'un rôle dans l'évolution future de la stratégie.

1.6

La stratégie de la mer Baltique pose un défi de taille au CESE en général et à ses membres provenant de la région de la mer Baltique en particulier. Elle les contraint à prendre l'initiative de représenter la société civile organisée dans le processus d'évolution de la stratégie, au moyen des activités du forum de la société civile. Le fait que la stratégie se déploiera sur une période de plusieurs années plaide fortement en faveur de la création d'un groupe permanent au sein du CESE en vue de s'assurer que le Comité puisse prendre une part effective à un processus susceptible de devenir le modèle de la coopération macrorégionale à travers l'Union européenne.

2.   Introduction

2.1

La question de la coopération macrorégionale a gagné en importance au cours de ces dernières années. Au sein de l'UE, on considère désormais que les macrorégions ont le potentiel nécessaire pour contribuer de manière significative à faire fonctionner la politique de cohésion et à permettre d'atteindre des niveaux comparables de développement entre les États membres et entre les régions. L'Europe adopte déjà des formes de coopération macrorégionale. Ainsi, le Groupe de Visegrád, qui comprend la République tchèque, la Hongrie, la Pologne et la Slovaquie, est l'expression des efforts déployés par les pays d'Europe centrale pour collaborer dans plusieurs domaines d'intérêt commun, dans l'esprit de l'intégration européenne (1). Plus récemment, en 2008, le Partenariat euro-méditerranéen, anciennement appelé «Processus de Barcelone», a été relancé au sommet de Paris pour la Méditerranée. Ce partenariat réunit les 27 États membres de l'Union et 16 pays partenaires du sud de la Méditerranée et du Moyen-Orient et a pour objectif de traiter les problèmes communs tels que la pollution maritime et la sécurité maritime, les questions énergétiques et le développement des entreprises (2).

2.2

En novembre 2006, le Parlement européen a adopté une résolution sur l'élaboration d'une stratégie de la mer Baltique. Cette stratégie, qui concerne la zone désignée comme macrorégion de la mer Baltique, a été adoptée par la Commission le 10 juin 2009 et soumise au Conseil européen le 19 juin 2009. La présidence suédoise veillera à la poursuite des discussions en prévision d'une adoption par le Conseil fin octobre 2009. Le présent avis exploratoire a été demandé par la présidence suédoise, la stratégie de la mer Baltique étant un élément important de son programme de travail. Il a pour objet d'évaluer la stratégie de la mer Baltique proposée, sa préparation, sa structure et son plan d'action, du point de vue de la société civile organisée. L'avis s'appuie sur l'analyse que présente l'avis du CESE récemment adopté sous le titre «La région de la mer Baltique: le rôle de la société civile organisée pour améliorer la coopération régionale et identifier une stratégie régionale» (3).

2.3

La demande d'une stratégie de la mer Baltique découle de l'idée selon laquelle il existe une nécessité de mettre en place une coordination accrue et plus efficace entre la Commission européenne, les États membres, les régions, les collectivités locales et d'autres acteurs concernés afin d'amener une utilisation plus efficace des programmes et des politiques. La région de la mer Baltique est l'une des régions maritimes les plus fréquentées et les plus encombrées du monde, comme le montre la carte des mouvements quotidiens des navires reprise en annexe du présent avis. La région de la mer Baltique comprend huit États membres (la Finlande, la Suède, le Danemark, l'Allemagne, la Pologne, l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie), plus la Russie, tous riverains de la Baltique. Lorsque le Conseil européen a demandé à la Commission d'entreprendre l'élaboration de cette stratégie, il a estimé que les aspects de relations extérieures de la stratégie devaient être liés au cadre existant de la dimension septentrionale (4). Le CESE soutient la mise en place d'une stratégie macrorégionale de développement qui inclurait tous les États de la mer Baltique.

2.4

Le processus ayant mené à l'élaboration de la stratégie est sans précédent. La Commission part du principe que si la stratégie de la mer Baltique s'avère valable et réalisable, une approche similaire pourrait s'appliquer à d'autres macrorégions telles que le Danube (5), l'espace alpin et la Méditerranée.

La Commission a procédé à un tour de consultations complet tout au long de l'année 2008. Ces conférences consultatives se sont réparties sur l'ensemble de la macrorégion et ont eu pour point d'orgue la conférence de Rostock en février 2009. Les thèmes se basaient sur les quatre piliers constitutifs de la stratégie de la mer Baltique afin de rendre la mer Baltique:

durable du point de vue de l'environnement;

prospère;

intéressante et accessible;

sûre et sécurisée.

2.5

La stratégie s'accompagne d'un plan d'action comprenant 15 domaines prioritaires qui se répartissent sur ces quatre piliers. Chaque domaine prioritaire sera coordonné par un État membre de la Baltique, appelé à coopérer avec tous les acteurs concernés lors de la mise en œuvre (6).

2.6

La stratégie de la mer Baltique et les mesures proposées seront financées à partir de sources déjà existantes, à savoir les fonds structurels européens (55 milliards d'euros entre 2007 et 2013), des financements apportés par chaque État de la Baltique, des ONG, des fonds privés ainsi que des fonds provenant d'institutions financières telles que la BEI, la Banque nordique d'investissement et la BERD.

2.7

En plus des quatre piliers, la stratégie comprend également des mesures horizontales destinées à développer la cohésion territoriale. Elles visent à:

aligner les politiques et les financements existants sur les priorités et les actions envisagées dans la stratégie de la mer Baltique;

coordonner la mise en œuvre des directives communautaires et éviter les freins bureaucratiques inutiles;

encourager dans les États membres l'usage d'une planification de l’espace maritime en tant qu'approche commune dans le cadre d'une coopération transfrontalière;

développer une planification de l’espace territorial dans les États membres de la Baltique;

traduire en actions «grandeur nature» des projets pilotes ayant réussi dans le cadre de cette stratégie;

développer la recherche pour en faire une base des décisions politiques;

améliorer et coordonner la collecte de données maritimes et socioéconomiques dans la macrorégion de la Baltique;

construire une identité régionale.

3.   Commentaires sur la stratégie de la mer Baltique

3.1   Le CESE se félicite de la démarche adoptée par le Conseil et la Commission vis-à-vis de l'élaboration d'une stratégie de la mer Baltique et, en particulier, du tour complet de consultations auprès des acteurs concernés de la macrorégion. Cette stratégie est novatrice en ce sens qu'elle opérera selon une structure de gouvernance transnationale et dépassera donc le cadre traditionnel des politiques régionales de l'UE. Cette structure de gouvernance est à mi-chemin entre l'État national et la communauté supranationale.

3.2   Les quatre piliers de la stratégie et le plan d'action qui en découle représentent une tentative sérieuse en vue de créer un cadre de développement mieux coordonné pour une région aussi diverse que la Baltique, et de promouvoir ainsi une cohésion territoriale.

3.3   Le concept de la stratégie de la mer Baltique est décrit par la Commission comme «un travail en cours». Toute définition des différents aspects de la région de la mer Baltique sera nécessairement imprécise étant donné que les zones géographiques changeront selon la question abordée. Ainsi, la question de l'environnement porte sur une zone géographique qui sera différente de celles concernées par l'économie ou la question des transports. L'approche adoptée dans le cadre de la conception de la stratégie de la mer Baltique consiste à commencer par cerner les problèmes et à laisser ceux-ci délimiter la zone géographique de la macrorégion concernée. Le CESE estime que la complexité des défis auxquels est confrontée la région de la mer Baltique requiert de mettre davantage l'accent sur la gouvernance efficace de la stratégie.

3.4   Le CESE reconnaît le niveau élevé d'adhésion politique à cette stratégie qui a été obtenu lors de la phase de consultation. BASTUN, le Réseau des syndicats de la mer Baltique, qui représente des membres d'organisations syndicales dans tous les États membres riverains de la Baltique et la Russie, a joué un rôle de premier plan dans le processus de consultation qui a donné forme à la stratégie de la mer Baltique jusqu'à aujourd'hui. L'élan créé doit être maintenu lors de la mise en œuvre. Dans cette optique, le CESE se félicite de l'engagement pris de présenter l'état d'avancement de la stratégie au niveau du Conseil européen tous les deux ans, lors des présidences polonaise (2011), lettonne (2013) et lituanienne (2015).

3.5   La remise de rapports annuels d'avancement sur cette stratégie ainsi qu'un réexamen biannuel constituent également d'importants mécanismes permettant de garantir que les acteurs concernés restent mobilisés. Lors des consultations avec la Commission, il est apparu que la stratégie de la mer Baltique, alors qu'elle sera officiellement lancée le 19 juin, est encore essentiellement en cours d'élaboration. Le CESE soutient cette stratégie et se félicite de la tenue de la conférence de haut niveau et de la réunion ministérielle sur la stratégie en septembre et octobre 2009 sous la présidence suédoise. Compte tenu de la prééminence accordée à la consultation des parties concernées lors de la préparation de la stratégie, il est important que le CESE participe activement à l'élaboration, à la mise en œuvre et à la diffusion de celle-ci.

3.6   Alors qu'il est apparu qu'un consensus émergeait des consultations sur la mise en œuvre de la stratégie, l'accord était moins net quant au caractère approprié ou non des cadres institutionnels existants pour cette mise en œuvre. Ce point, ainsi que d'autres questions connexes, feront sans aucun doute l'objet de discussions ultérieures entre les parties concernées et la Commission (7).

3.6.1

Entre-temps, la stratégie devrait néanmoins profiter des possibilités offertes par les initiatives européennes existantes telles que la programmation conjointe de la recherche, laquelle est vivement soutenue par le CESE. Cette initiative viendra étayer la recommandation émise par la Commission européenne dans la stratégie de la mer Baltique, à savoir exploiter pleinement le potentiel de la région en matière de recherche et d’innovation afin d'assurer la prospérité de la région de la mer Baltique.

3.7   S'agissant du financement de la stratégie, le CESE souhaite affirmer son soutien à une utilisation plus efficace des multiples canaux de financement communautaires existants. Afin de rendre cette utilisation plus transparente, il conviendrait peut-être d'élaborer et de présenter un budget pour chaque domaine prioritaire de la stratégie. Si l'on ne fait pas en sorte de prévoir des financements appropriés pour les initiatives de la stratégie de la mer Baltique, il existe un risque de voir l'ensemble de la stratégie devenir incohérent, confus et perdre l'adhésion des acteurs concernés dans les États membres. À cet égard, le CESE réitère sa position selon laquelle une mise en œuvre efficace de la stratégie de la mer Baltique requiert de prévoir un budget qui lui est propre, afin d'éviter qu'elle ne se réduise à une simple déclaration politique et que ses objectifs demeurent lettre morte (8).

3.8   On observe des tensions évidentes dans le plan d'action, qui constitue une tentative de s'assurer de l'adhésion continue des parties prenantes en proposant une très large gamme d'actions de grande visibilité. Cette approche comporte le risque de laisser croire que chacun peut y trouver ce qu'il recherche. La complexité de la stratégie est également l'une de ses principales faiblesses.

3.9   La Commission s'efforce de résoudre le problème que pose la complexité de la mise en œuvre en chargeant chaque État membre de gérer une ou plusieurs actions prioritaires. Si, en théorie, l'approche paraît judicieuse, en pratique, elle peut s'avérer très difficile à réaliser. Il sera demandé à chaque État membre de coordonner des actions à travers la macrorégion, impliquant un grand nombre de directions générales. La stratégie prise dans son ensemble couvre les domaines de compétences de 21 directions générales. L'expérience acquise à ce jour avec d'autres coopérations politiques intergouvernementales est mitigée. La charte de Leipzig sur les villes européennes durables, qui a opté pour une approche de mise en œuvre similaire, s'est révélée quelque peu décevante et a enregistré des progrès plutôt lents à ce jour (9). On peut dire que la stratégie de la mer Baltique est encore plus complexe que la charte de Leipzig et le risque existe que sa gestion s'avère trop difficile.

4.   Rôle potentiel du CESE dans la stratégie de la mer Baltique

4.1

Le CESE a déjà proposé d'établir un «Forum consultatif de la société civile de la mer Baltique» et a fait part de sa disposition à entamer les travaux préparatoires à un tel forum (10). Celui-ci devrait accompagner la stratégie et apporter sa contribution au réexamen biannuel de cette dernière. La réussite des conférences de consultation préalables à l'élaboration de la stratégie rend d'autant plus crédible la nécessité d'un débat public continu et d'une sensibilisation de l'opinion en ce qui concerne la mise en œuvre de la stratégie.

4.2

Le CESE et les comités économiques et sociaux des États membres baltes ont un rôle important à jouer dans le maintien d'une atmosphère de coopération et de collaboration lors de la mise en œuvre de la stratégie. Pour renforcer le développement institutionnel et les structures participatives de la société civile, surtout dans les nouveaux pays membres et dans les États voisins comme la Russie, il pourrait s'avérer utile de développer des relations et une coopération transfrontalières entre organisations sœurs telles que des syndicats, des associations de consommateurs et des organisations locales et bénévoles. Les membres du CESE provenant des huit États de la Baltique membres de l'UE devraient s'investir plus particulièrement dans les rôles d'émissaire, d'interlocuteur et de rapporteur, de manière à ce que le Comité puisse prendre en tout temps des positions informées par rapport à l'avancement de la stratégie, à ses succès et à ses défis, et du même coup contribuer à la réalisation de ses objectifs.

4.3

Le CESE se félicite de la tentative sérieuse qui est faite, dans le cadre de la stratégie de la mer Baltique, pour mettre en place une approche intégrée de la coopération macrorégionale. Le Comité est depuis longtemps partisan de cette approche, tout comme le Parlement européen.

4.4

S'agissant de la mise en œuvre, le CESE soutient l'approche élargie prônée dans la stratégie, qui consiste à faire coordonner au premier chef par les États membres la gestion des 15 domaines prioritaires et la mise en œuvre des projets phares qui s'y rapportent.

4.5

L'on peut estimer que la stratégie de la mer Baltique constitue un test décisif du rôle du CESE. Le Comité devrait donc s'investir pleinement dans l'évolution de la stratégie, malgré les difficultés de gouvernance mentionnées précédemment dans le présent avis. Le défi se pose tout particulièrement aux membres du CESE qui proviennent des huit pays membres riverains de la mer Baltique concernés par la stratégie. En effet, la stratégie les contraint à prendre l'initiative de représenter la société civile organisée dans le processus en cours de mise en œuvre de la stratégie au moyen des activités du forum de la société civile de la mer Baltique. Le fait que la stratégie se déploiera sur une période de plusieurs années plaide fortement en faveur de la création, au sein du CESE, d'un observatoire ou d'un groupe d'étude ad hoc concernant la mer Baltique afin que le Comité dans son ensemble puisse prendre une part effective à un processus qui deviendra sans nul doute le modèle de la coopération macrorégionale à travers l'Union européenne.

Bruxelles, le 30 septembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  http://www.visegradgroup.eu/

(2)  http://ec.europa.eu/external_relations/euromed/index_fr.htm

(3)  Avis CESE 888/2009 adopté le 13 mai 2009 (pas encore publié au JO)

(4)  La dimension septentrionale est un instrument au moyen duquel l'UE, la Russie, la Norvège et l'Islande mettent en œuvre des politiques dans des domaines de coopération définis d'un commun accord.

(5)  Déclaration de la commissaire Hübner dans «Towards a Strategy for the Danube Region» (vers une stratégie pour la région du Danube), http://ec.europa.eu/commission_barroso/hubner/speeches/pdf/2009/07052009_ulm.pdf

(6)  La stratégie de la mer Baltique et le plan d'action peuvent être téléchargés à l'adresse suivante: http://ec.europa.eu/regional_policy/cooperation/baltic/documents_en.htm

(7)  L'on peut trouver un débat général de qualité au sujet de ces questions institutionnelles et de gouvernance dans l'ouvrage de C. Schymik et P. Krumrey: «EU Strategy for the Baltic Sea Region: Core Europe in the Northern Periphery? » (une stratégie de l'UE pour la région de la mer Baltique: l'Europe du «noyau dur» à la périphérie septentrionale?), document de travail FG1 2009, SWP Berlin.

(8)  Voir l'avis du CESE sur «La région de la mer Baltique: le rôle de la société civile organisée pour améliorer la coopération régionale et identifier une stratégie régionale», paragraphes 2.6 et 2.7. Le Partenariat euro-méditerranéen dispose par exemple d'un budget considérable consacré à EuroMed. Avis adopté le 13 mai 2009 (pas encore publié au JO)

(9)  Cette charte a été signée sous la présidence allemande du Conseil au cours d'une réunion informelle des ministres européens chargés du développement urbain et de la cohésion territoriale. Cette charte intergouvernementale comporte deux recommandations principales, à savoir, recourir davantage à une politique d'urbanisme intégrée et accorder une attention spécifique aux voisinages défavorisés.

(10)  Voir l'avis du CESE sur «La région de la mer Baltique: le rôle de la société civile organisée pour améliorer la coopération régionale et identifier une stratégie régionale», paragraphe 3.4. Avis adopté le 13 mai 2009 (pas encore publié au JO)


23.12.2009   

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Journal officiel de l'Union européenne

C 318/10


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Comment faire de la stratégie de l'UE relative aux dommages liés à l'alcool une stratégie durable, de long terme et multisectorielle» (avis exploratoire)

2009/C 318/03

Rapporteure: Mme Van TURNHOUT

Dans une lettre du 18 décembre 2008, le ministère suédois des affaires européennes a demandé au Comité économique et social européen, dans la perspective de la prochaine présidence de l'Union européenne, d'élaborer un avis exploratoire sur le thème suivant:

«Comment faire de la stratégie de l'UE relative aux dommages liés à l'alcool une stratégie durable, de long terme et multisectorielle»

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 1er septembre 2009 (rapporteure: Mme Van TURNHOUT).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 30 septembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 128 voix pour, 5 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Élaboré en réponse à une demande de la présidence suédoise adressée au CESE, le présent avis exploratoire porte sur la question suivante: comment faire de la stratégie de l'UE relative aux dommages liés à l'alcool une stratégie durable, de long terme et multisectorielle (1)? L'objectif de la présidence suédoise consiste à soutenir la mise en œuvre de la stratégie horizontale de l'UE en matière d'alcool et l'instauration de mesures de prévention à long terme tant au niveau européen qu'au niveau national.

1.2

Le présent avis s'appuie sur le précédent avis du Comité portant sur les dommages liés à l'alcool, qui se penchait sur cinq thèmes prioritaires, à savoir la protection des enfants, la réduction des accidents de la route liés à l'alcool, la prévention des dommages liés à l'alcool chez les adultes et sur le lieu de travail, l'information, l'éducation et la sensibilisation et enfin l'ensemble de données commun (2).

1.3

L'avis met l'accent sur les quatre priorités suivantes de la présidence:

l'impact de la publicité et des techniques de commercialisation sur les jeunes;

l'influence du prix sur l'évolution des dommages;

les enfants au centre de l'attention: en particulier, l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation fœtale et les enfants dans les familles, et

les effets de la consommation nocive d'alcool sur un vieillissement digne et en bonne santé.

Afin d'adopter une approche globale, tous les thèmes abordés dans les deux avis ainsi que les autres questions pertinentes doivent être traités ensemble.

1.4

Les modes de consommation varient considérablement entre les pays, mais la plupart des consommateurs boivent de façon responsable la plupart du temps (cf. paragraphe 3.2) (3). Ceci étant, le CESE marque sa préoccupation quant au fait que, selon les estimations, 15 % de la population adulte de l'UE a régulièrement des niveaux de consommation d'alcool qui sont nocifs; le Comité s'inquiète aussi de ce que les enfants sont les plus vulnérables aux dommages causés par l'alcool. Il conviendrait d'élaborer des mesures visant les personnes dont la consommation d'alcool atteint déjà des niveaux nocifs.

1.5

Les techniques de commercialisation de l'alcool sont l’un des facteurs qui accroissent la probabilité que les enfants et les adolescents commencent à en consommer, et s'ils le font déjà, qu'ils en consomment davantage. Compte tenu de ces éléments, le CESE appelle à réduire l'exposition des enfants aux techniques de commercialisation de l'alcool.

1.6

Les politiques de prix de l'alcool bien conçues peuvent constituer des instruments efficaces pour réduire les dommages liés à l'alcool, notamment chez les personnes à faibles revenus et les jeunes. Le CESE est convaincu qu'une réglementation régissant la disponibilité, la distribution et la promotion de l'alcool est nécessaire; dans ce domaine, l'autorégulation n'est pas suffisante.

1.7

Afin de sensibiliser aux risques liés à l'ensemble des troubles de l'alcoolisation fœtale, le CESE soutient les campagnes de sensibilisation au niveau national et européen.

1.8

Le CESE estime qu'il est nécessaire d'informer davantage au sujet des effets de la consommation nocive d'alcool sur un vieillissement digne et en bonne santé au niveau européen.

1.9

Le CESE reconnaît que les politiques en matière d'alcool devraient être globales et comporter une gamme de mesures dont il a été établi qu'elles en réduisent les dommages.

2.   Contexte

2.1

L'Union européenne possède les compétences et les pouvoirs nécessaires pour agir dans le domaine des problèmes de santé publique liés à un usage nocif et dangereux de l'alcool, sur la base de l'article 152, paragraphe 1 du traité (4) qui prévoit que l'action de la Communauté doit compléter les politiques nationales.

2.2

À la suite de la recommandation concernant la consommation d'alcool chez les jeunes qu'il a émise en 2001 (5), le Conseil a invité la Commission à suivre et évaluer l'évolution de la situation ainsi que les mesures prises, et à faire rapport sur la nécessité de mesures supplémentaires.

2.3

Dans les conclusions de juin 2001 et juin 2004, la Commission a été invitée à formuler des propositions de stratégie communautaire globale visant à réduire les dommages liés à l'alcool, ce qui permettrait de compléter les politiques nationales (6).

2.4

En 2006, la Commission a adopté une communication intitulée «Une stratégie de l'Union européenne pour aider les États membres à réduire les dommages liés à l'alcool» (7). Celle-ci vise à «répertorier les mesures» prises par la Commission et les États membres, et explique comment la Commission peut soutenir et compléter davantage les politiques nationales de santé publique. Le CESE estime que la communication se situe bien en deçà d'une «stratégie globale» (8), dans la mesure où elle n'apporte pas une analyse complète et transparente de tous les domaines d'action politique qui sont concernés, pas plus que des difficultés que certains États membres ont éprouvées, à cause des règles de marché de l'UE (9), à maintenir des politiques de santé publique de qualité par rapport au problème de l'alcool. La stratégie ne reconnaît pas non plus que l'alcool est une drogue psychoactive, une substance qui devient toxique lorsqu'on en consomme de manière excessive, et, pour certains, une substance qui crée une dépendance.

2.5

La Cour européenne de justice a confirmé à plusieurs reprises que la réduction des dommages liés à l'alcool constitue un objectif de santé publique important et légitime, que l'on peut poursuivre par des mesures qui paraissent appropriées et conformément au principe de subsidiarité (10).

2.6

Le CESE reconnaît le travail accompli par l’ensemble des acteurs concernés dans le cadre du Forum européen «Alcool et santé», depuis sa création en 2007. Le CESE se félicite des évolutions similaires à l’échelon local.

3.   Aperçu des effets nocifs

3.1

L'Union européenne est la région où la consommation d'alcool est la plus élevée au monde, avec 11 litres d'alcool pur par personne et par an (11). Si la consommation totale d'alcool a baissé des années 1970 au milieu des années 1990, date à partir de laquelle elle est restée relativement stable, il existe toujours des différences entre les pays du point de vue de la consommation comme sur le plan des dommages (12); toutefois, les modes de consommation nocifs occupent toujours une place importante (13).

3.2

La plupart du temps, la majorité des consommateurs boit de façon responsable. Néanmoins, le CESE marque sa préoccupation quant au fait que, selon les estimations, 55 millions d'adultes dans l'UE (soit 15 % de la population adulte) ont régulièrement des niveaux de consommation d'alcool qui sont nocifs (14). L'on estime que la consommation nocive d'alcool est responsable, dans l'UE, d'environ 195 000 décès par an suite à des accidents, à des affections hépatiques, à des cancers, etc. La consommation nocive d'alcool est la troisième cause de décès précoce et de maladie dans l'UE (15).

3.3

Le CESE est convaincu que la consommation individuelle d'alcool à des niveaux nocifs n'est pas un problème isolé, mais plutôt que tout un éventail de causes peuvent en être à l'origine, y compris la pauvreté, l'exclusion sociale, l'environnement familial ou le stress lié au travail.

3.4

S’il existe des différences dans les habitudes culturelles en matière de consommation d’alcool dans les États membres, l’on observe également des habitudes culturelles différentes liées à une consommation d’alcool dangereuse et nocive, y compris chez les enfants et les adolescents (16). Le CESE demande instamment à la Commission et aux États membres de tenir compte de ces modèles nationaux et locaux lorsqu’ils définissent leurs politiques.

3.5

Les enfants sont particulièrement vulnérables aux dommages causés par l'alcool. L'on estime que, dans l'Union européenne, cinq à neuf millions d'enfants, au sein des familles, souffrent d'effets nocifs de l'alcool. L'alcool est un élément de causalité dans 16 % des cas de sévices et négligences dont sont victimes les enfants et, chaque année, selon les estimations, 60 000 naissances d'enfants d'un poids insuffisant sont imputables à l'alcool (17).

3.6

Une consommation nocive d'alcool peut causer des dommages non seulement à l'individu qui en consomme, mais aussi à des tierces personnes. Il conviendrait d'examiner les dommages causés par l'alcool sur le lieu de travail aussi, dans le cadre de règlements dans le domaine de la santé et de la sécurité, une responsabilité qui incombe en premier lieu à l'employeur. Des mesures dans le domaine de la consommation d'alcool sur le lieu du travail pourraient contribuer à réduire les accidents ainsi que l'absentéisme liés à l'alcool et à augmenter la capacité de travail. Le CESE demande instamment aux employeurs, aux syndicats, aux autorités locales et aux autres organisations concernées de coopérer étroitement et de prendre des mesures conjointes en vue de réduire les dommages liés à l'alcool sur le lieu de travail.

3.7

L'alcool est un produit de base important en Europe car il crée des emplois, génère des revenus, par le biais des taxes, et contribue à la balance commerciale. Cependant, la consommation nocive d'alcool a aussi des incidences sur l'économie, en raison des coûts accrus dans le domaine des services sociaux et de santé, et des pertes de productivité. Le coût des dommages liés à l'alcool pour l'économie de l'UE a été estimé à 125 milliards d'euros pour 2003, soit l'équivalent de 1,3 % du PIB (18).

4.   L'impact de la publicité et de la commercialisation sur les jeunes

4.1

Le CESE invite instamment la Commission à reconnaître la charte européenne de l'OMS sur la consommation d'alcool (19), adoptée par tous les États membres de l'UE en 1995 et notamment le principe moral selon lequel [tous] les enfants et adolescents ont le droit de grandir dans un environnement aux risques réduits, à l’abri des conséquences néfastes de la consommation d’alcool et, dans la mesure du possible, de la promotion des boissons alcoolisées.

4.2

La recommandation du Conseil de l'UE invitait instamment les États membres à établir des mécanismes efficaces dans le domaine de la promotion, de la commercialisation et de la vente au détail, et à veiller à ce que les produits alcoolisés ne puissent pas, par la manière dont ils sont conçus ou promus, susciter l'intérêt des enfants et des adolescents.

4.3

La consommation ponctuelle immodérée d'alcool (ou «beuverie express», désignée en anglais sous l'appellation de «binge drinking») chez les jeunes adultes (15-24 ans) suscite une préoccupation croissante au niveau européen comme au niveau des États membres; 24 % des consommateurs d'alcool de cette tranche d'âge ont fait état d'un épisode d'intoxication alcoolique aigüe au moins une fois par semaine en 2006 (20). La bière (40 %) et les spiritueux (30 %) figurent parmi les boissons alcooliques les plus consommées par les adolescents (21), suivis par le vin (13 %), les prémix (ou «alcopops», à 11 %) (22) et le cidre (6 %). Les ventes promotionnelles d'alcool, telles que les «happy hour» (heure de l'apéritif où les boissons, en particulier alcoolisées, sont proposées à un tarif plus avantageux qu'à l'ordinaire) et les promotions «deux pour le prix d'un» accroissent elles aussi la consommation d'alcool et la probabilité d'intoxication alcoolique aigüe chez les jeunes (23). Pour réaliser une avancée dans ce domaine, il est nécessaire que les autorités responsables veillent à l'application plus stricte de la législation sur l'âge légal de consommation d'alcool.

4.4

La publicité pour l'alcool et ses techniques de commercialisation exercent une influence sur la façon dont se forgent l'attitude des jeunes envers l'alcool et l'image qu'ils en ont, et elles encouragent les attentes positives des jeunes vis-à-vis de la consommation d'alcool (24). Une revue des études longitudinales menée par le Groupe scientifique du Forum européen «Alcool et santé» a établi «des preuves cohérentes démontrant que la publicité pour l'alcool a une incidence sur le fait que des jeunes qui ne buvaient pas commencent à le faire, et sur l'augmentation de la consommation de leurs camarades qui buvaient déjà. Cette conclusion est d'autant plus frappante que seule une petite partie de la stratégie globale de commercialisation a été étudiée» (25).

4.5

Le CESE se déclare préoccupé par le fait que les techniques de commercialisation de l'alcool séduisent des consommateurs mineurs (26), et il attire l'attention sur les constats récurrents selon lesquels l'exposition à la télévision et les actions de parrainage incluant l'alcool laissent prévoir le début de la consommation alcoolique à un jeune âge et une consommation accrue (27).

4.6

Le comité d'experts de l'Organisation mondiale de la santé a estimé que «les systèmes librement consentis n'empêchent pas le type de marketing ayant des effets sur les jeunes, et que l'autoréglementation semble ne fonctionner que dans la mesure où il existe une menace permanente et crédible de réglementation par les pouvoirs publics» (28).

4.7

Les exploitants de la chaîne de fabrication et de distribution des boissons alcoolisées ont fait état de leur volonté d'être plus proactifs dans l'application des mesures de régulation et d'autorégulation (29). Leur action, en coopération avec les États membres, doit être de nature à garantir que leurs produits soient fabriqués, distribués et commercialisés de façon responsable, contribuant ainsi à réduire les dommages liés à l'alcool.

4.8

La directive relative aux services de médias audiovisuels aide à déterminer les normes minimales en matière de publicité pour l'alcool. Elle spécifie que « […] la publicité pour les boissons alcooliques […] ne peut pas être spécifiquement adressée aux mineurs, ne doit pas associer la consommation d'alcool à une amélioration des performances physiques ou à la réussite sociale ou sexuelle, et ne doit pas suggérer que les boissons alcooliques ont un effet stimulant ou sédatif ou anticonflictuel» (30). Le CESE est convaincu que cette directive n'est en elle-même pas suffisante pour protéger pleinement les enfants face aux techniques de commercialisation de l'alcool.

4.9

Le CESE demande instamment que la Commission fixe comme objectif spécifique la réduction de l'exposition des enfants aux produits, à la publicité et aux promotions liés à l'alcool, et qu'une réglementation plus stricte soit établie en la matière.

5.   L'influence du prix sur les dommages liés à l'alcool

5.1

L'on constate un intérêt paneuropéen grandissant pour les mesures visant à lutter contre les dommages liés à l'alcool. L'alcool est un produit important en Europe: il crée des emplois, génère des revenus par l'intermédiaire des taxes et contribue à l'économie européenne grâce aux échanges commerciaux. Selon les estimations, cependant, 15 % de la population adulte a un niveau de consommation d'alcool nocif, ce qui est source de dommages pour les individus et les communautés. En 2003, le coût de l'abus d'alcool dans l'UE a été estimé à 125 milliards d'euros, soit 1,3 % du PIB (31).

5.2

Selon l'étude RAND, la tendance en Europe est à la consommation accrue d'alcool dans le réseau des points de vente de boissons à emporter, car il tend à y être moins cher que l'alcool vendu dans les établissements servant des boissons à consommer sur place (32). Il convient toutefois de noter que l'étude se référait essentiellement aux prix de l'alcool à emporter, et ne procédait à aucune comparaison du prix de l'alcool entre les deux réseaux de vente.

5.3

Des études montrent qu'entre 1996 et 2004, l'alcool est devenu plus abordable dans l'UE, son prix allant jusqu'à baisser de plus de 50 % dans certains pays (33). Une corrélation positive a été établie, sur la base de données factuelles, entre le caractère financièrement abordable de l'alcool et sa consommation dans l'UE (34).

5.4

Les jeunes sont sensibles aux augmentations de prix de l'alcool, lesquelles entraînent une diminution de la fréquence de la consommation d'alcool chez les jeunes, et conduisent aussi à réduire la quantité absorbée lors de chaque prise (35). Toutefois, d'autres études montrent que les jeunes peuvent se tourner vers des modes de consommation plus nocifs en réponse aux augmentations de prix, par exemple en consommant préalablement de l'alcool bon marché à la maison avant de sortir (36). Ce constat a des répercussions importantes concernant la politique en matière d'alcool dans l'UE, notamment eu égard à l'augmentation de la consommation nocive d'alcool chez les jeunes.

5.5

À l'échelle mondiale, l'on estime que l'alcool est responsable de 3,8 % des décès et 4,6 % du nombre d'années de vie corrigées du facteur invalidité (AVCI). Il existe une corrélation positive entre la consommation d'alcool, les accidents de la route et les décès sur la route (37). L'alcool est seul en cause dans certaines maladies telles que la maladie hépatique provoquée par l'alcool ou les pancréatites dues à l'alcool, tandis qu'il est également incriminé dans d'autres maladies et atteintes (comme certains types de cancers, d'affections et attaques cardiaques ou la cirrhose du foie) (38). La consommation nocive d'alcool est un facteur contribuant à la criminalité, à la violence, aux carences familiales, aux comportements sexuels à risque et aux maladies sexuellement transmissibles (39).

5.6

L'on estime que dans l'UE, la consommation ponctuelle immodérée d'alcool est en cause dans 2 000 homicides, 17 000 décès de la route (soit un tiers des cas), 27 000 morts accidentelles et 10 000 suicides (40).

5.7

Les politiques de prix de l'alcool peuvent constituer des instruments efficaces pour ce qui est de réduire les dommages liés à l'alcool (41). Le CESE est toutefois convaincu que la politique des prix devrait être prise en compte lors de l'élaboration de stratégies pour lutter contre les dommages causés par l'alcool, d'une façon durable, multisectorielle et à long terme.

5.8

Les politiques de l'alcool devraient être globales et comporter un ensemble de mesures dont il est prouvé qu'elles ont un effet s'agissant de réduire les dommages, telles que les politiques contre l'alcool au volant ou les interventions basées essentiellement sur la santé. Le CESE reconnaît qu'aucune mesure isolée ne peut résoudre les dommages liés à l'alcool.

5.9

Le CESE est convaincu qu'une application efficace de la réglementation régissant la disponibilité, la distribution et la promotion de l'alcool est nécessaire. L'autorégulation dans ce domaine représente une partie de la solution mais ne suffit pas en tant que telle. Il devrait être possible de restreindre les ventes à prix cassés et les ventes promotionnelles sans que cela ne constitue une entrave au commerce ou ne soit en porte-à-faux avec le droit européen.

6.   Les enfants au centre de l'attention: en particulier, l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation fœtale et les enfants dans les familles

6.1

Le destin de l'Europe dépend de la bonne santé et de la productivité de sa population. C'est pourquoi le CESE se déclare gravement préoccupé par les indications selon lesquelles l'on trouve chez les jeunes une proportion plus élevée qu'ailleurs de pathologies résultant d'une consommation nocive et dangereuse d'alcool (42).

6.2

La Commission reconnaît que les enfants ont droit à une protection efficace contre l'exploitation économique et contre toutes les formes de sévices (43). Le Comité soutient pleinement cette position.

6.3

Le CESE relève que la consommation nocive et dangereuse d'alcool a des effets négatifs non seulement pour la personne qui boit, mais aussi pour d'autres personnes, surtout dans les cas d'accidents, de dommages corporels et de violences. Au sein des familles, le CESE constate que ce sont les enfants qui constituent le groupe à risque le plus vulnérable.

6.4

L'on estime que 5 à 9 millions d'enfants, au sein des familles, souffrent d'effets nocifs de l'alcool, que l'alcool est un élément contribuant dans 16 % des cas aux sévices et aux négligences dont sont victimes les enfants et qu'il contribue également chaque année, selon les estimations, à 60 000 naissances d'enfants d'un poids insuffisant (44). Parmi les effets négatifs qui touchent les enfants figurent encore la pauvreté et l'exclusion sociale, susceptibles de nuire à leur santé, à leur éducation et à leur bien-être, tant à l'heure actuelle que pour l'avenir.

6.5

Les violences conjugales, qui constituent un sérieux problème dans de nombreux pays (45), sont étroitement liées à des problèmes de forte consommation d'alcool chez l'auteur de ces violences (46). Si des violences conjugales peuvent se produire sans que leur auteur ne soit sous l'emprise de l'alcool, une forte consommation peut contribuer à des actes de violence chez certaines personnes. Réduire une forte consommation d'alcool est bénéfique pour les victimes ou les auteurs d'actes de violence, comme pour les enfants qui vivent dans ces familles.

6.6

L'alcool peut toucher les enfants avant même qu'ils ne soient nés. L'«ensemble des troubles de l'alcoolisation fœtale» renvoie à un éventail d'anomalies congénitales permanentes (de nature physique, comportementale ou cognitive) causées par la consommation d'alcool de la mère durant la grossesse.

6.7

La population a peu conscience des troubles de l'alcoolisation fœtale et de leurs effets. Afin de réduire les dommages causés par l'alcool durant la grossesse, il est crucial de diffuser des exemples de programmes de prévention qui s'appuient sur des données factuelles. Le CESE soutient le recours à des campagnes ciblées, au niveau national et européen, afin de sensibiliser aux risques qu'entraîne l'ensemble des troubles de l'alcoolisation fœtale.

7.   Les effets de la consommation nocive d'alcool sur un vieillissement digne et en bonne santé

7.1

Les personnes âgées sont plus sensibles aux effets de l'alcool. Parmi les problèmes spécifiques susceptibles rendre les personnes âgées plus sensibles à l'alcool figurent l'équilibre et le risque de chute ainsi que l'apparition de problèmes de santé. Ce n'est que sur le tard que près d'un tiers des personnes âgées développent des problèmes liés à leur consommation d'alcool pour la première fois, ceux-ci étant souvent dus à la perte d'êtres chers, une mauvaise condition physique, des difficultés à se déplacer ou à l'isolement social (47).

7.2

La consommation nocive d'alcool peut affecter la santé mentale des personnes âgées sous forme d'anxiété, de dépression ou de confusion.

7.3

Les troubles liés à la consommation d'alcool sont communs chez les personnes âgées, notamment chez les hommes qui sont socialement isolés et vivent seuls (48). Une consommation problématique d'alcool est liée à un amoindrissement marqué de la santé physique, psychologique, sociale et cognitive. Environ 3 % des personnes de plus de 65 ans souffrent de ces troubles (49), bien que de nombreux cas puissent ne pas être détectés dans la mesure où les critères de diagnostic et de contrôle ciblent davantage les jeunes adultes. Cependant, traiter des personnes âgées pour des problèmes liés à l'alcool s'avère souvent plus aisé que traiter des jeunes adultes.

7.4

L'alcool peut accroître les effets de certains médicaments et réduire les effets de certains autres. Il importe de sensibiliser les professionnels des soins de santé, les personnes qui prodiguent ces soins de façon informelle ou les citoyens âgés à l'interaction potentielle entre médicaments et alcool.

7.5

Le CESE estime qu'il est nécessaire de faire plus pour traiter le bien-être de la population vieillissante de l'UE, y compris s'agissant d'informer quant aux effets de la consommation nocive d'alcool sur un vieillissement digne et en bonne santé au niveau européen.

Bruxelles, le 30 septembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Par «multisectoriel» on entend: couvrant plusieurs secteurs, y compris la société civile, les syndicats et les entreprises.

(2)  Avis du CESE du 30.05.2007 intitulé «Une stratégie de l'Union européenne pour aider les États membres à réduire les dommages liés à l'alcool», rapporteure: Mme Van TURNHOUT, corapporteur: M. JANSON, JO C 175 du 27.07.2007.

(3)  Konnopka, A & König, H-H, «The Health and Economic Consequences of Moderate Alcohol consumption in Germany 2002» (Les conséquences d'une consommation modérée d'alcool sur la santé et l'économie en Allemagne, 2002), in Value in Health, 2009.

(4)  Traité instituant la Communauté européenne.

(5)  Recommandation du Conseil du 5 juin 2001 (2001/458/CE).

(6)  Conclusions du Conseil du 5 juin 2001 relatives à une stratégie communautaire visant à réduire les dommages liés à l'alcool (JO C 175 du 20.06.2007, p. 1) et conclusions du Conseil des 1er et 2 juin 2004 sur l'alcool et les jeunes (non publiées au JO).

(7)  COM(2006) 625 final.

(8)  Voir note de bas de page no 2.

(9)  Ibidem.

(10)  Affaire Franzen (C-89/95), affaire Heinonen (C-394/97), affaire Gourmet (C-405/98), Catalonia (affaires jointes C-1/90 et C-176/90), affaire loi Évin (C-262/02 et C-429/02).

(11)  «Alcohol in Europe, a public health perspective» (L'alcool en Europe, une perspective de santé publique), rapport élaboré pour la Commission européenne par MM. P. ANDERSON et B. BAUMBERG, Institute of Alcohol studies (Institut des études sur l'alcool), juin 2006.

(12)  Avis du CESE du 30.05.2007 intitulé «Une stratégie de l'Union européenne pour aider les États membres à réduire les dommages liés à l'alcool», rapporteure: Mme Van TURNHOUT, corapporteur: M. JANSON, JO C 175 du 27.07.2007

(13)  Voir note de bas de page no 11.

(14)  Plus de 40 g d'alcool, c'est-à-dire 4 absorptions par jour pour les hommes et plus de 20 g, c'est-à-dire 2 absorptions par jour, pour les femmes.

(15)  «Alcohol-related harm in Europe Key data October 2006» (Les dommages liés à l'alcool en Europe – données essentielles, octobre 2006), Bruxelles, MEMO/06/397, 24 octobre 2006.

(16)  Enquête ESPAD, 2007.

(17)  Voir note de bas de page no 11.

(18)  DG SANCO.

(19)  Organisation mondiale de la santé, Charte européenne sur la consommation d'alcool (1995).

(20)  Voir note de bas de page no 11.

(21)  Rapport ESPAD 2007 (2009).

(22)  Le terme «prémix» désigne les boissons alcoolisées en bouteille qui ressemblent à des produits tels que les boissons non alcoolisées et la limonade (aussi appelées «alcopops»).

(23)  «Independent Review of the Effects of Alcohol Pricing and Promotion» (Revue indépendante des effets des prix et de la promotion de l'alcool, 2008).

(24)  Avis scientifique du Groupe scientifique du Forum européen «Alcool et santé» (2009) et «Impact of Alcohol Advertising and Media Exposure on Adolescent Alcohol Use: A Systematic Review of Longitudinal Studies» (Impact de la publicité pour l'alcool et de l'exposition médiatique sur la consommation d'alcool des adolescents: revue des études longitudinales, 2009).

(25)  Voir note de bas de page no 24, première partie.

(26)  Voir note de bas de page no 11.

(27)  Ibidem.

(28)  Comité OMS d'experts des problèmes liés à la consommation d'alcool, Deuxième rapport, 2007.

(29)  COM(2006) 625 final.

(30)  «The affordability of alcoholic beverages in the European Union: Understanding the link between alcohol affordability, consumption and harms» (Le caractère économiquement abordable des boissons alcoolisées dans l'Union européenne: comprendre le lien entre accessibilité financière, consommation et dommages, 2009).

(31)  DG SANCO 2006.

(32)  Voir note de bas de page no 11. Les établissements servant des boissons à consommer sur place désignent les bars, discothèques, restaurants et autres détaillants qui vendent de l'alcool pour une consommation sur place. Le réseau de distribution des boissons à emporter fait référence aux supermarchés et aux établissements dépourvus de licence, qui vendent de l'alcool pour une consommation qui a lieu ailleurs.

(33)  Le caractère abordable est mesuré en considérant l'effet net du prix et du revenu.

(34)  Voir note de bas de page no 30.

(35)  «Modelling the Potential Impact of Pricing and Promotion Policies for Alcohol in England: Results from the Sheffield Alcohol Policy Model Version 2008(1-1)» (Modéliser l'impact potentiel des politiques de prix et de promotion de l'alcool en Angleterre: résultat de la version 2008(1-1) du modèle de politique de l'alcool de Sheffield).

(36)  Alcohol Price and Consumer Behaviour. Market research. IPSOS Belgium (2009). (Prix de l'alcool et comportement des consommateurs. Étude de marché. Par IPSOS Belgique (2009)).

(37)  Voir note de bas de page no 30.

(38)  «Global burden of disease and injury and economic cost attributable to alcohol use and alcohol use disorders» (La charge globale des maladies et atteintes et le coût économique imputable à la consommation d'alcool et aux troubles associés, The Lancet, 2009).

(39)  «Effectiveness and cost-effectiveness of policies and programmes to reduce the harm caused by alcohol» (Efficacité et rapport coût-efficacité des politiques et des programmes visant à réduire les dommages causés par l'alcool, The Lancet, 2009).

(40)  Voir note de bas de page no 11.

(41)  «WHO Global Status Report: Alcohol Policy» (Organisation mondiale de la santé, Rapport sur la situation mondiale: la politique en matière d'alcool, 2004). Voir aussi «Paying the tab. The costs and benefits of alcohol control» (Payer l'addition. Les coûts et les avantages du contrôle de l'alcool, 2007) et les notes de bas de page no 35 et 37.

(42)  Voir note de bas de page no 11.

(43)  COM(2006) 367 final.

(44)  Voir note de bas de page no 11.

(45)  Avis d'initiative du CESE du 16.03.2006 sur la «Violence domestique envers les femmes», rapporteure: Mme HEINISCH, JO C 110 du 9.5.2006 et avis d'initiative du CESE du 14.12.2006 sur «Les enfants – victimes indirectes de violences», rapporteure: Mme HEINISCH, JO C 325 du 30.12.2006.

(46)  Voir note de bas de page no 11.

(47)  Voir le site du «Royal College of Psychiatrists» du Royaume-Uni

http://www.rcpsych.ac.uk/mentalhealthinfoforall/problems/alcoholanddrugs/alcoholandolderpeople.aspx.

(48)  «Alcohol use disorders in elderly people: redefining an age old problem in old age», British Medical Journal, (Les troubles liés à la consommation d'alcool chez les personnes âgées: redéfinir un problème de longue date du grand âge, 2003).

(49)  «Prevalence of mental disorders in Europe: results from the European Study of the Epidemiology of Mental Disorders project», (Fréquence des troubles mentaux en Europe: les résultats du projet d'étude européenne de l'épidémiologie des troubles mentaux, 2004).


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/15


Avis du Comité économique et social européen sur «Le lien entre l'égalité des sexes, la croissance économique et le taux d'emploi» (avis exploratoire)

2009/C 318/04

Rapporteure: Mme OUIN

Dans une lettre du 18 décembre 2008, Mme Cecilia MALMSTRÖM, ministre des Affaires européennes de la Suède, a demandé au Comité économique et social européen, dans la perspective de la prochaine présidence suédoise, d'élaborer un avis exploratoire sur le thème suivant:

«Le lien entre l'égalité des sexes, la croissance économique et le taux d'emploi».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 1er septembre 2009 (rapporteure: Mme OUIN).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 1er octobre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 138 voix pour, 6 voix contre et 6 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le mérite de la question posée par la présidence suédoise sur les liens entre l’égalité des sexes, la croissance et l’emploi est de permettre de prendre du recul. Le thème de l’égalité des sexes est en effet traité dans un nombre considérable de rapports et d’études ainsi que de directives, de lois, de recommandations, d’accords. Pourtant la réalité résiste et les inégalités persistent. Elles sont hérités des siècles passés et cela fait seulement 50 ans qu’elles sont combattues. Si l’égalité des sexes est maintenant inscrite dans les lois, il reste à changer les mentalités, les comportements individuels et collectifs. Le présent avis propose de changer de regard, en particulier dans trois domaines: l’organisation du temps, la reconnaissance de la qualification des emplois de service à la personne et la mixité, tant des secteurs professionnels que des postes de décision.

1.2

Les recommandations du CESE s’adressent donc aux Etats membres, à la Commission, aux partenaires sociaux, mais aussi à l’ensemble des acteurs de la société.

Aux États membres:

1.3

La croissance est mesurée par l’augmentation du PIB. Or cet indicateur est insuffisant pour refléter la contribution économique des femmes. Pour examiner les liens entre égalité des sexes et croissance, l’instrument de calcul de celle-ci devrait être revu.

1.4

Œuvrer pour l'égalité des sexes doit être considéré comme un moyen:

de promouvoir la croissance et l'emploi et non comme un coût ou une contrainte;

de renforcer l'indépendance économique des femmes qui seront davantage consommatrices de biens et services;

d'investir dans les ressources humaines en imposant l'égalité d'accès aux formations professionnelles, à l'apprentissage tout au long de la vie, en valorisant mieux l'expérience et la diversité;

de créer les conditions pour une meilleure conciliation entre travail, vie familiale et vie privée, en proposant des organisations de temps de travail flexibles choisis dans l’intérêt des entreprises et des salariés, en augmentant les services de soins, en considérant l’accueil des jeunes enfants non comme une charge mais comme un investissement, et en encourageant les hommes à prendre leur part du travail familial;

de stimuler l'esprit d'entreprise des femmes, en soutenant les créations et les transmissions d'entreprise et améliorant leur accès aux financements;

de s'assurer que la perspective de genre est prise en compte dans les mesures prises, à court, moyen et long terme, face à la crise économique et financière, tant au niveau de l'Union européenne dans son ensemble, qu'à l'échelon de chaque Etat membre;

de réduire la pauvreté active (les salariés sous-payés, précarisés, chefs de famille monoparentale sont souvent des femmes) par un accès accru à un travail, à un travail sécurisé, et à des salaires décents.

À la Commission:

1.5

demande de contrôler et évaluer les efforts des États membres dans la mise en place de la Feuille de route pour l'égalité entre hommes et femmes et de devenir une plateforme d'échange de bonnes pratiques et d'expériences.

Aux partenaires sociaux:

1.6

demande de mettre en œuvre leur cadre commun d'actions en matière d'égalité des sexes en se concentrant sur le rôle des genres, la promotion de la femme dans le processus de décision, le soutien de l'équilibre travail/vie privée et la réduction de l'écart de rémunération;

1.7

d’améliorer les connaissances et les instruments de lutte contre la ségrégation des emplois et pour leur mixité;

1.8

de professionnaliser les emplois de service à la personne par une meilleure reconnaissance des compétences mises en œuvre pour les exercer.

À tous les acteurs de la société civile et aux responsables politiques:

demande de réfléchir à un assouplissement des modalités des règles de la retraite, ce qui pourrait inclure la possibilité de prélever du temps avant la retraite pour faire face aux obligations de la vie familiale;

de développer l’offre de service à domicile par le développement de services publics et la création d’entreprises;

d’augmenter le nombre de femmes aux fonctions dirigeantes dans les administrations publiques ainsi que dans les conseils d’administration et comités de direction des entreprises privées et publiques;

d’envisager cette question avec une vision ample, conduisant tant à des mesures immédiates qu’à des axes de travail inscrits dans la durée.

2.   Introduction

2.1

La nécessité des mesures visant à améliorer la participation des femmes au marché du travail fait partie intégrante de la Stratégie de Lisbonne qui doit faire évoluer l'Europe vers une société plus compétitive basée sur les connaissances.

2.2

Le rapport 2008 de la Commission sur l’égalité entre les femmes et les hommes en Europe (1) indique: «L'emploi féminin a été le principal facteur de la croissance continue de l'emploi dans l'UE au cours de ces dernières années. Entre 2000 et 2006, l'emploi dans l'UE-27 a crû de près de 12 millions de personnes, dont plus de 7,5 millions de femmes (…). Le taux d'emploi des femmes ayant des enfants à charge n'est que de 62,4 %, contre 91,4 % pour les hommes, soit une différence de 29 points. Plus des trois quarts des travailleurs à temps partiel sont des femmes (76,5 %), ce qui correspond à une femme sur trois, contre moins d'un homme sur dix».

2.3

Le rapport 2009 (2) chiffre le taux d’emploi des femmes à 58,3 % contre 72,5 % pour les hommes, le taux d’emploi féminin à temps partiel à 31,2 % contre 7,7 % pour les hommes, pointe la prédominance des femmes dans les secteurs où l’emploi est moins bien rémunéré; et souligne la répartition inégale en matière de pouvoirs dans les institutions et entreprises.

2.4

Si l’égalité des sexes n'est pas encore réalisée, la situation des femmes travailleuses est l'une des meilleures du monde; il faut mettre au crédit de l’Union européenne de s’être attelée à cette question dès l’origine et d’avoir mis en place outils statistiques, études, analyses, et législation.

2.5

Malgré des progrès et résultats positifs enregistrés, le potentiel économique des femmes n'a pas été suffisamment mis en valeur. En outre, la crise économique et financière internationale sans précédent aura probablement un impact différent sur les femmes et les hommes, étant donné leurs situations différentes dans la sphère économique, sociale et familiale.

2.6

Parce que de très nombreux travaux sont disponibles, que des recommandations ont été formulées, des décisions prises par les institutions et partenaires sociaux européens, – en 9 ans le Comité a adopté 14 avis sur des thèmes en rapport avec l’égalité des sexes (3) – le présent avis fait le choix de ne pas traiter de l’intégralité du sujet de l'égalité des sexes. Il limite le champ à ses liens avec la croissance et l'emploi, avec, en ligne de mire, les objectifs fixés par la Stratégie de Lisbonne concernant l’augmentation de la participation des femmes au marché du travail (4).

3.   Observations générales

3.1   Antécédents

3.1.1

L'augmentation de l'emploi des femmes a été continue depuis les années 60. Un grand pas vers l’égalité des sexes a été, dès les années 70, l’accès massif des femmes à un emploi. Dès qu'il leur a été possible de choisir leurs maternités et d’accéder aux études supérieures, elles ont voulu, comme les hommes, utiliser leurs compétences au sein de la société et pas seulement de leur famille, et acquérir une autonomie financière. Le travail rémunéré, c'est un revenu personnel, de meilleures garanties en matière de sécurité sociale et de retraite, un rempart contre la pauvreté en cas de séparation, divorce ou veuvage.

3.1.2

L’entrée des femmes dans l’emploi a créé de nouveaux besoins que le marché a dû satisfaire. Les femmes travaillaient chez elles, ce qui n’était pas comptabilisé dans le produit intérieur brut. Lorsque les femmes sont sorties de la sphère domestique, des emplois ont été créés pour réaliser les tâches qu’elles effectuaient à la maison. On pense aux gardiennes d’enfants et aides ménagères mais pas seulement.

3.1.3

Le travail des femmes a créé des besoins qui ont contribué au développement économique. Quand les femmes ont occupé un emploi, les couples se sont équipés d’appareils électroménagers, de deux automobiles, ont acheté des plats cuisinés préparés, enfants et parents ont pris un repas à l’extérieur, les familles ont eu besoin de services pour et de structures d'hébergement pour les malades, personnes handicapées et âgées dont s'occupaient précédemment les femmes au foyer, pour l'accueil des enfants en dehors du temps scolaire. Avec deux salaires, les couples ont pu acquérir un logement, et profiter des activités culturelles, voyager… Des emplois ont ainsi été créés dans l’industrie (électroménager, automobile, agroalimentaire), dans la restauration collective, dans les secteurs sanitaires et sociaux, périscolaire, de la petite enfance et de l’éducation, dans le bâtiment, le tourisme, les loisirs, la culture, les transports de voyageurs…

3.1.4

Depuis quarante ans, ce mouvement de transformation du travail domestique en emplois est un moteur de la croissance. Mais s'agit-il de croissance réelle ou seulement de la façon dont elle est calculée? L'économie ne connait pas le travail domestique et familial, pourtant nécessaire au fonctionnement de la société, ce qui conduit à s'interroger sur la façon de calculer la croissance.

3.2   Égalité des sexes et croissance économique – faits et constatations

3.2.1

Selon une analyse de l'UE (5), l’apport de l'égalité des sexes à l’économie ne doit pas se mesurer uniquement à l’aune d’une meilleure rentabilité des entreprises. C’est un investissement productif participant au progrès économique global, à la croissance et à l'emploi. L'égalité des sexes peut contribuer au développement: 1) par une plus forte participation des femmes au marché du travail ce qui induit une meilleure utilisation de leur investissement en éducation et formation, 2) par une plus grande indépendance économique, 3) par une meilleure intégration des femmes dans le système fiscal, participant ainsi au bien-être collectif.

3.2.2

Bien que la contribution économique soit considérée comme plus large que l'approche entrepreneuriale et la gestion de la diversité au niveau des entreprises, certains éléments permettent d'établir qu'à l'approche entrepreneuriale sont associés des résultats économiques positifs. Les entreprises dont le conseil d'administration compte davantage de femmes sont plus rentables.

3.2.3

Les politiques en faveur de l'égalité peuvent se concevoir comme un investissement efficace dans les ressources humaines. Même si les ambitions du développement économique se limitent à la croissance économique, du point de vue de l'investissement, les politiques en faveur de l'égalité sont susceptibles d'avoir une incidence positive sur les personnes, les entreprises, les régions et les nations. Recourir plus efficacement aux femmes qui ont des niveaux d'éducation supérieurs est aussi une démarche porteuse d'avantages économiques potentiels.

3.2.4

Une plus grande indépendance économique des femmes présente des avantages grâce à la contribution qu'elles apportent en tant que consommatrices de biens et de services dans l'économie, et au pouvoir d'achat des ménages. La contribution économique des femmes devrait être davantage reconnue dans les politiques économiques au niveau national, régional et local.

3.3   Situation actuelle

3.3.1

Au moment où les crises économique et écologique interpellent sur le type de développement souhaitable, des voix s'élèvent pour remettre en cause le PIB comme seul indicateur de croissance. D'autres indicateurs devraient être pris en considération (6).

3.3.2

Quels que soient les indicateurs, la situation des femmes reste inégalitaire, ce qui représente un coût pour la société. Les Etats investissent autant pour l'éducation des garçons que des filles - pourtant 60 % des diplômés des universités européennes sont des filles -, il n'est pas logique que les Etats ne soutiennent pas davantage ensuite les femmes sur le marché du travail. Des dépenses publiques d’éducation égales pour les deux sexes devraient permettre aux femmes d’atteindre les mêmes responsabilités et rémunérations que les hommes. Les femmes doivent profiter des mutations actuelles pour acquérir les nouvelles compétences nécessaires aux nouveaux emplois. Les contributions des femmes, leur niveau élevé de formation et leur potentiel pour répondre aux besoins futurs du marché du travail demeurent sous-estimés et méconnus.

3.3.3

Lutter contre l'inégalité des sexes n’est pas seulement une question éthique, c’est mieux gérer les ressources humaines. Des femmes plus nombreuses dans l’emploi créeront davantage de richesses, consommeront davantage de biens et de services, et contribueront à accroître les recettes fiscales. Des équipes de travail mixtes, c’est un meilleur potentiel d’innovation. Donner aux couples les moyens de réaliser leur désir d'enfant, en permettant aux parents de garder leur emploi, c'est lutter contre le déficit démographique. Si l'Europe veut investir dans l'humain, elle doit en priorité s'attaquer aux handicaps des femmes (7).

3.3.4

Le potentiel d'évolution des femmes est freiné en particulier par:

le partage inégal des responsabilités familiales (enfants, malades, parents âgés, tâches ménagères, etc.),

l'insuffisance, tant du point de vue du nombre que de la qualité des structures publiques d'accueil préscolaire, ainsi que des structures alternatives d'accueil, à un coût accessible à tous,

le poids des stéréotypes,

la ségrégation horizontale et verticale du marché du travail,

la ségrégation au niveau de l’orientation scolaire et des études,

la non-reconnaissance de leurs qualifications et des compétences mises en œuvre dans de nombreux métiers,

le travail à temps partiel non choisi,

et le travail précaire,

le travail informel,

les bas salaires,

l'écart salarial entre hommes et femmes (8),

la violence et le harcèlement à caractère sexuel et/ou en raison des sexes,

le trop faible nombre de femmes avec des responsabilités dans les domaines économique et politique,

les conditions défavorables pour les femmes entrepreneuses, le soutien trop faible aux créations et aux transmissions d'entreprise et l'accès limité aux financements,

les régressions véhiculées par certaines communautés,

le manque de modèles,

elles-mêmes – les femmes ne se mettent pas en valeur comme les hommes le font (elles hésitent à poser leur candidature pour des postes à responsabilités, manquent de confiance en elles, ne constituent pas de réseau, ne saisissent pas les occasions qui se présentent et sont réticentes à combattre la discrimination).

3.3.5

Porter l'effort sur les conditions d'accès et de maintien des femmes sur le marché du travail, combler l’écart salarial entre hommes et femmes promet davantage de croissance et de meilleurs emplois, une prévention contre la pauvreté, et un moindre coût de la «réparation sociale». La pauvreté en Europe se concentre sur la catégorie des femmes seules avec enfants (9).

3.3.6

Dans la répartition précédente des fonctions, l’homme gagnait un revenu qui finançait le travail familial, social et domestique de son épouse. Quand les couples ont deux salaires, ils ne consacrent pas l'un des deux au financement des services pour effectuer les travaux que réalisait la femme au foyer, ils privilégient la consommation de biens matériels.

3.3.7

Le travail gratuit de la femme au foyer n'avait pas de prix, mais en se transformant en travail salarié, il a un coût que les utilisateurs ne sont pas prêts ou ne peuvent pas payer. Gardiennes d’enfants, aides familiales, aides ménagères sont payées aux plus bas salaires, à temps partiel, à employeurs multiples (ce sont les particuliers qui sont employeurs pour quelques heures par semaine) et souvent dans l'économie informelle. Le travail domestique est le plus important secteur de travail non déclaré en Europe.

3.3.8

Les parents confient ce qu’ils ont de plus précieux, leur bébé, à des personnes beaucoup moins rémunérées que la moyenne, alors qu’ils souhaitent que leur niveau de compétences soit élevé. De même qu'à une aide ménagère on laisse la clef de son domicile, sans pour autant lui verser le salaire de la confiance. La qualification est difficile à faire reconnaitre parce que les familles jugent «facile» une tâche qu’elles peuvent accomplir elles-mêmes. Pourtant, si s'occuper de ses enfants n'est pas un métier, s'occuper des enfants des autres l'est (connaissances en psychologie, en diététique, en hygiène, concentration, écoute, attention, vigilance permanentes, etc.); les compétences requises, souvent considérées comme «naturellement» féminines et de ce fait ignorées dans le domaine professionnel, sont plus souvent transmises de façon informelle dans la famille qu’enseignées dans le cursus scolaire.

4.   Observations particulières

4.1   La marche vers l’égalité des sexes peut continuer à créer de la croissance et des emplois:

parce que le taux d’emploi des femmes peut augmenter, ce qui créera des besoins supplémentaires de services,

parce que les salaires féminins peuvent être réévalués, ce qui créera du pouvoir d’achat, des capacités de consommation supplémentaires et des recettes fiscales,

parce que les femmes peuvent occuper davantage de postes politiques et de décision, ce qui a un effet positif sur la performance des entreprises et des institutions,

parce que plus de femmes entrepreneuses apporteront de la valeur ajoutée et des contributions financières supplémentaires à l'économie grâce à l'innovation et à la création d'emplois.

4.2   Parce qu'il est inutile de répéter ce que d'autres documents communautaires affirment déjà, le Comité économique et social européen limite ses propositions à quelques pistes moins explorées que d'autres.

4.2.1   S’attaquer à la ségrégation des emplois

4.2.1.1

Le principal obstacle à l’égalité des sexes est actuellement la ségrégation des emplois. Il y a des professions masculines et des professions féminines. Les salaires des branches professionnelles féminines sont souvent plus bas. Et le travail à temps partiel non choisi ainsi que la précarité plus répandus.

4.2.1.2

Tant qu’une profession sera réservée à un sexe, des stéréotypes s’y attacheront. Il est maintenant prouvé qu’hommes et femmes sont capables d’exercer tous les métiers. On voit des professions longtemps dominées par les hommes (enseignant, juge, médecin généraliste…) l'être aujourdh'ui par des femmes. Pourquoi la mixité est-elle si difficile à installer dans l’emploi? Il faut augmenter les connaissances à ce sujet pour s’attaquer à la ségrégation de l’emploi et promouvoir sa mixité. Cela permettra aussi d’éviter les pénuries de main d’œuvre dont sont victimes certains secteurs.

4.2.1.3

Les obstacles à la mixité des emplois et des fonctions sont inconscients et liés à des représentations. Ils s’enracinent dès le système éducatif, avec le choix des professions différentes des filles et des garçons. Parents et enseignants doivent être davantage sensibilisés aux conséquences des choix d’orientation des jeunes. Les négociateurs patronaux et syndicaux des grilles de classifications, qui hiérarchisent les qualifications lors des négociations des salaires ont un rôle essentiel, qui nécessite qu’ils connaissent la valeur des compétences acquises dans la sphère domestique et familiale. Les fonctions dirigeantes ne sont pas mixtes non plus. Des mesures doivent être prises dans les grandes entreprises et la haute administration pour leur plus grande mixité.

4.2.2   Qualifier et professionnaliser les emplois de services à la personne

4.2.2.1

Les emplois de services à la personne doivent devenir de vraies professions, avec une qualification reconnue, des formations, des diplômes, un déroulement de carrière. Afin de sortir de la relation individuelle entre le particulier et l’aide familiale, il faut créer des entreprises et services publics de services à la personne. Les familles ne doivent plus être des employeurs mais des clients ou des usagers qui achètent ou bénéficient de quelques heures de ménage, d'aide à la personne âgée ou de garde d’enfant, de soutien scolaire… Il faudrait généraliser un système qui existe déjà dans quelques pays européens, dans lequel l’entreprise ou le service public employeur est responsable de la sécurité des biens et des personnes et doit vérifier la qualification des salariés intervenant à domicile. Ceux-ci n’ont ainsi qu’un seul employeur, sont rémunérés pour le temps de transport entre deux domiciles et ont accès à la formation professionnelle et à toutes les garanties collectives. Il faut élaborer un cadre de références européen pour les emplois de service à domicile intégrant les dimensions psychologiques de ces fonctions (confiance, empathie, attention, écoute, vigilance…), les connaissances indispensables (diététique, incidence des produits utilisés sur la santé et l’environnement…), et pas seulement la dimension matérielle et technique des travaux ménagers.

4.2.2.2

La reconnaissance de la qualification renchérit le coût des services, que déjà actuellement la plupart des familles ne peuvent pas assumer. Un financement public et des entreprises – dans les cas où il s'inscrit dans le cadre d'accords au niveau des entreprises – pourrait rendre ces services plus accessibles pour tous.

4.2.2.3

La professionnalisation des emplois de services à la personne et de meilleurs salaires permettront de développer leur mixité. Quand des hommes voudront exercer les métiers d'aides ménagers, gardiens d’enfants, aides familiaux, un grand pas aura été franchi vers l’égalité des sexes.

4.2.3   Mieux répartir les responsabilités familiales

4.2.3.1

Les pères consacrent moins de temps que les mères aux tâches familiales et domestiques. Sensibiliser les pères à l’importance de leur rôle auprès de leurs enfants, inciter les hommes à prendre leurs responsabilités auprès de leurs parents âgés, des malades de la famille est une des conditions de l’égalité.

4.2.4   L’accueil des jeunes enfants

4.2.4.1

Développer l’accueil des jeunes enfants ne doit pas être considéré comme un coût mais comme un investissement. D’après Gösta Esping-Andersen (10), sur le long terme, les mères qui travaillent restituent la subvention «grâce à l’augmentation de leurs gains à l’échelle d’une vie et aux impôts qu’elles acquittent». Cet apport rembourse l’aide publique initiale et a des effets bénéfiques pour l’enfant accueilli. Cet investissement permettra aussi d’enrayer le déclin démographique de l’Europe.

4.2.5   Développer l’offre de services

L'égalité passe par le développement d’une offre de services qui pourra libérer les femmes des travaux domestiques et familiaux, afin de conforter leur place dans des emplois stables, à temps plein et qualifiés. Développer ces services (accueil des jeunes enfants, services périscolaires, accompagnement des personnes âgées et handicapées, ménage, repassage..) c’est créer des emplois.

4.2.5.1

Le développement de ces services passe par un financement mutualisé « (État, entreprises, clients)» (11). Des accords d’entreprise récents proposent des services à la personne comme alternative aux augmentations de salaires. Proposer des services permettant de mieux concilier vie personnelle et vie professionnelle fait partie de la responsabilité sociale des entreprises.

4.2.6   Prévoir un crédit «temps»

4.2.6.1

Les services ne peuvent suffire pour concilier la vie professionnelle et familiale. Élever, éduquer des enfants requiert du temps pendant une partie de la vie. Si le travail à temps partiel, quand il est choisi, peut aider les personnes chargées de famille à mieux concilier leurs vies professionnelle, familiale et privée, il ne doit pas fragiliser la position des femmes dans l’emploi, et dans la vie, surtout quand elles sont chefs de famille, ni dissuader les pères de s’investir dans la vie familiale. Les deux parents doivent pouvoir s’occuper de leurs enfants.

4.2.6.2

D’autres membres de la famille ont besoin de temps: personnes en fin de vie, malades, parents âgés. À l’heure où tous les systèmes de retraite sont réformés, il faut sortir d’une vision de la vie divisée en trois temps: les études, le travail et la retraite. Chacun doit pouvoir étudier tout au long de sa vie et disposer d'un nombre d’années suffisant de crédit temps pour ses activités familiales, sociales, associatives, politiques et citoyennes. Il devrait être possible de choisir de reculer son âge de départ à la retraite si l’on préfère prendre du temps (financé comme la retraite) pendant sa vie active.

4.2.7   Augmenter le nombre de femmes aux fonctions dirigeantes

4.2.7.1

Les femmes sont sous-représentées dans toutes les fonctions dirigeantes, les responsabilités politiques, la haute administration et dans les directions des grandes entreprises alors que les entreprises qui ont une plus grande proportion de femmes dans leur comité de direction sont aussi celles qui sont les plus performantes financièrement. Elles créent moins d'entreprises, sont moins souvent chefs d'entreprises. Les hommes sont sous représentés dans la sphère familiale, ils prennent moins leur congé parental.

4.2.7.2

Les femmes qui se sont imposées dans un milieu masculin pourraient guider des femmes qui aspirent à la même carrière (tutorat). Des mesures contraignantes peuvent s’avérer nécessaires: les grandes institutions publiques et grandes entreprises privées devraient prendre des mesures pour assurer un nombre significatif de femmes parmi leurs dirigeants.

4.2.8   Soutien des femmes en tant qu'entrepreneuses

Les femmes qui ont l'intention de créer ou de diriger une entreprise dans l'UE rencontrent de nombreuses difficultés à créer et pérenniser des entreprises du fait de leur faible connaissance du monde des affaires,, des types d’entreprise et des secteurs, du manque d'information, de l’absence de contacts et de réseaux, des stéréotypes, de la faiblesse et de l’insuffisante flexibilité des services pour enfants, des difficultés à concilier affaires et obligations familiales, ainsi que de la façon différente des hommes et des femmes de concevoir l'entreprenariat. La Feuille de route de l'UE pour l'égalité entre femmes et hommes a identifié des mesures à prendre pour soutenir l'esprit d'entreprise des femmes, pour les aider à créer leur entreprise ou à reprendre une entreprise existante, et à bénéficier de formations adaptées pour entrepreneurs et pour faciliter leur accès aux financements.

4.2.9   Le rôle des partenaires sociaux

En considérant que les causes des inégalités persistant sur le marché du travail sont complexes et liées entre elles, les partenaires sociaux européens ont adopté en 2005 – dans le cadre de leur premier programme de travail commun – un cadre d'actions sur l'égalité des genres ayant pris en compte essentiellement quatre domaines: s'occuper du rôle des genres, promouvoir les femmes dans les processus de décision, soutenir l'équilibre travail/vie privée et réduire l'écart de rémunération.

Bruxelles, le 1er octobre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  COM(2008) 10 final, page 4.

(2)  COM(2009) 77 final.

(3)  Voir les avis du CESE des:

24.03.2009 sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l'application du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes exerçant une activité indépendante et abrogeant la directive 86/613/CEE», rapporteure: Mme SHARMA, JO C 228 du 22.9.2009.

13.05.2009 sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil portant modification de la directive 92/85/CEE du Conseil concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail», rapporteure: Mme HERCZOG, CESE 882/2009 JO C 277 du 17.11.2009.

22.04.2008 sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions - Combattre l'écart de rémunération entre les femmes et les hommes», rapporteur: Mme KÖSSLER (JO C 211 du 19.08.2008)

11.07.2007 sur «Employabilité et esprit d'entreprise – Le rôle de la société civile, des partenaires sociaux et des organismes régionaux et locaux du point de vue du genre», rapporteur: M. PARIZA CASTAÑOS (JO C 256 du 27.10.2007)

11.07.2007 sur «Le rôle des partenaires sociaux dans la conciliation de la vie professionnelle, de la vie familiale et de la vie privée», rapporteur: M. CLEVER (JO C 256 du 27.10.2007)

12.07.2007 sur «L'emploi pour les catégories prioritaires (stratégie de Lisbonne)», rapporteur: M. GREIF (JO C 256 du 27.10.2007)

13.09.2006 sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions - Une feuille de route pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2006-2010», rapporteure: Mme ATTARD (JO C 318 du 23.12.2006)

14.02.2006 sur la «La représentation des femmes dans les organes de décision des groupes d'intérêts économiques et sociaux de l'Union européenne», rapporteur: M. ETTY (JO C 88 du 11.04.2006)

14.12.2005 sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à l'année européenne de l'égalité des chances pour tous (2007) – Vers une société juste», rapporteure: Mme HERCZOG (JO C 65 du 17.03.2006)

29.09.2005 sur «La pauvreté des femmes en Europe», rapporteure: Mme KING (JO C 24 du 31.01.2006)

28.09.2005 sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d’un Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes», rapporteur: Mme ŠTECHOVÁ (JO C 24 du 31.01.2006)

15.12.2004 sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail», rapporteure: Mme SHARMA (JO C 157 du 28.06.2005)

03.06.2004 sur la «Proposition de directive du Conseil mettant en œuvre le principe de l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l'accès aux biens et services et la fourniture de biens et services», rapporteure: Mme CAROLL (JO C 241 du 28.09.2004).

25.1.2001 sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 76/207/CEE du Conseil relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail», rapporteure: Mme WAHROLIN (JO C 123 du 25.4.2001)

(4)  60 % en 2010.

(5)  Note de synthèse: «The Economic Case for Gender Equality» (l'aspect économique de l'égalité des chances), Mark Smith et Francesca Bettio, 2008 – financée et élaborée pour les besoins de la Commission européenne, (DG EMPL).

(6)  Par exemple, les indicateurs utilisés par le PNUD – Programme des Nations unies pour le Développement – l'IDH (indice du développement humain), qui classe les pays en faisant la moyenne de trois indicateurs, le PIB par habitant, l’espérance de vie à la naissance et le niveau d’instruction, l’IDSH, indicateur sexospécifique de développement humain qui permet d’évaluer les différences de situation des hommes et des femmes, et l’IPF, indicateur de participation des femmes à la vie économique et politique.

(7)  COM(2009) 77 final: «Les États membres où la fécondité est la plus élevée sont ceux qui ont fait le plus pour concilier la vie professionnelle et la vie privée des parents, et qui enregistrent un taux d'emploi des femmes élevé».

(8)  Voir l’excellente campagne de la Commission «Equal pay for work of equal value», http://ec.europa.eu/equalpay.

(9)  COM(2009) 77 final: «Les femmes sont les plus menacées par la pauvreté, c'est surtout le cas des parents isolés (en général des femmes) dont le taux de risque de pauvreté est de 32 %».

(10)  «Trois leçons sur l’État-Providence», 2008, Paris, Le Seuil.

(11)  L’exemple du «chèque-emploi-service», de la déduction fiscale en France qui permet de financer partiellement ces services sont des pistes intéressantes, qui ont obtenu des résultats positifs contre le travail informel dans ce secteur. C’est un système issu d'un accord entre les banques, l’État et les systèmes de protection sociale, selon lequel les banques émettent des chéquiers spéciaux pour payer les prestations de service à domicile dans le but de supprimer du travail au noir et de faciliter aux particuliers employeurs les démarches de déclarations sociales et fiscales.


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/22


Avis du Comité économique et social européen sur «La diversité des formes d'entreprise» (avis d'initiative)

2009/C 318/05

Rapporteur: M. CABRA DE LUNA

Corapporteure: Mme ZVOLSKÁ

Le 10 juillet 2008, le Comité économique et social européen, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, a décidé d'élaborer un avis d'initiative sur

«La diversité des formes d'entreprise.»

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 9 septembre 2009 (rapporteur: M. CABRA DE LUNA, corapporteure: Mme ZVOLSKÁ).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 1er octobre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 113 voix pour et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   Le présent avis a pour objet de décrire la diversité des formes d'entreprise existant dans l'Union européenne (UE). Il est très important de protéger et de préserver cette diversité pour parachever le marché unique et pour maintenir le modèle social européen, ainsi que pour atteindre les objectifs de la stratégie de Lisbonne en matière d'emploi, de compétitivité et de cohésion sociale.

1.2   L'avis insiste sur la nécessité tant pour le cadre juridique régissant les entreprises que pour la politique de concurrence de promouvoir la diversité et la pluralité des formes d'entreprise, qui sont l'un des principaux atouts de l'UE, de manière cohérente, afin que des conditions équitables de concurrence soient créées entre toutes les différentes formes d'entreprise, dans le respect des caractéristiques de chacune de celles-ci.

1.3   La pluralité et la diversité des différentes formes d'entreprise sont reconnues tant dans le traité que dans les faits, par le biais des différents statuts juridiques déjà approuvés ou actuellement à l'examen.

1.4   Cette diversité contribue à la richesse de l'UE et constitue une dimension centrale pour l'Europe dont la devise est «Unie dans la diversité». Toutes les formes d'entreprise traduisent un aspect de l'histoire européenne, chacune étant porteuse de notre mémoire et culture collectives, de «nos cultures». Cette diversité vaut la peine d'être préservée.

1.5   Cette diversité est également primordiale pour réaliser les objectifs de Lisbonne en matière de croissance, d'emploi, de développement durable et de cohésion sociale, sur la base de la préservation et de l'augmentation de la compétitivité des entreprises.

1.6   Le droit de la concurrence ne doit pas avoir comme objectif l'uniformité mais fournir un cadre juridique équilibré pouvant être appliqué aux différentes formes d'entreprise. Celles-ci doivent pouvoir se développer tout en conservant les objectifs et les modalités de fonctionnement qui leur sont propres.

1.7   Le CESE invite la Commission à entreprendre des travaux visant à approuver des statuts européens distincts pour les associations et les sociétés mutuelles. Il se félicite du début des travaux sur le statut européen des fondations et espère que ceux-ci déboucheront bientôt sur l'approbation du statut de la fondation européenne. Il est également favorable à la simplification de la réglementation sur la société coopérative européenne (SCE), dont la complexité en ralentit l'essor.

1.8   Les services et les réseaux fournissant soutien, information, conseils juridiques, assistance en matière de marketing et d'autres services encore doivent également couvrir toute la gamme des types d'entreprise.

1.9   Le CESE engage la Commission à respecter l'identité des coopératives en matière comptable: il convient de traiter le capital social des membres comme les fonds propres de la coopérative et non comme une dette, tant que les membres ne sont pas devenus créanciers en quittant la coopérative.

1.10   Les statistiques économiques relatives aux coopératives, mutuelles, associations, fondations et entreprises similaires sont très limitées et hétérogènes, ce qui rend difficiles l'analyse et l'évaluation de leur contribution aux grands objectifs macroéconomiques.

1.10.1

Pour cette raison, le CESE demande à la Commission et aux États membres de favoriser la création de registres statistiques relatifs aux entreprises susmentionnées et en particulier la préparation de comptes satellites, selon les critères harmonisés du système européen des comptes (SEC 1995) détaillés dans le «Manuel pour l'établissement des comptes satellites des entreprises de l'économie sociale: coopératives et mutuelles» (1) et dans le rapport du CESE sur «L'économie sociale dans l'Union européenne» (2).

1.11   Le CESE demande à la Commission d'encourager les États membres à étudier la possibilité de prévoir des mesures compensatoires pour les entreprises sur la base de leur valeur sociale avérée ou de leur contribution reconnue au développement régional (3).

1.12   Le CESE demande à la Commission européenne de déployer, à côté d'un observatoire de la diversité des formes d'entreprise, en tant qu'élément essentiel de la compétitivité européenne, tous les instruments organiques nécessaires existant déjà, afin de veiller à ce que les entreprises ne fassent l'objet de discrimination dans aucune des politiques qui les concernent, en assurant à cette fin une coordination entre les différents services de la Commission.

1.13   Enfin, dans les cas où elles démontrent leur représentativité, le CESE plaide pour que les organisations les plus représentatives de la diversité des formes d'entreprise soient associées au dialogue social.

2.   Diversité des formes d'entreprise et marché intérieur dans l'Union européenne

2.1   La diversité des formes d'entreprise existant dans l'Union européenne découle d'une évolution historique complexe et variée. Chacune d'entre elles correspond à une situation historique, sociale et économique particulière, qui diffère souvent d'un pays européen à l'autre. En outre, les entreprises doivent évoluer et s’adapter continuellement aux tendances changeantes des sociétés et des marchés, notamment en modifiant leur forme juridique. Le pluralisme et la diversité des différentes formes d'entreprise représentent donc un précieux patrimoine pour l'Union européenne, et sont indispensables pour la réalisation des objectifs établis par la Stratégie de Lisbonne en matière de croissance, d'emploi, de développement durable et de cohésion sociale, sur la base du maintien et de l'accroissement de la compétitivité des entreprises. La protection et la préservation de cette diversité constituent des objectifs clés pour garantir le développement de marchés compétitifs, l'efficacité économique et la compétitivité des agents économiques, tout en préservant la cohésion sociale de l'UE.

2.2   Les institutions européennes ont reconnu ce qui précède dans les dispositions figurant dans les articles 48, 81 et 82 du traité et dans le traité de Lisbonne (4), l'article 3.3 de celui-ci disposant que l'un des objectifs de l'Union est une économie sociale de marché reposant sur un équilibre entre les règles du marché et la protection sociale des individus en tant que travailleurs et citoyens.

2.3   La diversité des formes d'entreprise peut se définir en fonction de différents critères tels que la taille, la structure juridique, les formes d'accès au financement, les objectifs, les droits politiques et économiques attribués au capital (distribution des bénéfices et des dividendes, droits de vote) ou la composition de ce dernier (public ou privé), la désignation du personnel d'encadrement, l'importance pour l'économie (européenne, nationale et locale), les emplois, le risque de faillite, etc. Chacun de ces critères crée une matrice diversifiée, exposée de manière simplifiée dans le tableau suivant:

DIVERSITÉ DES FORMES D'ENTREPRISE DANS L'UNION EUROPÉENNE

TAILLETYPE

Multinationale

Grande

Petiteet moyenne

Secteur public

X

X

 

Cotée en bourse

X

X

X

Non cotée en bourse

 

X

X

Entreprise familiale

 

X

X

Société de personnes

X

X

X

Coopérative

 

X (5)

X (5)

Société mutuelle

 

X (5)

X (5)

Fondation

 

X (5)

X (5)

Association

 

X (5)

X (5)

Autres formes d'entreprisesans but lucratif pouvant exister dans les États membres

 

X (5)

X (5)

Selon la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, telle qu'établie dans plusieurs arrêts (6), les fondations, les associations et les autres organismes à but non lucratif peuvent être des «opérateurs économiques» dans la mesure où ils exercent des «activités économiques» au sens des articles 43 et 49 du traité CE. Ils sont de ce fait inclus dans cette classification.

2.4   Quoique le but commun de tout type d'entreprise soit la création de valeur et la maximisation des résultats, les paramètres ou concepts servant à mesurer cette valeur et ces résultats peuvent différer en fonction du type d'entreprise et des objectifs poursuivis par ceux qui la contrôlent ou bénéficient de son activité. Dans certains cas, la maximisation des résultats consiste à obtenir le meilleur rendement sur le capital investi par l'actionnariat; dans d'autres, la création de valeur et la maximisation des résultats peuvent être assimilés à une maximisation de la qualité des services fournis aux membres ou au grand public (par exemple, dans une coopérative d'enseignement dont les membres propriétaires sont les familles, dans une société mutuelle ou dans les obligations de service public).

2.4.1

Il est également possible pour certaines grandes entreprises de ne pas avoir de membres actionnaires et d'affecter leurs profits financiers à des réinvestissements ou à des objectifs sociaux bénéficiant au public, comme le font les banques d'épargne de certains pays européens (7).

2.4.2

En outre, dans de nombreuses entreprises à base locale, de microentreprises et de PME, la création de valeur ne s’exprime pas uniquement en termes de bénéfices financiers, mais aussi dans une finalité sociale telle que les conditions de travail, l'autogestion, etc.

2.5   On trouvera ci-après une description plus détaillée des différents modes d'entreprise en fonction de leur taille et, ensuite, de leur régime de propriété.

2.6   Les multinationales et les grandes entreprises, qui sont généralement cotées en bourse en raison de leur dimension, procèdent à une consolidation au niveau de la productivité et de la compétitivité des systèmes économiques. Lorsqu'elles engrangent des résultats positifs, elles peuvent également préserver des taux d'emploi élevés (8).

2.7   De plus en plus, les avantages compétitifs des entreprises sont fondés sur des stratégies compétitives dans lesquelles la recherche, le développement et l'innovation technologique (R&D&I) occupent une place centrale. Les multinationales et les grandes entreprises jouent un rôle majeur dans les activités de R&D&I déployées par le secteur privé de l'économie à l'intérieur de l'UE, quoique le nombre de multinationales ou de grandes entreprises qui soient actives dans les secteurs de pointe de l'économie mondiale ne soit peut-être pas suffisant. En outre, à côté du fait que les grandes entreprises et les multinationales sont en elles-mêmes importantes pour l'économie et l'emploi, il faut se souvenir que chacune est souvent le point nodal de vastes réseaux de production à l'échelle mondiale, composés soit de PME entretenant des liens étroits les unes avec les autres (grande entreprise au sein d'un réseau) soit d'entreprises indépendantes (réseau de production modulaire). Ce sont précisément les pays européens qui comptent la plus grande proportion de multinationales et de grandes entreprises qui sont les premiers à voir ralentir le rythme de la perte de production et d'emplois suscitée par la situation économique actuelle.

2.8   Dès lors que ces entreprises sous-traitent de nombreux pans de leurs processus de production et de leurs infrastructures de services à des PME depuis plusieurs décennies, les niveaux de production et d'emploi dans celles-ci dépendent souvent, parmi de nombreux autres facteurs, de la demande des multinationales et des grandes entreprises, qui constituent donc un axe de positionnement de l'Europe sur le marché mondial. Quoique 30 % des 40 plus grandes entreprises industrielles du monde proviennent de l'UE (9), leur valeur boursière ne représente que 24 % du total, et dans certains secteurs technologiques de pointe, telles que ceux fondés sur les technologies de l'information et de la communication, la part de l'UE se limite à une seule grande entreprise.

2.9   Les PME, les réseaux de PME, les microentreprises et les travailleurs indépendants ont favorisé des mutations technologiques substantielles au cours des dernières décennies, et ils sont le fondement de l'économie européenne: 99 % des entreprises de l'UE sont des PME, et elles fournissent 66 % des emplois (10). Quoiqu'elles ne soient pas d'habitude cotées en bourse, elles sont susceptibles d'utiliser ces moyens pour accroître leurs fonds propres ou lever du capital-risque.

2.9.1

De manière générale, les PME devraient bénéficier d'un soutien que le Small Business Act  (11) ne saurait fournir à lui seul. Les PME offrent souvent une possibilité de préserver l'emploi, car les groupes d'intérêt qui assurent le démarrage de ces entreprises et les contrôlent sont composés de citoyens liés au territoire sur lequel se déroule leur activité, et ont démontré une grande aptitude à créer et conserver de l'emploi. Les PME constituent des incubateurs naturels pour la culture entrepreneuriale et des écoles permanentes de formation de cadres et de chefs d'entreprise.

2.10   En fonction de leur régime de propriété, les entreprises d'intérêt général peuvent être publiques, à capital mixte, voire revêtir la forme juridique d'une entreprise privée. En termes géographiques, elles peuvent revêtir une dimension multinationale, nationale ou locale, quoique la majorité d'entre elles opèrent dans un contexte local ou régional. Leurs activités consistent essentiellement en la fourniture de services d'intérêt général, comme par exemple les transports publics, l'énergie, l'eau, la gestion des déchets, les communications, les services sociaux, les soins de santé, l'éducation, etc. Cependant, il n'est pas exclu que ces entreprises participent également à des activités commerciales, à condition de respecter la directive 93/84/CEE sur la transparence (12). Tout en poursuivant l'intérêt général, elles réinvestissent leurs bénéfices dans des activités régionales et locales; elles contribuent dans une large mesure à la cohésion sociale, économique et régionale. Les entreprises qui fournissent des services d'intérêt général, de par les services essentiels qu'elles offrent, sont des acteurs primordiaux pour ce qui est de dynamiser l'économie en général, au moyen notamment de leurs investissements dans des secteurs clés qui ont un effet de levier sur le reste de l'économie (électricité, télécommunications et infrastructures, transports, etc.).

2.11   Les propriétaires des entreprises cotées en bourse sont les actionnaires enregistrés. Les actionnaires achètent et vendent leurs actions sur les marchés boursiers publics.

2.12   Les entreprises non cotées peuvent être grandes ou petites, mais leurs actions (ou autres titres de participation), par définition, ne sont pas cotées en bourse. Néanmoins, les entreprises non cotées s’orientent dans de nombreux cas vers une introduction en bourse, en particulier si du capital-risque ou des investisseurs privés sont de la partie. Même les PME privées peuvent recourir à une cotation en bourse lorsqu'elles accroissent leur capital afin de financer leur expansion.

2.13   Les entreprises familiales sont un instrument puissant de dissémination de la culture d'entreprise. Elles restent le meilleur moyen pour permettre à des millions de personnes de se lancer dans une activité économique, non seulement sous la forme de PME (qui constituent la majorité de ce type d'entreprises), mais aussi sous celle de grandes entreprises familiales, qui dans des pays aussi importants que l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Italie ou la France, représentent entre 12 et 30 % du nombre total de grandes entreprises (13). Les entreprises familiales, qu'elles soient grandes ou petites, se caractérisent par le fait que le groupe familial exerce un contrôle permanent sur l'entreprise, même s’il s’agit d'une société anonyme. Dans ce cas de figure, l'introduction en bourse ne constitue pas une ambition.

2.14   Les sociétés de personnes sont une forme d'entreprise typique du monde anglo-saxon mais qui existe également dans d'autres pays de l'UE. Fréquemment constituées par des titulaires de professions libérales, elles sont un instrument efficace pour permettre à ceux-ci (avocats, comptables et autres) de participer à l'activité économique dans le secteur des services professionnels. Ces entreprises sont détenues par les associés, qui sont liés par le capital qu'ils apportent, mais surtout par leur propre travail. Lorsqu'un associé part à la retraite ou quitte une société de personnes, il transfère la part qu'il en détient aux associés restants.

2.15   Enfin, pour terminer ce panorama des différents types d'entreprises existant dans l'UE, il convient de noter qu'une gamme très diversifiée d'entreprises privées, qui partagent des caractéristiques semblables d'organisation et d'exploitation, mènent des activités à finalité sociale qui ont pour objectif premier de répondre aux besoins des individus plutôt que de rémunérer les investisseurs bailleurs de capitaux (14). Ces entreprises revêtent pour l'essentiel la forme de coopératives, de mutuelles, d'associations et de fondations (15). Les documents de la Commission, du Parlement et du CESE regroupent habituellement cet ensemble d'entreprises sous l'appellation «entreprises de l'économie sociale» (EEE) (16). Quoique cette expression ne soit pas employée dans chaque pays de l'UE, et que d'autres lui préfèrent celles de «tiers-secteur» (17), « troisième système», «économie solidaire» ou d'autres encore, chacune de ces expressions décrit des entreprises qui «partagent les mêmes caractéristiques partout dans l'Union» (18).

3.   La dimension sociale

3.1   Quoique les multinationales, les grandes entreprises et les PME n'aient pas d'objectif explicite de bien-être social, leur présence sur les marchés apporte une contribution décisive à la compétitivité et à l'emploi, de même qu'elle revêt une dimension sociale structurante. Cette dimension générale, d'ordre social et territorial, est particulièrement évidente dans le cas des PME à base locale et des microentreprises entretenant des liens étroits avec le territoire où elles sont actives.

3.2   Les coopératives, les mutuelles, les associations et les fondations sont également des acteurs très importants dans l'UE. Elles représentent une activité économique considérable dans trois des cinq secteurs institutionnels entre lesquels le système européen des comptes (SEC 1995) répartit tous les centres de décision économique dans chacune des économies nationales (19). L'économie sociale représente 10 % de l'ensemble des entreprises européennes, soit deux millions d'entreprises (20) et 7 % (21) de l'emploi salarié total. Les coopératives comptent 143 millions de membres, les mutuelles 120 millions et les associations jusqu'à 50 % de la population de l'Union européenne (22).

3.2.1

Qu'elles soient grandes ou petites, ces entreprises opèrent dans des territoires et/ou domaines sociaux où des problèmes et des défis menacent le marché intérieur et la cohésion sociale, s’acquittant de cette tâche en internalisant les coûts sociaux et en générant des externalités positives.

3.2.2

En raison de leur enracinement dans les communautés locales et parce que leurs objectifs prioritaires consistent à satisfaire les besoins des personnes, ces entreprises ne délocalisent pas, combattant efficacement le dépeuplement des zones rurales et contribuant au développement des régions et des collectivités défavorisées (23).

3.3   Les entreprises fournissant des services d'intérêt général constituent un des piliers de la dimension sociale européenne. Elles jouent un rôle spécifique en tant que partie intégrante du modèle européen de société, dès lors que dans le cadre de leurs activités de fourniture de services, elles assurent le respect et la promotion des principes de qualité élevée, de sécurité, de prix accessibles, d'égalité de traitement, d'accès universel et de droits des usagers. En ce sens, elles ont également un effet direct et indirect sur l'emploi, vu que de bonnes infrastructures attirent les investissements privés. Les entreprises d'intérêt général forment un pan essentiel de l'économie qui représente entre 25 et 40 % de la main-d'œuvre et contribue pour plus de 30 % au PIB.

3.4   Les entreprises sociales (coopératives sociales et autres entreprises similaires, sous différentes formes juridiques) développent leurs activités dans le domaine de la prestation de services tels que les services sanitaires, environnementaux et sociaux ainsi que l'éducation. Elles apportent fréquemment à leurs processus de production des ressources importantes sous forme de travail à caractère altruiste, agissant ainsi comme des instruments efficaces des politiques publiques de bien-être social. En outre, un grand nombre d'entreprises sociales sont des WISE («Work Integration Social Enterprises», ou entreprises sociales œuvrant à l’intégration), qui ont pour objectif de créer des emplois et d'intégrer les personnes défavorisées dans le marché du travail.

3.5   Les entreprises sociales ne constituent pas toujours une catégorie juridique. Il s’agit d'entreprises qui apportent des avantages socio-économiques dans des secteurs très variés. Il n'est pas aisé de les classifier. La question essentielle est de savoir comment soutenir les activités des entrepreneurs qui sont à leur origine en fournissant les conditions qui leur permettent de développer leurs capacités d'innovation, atouts particulièrement utiles en période de crise (24). La Commission européenne devrait sérieusement envisager de mettre en oeuvre une politique pour les entreprises sociales (25).

3.6   Dans les cas où elles démontrent leur représentativité, les organisations les plus représentatives des différentes formes d'entreprises devraient être associées au dialogue social.

3.6.1

Certains des secteurs mentionnés ci-dessus ont déjà participé à des discussions sectorielles. C'est notamment le cas pour l'Association des assureurs coopératifs et mutualistes européens dans le secteur des assurances, pour certains membres de Coopératives Europe (26), pour l'Association européenne des banques coopératives (AEBC) et le Groupement européen des caisses d'épargne (GECE) dans le secteur bancaire (27).

4.   Cadre juridique et réglementaire des différentes formes d'entreprise

4.1   Introduction: la diversité des formes d'entreprise et le marché intérieur

4.1.1

La construction et le développement du marché intérieur ne sauraient subordonner la fin aux moyens: il faut établir un cadre juridique et réglementaire qui reflète les caractéristiques des différents agents économiques du marché afin de créer des conditions de concurrence équitable entre les différentes formes d'entreprise, en tenant dûment compte des caractéristiques de chacune de ces formes. À l'heure actuelle, ce cadre est dans l'ensemble conçu pour les grandes entreprises cotées en bourse, et son application à tous les types d'entreprises crée des obstacles pour les plus petites d'entre elles. Ce cadre devrait parvenir à encourager les agents économiques à adopter des comportements efficaces, ce qui contribuera à améliorer l'équité du système. Ce cadre sera appliqué via le droit des sociétés, les normes comptables, le droit de la concurrence et le droit fiscal, l'harmonisation statistique et la politique d'entreprise.

4.2   Droit des sociétés

4.2.1

Les sociétés anonymes européennes et les coopératives européennes disposent de leur propre statut, mais d'autres types d'entreprises sont confrontés à différents obstacles dans le marché intérieur en raison de l'absence de statut européen les concernant. Les PME européennes ont besoin d'une législation européenne flexible qui leur permette de mener leurs activités plus aisément par-delà les frontières nationales. De même, les coopératives ont besoin de voir simplifier le règlement sur la société coopérative européenne (SCE), dont la complexité ralentit l'essor.

4.2.2

L'absence de couverture législative pour les fondations actives au niveau européen les empêche de travailler sur un pied d'égalité avec d'autres entreprises de forme juridique différente. Le CESE se félicite dès lors des résultats de l'étude d'impact relative au statut de fondation européenne et demande à la Commission de conclure l'analyse d'impact au début 2010 en présentant une proposition de règlement qui permette aux fondations de portée européenne d'opérer sur un pied d'égalité dans le marché intérieur (28).

4.2.3

Pour des raisons similaires, il invite également la Commission à entreprendre des travaux visant à approuver des statuts européens pour les associations et mutuelles européennes.

4.3   Droit comptable

4.3.1

Les normes comptables doivent être adaptées aux différentes formes d'entreprise. Les obstacles que l'introduction des nouvelles normes comptables internationales (NCI) crée pour les entreprises cotées en bourse sont un autre exemple des limitations existant en matière de droit comptable. Les comptes européens ne peuvent être harmonisés si le prix à payer réside dans l'abolition des caractéristiques essentielles de certains des différents types d'entreprises existant dans l'Union européenne.

4.3.2

Dans le cas concret des coopératives, il est de toute évidence difficile de définir un concept de «fonds propres» susceptible d'être appliqué de manière générale et indifférenciée, ce qui pourrait avoir des effets négatifs et destructeurs sur la diversité entrepreneuriale. Le CESE engage la Commission à respecter l'identité coopérative en matière comptable: il convient de traiter le capital social des membres comme des fonds propres et non comme une dette tant que les membres ne quittent pas la coopérative, devenant de ce fait créanciers (29).

4.3.3

Le Comité souscrit à la recommandation du groupe de Larosière (30) selon laquelle les normes comptables ne doivent pas défavoriser certains modèles d'entreprises, promouvoir des comportements pro-cycliques, décourager l'investissement à long terme ni porter préjudice à la stabilité des entreprises.

4.4   Droit de la concurrence

4.4.1

Chaque forme juridique d'entreprise doit être en mesure de mener ses activités tout en préservant son propre modus operandi. Le droit de la concurrence ne saurait dès lors se fonder sur un modèle unique et uniforme d'entrepreneuriat. Il doit éviter toute discrimination et apprécier les bonnes pratiques mises en œuvre au niveau national. Il ne s’agit pas d'établir des privilèges, mais de promouvoir un droit équitable de la concurrence. Le CESE, dans la ligne de précédents avis (31), plaide donc pour que le droit de la concurrence et les règles fiscales permettent que les coûts différentiels des entreprises non liés à des processus de production inefficaces mais à l'internalisation des coûts sociaux puissent faire l'objet d'un traitement compensatoire.

4.4.2

Certains instruments de la politique de concurrence ne sont pas neutres par rapport aux différents types d'entreprises, comme le CESE l'a déjà fait valoir: «le secteur de l'économie sociale nécessite des solutions sur mesure en ce qui concerne la fiscalité, les marchés publics et les règles de concurrence» (32). Par exemple, les soutiens publics aux investissements privés en R&D&I visant à accroître la compétitivité du système de production favorisent essentiellement les grandes entreprises, qui sont celles qui pour l'essentiel mènent ce genre d'activités. De même, vu que les grandes entreprises jouissent d'une plus grande liberté de choix s’agissant du lieu d'implantation de leurs équipements de production, elles peuvent mieux tirer parti des investissements publics en infrastructures pour le secteur manufacturier. Cela entraîne parfois des désavantages concurrentiels pour les petites entreprises qui n'ont que peu de possibilités réelles de choisir entre différents lieux d'implantation.

4.4.3

Les règles de concurrence devraient également tenir compte de la singularité des entreprises sociales, qui produisent et distribuent des biens et des services non marchands à des personnes marginalisées ou à d'autres menacées d'exclusion sociale, et qui font participer d'importantes ressources altruistes à leurs processus de production.

4.5   Droit fiscal

4.5.1

Il arrive fréquemment que dans certains États membres, les entreprises soient confrontées à des situations d'inégalité concurrentielle pour des raisons qui ne sont pas liées aux processus de production en eux-mêmes, mais qui découlent de dysfonctionnements au niveau de l'allocation des ressources par le marché (33), en d'autres termes, de situations dans lesquelles le marché lui-même est inefficace et distribue les ressources de manière non optimale. Le CESE appuie la directive sur les taux réduits de TVA pour les services fournis localement, lesquels concernent essentiellement les PME. Il réitère son accord avec le principe formulé par la Commission et selon lequel les avantages fiscaux accordés à un type d'entreprise particulier doivent être proportionnés aux contraintes juridiques ou à la valeur ajoutée sociale inhérentes à cette forme (34). Le CESE demande donc à la Commission d'encourager les États membres à étudier la possibilité de prévoir des mesures compensatoires pour des entreprises sur la base de leur utilité publique avérée ou leur contribution reconnue au développement régional (35). Il convient en particulier de chercher à résoudre le problème auquel sont confrontées les organisations non lucratives face à l'impossibilité de recouvrer la TVA payée lors de l'acquisition de biens et services nécessaires à l'exercice de leurs activités liées à l'intérêt général, dans les pays où cette situation est problématique. Le régime fiscal appliqué aux ONG menant des activités économiques non liées à des objectifs de bien public devrait également être abordé.

4.5.2

À l'heure actuelle, les PME n'ont que peu de possibilités réelles d'investir en R&D&I, qui est un important élément pour rendre la production efficace et maintenir la compétitivité des entreprises. Cela crée un désavantage concurrentiel qui devrait être compensé par des allégements fiscaux servant à récompenser les PME qui investissent dans ce domaine. C'est toute une gamme de mesures compensatoires variant selon les États que l'on peut recommander, notamment des dégrèvements fiscaux extraordinaires pour investissements multiples en R&D, remboursements en l'absence de bénéfices et réductions des charges sociales. Eu égard au rôle stratégique des PME dans l'économie communautaire, le CESE recommande que chaque État membre utilise un mélange optimal de mesures compensatoires pour faciliter la survie et la croissance des PME dans son économie. L'impact le plus fort, et de loin, que ces programmes sont susceptibles d'avoir réside dans leur capacité à soutenir l'essor des PME spécialisées en R&D durant les premières années de leur existence.

4.6   Harmonisation des statistiques

4.6.1

Les données agrégées pour les différents types d'entreprises sont établies dans les États membres et dans l'ensemble de l'UE selon des critères approuvés par le Système européen des comptes nationaux et régionaux (SEC 95). Toutefois, les statistiques économiques sur les coopératives, mutuelles, associations, fondations et autres entreprises similaires sont très limitées et sont établies selon des critères hétérogènes, ce qui rend difficiles l'analyse de ces entreprises et l'évaluation de leur contribution aux grands objectifs macroéconomiques. La Commission a donc commandé un Manuel  (36) qui permettra d'établir des statistiques nationales relatives à ces entreprises, sur la base de critères homogènes sur le plan des comptes nationaux. Le CESE plaide pour que ces nouveaux instruments analytiques soient utilisés afin d'établir des statistiques harmonisées pour les types susmentionnés d'entreprises dans tous les pays de l'Union européenne et pour que des politiques plus efficaces soient mises en oeuvre à cet égard.

Il serait également utile d'établir une méthodologie qui permette de promouvoir l'essor d'un observatoire européen des microentreprises.

Bruxelles, le 1er octobre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  «Manuel pour l'établissement des comptes satellites des entreprises de l'économie sociale: coopératives et mutuelles», CIRIEC, pour la Commission européenne, 2006.

(2)  CIRIEC, «L'économie sociale dans l'Union européenne». CESE, Bruxelles, 2008. www.cese.europa.eu, ISBN 928-92-830-08-59-0.

(3)  JO C 234 du 22.9.2005.

(4)  Version consolidée du traité sur l'Union européenne après la ratification du traité de Lisbonne, JO C 115 du 9.5.2008.

(5)  Dans certains États membres, le Parlement européen, la Commission européenne et le CESE, ces types d'entreprise sont regroupés sous le vocable «entreprises de l'économie sociale» (EES). C'est là une catégorie sociologique, et non un terme juridique.

(6)  Voir par exemple les affaires jointes C-180/98 à C-184/98 (Pavlov) et l'affaire C-352/85 (Bond van Adverteerders).

(7)  Depuis cinquante ans, la littérature économique souligne la diversité des objectifs poursuivis par les différents types d'entreprise - cf. B. Ward (1958), E.D. Domar (1967), J. Vanek (1970), J. Meade (1972) et J.L. Monzón (1989), auteurs cités dans le Manuel pour l'établissement des comptes satellites des entreprises de l'économie sociale (NbP 1).

(8)  Dans certains cas, de grandes entreprises ne comptent pas d'actionnaires et ne distribuent pas les bénéfices de quelque manière que ce soit, comme c'est par exemple le cas pour les banques d'épargne de certains pays européens. Il est également de grandes entreprises et sociétés coopératives qui émettent des actions non cotées en bourse, ou des mutuelles qui fonctionnent grâce à leur propre capital et leurs réserves plutôt qu'au moyen de capitaux acquis par les membres.

(9)  www.forbes.com, The Global 2000, 04/02/2008.

(10)  JO C 120 du 20.5.2005, p. 10 (point 2.1); JO C 112 du 30.4.2004, p. 105 (point 1.7); Small Business Act dans le JO C 182 du 4.8.2009, p. 30.

(11)  COM(2008) 394 final: «Think Small First» – Un «Small Busines Act» pour l'Europe.

(12)  Directive 93/84/CEE de la Commission du 30 septembre 1993 modifiant la directive 80/723/CEE relative à la transparence des relations financières entre les États membres et les entreprises publiques (JO L 254 du 10.12.1993, p. 16).

(13)  A. Colli, P. Fernández and M. Rose, (2003): «National Determinants of Family Firm Development? Family Firms in Britain, Spain and Italy in the Nineteenth and Twentieth Centuries», Enterprise & Society, pp 4, 28-64.

(14)  L'économie sociale (NbP 2).

(15)  Rapport du Parlement européen sur l'économie sociale (2008/2250 (INI)).

(16)  La Commission fait référence au secteur de «l'économie sociale» dans de nombreux documents, par exemple COM(2004) 18 final, «Communication sur la promotion des sociétés coopératives en Europe» (point 4.3).

(17)  Le Royaume-Uni par exemple est doté d'un Office of the Third Sector (OTS), cette dénomination recouvrant des groupes bénévoles et communautaires, les entreprises sociales, les structures caritatives, les coopératives et les mutuelles, soit le même ensemble d'entreprises appelées «entreprises de l'économie sociale» dans le présent document. Ce «Bureau du troisième secteur» est un organe gouvernemental relevant du Cabinet Office (www.cabinetoffice.gov.uk).

(18)  Rapport (2008/2250) (INI).

(19)  Le SEC1995 répartit les entités présentant un comportement économique analogue (SEC 95, 2.18) en cinq grands secteurs (SEC 95, tableau 2.2): a) les sociétés non financières (S.11); b) les sociétés financières (S.12); c) les administrations publiques (S.13); d) les ménages (S.14) et e) les institutions sans but lucratif au service des ménages (S.15). Le SEC 1995 range également les unités d'activité économique en branches d'activité, regroupant les entreprises exerçant une activité économique identique ou similaire (SEC 95, 2.108) et les répartit en cinq niveaux différents de regroupements contenant respectivement 60, 31, 17, 6 et 3 secteurs d'activité (SEC 95, annexe IV).

(20)  Rapport (2008/2250) (INI).

(21)  Les EES fournissent directement des emplois à temps plein à 11 millions d'Européens. Elles sont présentes dans tous les types d'activité économique, que ce soit dans les secteurs hautement compétitifs comme les secteurs financier et agricole ou dans les secteurs innovants comme ceux des services aux personnes et des énergies renouvelables.

(22)  CESE (2008), L'économie sociale (NbP 2).

(23)  COM(2004) 18 final, point 4.3 (Promotion des sociétés coopératives en Europe).

(24)  «Il est temps pour les entreprises sociales de réaliser tout leur potentiel»: Trimble, Robert, in The Bridge magazine, p. 17. www.ipt.org.uk

(25)  Avis du CESE sur «L'esprit d'entreprise et le programme de Lisbonne», JO C 44 du 16.02.2008, p. 84.

(26)  Il convient de noter que certaines organisations, telles que Coopératives Europe mènent actuellement des études sur leur représentativité en vue de participer aux consultations sur le dialogue social.

(27)  Avis du CESE au JO C 182 du 04.08.2009, p. 71 et au JO C 228 du 22.9.2009, p. 149–154.

(28)  Dans son étude de faisabilité du statut de fondation européenne, la Commission européenne estime que les coûts des barrières aux activités transfrontalières des fondations européennes oscillent entre 90 et 100 millions d'euros par an.

(29)  Comme y appelle la littérature comptable récente : CIRIEC-Espagne, revue d'économie publique, sociale et coopérative no 58, août 2007 (www.ciriec.es), «Clasificación del capital social de la sociedad cooperativa: una visión crítica», «[Classification du capital social des sociétés coopératives: un point de vue critique] », B. Fernández-Feijóo et M. J. Cabaleiro.

(30)  Rapport du groupe d'experts de haut niveau sur la supervision financière dans l'UE, février 2009: http://ec.europa.eu/internal_market/finances/docs/de_larosiere_report_en.pdf; recommandation 4, page 21).

(31)  JO C 234 du 22.9.2005 et COM(2004) 18 final.

(32)  JO C 117 du 26.4.2000, p. 52 (paragraphe 8.3.1). Également JO C 117 du 26.4.2000, p. 57. La Commission européenne opère une distinction entre «aides d'État» et «mesures générales», et elle inclut parmi ces dernières les «incitants fiscaux en faveur d'investissements environnementaux, en recherche-développement ou en formation, qui ne favorisent que les entreprises qui entreprennent de tels investissements, sans nécessairement constituer des aides d'État» (Communication de la Commission sur l'application des règles relatives aux aides d'État aux mesures relevant de la fiscalité directe des entreprises, JO C 384/5 du 10.12.1998, point 14). Dans l'Union européenne, les grandes entreprises sont celles qui sont les plus actives en R&D. En Espagne, par exemple, 27,6 % des grandes entreprises investissent en R&D, tandis que 5,7 % seulement des entreprises comptant moins de 250 employés le font, selon des données 2007 élaborées par www.ine.es

(33)  Communication de la Commission COM(2008) 394 final.

(34)  COM(2004) 18 final.

(35)  JO C 234 du 22.9.2005, avis du CESE sur la communication de la Commission COM(2004) 18 final (point 4.2.3).

(36)  Manuel (NbP 1).


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/29


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Aliments du commerce équitable: autorégulation ou législation?» (avis d'initiative)

2009/C 318/06

Rapporteur: M. Hervé COUPEAU

Le 10 juillet 2008, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le thème:

«Aliments du commerce équitable: autorégulation ou législation?».

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 2 septembre 2009 (rapporteur: M. Hervé COUPEAU).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 1er octobre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 164 voix pour, 1 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions

1.1   Le commerce équitable des produits agricoles vise à introduire, au niveau du commerce international, le principe d'une plus juste répartition des revenus marchands afin de permettre aux producteurs issus des pays en voie de développement:

d'établir un processus de développement économique (structuration de filières de production, organisation de branches d'activité, …);

de constituer un processus de développement social (création de structures sanitaires, éducatives, …);

d'initier à la gestion de l'environnement (préservation de la biodiversité, gestion des émissions de CO2, …).

1.2   L'Europe constitue le plus grand marché du commerce équitable avec environ 65 % du marché mondial. La vente des produits du commerce équitable s'effectue par correspondance sur catalogue, en ligne, par le biais de services de restauration ou au détail dans des administrations, des collectivités et des entreprises, ce qui représente au total plus de 79 000 points de vente dans 25 pays. En 2008, le chiffre d'affaires a dépassé 1,5 milliard d'euros. La croissance de ces ventes a été relativement soutenue, de l'ordre de 20 % par an. Néanmoins, ce chiffre reste très modeste comparé aux 913 milliards d'euros de chiffre d'affaires de l'industrie agroalimentaire européenne en 2007.

1.3   Il existe en matière de certification deux approches complémentaires: l'une est fondée sur le produit (c'est le cas de FLO International, qui a établi des normes pour 18 catégories de produits alimentaires), l'autre sur le processus de transformation (c'est l'approche de la WFTO, qui délivre des certificats pour la chaîne d'approvisionnement et le système de gestion des principales organisations du commerce équitable, tant dans les pays industrialisés que dans les pays en développement). Toutes deux ont contribué à améliorer la confiance des consommateurs et à réduire les abus commis par les entreprises qui cherchent à tirer profit de cette forme de commerce équitable sans pour autant satisfaire aux critères reconnus par les principales agences internationales de développement.

1.4   La certification promeut de manière efficace ce type de commerce et protège les petites et moyennes entreprises souhaitant s'y engager.

1.4.1

Ces certifications visent au respect du caractère multidimensionnel du commerce équitable:

une dimension commerciale favorisant une relation équilibrée au bénéfice des producteurs et travailleurs désavantagés du Sud,

une dimension liée au développement à travers le renforcement des organisations de producteurs sur les plans financier, technique et opérationnel,

une dimension éducative par l'information et la sensibilisation des citoyens et des partenaires des pays du Sud,

une dimension politique par un engagement pour plus de justice dans les règles du commerce international conventionnel.

1.4.2

En dépit des progrès constatés dans le domaine de l'autorégulation, le CESE souhaite attirer l'attention sur la nécessité que ce modèle s'inspire du système européen de certification qui, entre autres principes, impose de soumettre le respect des spécifications techniques à un contrôle externe, réalisé par un organisme indépendant et accrédité à cette fin, et ce, évidemment, sans préjudice du respect obligatoire de la législation générale applicable à la mise sur le marché des produits alimentaires.

2.   Introduction

2.1

Le présent avis porte de manière spécifique sur le commerce équitable proprement dit, c'est-à-dire sur le partenariat alternatif qui fait le lien entre le producteur et le consommateur tel qu'il a été constitué au cours des dernières décennies par le mouvement du commerce équitable. Il existe d'autres programmes visant à s'assurer du caractère plus ou moins durable des activités commerciales, mais ils ne sont pas abordés ici, car ces programmes ne répondent pas à tous les critères du commerce équitable cités au paragraphe 1.4.1.

2.2

Le commerce équitable s'est développé avec l'ambition de construire des relations économiques avec les producteurs des pays en développement marginalisés dans les échanges commerciaux internationaux. S'inscrivant dans une perspective de développement durable, il porte des enjeux sociétaux importants dans les pays du Sud. Il vise à contribuer à la réduction de la pauvreté, notamment par ses appuis aux organisations de producteurs. Dans les pays du Nord, il cherche à favoriser un modèle de consommation plus durable.

2.3

Ce secteur, encore jeune et en pleine évolution, connaît une croissance importante et fait l'objet d'une attention de plus en plus marquée de la part des consommateurs européens.

2.4

Toutefois, la confiance des consommateurs est encore à consolider car même s'ils se sentent proches du concept de commerce équitable, beaucoup disent manquer d'informations et peuvent penser que des abus peuvent survenir de la part des grandes entreprises ou de la grande distribution.

2.5

Cependant les circuits spécialisés demeurent des débouchés importants pour les produits de commerce équitable. Ces structures sont nombreuses, de petite taille et appréciées des consommateurs.

3.   Historique

3.1

La déclaration des droits de l'homme de 1948 énonce dans l'article 23: «Quiconque travaille a droit à une rémunération équitable et satisfaisante lui assurant, ainsi qu'à sa famille, une existence conforme à la dignité humaine».

3.2

Les activités du commerce équitable ont commencé dans les années cinquante aux États-Unis puis au Royaume-Uni et par la suite dans le reste de l'Europe. Le commerce équitable est une prise de conscience des dégâts sociaux et environnementaux causés par les filières d'importations des pays industrialisés.

3.3

En 1964, la CNUCED (Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement) dénonce l'inégalité des termes de l'échange et alerte la communauté internationale sur le caractère insoutenable d'un point de vue humain et social des règles qui régissent le commerce international. Les pays du Sud insistent sur la nécessité d'échanges justes («Trade, not aid»).

3.4

Quelques dates du commerce équitable

1860 – Publication du livre «Max Havelaar» écrit par Eduard DOUWES DEKKER

Fin des années quarante – Ten Thousand Villages et SERRV, aux Etats Unis, commencent à faire du commerce avec les communautés pauvres des pays du Sud

Fin des années cinquante – OXFAM UK commercialise dans ses magasins britanniques de l'artisanat fabriqué par des réfugiés chinois.

1957 – De jeunes catholiques néerlandais créent une association visant à importer des produits des pays en voie de développement

1964 – OXFAM UK crée la première organisation de commerce alternatif (ATO, sigle en anglais)

1967 – Création de la première organisation de commerce équitable au Pays Bas

1969 – Première ouverture de magasins de commerce équitable au Pays Bas

1971– Création de la première coopérative de commerce équitable au Bangladesh («jute work»)

1973 – Ventes du premier café équitable aux Pays Bas

1988 – Le label «fair trade» sous le nom Max Havelaar est attribué la première fois à un café

1989 – Création de la Fédération internationale du commerce alternatif (IFAT), transformée par la suite en Organisation mondiale du commerce équitable (WFTO)

1990 – Création de l'Association européenne du commerce équitable (EFTA)

1993 – Création de l'organisme de labellisation Transfair en Allemagne

1994 – Introduction du thé en commerce équitable

Création du Réseau des Magasins du Monde européens (NEWS)

1996 – Introduction de la banane en commerce équitable aux Pays Bas

1997 – Les organismes labellisateurs (Max Havelaar, Transfair, Rattvisemarkt, Faire Trade…) s'unissent formant les Organisations des labels du commerce équitable (FLO, sigle en anglais) Monoprix et Auchan s'engagent à proposer du café équitable

1998 – Les organisations du commerce équitable (FLO, IFAT, NEWS et EFTA) se réunissent au sein de FINE

2004 – Distribution de produits du commerce équitable dans certaines cantines en France.

3.5

Les règles de l'Organisation mondiale du commerce ne tiennent pas compte de l'humain, du social ni de l'environnement. Ce besoin de contestation pousse les gens à adhérer à une forme humaine d'échanges commerciaux. Pour ceux-là, le commerce équitable est la preuve qu'un autre monde est possible. Le commerce équitable promeut transparence, bonne gouvernance et responsabilité et à ce titre contribue au développement durable.

4.   Description

4.1

L'enjeu du commerce équitable et plus globalement de la consommation éthique, responsable et citoyenne est de définir les moyens visant à pérenniser le succès obtenu auprès de la population, en:

assurant la transparence, la visibilité et la compréhension du fonctionnement du commerce équitable;

garantissant que l'achat va profiter au développement des exploitations agricoles dans les pays en voie de développement.

4.2

Le CESE note que le droit fondamental du travailleur (OIT), le respect des normes environnementales et de la biodiversité, et une meilleure rémunération des producteurs dans les relations commerciales internationales ont été pris en compte dans la formulation des normes en matière de commerce équitable.

4.3

Le fait d'associer les deux termes «commerce équitable» peut paraître pour certains antinomique, car les lois du marché sont dépourvues de valeurs humaines. Mais le défi d'associer le commerce au dialogue social avec comme objectif une plus grande équité dans le commerce mondial sera un enjeu du 21e siècle, auquel le CESE voudrait contribuer. Car il peut permettre un développement durable en offrant de meilleures conditions commerciales et en garantissant les droits des producteurs et des travailleurs marginalisés du cycle de Doha.

4.4

L'introduction de nouveaux labels et codes de conduites lancés par des nouveaux acteurs se revendiquant des pratiques équitables favorise, en parallèle, une confusion dans l'esprit des consommateurs. En faisant courir le risque de diluer le concept, ses principes et les critères qui le définissent, la multiplicité des systèmes de référence et de garanties autorise des positionnements économiques opportunistes construits sur la base de systèmes de garanties moins coûteux pour ceux qui en portent la charge souvent en aval de la filière, mais aussi d'implication moindre sur les aspects d'appui au renforcement des pays en développement. Le Comité exprime sa volonté de voir une certification internationale faite par les organisations du commerce équitable (voir les propositions ci-dessus concernant la terminologie), pour autant que l'établissement d'une entité de contrôle indépendante et accréditée et bien entendu le respect de la législation alimentaire en vigueur soient toujours garantis.

4.5

Le CESE demande que tous les produits issus du commerce équitable soient garantis sur les mêmes critères dans tous les pays de l'Union européenne. Aujourd'hui, il n'y a pas de définition officielle européenne juridiquement contraignante. Le CESE souhaite s'associer à la définition conjointe adoptée par FINE (réseau constitué de FLO, IFAT, NEWS! et EFTA) et reprise par la Commission européenne dans une récente communication sur le commerce équitable (1):

«Le commerce équitable est un partenariat commercial, fondé sur le dialogue, la transparence et le respect, dont l'objectif est de parvenir à une plus grande équité dans le commerce mondial. Il contribue au développement durable en offrant de meilleures conditions commerciales, en garantissant les droits des producteurs et des travailleurs marginalisés, tout particulièrement au Sud de la planète.

Les organisations du commerce équitable (soutenues par les consommateurs) s'engagent activement à soutenir les producteurs, à sensibiliser l'opinion et à mener campagne en faveur de changements dans les règles et pratiques du commerce international conventionnel.».

5.   Les producteurs (principes)

5.1

Le commerce équitable veille à rémunérer au mieux les producteurs, sur des bases stables et sur la base de revenus suffisants pour vivre correctement, déterminés par des organisations de producteurs et les syndicats de chaque région et pays concerné.

5.2

Le prix doit être déterminé par un coût de production moyen en fonction:

du temps passé par la main d'œuvre locale à un taux de rémunération réévalué pour assurer un niveau de vie décent;

des investissements nécessaires à moyen ou long terme afin de respecter les standards économiques, environnementaux et sociaux du commerce équitable;

d'une analyse de marché;

des choix politiques de la majorité des acteurs du commerce équitable: préfinancement de 60 % aux producteurs avant la récolte, stabilisation de la relation entre producteurs et distributeurs afin d'assurer des débouchés aux producteurs et des approvisionnements aux distributeurs.

5.3

Le commerce équitable doit avoir des exigences telles que le refus de l'exploitation du travail, notamment celui des enfants, ainsi que le respect des normes de l'Organisation internationale du travail (OIT) même si les lois sociales du pays ne l'exigent pas.

5.4

Le commerce équitable assure un prépaiement partiel des denrées alimentaires afin de permettre aux producteurs de financer les matières premières.

5.5

Les processus de fabrication des produits alimentaires devront impérativement respecter l'environnement, les ressources naturelles et les dispositions législatives en vigueur dans l'Union européenne.

5.6

Le commerce équitable permet de créer des emplois socialement utiles aussi bien en amont qu'en aval (et permettre aussi aux plus précaires de retrouver une dignité au travail).

5.7

Le commerce équitable assure une véritable traçabilité et une transparence totale, permanente et publique des activités à toutes les étapes des filières (contexte, prix, marge, …).

5.8

Le commerce équitable doit permettre l'émergence d'une économie solidaire dans une perspective de développement durable.

5.9

Le commerce équitable doit s'apprécier seulement dans des actes et des engagements précis, et non sur le seul énoncé de bonnes résolutions.

5.10

Le commerce équitable est un moyen éprouvé pour amorcer une nouvelle politique alimentaire mondiale en respectant l'homme.

6.   Les produits

6.1

Les produits alimentaires représentent l'essentiel du chiffre d'affaires du commerce équitable. Parmi ces produits, le café vient en tête; on trouve également du thé, du chocolat, des fruits séchés, des épices, du riz, des céréales, du sucre, du miel, de la confiture. Les produits frais sont apparus récemment et ils restent marginaux dans les circuits équitables, en raison de la lenteur de la rotation des approvisionnements. Mais on assiste à une augmentation considérable des ventes de ceux-ci depuis l'introduction des produits équitables dans les coopératives de consommateurs et les autres détaillants du secteur privé.

6.2

Le commerce équitable, dans la perspective de contribuer à l'amélioration de la situation des petits producteurs des pays en développement, devrait permettre la constitution de filières de production d'aliments élaborés afin de créer des emplois socialement durables.

6.3

Le commerce équitable doit pouvoir mettre l'accent sur la nécessité d'agir sur des filières plus importantes pour donner plus de poids politique à ce processus, tout en respectant l'intérêt du producteur.

7.   Principaux pays

7.1

Tous les pays concernés par la production agricole destinée au commerce équitable sont des pays du Sud. Le commerce équitable, du fait de la relative transparence de son processus de commercialisation, a bien montré la faiblesse de la proportion du prix d'achat payé par le consommateur qui profite au producteur (pour 100 euros dépensés, seuls 20 euros sont reversés à l'économie locale) ainsi que l'importance de la part de la valeur ajoutée (créée notamment par la transformation et la vente au détail) qui reste dans le monde industrialisé. La véritable question est la capacité du commerce équitable à modifier durablement les règles du commerce international.

8.   Législation ou certification

8.1

Le Comité estime que la certification est la meilleure garantie aux consommateurs. La certification est un processus de vérification par un organisme tiers accrédité (au terme d'un processus d'accréditation) et impartial pour attester qu'un service, un produit ou un processus est conforme aux spécifications énoncées dans un cahier des charges (ce cahier des charges peut être ou non une norme). Ainsi, si la certification et l'accréditation sont deux procédures de vérification, l'accréditation vérifie des compétences alors que la certification vérifie une conformité à un cahier des charges. L'enjeu du commerce équitable, et plus globalement de la consommation éthique, responsable et citoyenne est de définir les moyens visant à pérenniser le succès obtenu permettant de:

1)

garantir la transparence, la visibilité et la compréhension du fonctionnement des filières du commerce équitable. Sur ce terrain, un véritable travail d'information doit être entrepris pour en expliquer les contours et les enjeux;

2)

garantir que l'achat du produit alimentaire va profiter à un village, à des villageois et au développement des exploitations agricoles des pays en développement.

8.2

Le commerce équitable a donc mis en place des systèmes de garantie, mais ils tirent leur légitimité de leur caractère négocié et de l'implication des différentes parties prenantes.

Le système de garantie mis en place par FLO définit des cahiers des charges sur des produits;

le cahier des charges et le référentiel mis en place par WFTO portent sur les pratiques-mêmes de la structure impliquée dans le commerce équitable.

8.3

FLO et WFTO cherchent à développer la complémentarité entre leurs systèmes de garantie. Il s'agit de trouver les points de convergence et de cohérence entre leurs approches. Aujourd'hui, cela se limite à ce stade à un état des lieux.

8.4

Ces systèmes de vérification sont indispensables. Le niveau élevé de garantie est primordial afin d'éviter une prolifération de législations différentes dans les pays du Nord et de protéger les intérêts des consommateurs. D'ores et déjà, les organismes du commerce équitable ont défini un cahier des charges au niveau international et se sont mis d'accord sur une charte des principes du commerce équitable; ils doivent poursuivre leur coopération afin d'élaborer un système commun de certification pour les producteurs.

9.   Les conditions de l'aide au développement

9.1

Le commerce équitable contribue à la réduction de la pauvreté, tout en préservant les bases du développement durable.

9.2

La politique extérieure de l'Union européenne intervient pour favoriser l''essor de l'agriculture dans les pays en développement. Les aides destinées à encourager les petits producteurs agricoles à se tourner vers le commerce équitable pourraient être conditionnées aux critères du commerce équitable contribuant à un développement durable dans ces pays.

10.   Les défis du commerce équitable

10.1

Le commerce équitable réside indiscutablement dans le dynamisme commercial, social, éducatif et politique qui anime les acteurs locaux et internationaux.

10.2

Le commerce équitable est une innovation socio-économique, portée par la société civile pour changer les pratiques commerciales internationales de manière à tenir davantage compte de l'homme. Il devrait:

maintenir son influence en matière de responsabilité sociale et environnementale des entreprises;

travailler son assise sociale avec les syndicats, les associations de consommateurs, les environnementalistes, les syndicats de producteurs locaux;

élargir et diversifier son marché, le commerce ayant besoin d'élargir ses gammes de produits et ses réseaux;

mieux redistribuer la valeur ajoutée aux producteurs;

soutenir l'organisation des producteurs du Sud pour leur donner plus d'indépendance;

permettre le développement local et l'accroissement des droit fondamentaux, économiques, sociaux et culturels;

être en mesure d'améliorer globalement les règles et les pratiques du commerce conventionnel.

11.   «Équitable», aussi pour les producteurs européens?

11.1

Tous les produits agricoles issus du commerce équitable proviennent des pays en développement. Or certains produits comme le sucre, le vin et la banane sont produits aussi par les pays européens avec des normes sociales nettement supérieures, ce qui peut créer un certain surcoût par rapport à un produit certifié équitable.

11.2

Afin d'éviter cette situation délicate, il faudrait créer une organisation internationale de producteurs de ces filières pour trouver des compromis favorables pour tous.

12.   Le commerce équitable, nouveau fondement économique

12.1

Beaucoup d'organisations des droits de l'homme dénoncent les issues du commerce international (OMC).

12.2

Les différents acteurs et parties prenantes du commerce équitable se distinguent au niveau mondial tant du point de vue qualitatif que quantitatif. C'est bien d'ailleurs leur capacité à couvrir la diversité des champs du commerce équitable qui porte le sens de la démarche et la possibilité qu'elle aura d'avoir un impact significatif.

Bruxelles, le 1er octobre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  COM(2009) 215 final.


Annexe I

Retour de marge aux producteurs par rapport au commerce conventionnel

Commerce

Café

Thé darjeeling

Sucre

Quinoa

Riz basmati

conventionnel

5 %

7 %

2,5 %

6,7 %

6,5 %

équitable

17 %

9,5 %

3,8 %

8,5 %

9,5 %


Annexe II

Exemple de décomposition du prix d'un riz thai Max Havelaar:

15 % producteur

26 % coûts de transformation

2 % droits

57 % coûts de conditionnement et de distribution.


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/35


Avis du Comité économique et social européen sur la «Dimension septentrionale des régions défavorisées» (avis d'initiative)

2009/C 318/07

Rapporteur: M. Kaul NURM

Le 26 février 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur la

«Dimension septentrionale des régions défavorisées»

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 2 septembre 2009, (M. Kaul NURM, rapporteur).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 30 septembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 175 voix pour, 1 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Les objectifs fondamentaux de la politique agricole commune, et notamment la garantie de l'approvisionnement alimentaire, restent d'actualité, ce qui suppose que l'on préserve la production agricole sur l'ensemble du territoire de l'UE, et notamment aussi dans les régions septentrionales.

1.2

Le présent avis est centré sur les particularités et les problèmes d'ordre naturel, climatique et géographique des régions septentrionales de l'UE, dans lesquelles la production agricole est soumise à un certain nombre de contraintes résultant de la froideur du climat et nécessitant ainsi de la part des producteurs des dépenses supplémentaires par rapport aux exploitants agricoles qui bénéficient de conditions agroclimatiques plus favorables.

1.3

L'agriculture des régions septentrionales a des coûts de production plus élevés et une productivité considérablement moindre que celle des régions productrices bénéficiant de conditions favorables. La baisse durable de la rentabilité et aussi, dans le même temps, le fait que la motivation des producteurs faiblisse constituent un péril pour la poursuite de l'activité agricole dans les régions septentrionales de l'Europe. Il est possible d'éviter ces périls par le recours à des moyens appropriés relevant de la politique agricole.

1.4

Il faut garantir l'exploitation des sols dans les régions septentrionales connaissant des conditions naturelles défavorables, de manière à préserver les paysages traditionnels et les zones qui présentent un grand intérêt sur le plan de la protection de la nature. L'aide aux régions défavorisées est un instrument grâce auquel il est possible de répondre à cette exigence, mais cela suppose que l'aide soit orientée de manière plus systématique que cela n'a été le cas jusqu'à présent vers les régions où existe le plus grand risque de voir se perdre l'exploitation de la terre.

1.5

En plus de la définition de nouveaux critères de qualification des régions défavorisées, il faut aussi, afin d'obtenir un impact positif réel, réexaminer en même temps les principes du financement de leur développement. L'on devrait envisager une solution possible qui consisterait à intégrer aux paiements du premier pilier les paiements destinés aux régions défavorisées. Le système appliqué jusqu'à présent, dans lequel les niveaux des aides directes sont fonction d'indicateurs historiques de production favorise les exploitants agricoles des régions bénéficiant de bonnes conditions. L'aide aux régions défavorisées n'a pas compensé dans une mesure suffisante les conditions de production que connaissent les régions défavorisées par des contraintes naturelles.

1.6

Pour fixer les niveaux d'aide, il faudrait, à l'avenir, dans les zones défavorisées, prendre en compte le montant total des dépenses encourues pour surmonter les contraintes naturelles et les conditions défavorables existant concrètement dans chaque région: plus les conditions naturelles sont mauvaises, plus les niveaux d'aide devraient être élevés. Il conviendrait cependant de fixer aussi avec certitude les limites inférieures et supérieures des niveaux d'aide.

1.7

Pour définir les contraintes naturelles, il faudrait aussi prendre en compte, en plus du total des jours de températures positives pendant la période de végétation, mais aussi le total des jours de températures négatives, pendant l'hiver, dans la région.

1.8

Les régions septentrionales sont éloignées des grands marchés européens, leurs zones rurales sont très faiblement peuplées, et les champs sont fragmentés, ce qui augmente les coûts de la production agricole. Une aide aux régions défavorisées est nécessaire pour maintenir une population dans ces régions et pour faire en sorte que s'y poursuive une production agricole. C'est pourquoi le CESE recommande de retenir aussi, parmi les critères de détermination des régions défavorisées, la notion de faible densité de population, ainsi que d'élaborer des critères supplémentaires d'aide à la production agricole dans les zones boisées.

1.9

Pour l'élaboration et la définition de critères de qualification de nouvelles régions défavorisées (régions connaissant des conditions naturelles défavorables), le CESE recommande de prendre en compte les particularités des zones plus septentrionales sur lesquelles il met l'accent dans l'avis, c'est-à-dire les particularités naturelles, climatiques et socioéconomiques, une solution possible étant de définir ces régions comme régions spéciales, par analogie avec ce qui se fait pour les zones de montagne.

2.   Contexte

2.1

Le CESE a traité le sujet des régions défavorisées dans ses avis d'initiative antérieurs (1).

2.2

Le 21 avril 2009, la Commission européenne a rendu publique sa communication COM(2009) 161, dans laquelle figure une proposition visant à modifier les principes de la définition des zones défavorisées et à établir de nouveaux critères. Entre autres, la Commission présente aussi une nouvelle dénomination pour les régions défavorisées et recommande de les appeler à l'avenir «zones à handicaps naturels». Le CESE se félicite de cette nouvelle approche.

2.3

La libre circulation des biens et des services est garantie dans le marché unique de l'UE, et c'est pourquoi, à long terme, la production ne sera pas possible sans aides particulières dans les zones septentrionales de l'UE où le coût unitaire est plus élevé. Ce fait entraîne à son tour des conséquences négatives pour la viabilité sociale et environnementale de ces régions, ainsi que pour leur biodiversité.

2.4

Le régime des régions défavorisées et son impact ne sont pas comparables d'un État membre à l'autre. En raison de la multiplicité des critères appliqués, les régimes actuels d'aide aux régions défavorisées ne reflètent pas dans une mesure suffisante les spécificités des conditions qu'imposent à la production les facteurs naturels et climatiques et ne les compensent pas de manière adéquate et proportionnée.

2.5

Dans une perspective de sécurité alimentaire à long terme dans le monde, et aussi en Europe, il faut maintenir aussi la production agricole dans les régions septentrionales de l'Union européenne, régions où, selon les prévisions, les conditions agroclimatiques vont peut-être s'améliorer à un horizon de cinquante ou cent ans, suite au réchauffement global. Les régions méridionales connaîtront, en raison de ce réchauffement, une chaleur excessive et il se pourrait alors que la production agricole, en Europe, se déplace vers le nord.

3.   Particularités naturelles et climatiques des régions septentrionales, présentation générale des problèmes et justification d'un traitement spécial

3.1

Ce qui distingue la production agricole des régions septentrionales de l'UE de celle de l'Europe méridionale et centrale, ce sont: une période de végétation sensiblement plus courte, un chiffre considérablement plus bas pour ce qui est du total des jours de températures efficaces nécessaires à la croissance des végétaux et un excès d'humidité pendant la plus grande partie de l'année. Les précipitations sont réparties de manière inégale sur l'ensemble de l'année: pendant la période de printemps-été, qui est pour les végétaux la période d'éclosion, d'épiaison et de croissance, l'insuffisance des précipitations pose un problème, tandis que les fréquentes pluies d'automne empêchent de moissonner au moment opportun et dégradent la qualité des récoltes.

3.2

L'agriculture des régions septentrionales subit aussi, dans une mesure très importante, les effets d'un hiver long, qui a pour effet de faire geler le sol. Les températures peuvent même descendre jusqu'à moins quarante degrés Celsius. La profondeur de pénétration du gel dépend à la fois du total des jours de températures négatives et de l'épaisseur de la couche de neige, qui peut atteindre un mètre en Lettonie et en Estonie, et jusqu'à deux mètres dans le nord de la Finlande et de la Suède. La fonte de la neige et le dégel du sol ainsi que le réchauffement des terres constituent un processus de longue haleine, ce qui a pour effet de retarder le début des semis de printemps et de la croissance des végétaux. Selon la latitude et la distance de la mer, les semis de printemps ont lieu, dans les régions septentrionales, de la fin avril à la mi-juin. C'est pourquoi il faudrait faire aussi entrer en ligne de compte, dans l'élaboration des critères de qualification des régions défavorisées, le total des jours de températures négatives dans les régions considérées.

3.3

Il est nécessaire de construire les fondations, ainsi que les conduites d'eau et les réseaux de collecte et de traitement des eaux usées, à des profondeurs dépassant la profondeur de pénétration du gel, et il faut aussi isoler les murs extérieurs des bâtiments, ce qui augmente les coûts de construction. Les dépenses occasionnées, en hiver, par le chauffage et le déneigement des bâtiments sont, elles aussi, considérables.

3.4

En raison de la brièveté du processus de constitution des sols ayant suivi la période glaciaire, l'épaisseur des couches de terre arable est moindre dans les zones septentrionales, ces terres sont de qualités et de textures diverses: elles sont, en majorité, excessivement humides, rocailleuses par endroits, trop argileuses, sablonneuses ou tourbeuses, et c'est pourquoi il faut consentir des dépenses importantes pour améliorer les sols, et surtout pour construire et entretenir des systèmes d'évacuation des eaux, mais aussi pour le chaulage des champs.

3.5

Les zones septentrionales se caractérisent par des paysages glaciaires vallonnés et fragmentés, dominés par des terrains boisés ou humides et autres espaces naturels peu fertiles, ce qui explique la faible superficie et la dispersion des parcelles cultivées. Il existe des zones où la superficie moyenne des terres cultivées d'une exploitation agricole peut être inférieure à un hectare et où les champs sont dispersés au milieu des bois, loin de la maison d'habitation de l'exploitant. Cela ne permet pas d'avoir recours à des machines de plus grande taille et d'une meilleure efficacité et alourdit en même temps, pour les exploitants, les coûts de production et de transport (sur l'exploitation même). Il n'est pas possible non plus d'atténuer de telles contraintes naturelles en faisant le choix de cultures alternatives ou en rationalisant d'une autre manière la production. C'est pourquoi il y a besoin d'introduire des critères supplémentaires qui prendraient en compte les contraintes naturelles que connaissent les régions boisées. L'on pourrait utiliser comme critère la part de terre cultivable par hectare. Il faudrait, au moyen d'une mesure applicable aux régions défavorisées, compenser les coûts de transport supplémentaires que subissent les exploitations.

3.6

Dans les zones septentrionales, la densité de population des régions rurales est très faible, tombant à moins de dix habitants au kilomètre carré en dehors des grandes villes, et jusqu'à moins de trois habitants au kilomètre carré dans les régions périphériques, ce qui entraîne des coûts de transport considérables, aussi bien dans le cadre de la production que pour garantir l'accès aux services privés et publics. Avec la mécanisation, l'Europe septentrionale a connu au vingtième siècle une croissance considérable de la productivité et la disparition d'un grand nombre d'emplois en milieu rural, et c'est pourquoi la faible densité de population ainsi que la faible disponibilité de services sont, à leur tour, devenus des facteurs d'intensification de l’exode rural: nombreuses sont les exploitations qui cessent la production, car les jeunes ne souhaitent pas continuer à s’occuper de la ferme. Pourtant, l’agriculture constitue, avec la sylviculture et le tourisme, la base de la vie rurale dans les zones septentrionales. Les collectivités rurales sont sensiblement plus petites que la moyenne, et pour cette raison, les services publics tels que, par exemple, l’enseignement scolaire et les activités périscolaires sont nettement plus chers pour les habitants. Dans les zones rurales faiblement peuplées, le coût de la vie est plus élevé, car une population insuffisante représente un faible nombre de consommateurs de biens comme de services. Les régions reculées des zones septentrionales sont trop éloignées des grands centres pour qu’il soit possible de s'y rendre quotidiennement pour travailler ou se procurer des services. Il faudrait, au moyen d’une mesure applicable aux régions défavorisées, compenser les coûts de transport supplémentaires que subissent les exploitations agricoles éloignées des centres d'activité (éloignées d'un marché).

3.7

En Europe septentrionale, moins les gens vivant dans les zones rurales sont nombreux, plus le coût de la vie devient élevé pour eux, car pour avoir accès à des biens et à des services, se faire soigner, scolariser ses enfants etc., il est nécessaire de parcourir des distances sans cesse plus importantes. C'est pourquoi, dans les zones à faible densité de population de l’Europe septentrionale, le maintien et la création d'emplois aussi bien dans le secteur agricole que dans les autres secteurs revêtent une importance toute particulière. Des aides devraient être disponibles pour cela, aussi bien au titre de la politique agricole commune qu'au titre de la politique régionale. Du succès de la mise en œuvre de ces politiques dépend la réponse à la question de savoir si l'on parviendra à équilibrer la migration milieu rural-milieu urbain et à enrayer le rejet des campagnes et la désertification économique et sociale des campagnes périphériques. C'est pourquoi il est essentiel pour l'ensemble de l'Union européenne, d'un point de vue de politique de sécurité également, de faire en sorte que ces confins de l’UE restent peuplés.

3.8

Les parties boisées et humides des zones septentrionales constituent, avec l'agriculture plus extensive qui s'y pratique et avec les écosystèmes semi-naturels, la base de la diversité naturelle et de la biodiversité. Par ailleurs, l'Europe septentrionale est la zone de reproduction de millions d'oiseaux migrateurs, qui trouvent de quoi se nourrir dans ses champs cultivés et dans ses prairies naturelles.

3.9

À cause des contraintes naturelles et des coûts de transport dus à la fragmentation des terres agricoles et à la faible densité de population, la rentabilité de l'agriculture et les revenus qu'elle génère sont faibles dans les zones septentrionales. Cela a déterminé, en conséquence, conformément aux principes de la PAC appliqués jusqu'à présent, de faibles niveaux d'aides directes au titre du premier pilier. Si l'on veut garantir que les terres agricoles soient exploitées, et si l'on veut garantir aussi une production durable de denrées alimentaires et la préservation du paysage dans les régions septentrionales à handicaps naturels, il faut assurer aux exploitants agricoles un revenu comparable à celui des exploitants des régions qui jouissent de conditions favorables de production. Si on ne le fait pas, les habitants quitteront les localités rurales, les terres agricoles seront abandonnées, les espaces agricoles entretenus seront laissés en friche et perdront leur fertilité. Le CESE recommande à la Commission européenne une solution possible qui consisterait à procéder à une analyse complémentaire des particularités des zones septentrionales et à envisager de définir ces régions comme régions spéciales, par analogie avec ce qui se fait pour les zones de montagne.

3.10

Le caractère et l'ampleur des contraintes naturelles peuvent varier selon les régions. C'est pourquoi, pour fixer les niveaux d'aide aux zones défavorisées, il faudrait prendre en compte le montant total des dépenses encourues pour surmonter les contraintes naturelles et les conditions défavorables existant concrètement dans chaque région: plus les conditions naturelles sont mauvaises, plus les niveaux d'aide devraient être élevés. Il conviendrait cependant de fixer aussi avec certitude les limites inférieures et supérieures des niveaux d'aide.

4.   Contraintes naturelles en matière de production végétale, présentation des problèmes et justification d'un traitement spécial

4.1

Dans les zones septentrionales, les cultures subissent les effets des hivers froids, de la brièveté de la période de végétation, de la faiblesse du total de jours de températures efficaces pour la croissance des végétaux, ainsi que de l'excès d'humidité, ce qui nécessite des investissements considérables pour la construction de systèmes de drainage. La durée de vie des systèmes de drainage dépend des matériaux utilisés pour le drainage et elle est d'environ trente à cinquante ans; après cela, l'on doit remplacer ces systèmes. Les dépenses annuelles que nécessitent l'entretien et les réparations des systèmes de drainage représentent des coûts supplémentaires. L'installation des systèmes de drainage et leur entretien conditionnent l'utilisation de sols dans lesquels l'humidité est excessive.

4.2

En raison de la présence d'une roche-mère cristalline ou de grès, les sols des zones septentrionales, pour leur plus grande part, sont acides, et il faut les chauler régulièrement tous les 6 à 8 ans pour les rendre cultivables, ce qui exige des dépenses supplémentaires par rapport aux zones qui ont un Ph neutre. Il ne faut pas considérer le chaulage comme un moyen de rendre les sols plus fertiles, mais comme une obligation qui s'impose si l'on veut rendre cultivables les sols acides et atténuer l'effet de contraintes naturelles constantes. Le CESE est d'avis que pour la définition des régions défavorisées et l'élaboration de nouveaux critères, l'on devrait accorder davantage d'attention au problème des sols acides que cela n'a été le cas jusqu'à présent.

4.3

Dans les régions septentrionales, il faut sécher toutes les récoltes dans des séchoirs spéciaux, car leur teneur en humidité peut atteindre jusqu'à 30 %. Pour pouvoir conserver les récoltes, il faut les sécher pour amener l'humidité à 12-14 %. La construction de séchoirs pour les récoltes nécessite des investissements importants et l'énergie consommée pour le séchage représente un supplément notable de dépense. Le coût des séchoirs et de l'appareillage peut atteindre 300 000 euros, à quoi s'ajoute le fait que la durée d'utilisation de l'appareillage est de dix à quinze ans selon l'intensité d'utilisation. D'après les données des exploitations, les dépenses de séchage des récoltes représentent, en moyenne, de 20 à 25 euros par tonne, bien que l'on constate d'une année à l'autre des différences de degré d'humidité des produits récoltés et de quantité d'énergie nécessaire au séchage. Si l'on considère que la récolte moyenne, dans les zones septentrionales, est de 3 à 4 tonnes par hectare, nous arrivons, pour ces zones, à une dépense supplémentaire de 60 à 100 euros par hectare.

4.4

Les espèces végétales doivent être plus résistantes au froid et pouvoir supporter des refroidissements nocturnes qui surviennent même au mois de juin, ce qui fait que les rendements sont plus bas. À cause de la brièveté de la période de végétation, il n'est pas possible de cultiver de variétés qui ont besoin d'une longue période de végétation et de températures plus élevées vingt-quatre heures sur vingt-quatre, comme par exemple le maïs fourrager, ce qui permettrait de réduire aussi de façon notable les coûts d'élevage. Pour cette raison, l'alimentation animale repose, en majeure partie, sur l'ensilage d'herbe, à des coûts unitaires qui sont supérieurs à ceux du maïs fourrager.

4.5

Le danger des gelées nocturnes menace surtout la culture des fruits, des baies et des légumes. Au moins une fois tous les dix ans, surviennent des gelées nocturnes si intenses pendant la période de floraison qu'elles détruisent la totalité de la récolte. Il existe, bien sûr, un certain nombre de moyens de lutter contre les gelées nocturnes, tels que l'aspersion antigel, l'écran de fumée, les voiles de forçage, etc., mais leur utilisation représente un supplément de coût financier et de coût de main d'œuvre.

4.6

À cause de la brièveté de la période de végétation, il est nécessaire d'effectuer tout le travail des champs dans un temps très court. Par rapport à des situations normales, cela suppose de pouvoir disposer d'un plus grand parc de machines, ce qui exige, en moyenne, des investissements par hectare plus importants.

5.   Contraintes naturelles en matière d'élevage, présentation des problèmes et justification d'un traitement spécial

5.1

En milieu septentrional, la période de pâturage est courte (de la mi-mai jusqu'à la fin du mois de septembre), et pour cette raison, la quantité d'aliments destinés aux animaux qui est à stocker pour l'hiver, ainsi que les coûts de production, sont plus importants. Et afin de conserver les aliments destinés aux animaux pour l'hiver, il faut aussi construire des entrepôts spéciaux. Souvent, il n'est pas possible, à cause des conditions météorologiques, de commencer la récolte du foin au moment optimal, ce qui fait que sa valeur nutritive diminue. Les averses fréquentes en période de fenaison ou d'ensilage peuvent abaisser le niveau de qualité du fourrage.

5.2

Les coûts des édifices et des installations destinés à l'élevage sont plus élevés que dans les régions chaudes, parce que pour poser les fondations des édifices et installer les conduites d'eau et les réseaux de collecte et de traitement des eaux usées, il est nécessaire de descendre à une profondeur supérieure à celle de l'épaisseur gelée (plus de 1,2 mètre au minimum, si l'on prend l'exemple de l'Estonie).

5.3

La neige entraîne également des coûts supplémentaires; elle nécessite notamment de nettoyer aussi bien les cours de ferme que les chemins qui parcourent les exploitations. À cause du soulèvement dû au gel, il faut remettre en état le revêtement des chemins entre cinq et dix fois par an. En raison de la faible densité de population, il existe dans les pays du Nord beaucoup de chemins de surface et de chemins non revêtus. Il faut engager des dépenses supplémentaires pour entretenir et réparer ces chemins, en particulier après les dégradations du printemps; des mesures sont aussi nécessaires en été pour lutter contre la poussière.

5.4

Les coûts de stockage au kilo du lait à mobiliser sont plus élevés dans les zones faiblement peuplées que dans les zones d'agriculture intensive à forte densité de population, car il faut parcourir de plus longues distances pour collecter le lait. Par exemple dans de nombreuses régions insulaires et îles intérieures, la production laitière a cessé, car cette production n'était pas rentable en raison des coûts de transport. Le coût de transport vers les exploitations agricoles des autres intrants nécessaires à la production est également plus élevé.

6.   La préservation de l'agriculture et de la vie rurale dans les régions septentrionales est d'une importance essentielle pour l'ensemble de l'Union européenne

La poursuite de la production agricole et le maintien d'une population rurale dans les zones septentrionales revêtent une importance d'ampleur transeuropéenne sous les aspects suivants:

en assurant aux habitants de ces régions une alimentation faite de produits locaux et en garantissant pour l'avenir l'approvisionnement de l'UE en cas de réchauffement global,

en préservant des emplois et en assurant le maintien d'une population dans les régions rurales,

en préservant et, dans de nombreux cas, en accroissant la biodiversité,

en conservant les paysages ouverts et intéressants dont a besoin l'industrie du tourisme et des vacances,

en assurant la sécurité des zones frontalières de l'UE.

Bruxelles, le 30 septembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 318, 23.12.2006, p. 86, JO C 44, 16.2.2008, p. 56 and JO C 120, 16.5.2008, p. 47.


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/39


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Promouvoir les politiques et les programmes en faveur de l'efficacité énergétique à l'échelon des utilisateurs finaux» (avis d'initiative)

2009/C 318/08

Rapporteur: M. CAPPELLINI

Le Comité économique et social a décidé, le jeudi 10 juillet 2008, conformément aux dispositions de l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le thème

«Promouvoir les politiques et les programmes en faveur de l'efficacité énergétique à l'échelon des utilisateurs finaux» (avis d'initiative).

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 septembre 2009 (rapporteur: M. CAPPELLINI).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 1er octobre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 126 voix pour et 2 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité économique et social européen (CESE) a été associé à la dernière consultation consacrée aux diverses thématiques des politiques européennes en faveur de l'efficacité énergétique et à l'ensemble de leurs dimensions (dimension extérieure, défis énergétiques à court et à long terme, politiques d'approvisionnement et de sécurité énergétique), dans le cadre d'une politique énergétique caractérisée par sa viabilité économique et sa durabilité. Il souligne l'importance de promouvoir et de valoriser les résultats des journées de l'efficacité énergétique organisées par le CESE avec la collaboration de tous les acteurs concernés, des utilisateurs finaux et des États membres. Compte tenu de ces considérations, le Comité invite la Commission européenne et le nouveau Parlement à reprendre avec vigueur les recommandations qu'il a déjà formulées dans ses avis antérieurs (1).

1.2

Le Comité estime en outre que la mise en œuvre d'une politique énergétique visant à promouvoir l'efficacité et les nouvelles technologies «propres» peut représenter une solution non seulement au problème environnemental, mais également pour réduire la dépendance à l'égard des approvisionnements énergétiques, ainsi que pour faire face aux coûts élevés des matières premières et à leur retombées sur les utilisateurs finaux.

Le Comité économique et social européen recommande d'intensifier les efforts visant à impliquer systématiquement les utilisateurs finaux (et notamment les consommateurs et les petites entreprises) dans l'optique des nouvelles contraintes fixées par le Conseil européen en mars 2007 et de la maîtrise de l'actuelle crise économique.

1.3

Le Comité estime que le partenariat social européen et national peut ouvrir la voie à une implication accrue des consommateurs finaux d'énergie, en particulier les petites entreprises, leurs organisations, et les modèles associatifs et coopératifs privés et publics opérant au niveau local, afin d'apporter une contribution plus percutante à la poursuite des objectifs européens en matière d'efficacité énergétique et d'«économie verte». À condition de s'inscrire dans le cadre le plus approprié, tel que l'agenda du dialogue social européen, y compris au niveau sectoriel, cet engagement peut contribuer de manière effective à l'augmentation du nombre d'emplois et à la création de nouvelles professions qualifiées, liées au secteur de l'énergie et à la diffusion de nouveaux services.

1.4

Le CESE estime que le choix de renforcer la dimension européenne des politiques énergétiques devrait inciter également à promouvoir davantage, dans le marché intérieur et sur les marchés nationaux, une stratégie de développement durable et une coopération scientifique et technologique élargie, capable de relancer les investissements publics et privés, y compris les formes de «coopération renforcée» entre les États membres de l'UE.

1.5

Le Comité fait part de sa déception et de sa préoccupation concernant le manque d'informations et de données homogènes et détaillées relatives à l'efficacité énergétique dans les utilisations finales, qui rend difficile la définition d'indicateurs statistiquement «solides» et harmonisés, au regard notamment de l'insuffisance des séries historiques disponibles au niveau européen et accessibles aux utilisateurs finaux.

Le Comité confirme sa propre préoccupation vis-à-vis des États membres lorsqu'il constate qu'ils n'ont pas élaboré en temps voulu leur plan national d'action en matière d'efficacité énergétique (PNAEE), tel que prévu par la directive à l'examen.

1.6

Le Comité estime en outre que, pour favoriser une mise en œuvre complète, homogène et plus rigoureuse, au plan national, des politiques européennes en faveur de l'efficacité énergétique, il est nécessaire et urgent d'adopter, en coopération avec la Commission européenne et les États membres et après avoir consulté de manière systématique les instances de représentation des utilisateurs finaux, un système européen de contrôle commun qui tout à la fois soit équitable, transparent et permette la comparaison des factures énergétiques.

1.7

Le Comité estime en outre que, pour améliorer la mise en œuvre des politiques européennes dans le domaine de l'efficacité énergétique, il convient d'en renforcer l'aspect sectoriel, afin qu'elles puissent mener à bien des activités de suivi plus étendues et développer leurs analyses d'impact. En effet, les politiques énergétiques ont un impact différent pour chaque type d'activité économique, qu'il s'agisse d'entreprises consommatrices d'énergie (dont les problématiques sont différentes suivant l'importance de leurs consommations, la typologie de leurs processus, etc.), ou d'entreprises actives dans les divers secteurs de la filière énergétique, tels que par exemple les producteurs et installateurs d'équipements, les fournisseurs de services énergétiques ou les firmes du secteur de la construction, qui recèlent un énorme potentiel d'économies d'énergie encore latent.

1.8

Le Comité a en outre la conviction que les programmes européens, comme le programme-cadre pour l'innovation et la compétitivité (PIC), Énergie intelligente pour l'Europe (EIE), ou d'autres encore, demandent à être simplifiés de toute urgence, doivent impliquer davantage les utilisateurs finaux et nécessitent un cadre d'intervention moins éclaté et plus intégré, comme c'est le cas avec le programme ECAP. En conséquence, il est proposé de lancer un nouveau programme intégré assurant une meilleure coordination des activités en faveur des utilisateurs finaux.

Le Comité invite l'UE, les États membres et les entreprises à investir des ressources suffisantes dans la recherche appliquée et dans son transfert aux utilisateurs finaux, dans la réalisation d'économies grâce à l'utilisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication (TIC) dans les professions techniques et de pointe, ainsi que dans le développement et l'innovation en matière énergétique, et recommande une coopération internationale plus étendue dans ce domaine.

1.9

Le Comité estime urgent que l'UE se dote de politiques et d'instruments fiscaux et d'accès au crédit plus à même de soutenir les économies d'énergie, en accordant des facilités à tous les utilisateurs finaux, en particulier les PME et le partenariat public-privé, qui, de manière individuelle ou en association, réalisent des modèles de production plus efficaces et durables.

Conscient du rôle crucial que jouent l'éducation et la formation dans la diffusion d'une culture de l'efficacité énergétique au niveau européen, le Comité propose qu'une consultation spéciale soit lancée au niveau européen et national entre les partenaires sociaux et toutes les parties intéressées, afin de réorienter les ressources financières européennes qui sont disponibles, en renforçant les cursus et aspects professionnels en rapport avec l'efficacité énergétique, et de favoriser l'information du grand public et sa sensibilisation.

2.   Objectifs de la directive européenne 2006/32/CE

2.1

La directive européenne 2006/32/CE avait pour objectif

de «renforcer l'efficacité énergétique dans les utilisations finales», afin de contribuer à améliorer la sécurité de l'approvisionnement en énergie,

de réduire les émissions de CO2 et d'autres gaz à effet de serre, dans le cadre de la lutte contre le changement climatique, et d'exploiter de manière efficace, économiquement parlant, les gisements d'économies d'énergie sous l'angle des coûts, y compris en encourageant l'innovation et la compétitivité.

Pour concrétiser cette visée, la directive prévoyait un certain nombre d'objectifs, parmi lesquels figuraient les éléments suivants:

fournir aux États membres les objectifs indicatifs d'économie, ainsi que les mécanismes adéquats pour les atteindre,

définir le cadre institutionnel, financier et juridique nécessaire pour éliminer les barrières commerciales et les imperfections du marché qui empêchent une utilisation finale efficace de l'énergie,

créer les conditions propices à la mise en place et à la promotion d'un marché des services énergétiques, en particulier pour les PME,

réaliser un objectif indicatif national global en matière d'économies d'énergie, fixé à 9 % pour la neuvième année d'application de la directive, et devant être atteint par le biais de services énergétiques et d'autres mesures visant à améliorer l'efficacité énergétique.

3.   Observations générales

3.1   La phase de mise en œuvre de la directive 2006/32/CE s'est révélée en décalage par rapport aux ambitieux objectifs initiaux fixés par la Commission européenne, ce pour les raisons suivantes:

les mesures étaient tout à la fois peu percutantes et faciles à éluder dans les procédures d'adoption au niveau national,

les plans d'action nationaux et les dispositions prises pour la transposition dans les États membres ont manqué de cohérence et de vigueur par rapport aux prescriptions de la directive,

les programmes et les mesures d'accompagnement étaient insuffisamment coordonnés et trop fragmentaires,

en l'absence des données et informations homogènes qui étaient indispensables pour mener une action de suivi et d'analyse de l'impact de ladite directive sur les utilisateurs finaux, l'initiative s'est avérée totalement inadaptée et incapable de fournir des éléments utiles pour un développement cohérent et durable de l'efficacité énergétique dans l'UE.

L'expérience en cours démontre que sur les 27 États membres de l'Union européenne, quelques-uns seulement ont mis en œuvre des politiques énergétiques vigoureuses et bien structurées pour encourager l'efficacité énergétique et l'essor des sources d'énergie renouvelables, en amorçant un processus de développement de nouveaux secteurs liés aux technologies susmentionnées, tout en contribuant à faire baisser le coût de l'énergie pour les petites entreprises et les ménages.

Dans son livre vert «Vers un réseau d'énergie européen sûr, durable et compétitif» (2), la Commission plaide en faveur d'un gestionnaire européen des réseaux d’énergie.

Le CESE, dans trois récents avis (3), estime que des études devraient être faites sur la faisabilité d'un SIG européen de l'énergie qui pourrait être mis au service de la politique commune de l'énergie. Il y est indiqué en substance qu’il faut mener cette réflexion d’amont, car de tels services seront l'expression des solidarités européennes pour relever les défis qui se posent pour l'Union dans des domaines essentiels et multinationaux ou transnationaux tels que la sécurité d'approvisionnements en énergie, la gestion des ressources en eau, la préservation de la biodiversité, le maintien de la qualité de l'air, la sécurité interne et externe, etc. L’existence de tels services communautaires conduirait à une prise de conscience de leur responsabilité par tous les utilisateurs finaux.

3.2   Les utilisateurs finaux et l'approche européenne des politiques énergétiques

L'important retard qu'accusent certains États membres dans la poursuite des objectifs d'efficacité énergétique et la persistance de la grave crise économique actuelle confirment la nécessité et l'urgence d'interventions mieux coordonnées, programmées et articulées, de manière à permettre le déploiement de ressources de la part de la Communauté européenne et des États membres et à favoriser la reprise des investissements publics et privés. Une stratégie et une approche du développement durable reposant sur les principes d'efficacité, de production distribuée et de nouvelles sources d'énergie «propres» (y compris l'énergie produite à partir de la biomasse) et un partage des résultats ainsi obtenus au niveau européen entre les États membres et les représentants des utilisateurs finaux pourraient permettre d'éviter le morcellement des activités de recherche qui doivent être menées de concert avec les efforts engagés au niveau international.

S'agissant de la lutte contre la crise économique et de la relance des politiques d'efficacité énergétique et des démarches connexes d'investissement, il importe de repenser les politiques européennes en matière de fiscalité et de crédit en fonction des utilisateurs finaux, du secteur du crédit et des opérateurs du secteur de l'énergie, ainsi que des administrations intéressées au niveau local, en encourageant le développement au niveau européen du dispositif des sociétés de services énergétiques.

3.3   La culture et les nouveaux savoirs liés à l'efficacité énergétique du point de vue des utilisateurs finaux

Force est de constater le manque d'informations générales et sectorielles et l'insuffisance de l'évaluation de l'impact que les politiques d'efficacité énergétique de l'Union européenne produisent sur l'ensemble des utilisateurs finaux, en particulier les PME et d'autres acteurs, de même que l'absence d'une méthodologie qui permettrait de vérifier la concordance entre les objectifs internationaux et européens, ou encore d'un processus de suivi des résultats obtenus par ces utilisateurs finaux.

Il apparaît, sur la base d'une première vérification effectuée dans certains États membres, que la disponibilité des données relatives à la production industrielle et à la consommation énergétique est fortement limitée du fait de l'absence d'informations détaillées.

Il s'avère en conséquence nécessaire de lancer des enquêtes par sondage afin de recueillir et de traiter les données et les indicateurs nécessaires au suivi et à l'évaluation de l'efficacité énergétique dans les utilisations finales et les services, de manière à pouvoir mesurer l'impact de la directive sur les stratégies et les initiatives d'intervention mises en œuvre par chaque État membre.

3.4   Les indicateurs de l'efficacité énergétique et les besoins des utilisateurs finaux

La Commission européenne et les États membres pourraient soutenir et faciliter, le cas échéant à travers la mise en place d'un groupe d'experts indépendants, la mise au point d'indicateurs harmonisés et fiables, qui soient susceptibles de quantifier et d'évaluer les économies d'énergie qui peuvent également résulter de l'utilisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication. L'élaboration de ces indicateurs, qui doivent être faciles à comprendre, pourrait offrir une garantie pour les utilisateurs finaux, lesquels pourraient à leur tour en tirer profit de manière adéquate. Une telle démarche contribuerait par ailleurs à restreindre l'utilisation, fallacieuse ou confuse, qui, dans une mesure croissante, est faite des notions d'énergie «verte» ou «propre», laquelle s'inscrit dans le cadre d'une pure stratégie de commercialisation, sans s'assortir d'aucune justification véritable, démontrable et quantifiable sur le plan des économies énergétiques ou de la réduction des émissions. Cela permettrait aussi d'empêcher les pratiques commerciales déloyales.

3.5   Un système de suivi et d'observation intégré et partagé par tous les États membres permettrait notamment à l'Union européenne et aux États membres:

de valoriser un groupe européen d'experts et un réseau d'organismes indépendants œuvrant en faveur de l'efficacité énergétique et orienté vers les utilisateurs finaux et, plus particulièrement, les entreprises, notamment les PME et l'artisanat,

de produire à intervalles réguliers des rapports concernant les politiques de l'UE et leur impact sur les utilisateurs finaux, en particulier les PME,

de disposer d'une plate-forme d'information multilingue, aisément utilisable et accessible, de parvenir à consolider et à améliorer les relations entre les organisations représentatives d'échelon européen et national et les principaux acteurs intéressés.

3.6   Surmonter les retards et combler les lacunes lors de l'élaboration des PNAEE

Les plans nationaux d'action en matière d'efficacité énergétique (PNAEE) ne témoignent pas, de la part des États membres, d'un engagement fort et sérieux en faveur de la réalisation des objectifs définis par la directive (souvent d'un caractère par trop général, ils sont dépourvus des données et des indicateurs scientifiques qui seraient nécessaires pour évaluer correctement l'incidence potentielle des mesures prévues et ne se prêtent pas à l'accomplissement des objectifs de la directive), en particulier en ce qui concerne la réduction de la consommation dans les secteurs les plus importants, à savoir le transport et les bâtiments. D'où la nécessité de prendre des initiatives plus concrètes et réalisables dans le domaine de l'efficacité énergétique et de donner à ces mesures, ou en tout cas à certaines d'entre elles, un caractère plus contraignant, en vérifiant l'écart entre les plans nationaux et les résultats concrets, selon la démarche suivie pour les émissions des véhicules automobiles, la réduction générale des volumes de CO2, les rejets de gaz à effet de serre et les énergies renouvelables.

La récente consultation en ligne «Public Consultation on the Evaluation and Revision of the Action Plan for Energy Efficiency [COM(2006) 545] » mise en œuvre par la Commission européenne met en évidence les insuffisances de la directive en ce qui concerne la consultation des utilisateurs finaux. Un rapport annuel, à l'élaboration duquel le CESE pourrait lui aussi contribuer, pourrait représenter, à condition d'utiliser une méthode de consultation appropriée de tous les utilisateurs finaux, un instrument susceptible de combler les insuffisances relevées lors de l'élaboration des PNAEE.

3.7   «Nouvelle génération» de programmes européens plus adaptés au consommateur final

Une simplification des procédures d'accès aux programmes (CIP et en particulier EIE) est donc nécessaire afin d'en faciliter l'accès également aux petites entreprises et à leurs organisations représentatives ainsi qu'aux administrations des zones défavorisées (zones de montagne et régions périphériques). Par ailleurs, il serait judicieux d'encourager les partenariats public-privé et les sociétés de services énergétiques (SSE), en particulier au niveau européen, national et local, en favorisant une participation des PME à la réalisation effective de la politique européenne des «marchés publics verts». Enfin, dans le cadre du processus de simplification et du programme «Mieux légiférer», la Commission est invitée à examiner, avec les représentants des organisations européennes et nationales d'utilisateurs finaux, quelles sont les procédures et les pratiques les plus efficaces pour faciliter aux utilisateurs finaux et aux acteurs concernés par la directive la mise en œuvre des politiques d'efficacité énergétique.

4.   Observations particulières

4.1   La directive reconnaît aux opérateurs du secteur de l'énergie un rôle dans le domaine des services énergétiques (article 6). Cette disposition s'avère particulièrement critiquable, dans la mesure où dans de nombreux marchés nationaux, il est arrivé que les grands opérateurs énergétiques exercent des activités dans des marchés en aval de la filière énergétique, comme les services énergétiques et les activités dites d'«après-compteur», dans des conditions qui leur conféraient un avantage, eu égard à leur position dominante dans d'autres segments de la filière (production, distribution et vente), ce qui a créé de gros obstacles au développement du secteur des services énergétiques pour les petites entreprises.

4.1.1

D'importants problèmes et défauts subsistent au niveau de la phase de transposition de la directive en ce qui concerne les utilisateurs finaux, à savoir notamment:

disponibilité et transparence des informations concernant la mise en œuvre des services énergétiques (souvent exclusivement réservées aux opérateurs du secteur de l'énergie et aux autorités compétentes) – article 7;

relevé correct et facturation explicative de la consommation d'énergie.

Aussi serait-il indiqué de renforcer l'action de surveillance, de contrôle et de sanction par les organes compétents des États membres et de l'UE et de procéder à un suivi plus efficace et rigoureux des opérateurs énergétiques (voir les articles 11 et 13 de la directive).

4.1.2

Il conviendrait de renforcer et d'approfondir, d'un point de vue technique et politique, l'efficacité de l'accès aux «instruments financiers pour les économies d'énergie» et le fonctionnement des « mécanismes» correspondants, dans l'intérêt des utilisateurs finaux, en particulier sous l'angle de la fiscalité énergétique. Ces instruments et les résultats atteints grâce à eux devraient faire l'objet d'un suivi spécifique, en coopération étroite avec les associations européennes et nationales d'utilisateurs finaux et en tenant compte notamment de la façon dont l'«effet rebond» peut être atténué. L'«effet rebond», mis en évidence lors de l'audition organisée le 9 juillet 2009 par le CESE au siège du Conseil national italien de l'économie et du travail (CNEL) sur le thème «Promouvoir les politiques et les programmes en faveur de l'efficacité énergétique à l'échelon des utilisateurs finaux», désigne le fait que les interventions destinées à améliorer l'efficacité énergétique entraînent souvent une augmentation de la consommation d'énergie au lieu d'une diminution de celle-ci.

4.1.3

Le système de l'audit énergétique et les «certificats blancs» (article 12) s'avèrent eux aussi particulièrement importants pour développer les services énergétiques et il conviendrait dès lors que les États membres les renforcent encore.

Il est souhaitable à cet égard que le dialogue social européen, y compris au niveau sectoriel, puisse lui aussi contribuer utilement à la mise en œuvre des politiques d'efficacité énergétique, afin de favoriser la création d'emplois et une compétitivité accrue du système de production.

4.1.4

Des méthodes de calcul des économies d'énergie sont prévues. Pour l'instant, ces dispositifs ne sont pas très développés et n'ont pas fait l'objet d'une harmonisation. Il convient par conséquent de définir et de mieux cerner des méthodologies de calcul partagées par les utilisateurs finaux et à utiliser de manière harmonisée entre les États membres.

Enfin, on relèvera que la Commission européenne ouvre la voie à de multiples procédures en infraction pour non-transposition ou transposition partielle de la directive, avec toutes les conséquences qui en découlent du point de vue des coûts et des pesanteurs bureaucratiques, à charge des utilisateurs finaux.

Bruxelles, le 1er octobre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 77 du 31.3.2009, p. 54; JO C 175 du 28.7.2009, p. 87; JO C 228 du 22.9.2009, p. 84; JO C 182 du 4.8.2009, p. 8.

(2)  COM(2008)782 final/2.

(3)  JO C 175 du 28.07.2009, p. 43: avis du CESE sur le «Livre vert - Vers un réseau d’énergie européen sûr, durable et compétitif», CESE 1029/2009 (non encore publié), et avis du CESE en cours d’élaboration sur «Les services d'intérêt économique général: quel partage des compétences entre l'UE et les États membres?» CESE 966/2009 (non encore parue au Journal officiel).


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/43


Avis du Comité économique et social européen sur «L'impact de la crise mondiale sur les principaux secteurs manufacturiers et des services européens» (avis d'initiative)

2009/C 318/09

Rapporteur: M PEZZINI

Corapporteur: M GIBELLIERI

Le 26 février 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément aux dispositions de l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur

«L'impact de la crise mondiale sur les principaux secteurs manufacturiers et des services européens».

La commission consultative des mutations industrielles (CCMI), chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 10 septembre 2009 (rapporteur: M. PEZZINI, corapporteur: M. GIBELLIERI).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre 2009 et 1er octobre 2009 (séance du 1er octobre), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 156 voix pour et 2 abstentions.

1.   Conclusions

1.1   Le CESE est convaincu que les conséquences de la crise financière actuelle sur les grands secteurs manufacturiers et des services de l'UE obligeront les institutions européennes et les États membres à reconsidérer en profondeur et à coordonner plus étroitement les politiques et instruments communautaires, afin de reconstruire une échelle de valeurs plaçant au premier plan l'économie réelle, les exigences des entreprises, des travailleurs et des citoyens.

1.2   Le CESE réclame avec force la ratification du traité de Lisbonne, de manière à pourvoir l'UE d'une architecture en mesure de répondre à la nécessité de réorienter le développement de notre continent de manière compétitive, durable et ouverte grâce à:

des mesures visant à renforcer la coopération entre les entreprises et les travailleurs;

des politiques communes et mieux coordonnées;

des systèmes décisionnels plus rapides;

des législations plus simples et transparentes.

1.3   Le CESE est convaincu qu'il est possible de rebâtir les fondements de l'économie européenne et de la relancer, sur la base d'un renouveau de la construction européenne, dans l'esprit qui fut celui de Jean Monnet au moment du lancement et de la mise en œuvre du traité de Paris à l'origine de la CECA. En réalité, les traités en vigueur ont montré de manière inquiétante leurs limites en matière de lutte contre la crise et ses conséquences économiques et sociales.

1.4   Le principe de subsidiarité doit être redéfini dans sa valeur initiale. Les décisions et responsabilités doivent être prises au niveau le plus efficace pour le citoyen européen. Face aux problèmes mondiaux, les politiques et les instruments ne peuvent être établis qu'au niveau européen et mondial.

1.5   Le CESE est convaincu que les gouvernements des États membres et le Conseil de l'UE doivent tout mettre œuvre pour restaurer la confiance des citoyens envers le projet d'une Europe plus forte et en mesure de se doter d'instruments communs et reconnus destinés à lutter contre la crise mondiale actuelle et celles qui surviendront dans le futur.

1.5.1

Le CESE est conscient de ce que divers pays ayant fait partie du premier noyau de la construction de la Communauté européenne font preuve, en particulier en ces temps de crise, d'une grande intolérance envers les règles du marché unique: concurrence, aides d'État. Mais c'est une erreur! (1)

1.5.2

Dans une situation telle que celle que nous vivons actuellement, le Conseil devrait, avec l'aide du Parlement européen et de la Commission, mettre sur pied un «pacte stratégique» qui prévoie:

des engagements forts en matière de marché unique, avec des mécanismes renforcés, en particulier dans les secteurs présentant encore des défaillances (2);

un engagement à introduire un certain degré de coordination des fiscalités, qui respecte la souveraineté fiscale des États mais renforce la coopération sur certains points;

la possibilité concertée, pour les États membres «en difficulté», d'accéder rapidement à la zone euro tout en respectant les conditions requises;

la mise en œuvre de politiques publiques coordonnées, proportionnées, transparentes et dégressives dans le temps, pour réduire les risques systémiques et accélérer le retour à un niveau d'activité capable de s'auto-entretenir sur le marché libre.

1.6   Le message du CESE est le suivant: les citoyens, les forces sociales et la société civile dans son ensemble sont convaincus que la crise actuelle incite à établir une Europe plus forte, qui sache dépasser le rôle limité des États pris séparément.

1.7   Il convient de demander à ces derniers de faire des sacrifices concrets, en termes de représentation et de visibilité, pour renforcer le rôle mondial de l'Europe dans ses expressions démocratiques: Parlement, Conseil, Commission.

1.8   Le CESE est convaincu que le premier instrument à mettre en œuvre est une véritable politique industrielle significative qui ne soit pas influencée par les choix des spéculateurs financiers et qui soit orientée vers le développement durable. L'expérience concrète acquise grâce à la politique industrielle menée pendant cinquante ans sur la base du traité CECA, dans deux grands secteurs productifs européens, doit être reprise, actualisée, modifiée pour promouvoir un développement durable et ensuite utilisée comme référence pour les actions futures (3).

1.9   C'est grâce au développement des entreprises, de l'économie sociale et à leur capacité à fournir des réponses innovantes que l'Europe pourra vaincre la crise et relancer l'économie.

1.10   Pour établir une politique de développement, les partenaires sociaux et l'ensemble de la société civile organisée devraient s'efforcer de créer un territoire socialement responsable (TSR) sur lequel diverses stratégies, coordonnées entre elles, pourraient être mises en œuvre:

une tactique de résistance et de survie, à même d'offrir la possibilité d'opérer sur des marchés matures, grâce à une meilleure spécialisation, par une réduction des coûts, une forte diversification dans des secteurs contigus ou de nouvelles formules;

une tactique d'innovation dans les processus, les produits et les services, avec un changement de marché et de technologie, au moyen de nouveaux matériaux aboutissant à de nouveaux produits;

de nouvelles initiatives, telles que le lancement de nouvelles formes d'entreprise, ou de nouveaux secteurs; il est nécessaire d'envisager, au moyen d'un exercice de prospective, de nouveaux produits en expansion (comme les marchés porteurs) vers lesquels faire confluer de nouveaux investissements;

un marketing territorial, visant à l'excellence, au moyen de conventions avec des centres de recherche, afin d'accroître la «contamination» technologique;

un soutien financier, par l'intermédiaire des institutions financières de développement, et grâce aussi à la garantie fidéjussoire du FEI (4);

une capitalisation du fonds à risque des consortiums de garantie, grâce à un accord entre les administrations et le système bancaire, afin qu'ils puissent octroyer des délais de paiement aux micro- et petites entreprises, en particulier pour préserver les niveaux d'emploi;

une consolidation des dettes à court terme, pour permettre aux micro- et petites entreprises de se concentrer sur la production, la commercialisation et le service après-vente de leurs produits;

le soutien d'un secteur tertiaire innovant (économie verte), en utilisant la possibilité de formation innovante offerte par le Fonds social européen;

la mise en place d'un niveau élevé de services aux personnes, notamment par la valorisation et le développement des polarités socio-sanitaires (5);

la mise en œuvre de politiques d'infrastructure contribuant à accroître la gamme des choix innovants en matière d'économie à faible taux d'émissions de carbone, ainsi que la création des conditions d'un avantage résidentiel sur le territoire;

le renforcement, au niveau des marchés publics, des critères relatifs à l'efficacité énergétique et à l'environnement;

des incitants financiers visant à encourager la création de nouveaux produits, plus efficaces et destinés à remplacer les plus anciens;

l'amélioration de l'accès à l'information;

des facilités d'utilisation des matières premières.

1.11   Une comparaison des paquets nationaux de relance, dans les économies industrialisées, démontre la nécessité d'une vision prospective commune plus vaste de la part des gouvernements européens, en particulier en ce qui concerne l'impulsion donnée au développement durable et à la responsabilité sociale des entreprises, et d'une meilleure coordination avec la Commission européenne. En outre, les paroles ne suffisent pas. Les États membres doivent appliquer d'urgence leurs plans, étant donné que la crise affecte violemment les entreprises et les travailleurs.

1.12   Le CESE se félicite des efforts accomplis à Prague, lors du sommet sur l'emploi du 7 mai 2009, pour définir des pistes d'action à mettre en œuvre au niveau national et européen, avec les partenaires sociaux, sur la base d'un dialogue social renforcé (6), afin d'accorder une plus grande attention à la création d'emplois et aux mesures nécessaires pour stimuler la demande.

1.13   Il y a lieu de préserver la crédibilité de la stratégie de Lisbonne et de prouver ses capacités d'adaptation à ce nouveau contexte, en accélérant le processus de réforme, en proposant des priorités et de nouvelles méthodes claires et en assurant une cohérence entre les objectifs de la stratégie post-Lisbonne à définir dans les prochains mois et ceux de la stratégie de développement durable de l'UE.

1.14   Les gouvernements européens doivent s'engager davantage afin de respecter intégralement et dans les temps les engagements pris au sein de la Communauté.

1.15   Les aides d'État prévues pour soutenir l'emploi, dans les entreprises touchées par les problèmes liés à la mondialisation et au crédit, doivent reposer sur des conditions offrant les garanties suivantes:

ces aides ne doivent pas servir à renforcer le protectionnisme ni à créer des obstacles à la libre concurrence;

les entreprises qui reçoivent des fonds s'engagent avant tout à soutenir le niveau d'emploi;

les conventions collectives doivent être respectées et le pouvoir d'achat des travailleurs doit être maintenu;

pendant les périodes de production réduite, les travailleurs peuvent bénéficier de formations pour acquérir de nouvelles qualifications et devraient être encouragés dans ce sens;

l'aide financière publique ne doit pas devenir une forme de revenu pour les actionnaires par le biais de dividendes ou autres formes de rachat d'actions;

si possible, l'aide doit favoriser le développement de nouveaux produits et services, conformément à des critères de protection de l'environnement;

les aides ne doivent pas fausser la concurrence, elles doivent être temporaires et dégressives;

des mécanismes de contrôle adaptés doivent être mis en place afin de protéger les contribuables.

1.16   Les propositions adoptées à ce jour sont inappropriées pour permettre d'apporter une réponse sociale à la crise. La création d'emplois ou les mesures nécessaires pour stimuler la demande (par exemple, des avantages fiscaux mieux coordonnés au niveau de l'UE et des mesures relevant de la politique salariale) (7) ne sont pas suffisamment prises en considération.

1.17   Au niveau des règles, en ce qui concerne les mesures temporaires sur le marché du travail, il convient de veiller à ce que le travail de courte durée s'accompagne d'une formation appropriée, portant avant tout sur l'hygiène et la sécurité sur le lieu de travail, et de garanties en matière de niveau salarial.

1.18   Le CESE estime qu'il est urgent et fondamental, pour l'avenir même de la structure productive de l'UE, de mettre en œuvre des politiques visant à réorienter les jeunes vers les disciplines technico-scientifiques, à tous les niveaux du système scolaire et éducatif, afin de contrecarrer la destruction des valeurs liées aux activités productives au profit des valeurs financières et spéculatives (8).

1.19   Afin de favoriser la reprise de la production et le caractère durable des secteurs industriels et des services européens, le CESE estime indispensable de renforcer le rôle des activités de recherche, d'innovation et de développement, au moyen des instruments disponibles – tels que le 7e programme-cadre de RDT et l'Institut européen de technologie (IET) –, tout en élaborant une orientation sectorielle claire, sur la base des priorités définies par les plateformes technologiques européennes.

1.20   Le CESE réclame avec force une action communautaire visant à soutenir le secteur des services aux entreprises au travers de services et de contenus innovants au profit des citoyens, des consommateurs, des travailleurs et des entreprises, en particulier pour l'internationalisation et l'exportation des PME.

1.21   Le Comité juge nécessaire, comme l'espère sa propre présidence (9), que les critères d'intervention des Fonds structurels, et notamment du FSE soient réexaminés, afin d'en permettre l'accès direct, au niveau européen, également sur base territoriale, en tirant ainsi parti de l'expérience de la CECA, qui s'est avérée efficace et rapidement applicable.

1.22   En ce qui concerne le commerce international, le CESE estime qu'il est prioritaire de conclure rapidement les négociations multilatérales sur le commerce (cycle de Doha), de manière à envoyer un signal favorable aux marchés internationaux, ce qui aurait des retombées importantes sur la crise en cours (10). L'UE peut et doit jouer un rôle moteur plus fort en matière de négociations, qui lui permette de parler d'une seule voix afin d'obtenir des résultats ambitieux garantissant le respect des normes fondamentales du travail de l'OIT et du travail décent. L'observation de ces deux principes est essentielle en vue de garantir la croissance future des secteurs manufacturiers et des services européens.

1.23   Dans le contexte actuel, la perspective d'une spirale protectionniste est très réelle et dangereuse. Dès lors, il faut que la Commission s'engage avec conviction à faire respecter la législation communautaire en matière de protection commerciale en prenant des mesures fermes à l'encontre des marchandises subventionnées et vendues en dessous du prix de production, à contester et agir contre les mesures protectionnistes non justifiées, ainsi qu'à intensifier le dialogue avec les principaux partenaires commerciaux de l'UE afin de résoudre les différends commerciaux.

2.   Observations préalables

2.1

Les secteurs manufacturiers et des services représentent l'épine dorsale de l'économie de notre continent. La réalisation du marché unique a permis un développement considérable de ces secteurs, selon des règles et des normes communes.

2.2

Les secteurs manufacturiers et des services doivent faire face à des défis exceptionnels:

la catastrophe financière qui a envahi, avec une violence et une simultanéité inouïes, la totalité de l'économie mondiale et a sapé la crédibilité et la fiabilité des marchés;

la nouvelle répartition internationale du travail, et ses inévitables rationalisations et restructurations industrielles, imposées par le nouveau marché mondial, sur lequel sont entrés pleinement les continents nouvellement industrialisés, avec toutefois moins d'entraves;

les changements climatiques et l'environnement, avec l'objectif incontournable, pour la santé des citoyens, de la protection de l'écosystème et du développement durable; la réalisation de cet objectif passe par une amélioration de l'efficacité énergétique et la modernisation des cycles productifs au moyen de nouveaux produits et procédés reposant sur des technologies propres;

le capital de ressources humaines, avec le vieillissement de la population et les flux migratoires importants, qui demandent une flexibilité et une mobilité professionnelles accrues ainsi que des processus de formation permanente sur la base de profils plus qualifiés, afin de garantir une meilleure qualité de vie et du travail;

les carences en matière de gouvernance, au niveau mondial et européen, avec des institutions, des capacités décisionnelles et des règles inappropriées, comme le démontre l'actuel système monétaire international et la crise de la construction européenne;

les disparités régionales qui s'aggravent au sein de l'UE;

la pénurie des ressources disponibles, à la fois dans les budgets publics et dans ceux des entreprises, en raison de laquelle il pourrait être impossible de financer de manière appropriée les réformes nécessaires à la relance de l'économie et de l'emploi.

2.3

La récession mondiale actuelle risque d'intensifier les efforts que ces secteurs doivent fournir pour:

s'adapter à la nouvelle répartition internationale du travail;

assurer la protection de l'écosystème et le développement durable;

se repositionner vers de nouvelles technologies de produits et de processus;

garantir des emplois plus nombreux et de meilleure qualité, avec des profils et un professionnalisme de plus en plus pointus.

2.4

Les crises actuelles représentent pour les entreprises un défi qu'elles devront relever pour pouvoir survivre, mais leur offrent également d'énormes possibilités de développement et d'innovation. Cependant, les entreprises ne doivent pas être livrées à elles-mêmes: il convient d'encourager l'esprit d'entreprise et la création d'emplois, tout en mettant en œuvre, au plus vite, des réformes pour améliorer l'environnement dans lequel travaillent les entreprises, en réduisant les charges administratives inutiles, en préservant et en améliorant le marché intérieur, en soutenant le capital-risque, en stimulant l'innovation et la «flexicurité», en légiférant moins et mieux et en investissant dans les relations entre le monde universitaire et scientifique et les entreprises, ainsi que dans l'éducation et la formation des ressources humaines, surtout dans les branches technico-scientifiques et dans le développement des marchés porteurs.

2.5

Le CESE souhaite insister sur l'importance de mettre en lumière la situation actuelle et les éventuelles perspectives d'avenir des principaux secteurs manufacturiers, des services et du tourisme en particulier, compte tenu de divers aspects fondamentaux, étroitement liés entre eux:

la dimension internationale: la crise s'est développée dans des circuits internationaux intégrés, qui ont pu recourir à des instruments innovants échappant totalement aux pouvoirs de réglementation et de contrôle des différents marchés et du marché international dans son ensemble; elle s'est superposée au processus d'adaptation de l'Europe à un scénario de référence mondial selon lequel en 2020, les pays BRIC (11) atteindront, voire dépasseront la part de 30 % du PIB mondial;

la dimension institutionnelle: les mécanismes institutionnels nationaux, régionaux et internationaux de gouvernance se sont avérés tout à fait insuffisants pour diagnostiquer préventivement les pathologies, définir anticipativement les moyens et instruments en mesure d'empêcher la contagion en chaîne dans les différentes économies régionales et nationales, et développer des anticorps capables de limiter les dégâts;

la dimension sociale: en mars 2009, le taux de chômage dans la zone euro a atteint 8,9 % (7,2 % en mars 2008) et 8,3 % dans l'UE-27 (6,7 % en mars 2008), tandis que le taux de chômage des jeunes de moins de 25 ans s'élevait à 18,1 % dans la zone euro et à 18,3 % dans l'UE-27 (12);

la dimension «économie réelle»: en décembre 2008, la production manufacturière a baissé de 12,8 % par rapport au même mois de 2007 dans l'UE-27, et de 6,7 % dans le secteur de la construction; les échanges intracommunautaires ont diminué de 13,7 % et les exportations communautaires des secteurs manufacturiers ont baissé de 5,8 % (13). Les baisses de production ont concerné en particulier les secteurs de la chimie et du textile, des véhicules à moteur et des métaux, et les exportations ont fortement diminué dans les secteurs tels que l'automobile, les produits chimiques, les télécommunications, le segment des équipements de radio et de télévision; dans le secteur des services, le tourisme a été fortement touché (14).

la dimension environnementale: l'efficacité énergétique, la lutte contre les changements climatiques et l'utilisation durable des ressources sont des enjeux auxquels il convient de s'attaquer d'urgence, pour la sauvegarde et le développement de la planète et en particulier pour l'Europe, la santé de ses citoyens, la protection de l'écosystème et l'économie dans son ensemble (avec des retombées importantes sur sa compétitivité), en définissant notamment un cadre réglementaire clair, stable et harmonisé.

3.   La dimension internationale

3.1

Aux États-Unis, le PIB a diminué d'1 % au quatrième trimestre 2008, après une baisse de 0,1 % au trimestre précédent. Au Japon, le PIB a diminué de 3,3 % au quatrième trimestre 2008, après une baisse de 0,6 % au trimestre précédent. Le PIB de la zone euro a quant à lui diminué d'1,5 % au quatrième trimestre 2008, après une baisse de 0,2 % au trimestre précédent (15).

3.2

Le taux de chômage croît rapidement et tend à se rapprocher des 12 % pour la fin 2010, selon l'OCDE. Dans le même temps, les salaires augmentent plus lentement ou restent inchangés.

3.3

Comme le souligne la Commission (16), «Tant que le crédit sera accordé avec parcimonie, les efforts visant à stimuler la demande et à restaurer la confiance des consommateurs resteront improductifs. (…) La crise à laquelle nous sommes confrontés est mondiale, et la reprise ne sera un fait que si les principaux acteurs du monde économique croissent et commercent à nouveau ensemble».

3.4

La Confédération européenne des syndicats (CES) est du même avis: «La situation économique se détériora probablement, et elle ne s’améliorera que si la manière de penser change radicalement: loin de la notion réconfortante mais irréaliste du retour au «business as usual”, nous avons besoin d’une nouvelle réalité économique basée sur les personnes, l’innovation et le développement durable. Nous avons également besoin d’une revalorisation du rôle du gouvernement:

dans la régulation des marchés

dans le service public

et dans la lutte contre les inégalités des salaires» (17).

3.5

Lors du sommet du G20 qui s'est tenu à Londres le 18 mars 2009, la Fédération des entreprises européennes (BusinessEurope) a souligné que «la crise financière a un effet dévastateur sur les entreprises, dans la mesure où les principaux moteurs de la croissance sont touchés par des restrictions en matière d'accès au financement. (…) Une stimulation économique s'impose pour éviter l'effondrement économique mondial» (18).

4.   La dimension institutionnelle

4.1

L'on constate un consensus de plus en plus large et une convergence des forces de plus en plus marquée pour mettre en place des mesures exceptionnelles et des réponses politiques d'urgence, au-delà des règles existantes, en vue de préserver à tout prix des entreprises, des secteurs manufacturiers, des activités de production et de services, l'emploi, les revenus et la consommation des familles.

4.2

La politique qui consiste à tenter de limiter les conséquences de la crise sur le plan économique, social et de l'emploi en déchargeant sur ses voisins les tensions accumulées au niveau interne n'est non seulement pas la bonne solution, mais risque également de précipiter les économies dans un nationalisme et un protectionnisme qui détruiraient les cadres de coopération internationale et d'intégration régionale construits péniblement ces dernières années, en Europe et dans le monde.

4.3

Quelles que soient les mesures prises pour faire face à la crise actuelle, le CESE considère dans ce cadre comme fondamental et incontournable:

de lancer un nouveau cadre de coopération internationale et mondiale, reposant sur des règles transparentes, qui permette de supprimer préventivement les pathologies, même latentes, du système économique, monétaire et financier international, tout en préservant la totale liberté des échanges dans le commerce international;

d'étudier immédiatement la possibilité d'un nouveau contrat social avec le secteur financier, d'une forte re-réglementation et d'une meilleure supervision du marché financier international, ainsi que d'un meilleur contrôle public sur les programmes de relance, afin de veiller à ce que l'aide financière arrive aux travailleurs, aux consommateurs et aux entreprises, tout en préservant la liberté des échanges internationaux;

de préserver les fondements de l'UE, en ce qui concerne:

l'unicité d'un marché européen;

la libre circulation des personnes, des biens, des capitaux et des services;

le développement et la pleine application des politiques communes, et en particulier de la politique de la concurrence;

la liberté d'entreprise et la sauvegarde du modèle social européen;

de mettre en œuvre des politiques publiques coordonnées, proportionnées, transparentes et dégressives dans le temps, pour réduire les risques systémiques;

de sauvegarder et d'améliorer la compétitivité et la consistance des secteurs manufacturiers et des services européens;

de développer l'économie de la connaissance;

d'améliorer les compétences des ressources humaines et managériales;

d'améliorer la qualité des produits et des processus destinés à la protection environnementale, à l'efficacité énergétique et à l'utilisation des matériaux et d'établir des conditions-cadres pour leur diffusion sur le marché;

de soutenir le développement d'un territoire socialement responsable (TSR);

de ne pas augmenter la charge administrative et réglementaire pour les entreprises européennes;

de développer une approche coordonnée en matière de réglementations internationales sur les produits (IPR) (19);

d'améliorer l'accès au crédit, en particulier pour les PME.

4.4

Le CESE est convaincu que la crise actuelle devra aboutir à un saut institutionnel vers une plus grande intégration économique, axée sur un développement économique de qualité, des emplois plus nombreux et plus qualifiés.

4.5

Le CESE estime cependant qu'un saut qualitatif vers une intégration politique accrue du continent est encore plus important; il pense en effet que c'est là le seul moyen de parvenir à un compromis entre l'abandon des égoïsmes et des priorités nationales et un avenir commun.

4.6

Le CESE est convaincu qu'il est possible de rebâtir les fondements d'une relance de l'économie européenne, sur la base d'un renouveau de la construction européenne, dans l'esprit qui fut celui de Jean Monnet au moment de l'entrée en vigueur et de la mise en œuvre du traité de Paris à l'origine de la CECA.

4.7

Il convient d'achever rapidement le processus de ratification du traité de Lisbonne, afin de garantir une architecture de la construction européenne qui permette à l'Europe de réagir au moyen de politiques mieux coordonnées.

5.   La dimension sociale de la crise: incidence sur les travailleurs, les entreprises et les familles

5.1

Au cours des derniers mois, l'on a constaté une augmentation brutale des restructurations d'entreprises. Nombre d'entre elles ont lancé des plans de licenciement qui ont de graves conséquences sociales, notamment pour l'avenir des jeunes (20). D'autres entreprises se sont déclarées en faillite.

5.2

Le CESE est convaincu que les ressources humaines seront la clé de voûte de la reprise de la compétitivité de l'UE, du point de vue des capacités et des qualifications de la main-d'œuvre comme du nouveau modèle de gouvernance managériale.

5.3

Selon le CESE, l'investissement dans la main-d'œuvre et le maintien de l'emploi sont essentiels pour promouvoir la compétitivité de l'industrie européenne, s'agissant à la fois des qualifications et des nouvelles compétences de la force de travail, et des nouveaux modèles de responsabilité sociale de l'entreprise (21).

5.4

Eu égard à l'ampleur de la crise, les programmes de formation / travail vers des secteurs en expansion, tels que les énergies renouvelables, devraient être mis rapidement à la disposition des travailleurs victimes de la récession.

5.5

Il convient d'envisager l'adoption de mesures de soutien à la consommation des ménages, notamment pour donner un nouvel élan à la demande (22).

6.   La dimension de l'économie réelle: la relance des secteurs manufacturiers et des services

6.1

La désindustrialisation. Peut-être la Commission et de nombreux États membres ont-ils accordé moins d'attention ces dernières années, surtout au tournant du siècle, à la politique industrielle et manufacturière, pour privilégier la richesse découlant du développement de systèmes financiers complexes, soutenus par des modèles avant tout nord-américains.

6.2

En 2005, l'UE a adopté les grandes lignes d'une politique industrielle européenne intégrée basée sur une combinaison d'initiatives sectorielles et horizontales. Ces grandes lignes ont fait l'objet d'un examen à mi-parcours en 2007 intitulé «Contribution à la stratégie pour la croissance et l'emploi de l'Union européenne» (23). En 2008, l'UE a lancé un plan d'action pour une politique industrielle durable (24), sur lequel le CESE a déjà eu l'occasion de se prononcer (25).

6.3

Le rôle clé des entreprises socialement responsables et compétitives, des entreprises de l'économie sociale et du travail de plus en plus qualifié et participatif, doit être placé au centre des politiques de relance des secteurs manufacturiers et des services.

6.4

Il y a lieu de préserver la crédibilité de la stratégie de Lisbonne. Les États membres et les institutions européennes doivent faire preuve de leur capacité à adapter leurs politiques à ce nouveau contexte, en définissant des priorités et de nouvelles méthodes claires en vue de la définition, dans les prochains mois, de la stratégie post-Lisbonne. Il convient d'accélérer les réformes, en définissant des priorités claires et précises, avec des feuilles de route réalisables et vérifiables.

6.5

Selon le CESE, le développement des secteurs manufacturiers et des services en Europe doit passer par une amélioration des processus et des produits. Le CESE demande que l'UE propose une action vigoureuse.

6.6

Le CESE estime que toute stratégie industrielle devrait inclure les éléments suivants:

des investissements importants dans de nouveaux bâtiments et dans la reconversion d'anciens bâtiments en bâtiments durables, en particulier dans le patrimoine architectural public et dans les bâtiments industriels (26)utilisant des matériaux à faible transmission tels que des matières composées de verre ou de la céramique, afin de réduire la consommation d'énergie;

des investissements importants dans l'efficacité énergétique – accroissement de la capacité de production d'énergie à partir de sources renouvelables et développement de technologies de capture et de stockage du CO2;

des investissements dans des programmes de transport à faible impact sur l'environnement – productions plus locales, meilleure gestion des déchets, conformément à l'initiative européenne en faveur de la voiture verte proposée par la Commission (27);

un meilleur accès du secteur manufacturier aux fonds d'investissement soutenus par le gouvernement, pour contribuer à l'innovation et à la conception de technologies et processus propres dans le secteur de l'automobile et dans la métallurgie, en reprenant et en développant l'initiative de la Commission concernant les usines du futur (28);

une impulsion en faveur des infrastructures matérielles et immatérielles de réseau, au niveau européen, et en particulier à la diffusion des technologies de l'information à large bande, avec un renforcement de l'initiative européenne «i2010». Cette dernière promeut l'infrastructure et l'investissement intelligents en vue de renforcer l'intégration d'une UE élargie.

6.7

Il y a lieu de se pencher sur la situation spécifique des PME, en particulier en ce qui concerne leurs difficultés pour accéder au crédit et à des prêts. Actuellement, les fonds réservés aux PME n'atteignent pas leurs objectifs.

6.8

L'initiative «Small Business Act», sur laquelle le Comité a pu se prononcer (29), «n’est pas à la hauteur de cet enjeu, en particulier dans le contexte des difficultés économiques et financières actuelles», car elle n'est pas dotée de moyens financiers adéquats. Il est néanmoins important de garantir que le Small Business Act soit appliqué pleinement, dans les délais et de manière systématique dans les États membres.

6.9

Outre l'accès au crédit, les éléments suivants revêtent une importance capitale, d'autant plus dans la situation actuelle, comme l'a rappelé à plusieurs reprises le Comité:

l'adoption du statut de la société privée européenne, urgente pour les PME (30), dans le respect des droits des travailleurs;

la révision de la directive européenne sur les retards de paiement;

la promotion du rôle des zones industrielles comme moteurs du développement du territoire, avec la création de «zones d'activités productives fonctionnelles» au niveau européen, particulièrement utiles pour les secteurs manufacturiers et des services;

le lancement d'initiatives communautaires de parrainage des nouvelles PME et des jeunes entreprises, pour augmenter leurs chances de réussite et leur accès aux marchés internationaux;

un examen constant des niveaux de vulnérabilité par secteur, afin de prévenir les «défaillances du marché» y afférentes et de développer des capacités d'anticipation positives.

6.10

Quant aux secteurs spécifiques, la Commission avait déjà défini, après une vaste consultation publique, une série de secteurs manufacturiers sur lesquels il convient de concentrer les actions de relance et de revitalisation. Six marchés ont été définis pour la phase initiale de l'initiative «Marchés porteurs» (31):

santé en ligne;

textiles de protection;

construction durable;

recyclage;

bioproduits;

énergies renouvelables.

6.11

La méthode utilisée par la Commission devrait être étendue à d'autres secteurs. Il conviendrait donc de déterminer dans quels secteurs une action concertée, au moyen d'instruments politiques clés et de conditions-cadres, ainsi qu'une coopération améliorée entre les principaux acteurs concernés, seraient susceptibles d'accélérer le développement du marché sans interférer avec la dynamique concurrentielle (32). Il en va de même pour le développement de l'industrie européenne de la défense qui devrait faire l'objet d'une politique européenne mieux coordonnée, après la création de l'Agence européenne de défense et les avancées enregistrées en matière de sécurité commune (33).

6.12

Pour être efficace, la politique industrielle européenne doit tenir compte du contexte spécifique des différents secteurs: celui des véhicules à moteur (voitures, camions et motos (34), le secteur chimique, le secteur naval, l'industrie charbonnière et sidérurgique, la construction, l'industrie du verre et de la céramique, le ciment, le textile et l'habillement, le secteur agroalimentaire, la métallurgie et l'électromécanique, le secteur aérospatial, l'informatique et les télécommunications, l'énergie, les services de santé, etc.

6.13

Le CESE juge essentiel, notamment pour favoriser l'innovation, de développer ultérieurement les instruments politiques nouvellement créés, tels que les initiatives technologiques conjointes, les marchés publics innovants, et le plan d'action pour la production et la consommation durables.

6.14

Le CESE estime qu'il convient d'accélérer également la libéralisation du marché des services, en particulier en ce qui concerne les prestations des professions libérales et les restrictions qui subsistent en matière de tarifs et de numerus clausus.

6.15

Le Comité réclame avec force une action communautaire visant à soutenir le secteur des services aux entreprises en développant des services et des contenus innovants au profit des citoyens, des consommateurs et des entreprises, en accélérant la transition vers le numérique et la diffusion de la large bande et en éliminant les obstacles à l'administration en ligne et à l'interopérabilité des systèmes.

6.16

Le CESE estime qu'en matière de relations avec le reste du monde, la politique extérieure commune devrait être renforcée et gagner en fermeté.

7.   La dimension durable du développement

7.1

Le CESE a soutenu (35) – et continue à le faire – les initiatives visant à développer des politiques d'exploitation, de production et de consommation durables, totalement intégrées avec les autres politiques communautaires, pour transformer les défis potentiels en débouchés compétitifs.

7.2

Le CESE est convaincu que l'UE doit continuer à orienter son action selon des objectifs ambitieux, mais soutenus par des instruments législatifs et financiers qui, plutôt que de pénaliser la compétitivité de l'Europe en entraînant une augmentation des charges pour les entreprises et les citoyens, favorisent les pratiques vertueuses, ainsi que les processus d'innovation et d'amélioration technologique.

7.3

Le CESE rappelle l'importance de lancer les initiatives adaptées pour que l'UE puisse jouer un rôle de premier plan sur la scène internationale s'agissant de l'efficacité énergétique, de l'augmentation des capacités de production électrique à partir de sources renouvelables et du développement des technologies de capture du CO2.

Bruxelles, le 1er octobre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Sur ce thème, Mario MONTI, ancien Commissaire responsable de la concurrence, a exprimé son inquiétude à propos de la survie du modèle européen, basé sur le marché unique (voir l'article de fond du Corriere della sera du 10 mai 2009).

(2)  Reconnaissance des qualifications, taxation des revenus du capital, prise en compte dans le calcul de la retraite des prestations de travail effectuées dans d'autres pays, etc.

(3)  Voir la plateforme européenne Manufuture (www.manufuture.org) ou bien l'entretien avec Étienne DAVIGNON sur la mise en œuvre du plan qui porte son nom (Bruxelles, le 14 janvier 2008; www.ena.lu).

(4)  Fonds européen d'investissement, financé par la BEI. Voir le premier programme opérationnel du programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (CIP).

(5)  Voir le marché porteur «médecine en ligne» (COM (2007) 860 final – et paragraphe 6.10 ci-dessous).

(6)  Voir l'avis du Comité sur «Les résultats du sommet pour l'emploi» (CESE 1037/2009), pas encore publié au JO.

(7)  Voir les propositions approuvées lors du Conseil européen de Luxembourg, en novembre 1997, sur la réduction, au niveau européen, des tarifs de la TVA pour certaines prestations professionnelles définies par les États membres.

(8)  Viser à ce que tous les pays de l'UE envoient au moins 50 % de leurs étudiants dans l'enseignement supérieur et attirent au moins 25 % des étudiants du supérieur dans les filières techniques, scientifiques et d'ingénieurs (rapport ELECTRA).

(9)  Lettre du président du CESE, M. SEPI, au président de la Commission, M. BARROSO, en vue du sommet social européen de Prague.

(10)  Voir l'avis intitulé «Négociations en vue de la conclusion de nouveaux accords de commerce — Position du CESE», JO C211 du 19.8.2008, pp. 82-89 et l'avis sur «La dimension extérieure de la stratégie de Lisbonne renouvelée» (non encore publié au JO).

(11)  BRIC: Brésil, Russie, Inde et Chine.

(12)  Voir Eurostat, STAT du 30 avril 2009.

(13)  Voir SEC(2009) 353.

(14)  Baromètre de l'Organisation mondiale du tourisme (OMT) des Nations unies paru en juin 2009 (volume 7, no 2).

(15)  Au cours du premier semestre de l'année 2009, le PIB a baissé de 2,5 % par rapport à l'année précédente. En mai 2009, la production industrielle de l'UE s'est contractée de 15,9 % par rapport à 2008 (ce recul a atteint 16,8 % dans le secteur manufacturier). Voir SEC 2009/1088, 20 juillet 2009.

(16)  COM(2009) 114.

(17)  Synthèse de la résolution de la CES sur un Programme européen de relance (5 décembre 2008; http://www.etuc.org/).

(18)  Note publiée par BusinessEurope le 17 mars 2009 en vue du «G20 business event» (18 mars 2009; http://www.businesseurope.eu/).

(19)  IPR: International Product Regulations

(20)  Dans les 27 États membres de l'UE, le taux de chômage des jeunes a atteint 18,3 % au premier trimestre de l'année 2009, ce qui représente 5 millions de jeunes sans emploi; EUROSTAT 23 juillet 2009.

(21)  Cela sera d'autant plus difficile en raison de l'effet produit par le rapport entre les risques et les prêts prévu par l'accord de Bâle II sur les PME. Des mesures devraient être mises en place au niveau européen en vue d'examiner comment ces effets pourraient être atténués.

(22)  Voir l'indicateur de la «confiance des consommateurs» (graphique 6), dans les résultats de l'enquête menée auprès des chefs d'entreprise et des consommateurs («Business & Consumer survey»), DG ECFIN, juin 2009.

(23)  COM(2007) 374.

(24)  COM(2008) 397.

(25)  Voir l'avis sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Plan d’action pour une consommation et une production durables et pour une politique industrielle durable», JO C 218 du 11.9.2009, pp. 46-49

(26)  Rapport emploi 2008-2009, Conseil «Emploi, politique sociale, santé et consommateurs», 9 mars 2009.

(27)  COM(2008) 800, «Un plan européen pour la relance économique».

(28)  Ibidem.

(29)  Voir l'avis CESE, JO C 182 du 14.8.2009, p. 30.

(30)  Voir l'avis CESE sur «L'accès des PME à un statut de droit européen», JO C 125 du 27 mai 2002, p. 100.

(31)  COM(2007) 860.

(32)  Voir les conclusions du Conseil Compétitivité du 4 décembre 2006 sur la politique d'innovation et la compétitivité.

(33)  Voir les avis sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil simplifiant les conditions des transferts de produits liés à la défense dans la Communauté» et sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Défense européenne — Questions liées à l'industrie et au marché Vers une politique de l'Union européenne en matière d'équipements de défense», respectivement publiés au JO sous les références JO C 100 du 30.4.2009, p. 109 et JO C 10 du 14.1.2004, p. 1.

(34)  En particulier le secteur européen de la moto devrait pouvoir bénéficier de mesures de soutien et d'incitation de la part des États membres, à l'instar du secteur automobile, étant donné qu'il a tout autant souffert de la crise actuelle.

(35)  Voir avis du CESE sur les «Modes écologiques de production», JO C 224 du 30 août 2008, p. 1.


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/52


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Travail et pauvreté: vers une approche globale indispensable» (avis d’initiative)

2009/C 318/10

Rapporteure: Mme Nicole PRUD'HOMME

Le 26 février 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l’article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, d’élaborer un avis d’initiative sur le thème

«Travail et pauvreté: vers une approche globale indispensable».

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 1er septembre 2009. (rapporteure: Mme Nicole PRUD’HOMME).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre 2009 et 1er octobre 2009 (séance du 30 septembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 173 voix pour, 2 voix contre et 7 abstentions.

1.   Recommandations

La pauvreté au travail représente, tant pour le salarié que pour certains travailleurs indépendants, un sujet complexe qui fait appel à de nombreux critères interconnectés. Il doit être adopté une approche globale pour trouver les mécanismes efficaces pour surmonter les défis.

1.1

Au cœur du projet européen, placer l’objectif de l’emploi de qualité pour tous au cœur du projet européen.

1.2

Faire de la question des travailleurs pauvres un thème de traitement régulier dans le cadre du dialogue social européen.

1.3

Achever rapidement la mise au point des outils de connaissance pour apprécier toujours plus finement ces situations, dans leurs divergences mais aussi leurs convergences européennes.

1.4

Étudier et établir de nouvelles combinaisons entre protection sociale et emploi, permettant notamment d’assurer des revenus décents pour tout travailleur et de créer ainsi les conditions pour couvrir ses besoins essentiels (logement, soins de santé, enseignement, pour lui-même et ses enfants, etc.).

1.5

Assurer une formation initiale et continue performante pour des emplois de qualité. Prendre des mesures à divers niveaux (national, régional) dans le but de créer un environnement qui évite les départs précoces des jeunes.

1.6

Continuer les efforts et débats autour de la flexicurité, pour trouver ce nouvel équilibre entre flexibilité (souplesse nécessaire pour les entreprises) et moyens réels de plus de sécurité (protection pour les travailleurs) qui empêchent l’accroissement de la pauvreté active et visent à son éradication.

1.7

Envisager dans le cadre de l’année 2010, proclamée par la Commission, Année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, une communication d’information et de mobilisation sur ces questions au niveau de l’Union européenne comme à celui des États membres.

2.   Contexte

2.1

Au niveau de l’UE, il s’est développé tout un ensemble de travaux savants, de propositions, et d’innovations qui, orientés vers les «travailleurs pauvres», démontrent que l’activité n’est pas nécessairement une protection contre la pauvreté, en particulier dans le contexte socio-économique actuel.

2.2

Dans sa «Proposition de rapport conjoint 2009 sur la protection sociale et l’inclusion sociale» (1), fondé sur les nouveaux rapports stratégiques nationaux, la Commission a précisé combien les sujets des travailleurs pauvres et de l’emploi de qualité étaient d’importance. Le sujet et les problèmes concrets qu’il désigne s’inscrivent en bonne place des préoccupations et des actions menées à l’échelle communautaire en termes d’«inclusion active». Il y a là un double souci de lutte contre le dénuement et de soutien au développement d’emplois de qualité pour tous.

2.3

Le thème redouble d’importance dans le contexte de crise: considérable regain du chômage et tensions accrues sur les finances publiques. Il importe toutefois de s’extraire de la conjoncture immédiate pour considérer le sujet comme devant être traité certes dans les circonstances actuelles extraordinaires, mais aussi comme un sujet structurel, au cœur des évolutions positives à souhaiter en matière de protection sociale et de politique de l’emploi, sur le moyen comme sur le long terme.

2.4

La Commission, qui travaille à la production d’un document sur le travail et la pauvreté, a proclamé 2010 Année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale. En effet, près de 80 millions de personnes dans l’UE, c’est-à-dire 16 % de ses habitants, sont directement concernées par la pauvreté. Parmi elles, un nombre conséquent se trouvent en situation de «pauvreté active». 8 % des travailleurs vivent sous le seuil de pauvreté (2).

2.5

Dans son avis sur l’«Année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (2010)» (3), le Comité a précisé qu’en complément de l’indicateur habituel de pauvreté monétaire relative, d’autres indicateurs de pauvreté, démontrant sa persistance et les véritables privations sont nécessaires afin de rendre pleinement compte du phénomène. Au-delà des raffinements techniques, les comparaisons, désormais permises par un accord européen sur une définition, dessinent un portrait clair des tendances.

3.   Définition

3.1

Parler de «travailleur pauvre» exige d’abord que l’on explicite tout à la fois les deux termes, à savoir «travailleur» et «pauvre». La «pauvreté» d’un travailleur dépend, d’une part, du revenu personnel qu’il a obtenu pendant la durée de son contrat de travail (rémunération du travail) et, d’autre part, des ressources matérielles globales de sa famille. Le travail renvoie à l’activité professionnelle individuelle. La pauvreté renvoie à l’insuffisance des ressources du ménage pris dans son ensemble. On peut dans certains cas basculer rapidement d’une situation et/ou d’une impression de non-pauvreté à une situation de pauvreté.

3.2

La pauvreté se définit au niveau du ménage, mais l’activité se définit au niveau des individus. On mêle donc deux niveaux d’analyse. La pauvreté active dépend, d’abord, de la situation d’emploi et des caractéristiques de l’emploi des individus et, ensuite, du niveau de vie du ménage auquel ils appartiennent. Cette double appréciation induit des difficultés. On peut être très faiblement rémunéré mais ne pas compter parmi les pauvres (parce que les autres ressources familiales sont plus conséquentes). À l’inverse, on peut être recensé comme pauvre bien qu’ayant un niveau de rémunération proche du salaire mensuel moyen du pays et considéré comme suffisant au sein de la société à laquelle on appartient. On peut être actif inoccupé (au chômage) et être indemnisé largement au-dessus du seuil de pauvreté. On peut, au contraire, être actif très occupé, mais très faiblement rémunéré, avec de nombreuses personnes à charge, et, en conséquence, se trouver sous le seuil de pauvreté.

3.3

Il s’ensuit que la prise en compte politique des travailleurs pauvres relève à la fois des politiques de l’emploi, des politiques d’assistance et d’assurance sociales, et des politiques familiales.

3.4

Dans le cadre de la stratégie européenne pour l’emploi, elle-même intégrée à la stratégie de Lisbonne, la diminution du nombre de travailleurs pauvres est devenue une priorité de l’Union. Il a donc fallu, à partir de 2003, bâtir un indicateur pour évaluer et comparer. En juillet 2003, dans le cadre de ses travaux relatifs au processus communautaire d’inclusion sociale, le comité de la protection sociale de l’Union européenne a adopté un indicateur commun destiné à évaluer la proportion de «travailleurs pauvres» au sein de l’Union européenne ainsi que quelques-unes des principales caractéristiques sociodémographiques de ceux-ci.

3.5

Selon cette définition du Comité de la protection sociale, le «travailleur pauvre» est une personne qui, durant l’année de référence, est «principalement au travail» (comme salarié ou indépendant) et vit au sein d’un ménage dont le revenu total est inférieur à 60 % du revenu médian national. Il doit avoir été en emploi plus de la moitié de l’année. Précisément, l’indicateur «risque de pauvreté au travail» identifie comme travailleur toute personne ayant été en emploi pendant au moins sept mois sur les douze mois de la période de référence (4).

4.   Évaluation statistique

4.1

La Commission a publié fin 2008 son rapport annuel sur les tendances sociales dans les États membres dans le cadre des objectifs communs de la stratégie de l’Union en matière de protection sociale et d’inclusion sociale (voir annexe) (5). Il en ressort que, fin 2006, 16 % des Européens sont exposés au risque de pauvreté. L’Union compte 8 % de travailleurs vivant en deçà du seuil de pauvreté. Les chiffres varient entre 4 % ou moins (République tchèque, Belgique, Danemark, Pays-Bas et Finlande) et 13 % ou 14 % (respectivement en Pologne et en Grèce) (6). La pauvreté des travailleurs est liée aux bas salaires (définis comme les salaires inférieurs à 60 % du salaire médian), au faible niveau de qualification, aux emplois précaires, à la faible rémunération de certains indépendants et au travail à temps partiel, souvent non souhaité. Cette forme de pauvreté est également liée au statut économique des autres membres du ménage. Dans les foyers avec enfants, note la Commission, le modèle familial à un seul revenu ne suffit plus à mettre le ménage à l’abri de la pauvreté.

4.2

L’indicateur de pauvreté monétaire relative est souvent critiqué car il n’approuve pas vraiment la diversité des situations de dénuement. La pauvreté des revenus n’est naturellement qu’un élément de la pauvreté. D’autres indicateurs sont en cours de développement au sein de l’Union, fournissant une image différente, et complémentaire, des réalités de la pauvreté.

4.3

À côté des mesures de pauvreté monétaire se développent ainsi des mesures de pauvreté en «conditions de vie». À l’échelle européenne est ainsi mesurée la «privation matérielle» (voir annexe). L’indicateur rend compte de la proportion de personnes vivant dans des ménages ne disposant pas d’au moins trois des neuf éléments suivants: 1) capacités à satisfaire des dépenses imprévues, 2) une semaine de vacances par an, 3) capacités de payer ses prêts, 4) un repas avec viande, poulet ou poisson au moins tous les deux jours, 5) un logement au chauffage adéquat, 6) une machine à laver, 7) une télévision couleur, 8) un téléphone, 9) une voiture personnelle. Tous ces éléments de conditions matérielles sont naturellement discutables comme indicateurs. C’est leur agrégation qui donne une image intéressante. Le taux de privation connaît de larges écarts, de 3 % au Luxembourg à 50 % en Lettonie. Ces écarts sont bien plus importants que les écarts de pauvreté monétaire (de 10 % à 21 %).

4.4

L’approche par la privation matérielle transforme radicalement le classement des États membres quand il s’agit de pauvreté. Mais il s’agit bien là de pauvreté en général et non des seuls travailleurs pauvres. Il faudra bientôt pouvoir fournir ce qu’est la situation des travailleurs pauvres, dans chacun des pays, en termes de privation matérielle. Car, fondamentalement, la pauvreté active n’est pas seulement un problème de faiblesse des revenus, mais aussi une question de qualité de vie (professionnelle, familiale, sociale).

5.   Des facteurs de la pauvreté active

5.1

Un des premiers facteurs conduisant à la pauvreté active est la précarité du statut de travailleur. De nombreux acteurs, dont la Confédération européenne des syndicats et les syndicats européens s’inquiètent d’une précarisation accrue du travail. Avec plus de 19,1 millions de contrats à durée déterminée (7) et environ 29 millions de faux indépendants (principalement dans le BTP), ce sont près de 48,1 millions de travailleurs dont le statut se caractérise par un certain niveau d’instabilité. Certes cette population est très hétérogène, au sein des pays voire à plus forte raison entre les pays, mais l’ordre de grandeur est bien celui de dizaines de millions d’actifs confrontés à certaines formes de précarité, pouvant les conduire à la pauvreté active.

5.2

Les employeurs soulignent la complexité de cette question de la pauvreté active, en remarquant d’abord le lien entre le risque de pauvreté et le niveau d’éducation. Les systèmes d’éducation et de formation doivent être plus efficaces et équitables. Il est, en outre, essentiel de «rendre le travail rémunérateur» (8), à savoir assurer un équilibre efficace entre les régimes fiscaux et les systèmes de sécurité sociale.

5.3

La pauvreté active repose sur la faiblesse de la rémunération du travail (qui est souvent inadéquate par rapport à la tâche accomplie) et sur les mutations du modèle familial. Les évolutions familiales, qui affectent à des degrés divers les différents États membres, se caractérisent partout par une instabilité accrue, par des séparations plus nombreuses, et par la croissance du nombre de familles monoparentales, par construction mono-actives et davantage exposées au risque de pauvreté. Le Rapport conjoint sur la protection sociale et l’inclusion sociale 2007  (9) de la Commission indiquait déjà que si l’emploi est le meilleur rempart contre la pauvreté, il ne peut pas être la seule sauvegarde. D’où des actions nécessaires relevant de la solidarité à entreprendre ou à renforcer en direction des familles, des femmes, des jeunes, des étudiants, et des personnes handicapées et âgées, migrants, catégories les plus vulnérables. Il est d’ailleurs à souligner combien la pauvreté active est un déterminant de la pauvreté des enfants.

5.4

La hausse du coût des transports, du logement, des soins de santé, etc. tend également à fragiliser les travailleurs. Elle affecte particulièrement les travailleurs proches du salaire minimum et les classes moyennes inférieures puisqu’ils sont le plus souvent situés en périphérie des zones d’emploi.

5.5

La pauvreté active peut être conséquence du faible niveau de compétences ou d’instruction d’une personne, de son manque de compétences requises pour un travail au salaire adéquat ou de conditions de travail inadaptées. Les groupes vulnérables sont le plus souvent les travailleurs âgés, les jeunes, les femmes, les familles nombreuses, les personnes handicapées, les travailleurs qui ont interrompu tôt leur scolarité et les migrants. Il est ainsi essentiel d’assurer à toute personne handicapée des conditions d’accueil adapté dans l’emploi et d’assurer à chaque enfant un bon départ dans la vie grâce à une scolarisation précoce mais également en s’attaquant au problème de l’abandon scolaire, dont le taux, actuellement de 15 % en Europe, est encore trop élevé.

5.6

Plus au fond et très souvent, la pauvreté active est une résultante du sous-emploi. La pauvreté au travail représente, tant pour le salarié que pour certains travailleurs indépendants, un sujet complexe qui fait appel à de nombreux critères interconnectés. Il doit être adopté une approche globale pour trouver les mécanismes efficaces pour surmonter les défis. Sans politiques globales de croissance et d’adaptation à la mondialisation et maintenant de relance face à la crise, il ne peut y avoir de programmes efficaces de lutte contre la pauvreté active.

6.   Propositions pour une approche globale de la lutte contre le travail pauvre

6.1

Il s’agit en premier lieu de réfléchir en termes macro-économiques afin de lutter contre le travail pauvre. Ce ne sont pas en effet des mesures ponctuelles qui peuvent valablement enrayer la dynamique, notamment dans le contexte de crise. L’emploi et l’activité indépendante, plus précisément l’emploi de qualité pour tous, doit être la priorité de toutes les institutions européennes.

6.2

Des indicateurs fiables. La dynamique de construction d’indicateurs communs et fiables en ce qui concerne les travailleurs pauvres doit se poursuivre. De grands progrès ont été permis grâce à l’investissement européen et à la méthode ouverte de coordination. Il importe désormais d’aller plus loin et d’enrichir la connaissance par des batteries de données plus fournies, tenant compte simultanément de la proportion des travailleurs pauvres, de l’intensité de cette pauvreté, de l’inégalité de répartition des revenus parmi les pauvres (au sein des pays et entre les pays).

6.3

Techniquement, sur ces questions statistiques, il importe de disposer de données nationales, à partir d’un seuil national, mais aussi de données pleinement européennes, à partir d’un seuil européen. Ceci permettrait d’autres classements et d’autres visions que celle aujourd’hui fournie par le seul indicateur qui a été établi.

6.4

Des rémunérations justes et décentes, appuyées sur un dialogue social renforcé. La lutte contre la pauvreté active doit également passer par une politique salariale ambitieuse. Il faut démultiplier et soutenir toutes les initiatives allant dans le sens de la formule inflation+participation adéquate aux gains de productivité du secteur considéré. A ce titre, les négociations salariales, clé de voûte du dialogue social doivent jouer un rôle prépondérant dans la lutte contre la pauvreté active. Au niveau de la branche, au niveau national ou européen, il n’existe pas de véritable incidence pécuniaire pour les entreprises quand les négociations se déroulent bien et donc pas de «prime» au vrai dialogue social. Les progrès autour du travail décent passent par le dialogue social, par l’investissement des partenaires sociaux, par la responsabilité des entreprises, et par les mesures incitatives et correctrices des pouvoirs publics, et actuellement, le rôle des banques auprès des PME. La lutte contre le travail non-déclaré constitue un outil déterminant dans la lutte contre le travail pauvre. D’une part, parce qu’il touche les populations les plus vulnérables (migrants, précaires) mais également parce qu’il peut mener à des situations de quasi esclavage contraire à la Charte des droits fondamentaux.

6.5

Des mécanismes favorisant l’entrepreneuriat et le travail indépendant. De nombreux entrepreneurs et travailleurs indépendants souffrent de la pauvreté au travail, surtout au début de la création de leur entreprise. Il convient de prévoir des mécanismes de soutien car plusieurs de ces PME deviennent par la suite des créateurs d’emplois. Bien que 80 % de la croissance économique provienne du secteur des PME, beaucoup d’entrepreneurs, en lançant leur activité, ne s’attribuent qu’un salaire très faible ou même aucun salaire, exposant leurs familles au risque de la pauvreté.

6.6

Des systèmes de formation ajustés. La formation tout au long de la vie en particulier pour les salariés les moins qualifiés est une condition essentielle dans l’optique d’une amélioration des compétences et d’un accès à un emploi avec un salaire décent pour ces travailleurs.

6.7

Une protection sociale adaptée. La lutte contre la pauvreté active passe par une rationalisation des dispositions à l’œuvre. Les prestations d’assistance doivent pouvoir se combiner plus efficacement avec de nouveaux services de garde d’enfants et d’aide à la mobilité (comme le travail, la mobilité doit aussi payer) qui permettent aux travailleurs pauvres de recouvrer une activité mieux rémunérée.

6.8

En matière de logement, alors qu’il apparaît dans certains pays qu’une partie non négligeable des sans-abri se trouvent être en situation d’activité professionnelle, il importe de mobiliser les ressources du logement social pour que priorité soit faite à ceux qui sont insérés par le travail mais qui risquent leur emploi et leur stabilité relative par la faible qualité, voire par l’absence de logement.

6.9

Prendre en compte l’environnement du travail, et le travail. Concrètement, puisque la pauvreté au travail est pour partie importante liée aux conditions de l’activité professionnelle, il est fondamental d’agir sur des leviers liés à l’environnement du travail: les aides à la mobilité choisie, l’accès à des repas dans des conditions financières ajustées, les conditions de logement, les modes d’accueil pour les enfants. Par ailleurs, l’entreprise qui a fourni le travail devrait être en situation d’examiner par quelles mesures donner à leur contrat de travail de plus grandes conditions de sécurité, et comment ses travailleurs pourraient progresser et augmenter leurs qualifications.

6.10

Informer et mobiliser. Enfin, dans le cadre de l’Année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, la mobilisation de l’opinion publique et des médias s’impose. Analyser le phénomène des travailleurs pauvres, parler des situations humaines dégradantes qu’il engendre et mobiliser les citoyens européens pourraient rompre la détresse dans laquelle se trouvent certains actifs et ainsi contribuer à leur rendre une dignité compromise. Plutôt qu’une communication de compassion, il faut envisager une communication de mobilisation en faveur du travail de qualité, pour tous, afin de promouvoir un modèle social européen éthiquement supérieur.

Bruxelles, le 30 septembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  COM(2009) 58 final.

(2)  Eurostat, Statistics in focus, 46/2009.

(3)  Avis du CESE du 29.5.2008 sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à l’Année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (2010)», rapporteur: M. PATER, corapporteure: Mme KOLLER, (JO C 224 du 30 août 2008).

(4)  Pour plus de précisions et pour des développements conséquents, voir Guillaume ALLÈGRE, «Working poor in the EU: an exploratory comparative analysis», document de travail OFCE, no 2008-35, novembre 2008; Sophie PONTHIEUX, «Les travailleurs pauvres comme catégorie statistique. Difficultés méthodologiques et exploration d’une notion de pauvreté en revenu d’activité», document de travail INSEE, no F0902, mars 2009.

(5)  Rapport conjoint sur la protection sociale et l’inclusion sociale 2008. http://ec.europa.eu/employment_social/spsi/joint_reports_fr.htm.

Voir toutes les données et tous les dossiers issus des travaux de la méthode ouverte de coordination: http://ec.europa.eu/employment_social/spsi/the_process_fr.htm. Pour une perspective européenne récente, avec des portraits de la situation et des préoccupations dans certains des pays de l’Union, voir Hans-Jürgen Andreß, Henning Lohmann (dir.), The Working Poor In Europe. Employment, Poverty and Globalization, Cheltenham, Edward Elgar, 2008.

(6)  Précisons que la pauvreté monétaire se mesure relativement aux échelles nationales. Si le seuil de pauvreté était européen, le classement des pays serait totalement bouleversé…

(7)  Enquête européenne sur les forces de travail – résultats de l’année 2008; http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_OFFPUB/KS-QA-09-033/EN/KS-QA-09-033-EN.PDF (en anglais).

(8)  «Rendre le travail rémunérateur» – Étude entreprise par le Comité de l’emploi et le Comité de la protection sociale sur l’interaction entre les systèmes fiscaux et de sécurité sociale. Voir également l’avis du CESE «Protection sociale: rendre le travail rémunérateur», rapporteure Mme St HILL (JO C 302 du 7 décembre 2004).

(9)  http://ec.europa.eu/employment_social/spsi/joint_reports_fr.htm#2007.


Annexe

Graphique 1. Pauvreté des travailleurs dans l’Union européenne en 2006

Image

Graphique 2. La «privation matérielle» dans l’Union

Part des personnes vivant dans un ménage ne disposant pas d’au moins trois des éléments listés (2006, en %)

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23.12.2009   

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Journal officiel de l'Union européenne

C 318/57


Avis du Comité économique et social européen sur le «Rapport de Larosière»

2009/C 318/11

Rapporteur: Mr NYBERG

Le 23 mars 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le

«Rapport de Larosière».

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», qui était chargée de la préparation des travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 11 septembre 2009 (rapporteur: M. Lars NYBERG).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 30 septembre), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 152 voix pour, 37 voix contre et 15 abstentions.

1.   Synthèse et recommandations

1.1   La crise financière et économique est d'une ampleur telle que l'on n'en a pas vu de semblable en temps de paix depuis les années trente. Toutefois, le présent avis a uniquement pour objet la crise financière et les possibilités d'empêcher que ce qui vient de se produire ne se reproduise. Tel était en effet le mandat confié à ce que l'on appelle «le groupe de Larosière», dont le CESE examine le rapport dans le présent avis. Le signe de l'importance que revêtent ces questions se trouve dans le fait que la Commission a déjà présenté plusieurs propositions, par exemple sur les agences de notation de crédit, sur certaines formes particulières d'activité financière et sur la surveillance financière, qui était le principal sujet de réflexion du groupe de Larosière.

1.2   La cause la plus importante de la crise a été un excès de liquidités, lequel, selon le groupe de Larosière, était en partie dû à une politique monétaire expansive aux États-Unis, des déséquilibres de l'économie mondiale, la relation entre les États-Unis et la Chine en donnant le témoignage le plus manifeste. Une autre explication possible se trouve, selon le CESE, dans le fait que les revenus ont été détournés du travail vers le capital. La répartition des revenus s'est faite plus inégale. Le besoin s'est fait sentir, pour les plus fortunés, de faire fructifier leurs disponibilités accrues. Les actifs réels susceptibles de recevoir leurs placements n'ayant pas augmenté au même rythme, les prix des valeurs mobilières ont subi une pression à la hausse. Le rapport de Larosière rend compte de manière complète de la «bulle» financière, mais il faudrait procéder à une analyse plus approfondie en vue de décisions politiques à venir.

1.3   D'une manière générale, le CESE soutient les 31 recommandations qu'a présentées le groupe, mais il entend élargir la perspective et présenter un certain nombre d'observations et de réflexions complémentaires.

1.3.1

Le groupe de Larosière propose de renforcer les obligations des banques en matière de fonds propres lorsque la conjoncture est bonne, et d'alléger ces obligations lorsque la conjoncture est mauvaise. Vu la difficulté qu'il y a à établir des pronostics économiques dans les périodes de fluctuations conjoncturelles, cette proposition pourrait comporter des risques. En même temps, l'exemple de l'Espagne montre qu'un système d'obligations variables en matière de fonds propres peut fonctionner. C'est pourquoi le CESE est d'avis qu'il est nécessaire d'étudier le moment opportun pour appliquer une telle mesure, avant de pouvoir la mettre en œuvre.

1.3.2

Le CESE est d'avis qu'il est sans nul doute nécessaire de renforcer les obligations en matière de fonds propres et la transparence pour ce qui concerne les opérations hors bilan. Les autorités espagnoles avaient mis en place la réglementation la plus stricte des opérations hors bilan et les banques espagnoles sont celles qui ont été le moins durement frappées par la crise.

1.3.3

Les expressions «hors bilan» et «fonds communs de créances» ont parfois été employées à tort. Des actifs à risques ont été retirés du bilan même de la banque dans le but de contourner les exigences en matière de fonds propres, et quelquefois dans le but d'échapper à l'impôt. Dans ces conditions, le CESE est d'avis qu'une réglementation plus stricte est nécessaire.

1.3.4

Le CESE est d'avis qu'il conviendrait, suite au rapport de Larosière, de poser comme l'une des exigences principales l'obligation de faire apparaître de manière plus visible les éléments de risque que contiennent les actifs des banques. Le CESE approuve l'idée exprimée dans le rapport, selon laquelle les banques et les établissements financiers doivent toujours continuer à assumer une part de risque lors de la revente d'actifs à risques. Il faut que les risques liés aux produits financiers soient clairement visibles. La transparence des produits financiers est nécessaire pour permettre de rétablir la confiance vis-à-vis du marché financier. À cet égard, le CESE souhaite de nouveau attirer l'attention sur l'exemple de l'Espagne. Il ne faut pas que de nouveaux instruments du secteur financier soient utilisés avant d'avoir fait l'objet d'un contrôle de la part d'une autorité monétaire. Il convient de débattre de la question d'instaurer des contrôles de cette nature. Il faut ainsi décider si ces contrôles doivent avoir lieu au niveau national ou si l'on a besoin de créer un système commun de contrôle pour l'ensemble de l'UE. Compte tenu du caractère hautement transfrontalier de l'activité financière, l'essentiel des arguments pèse en faveur d'un système commun.

1.3.5

L'expression de «système bancaire parallèle» désigne différentes formes de prêts qui ne sont pas réglementés. Ces nouvelles formes d'activité de financement ont pu se développer sans réglementation aucune, sans même aucune exigence en matière de réserves. Le CESE partage le sentiment selon lequel il est nécessaire de réglementer également ces formes de financement. Pour les fonds d'investissement aussi, le rapport souhaite la fixation de règles communes, l'établissement de définitions des différents types d'actifs et un contrôle plus strict. Là encore, l'on ne peut qu'approuver.

1.3.6

Le renforcement des exigences en matière de gestion et d'audit est une nécessité. Le CESE est d'avis que les solutions proposées dans le rapport de Larosière n'insistent pas suffisamment sur le rôle des auditeurs. Un système d'audit fonctionnant de manière satisfaisante aurait dû pouvoir atténuer la propagation des actifs à risques. La direction d'un organisme financier doit pouvoir faire confiance à l'audit pour l'évaluation des actifs. Il convient d'intégrer dans la révision de l'accord de Bâle II la question du rôle des auditeurs et celle des méthodes comptables.

1.3.7

Le rapport présente de bonnes recommandations en ce qui concerne les systèmes de primes. Ces systèmes doivent porter sur plusieurs années, s'appuyer sur des résultats concrets et ne pas garantir à priori que les intéressés en bénéficieront. Le CESE juge qu'il est nécessaire de passer de la vision à court terme à une vision à long terme, dans laquelle les primes ne reposent pas sur la spéculation. Dans cet esprit, le CESE soutient l'idée d'une taxation des transactions financières dont le produit pourrait être affecté à l'aide au développement. En outre il conviendrait de poser comme exigence supplémentaire que les systèmes en question ne doivent pas fonctionner par référence à l'évolution générale, mais par référence à la question de savoir si les intéressés ont réussi à faire la différence, dans un sens positif, par rapport à une tendance générale. De plus, il serait souhaitable de déterminer les modalités d'un plafonnement de ces primes afin d'éviter les extravagances qui incitent à la prise de risques inconsidérés. Il convient de prévoir, dans une stratégie de «sortie de crise», que les montants considérables versés aux institutions financières à partir de budgets publics soient remboursés, au lieu de servir à produire de nouveaux gains ou primes élevés.

1.4   La surveillance du marché financier constituait le principal sujet soumis à la réflexion du groupe de Larosière. De l'avis du CESE, la surveillance est aussi d'une importance fondamentale pour garantir qu'il n'y ait pas de nouvelle crise financière. Mais la surveillance nécessite des règles. C'est pourquoi l'on peut considérer comme tout aussi importantes les propositions de modification et de renforcement des réglementations qui figurent dans la première partie du rapport.

1.4.1

Le groupe de Larosière constate la nécessité d'un organisme européen de surveillance du système financier à un niveau global, organisme capable de mettre en garde contre l'existence de risques financiers. Il est proposé que cette responsabilité soit confiée à la BCE (Banque centrale européenne) ou au SECB (Système européen de banques centrales). La mission proprement dite devra être confiée à un conseil spécialement chargé de cette surveillance. Il est bon de rattacher administrativement ce conseil à la BCE, mais au plan formel et pour les besoins de la gestion de la surveillance, c'est le SEBC qui doit être compétent. Il faut absolument que la surveillance soit d'application pour les systèmes financiers de tous les États membres, et c'est le SEBC qui doit désigner les responsables de ce nouveau conseil ou de ce nouveau comité directeur.

1.4.2

Le rapport propose de développer en deux étapes un nouveau système de surveillance microprudentielle, qui comporterait des autorités spécialement chargées respectivement de la surveillance des banques, de la surveillance du fonds d'investissement et de la surveillance du marché des valeurs mobilières. La deuxième étape devra consister à mettre au point des règles fondamentales communes en matière de surveillance et à éliminer les différences d'application d'un pays à l'autre. C'est aussi au cours de cette étape que devront être harmonisées les possibilités de sanctions. Le CESE ne voit aucune raison de retarder tous ces travaux, et c'est pourquoi il apprécie que dans sa communication, la Commission propose de passer sans transition aux préparatifs de mise en place de l'ensemble du système de surveillance microprudentielle.

1.4.3

Des collèges d'autorités nationales de surveillance qui seraient chargés de surveiller les banques ayant une activité transfrontalière risquent, de l'avis du CESE, d'être difficiles à gérer si l'on ne développe pas dans le même temps l'harmonisation nécessaire. Faute de cela, des différences entre les réglementations applicables aux organismes nationaux de surveillance obligeraient dans la pratique les trois autorités à assumer la charge d'une partie de la surveillance.

1.4.4

Il convient que les organes directeurs de ces nouvelles autorités ne se composent pas uniquement de professionnels de la banque. Il conviendrait d'y faire siéger de droit les organisations syndicales, les consommateurs de services bancaires, ainsi que le CESE en tant que représentant de la société civile.

1.5   Au niveau mondial, le rapport attire l'attention sur la nécessité de renforcements de l'accord de Bâle II, de règles comptables internationales, d'une réglementation mondiale des agences de notation de crédit et du marché des produits dérivés, de modifications des modes de gouvernance dans le secteur financier et d'un rôle plus important pour le FMI. La volonté du groupe est de voir supprimer la possibilité d'attirer les opérateurs grâce à la faiblesse de la réglementation du secteur financier. Plusieurs des propositions du groupe ont été adoptées dès la réunion du G-20 à Londres. Le Forum de stabilité financière internationale, qui avait été créé en 1999 dans un but de stabilité financière au niveau mondial, a été transformé en «Financial Stability Board». Le CESE espère que cet organisme sera plus enclin à la transparence et disposera de ressources et de connaissances suffisantes, ainsi que du pouvoir nécessaire pour agir. Le CESE se félicite de ce qu'il soit prévu de doter le FMI de ressources supplémentaires, mais il trouve matière à critique dans les exigences que pose le FMI, car ces exigences remettent en question des parties importantes du modèle social européen. Aussi bien pour cette raison que sous tous les autres aspects, il est d'une importance essentielle que l'UE puisse présenter un front commun au sein du FMI.

1.5.1

Une notion qui est utilisée dans les discussions sur le marché financier est celle d'«examen de résistance» («stresstest»), qui désigne un procédé permettant d'examiner comment le système bancaire d'un pays donné résisterait à une crise du marché financier. Au vu de la crise financière actuelle, l'on comprend aisément quelle pourrait être l'importance d'examens de cette nature. En même temps, la question de savoir dans quelle mesure il convient de rendre publics les résultats se pose de manière décisive. Si le FMI procède à un tel examen et rend publique la constatation que le système bancaire d'un certain pays ne supporterait pas une crise, cela peut déclencher la crise.

2.   Introduction

2.1

La crise financière et économique est d'une ampleur sans précédent en temps de paix. La dépression des années 30 s'est produite à une époque où les économies du monde n'étaient pas aussi intégrées qu'elles le sont actuellement. À cette époque, ce sont principalement les États-Unis et l'Europe qui ont été frappés. Actuellement, l'on se trouve en présence d'une crise qui est, au plus haut point, une crise mondiale.

2.2

Ce qui avait commencé par une crise financière s'est transformé en crise économique accompagnée d'une récession dans de vastes régions du monde. Il s'ensuivra probablement une crise sociale associée à un taux de chômage élevé. L'étendue de ce phénomène sera déterminée par le type de politique que l'on sera en mesure de concevoir pour répondre à la crise. Simultanément, s'est développée une crise politique qui a fait tomber des gouvernements.

2.3

Toutefois, le présent avis a uniquement pour objet la crise financière et les possibilités d'empêcher que ce qui vient de se produire ne se reproduise. Dans le contexte de la crise généralisée, l'objet du présent avis est limité. Il ne s'agit pas de la crise économique. Il ne s'agit pas de mesures destinées à faire échec à la crise financière en cours, telles que, par exemple, l'apport de ressources publiques au secteur financier. Il s'agit seulement de l'avenir, et dans cette perspective, plus particulièrement, de la surveillance du secteur financier.

2.4

Tel était en effet le mandat confié au «groupe de Larosière», dont le CESE examine le rapport dans le présent avis. Le «groupe de Larosière» a élargi le mandat qui lui avait été confié. Cela était nécessaire pour dresser un tableau complet en vue de pouvoir présenter des propositions solidement étayées.

2.5

La crise actuelle a débuté dans le secteur financier. Avant que le «groupe de Larosière» ne rende son rapport, la crise avait pris un tour tellement grave que dans plusieurs cas, la Commission européenne avait déjà présenté des propositions de modifications de la législation. La plus importante est probablement la proposition concernant les agences de notation de crédit. Il a été présenté une proposition de directive concernant des formes particulières d'activité financière. Une communication en date du 27 mai touche à la partie du rapport de Larosière qui concerne la surveillance du secteur financier. Il n'existe que cinq différences entre la communication et le rapport de Larosière, selon l'annexe I d'un document de travail qui accompagne la communication. Ces différences font l'objet d'observations qui figurent aux paragraphes 6.2.4, 6.3.1 et 6.3.5. Le CESE rendra un avis spécialement consacré aux propositions concrètes de textes législatifs qui sont en préparation. Bien que la Commission n'évoque pas dans cette communication le reste du rapport de Larosière, le CESE est d'avis que ces parties du rapport sont tout aussi importantes par rapport au secteur financier de l'avenir.

2.6

Le rapport de Larosière a été écrit par des professionnels de la banque pour des professionnels de la banque, et ceux qui devront reprendre à leur compte les propositions du rapport sont principalement des spécialistes de la banque au sein de la Commission, et des ministres des finances dans les États membres. Le CESE souhaite adhérer aux 31 recommandations figurant dans le rapport, mais il faut élargir le champ de vision. Ce n'est pas à ceux qui, dans la pratique, ont provoqué la crise financière que peut revenir la responsabilité exclusive de résoudre les problèmes actuels. Les consommateurs de services du marché financier sont des individus et des entreprises qui déposent leur épargne et qui empruntent pour réaliser leurs investissements. La fonction du marché financier est de fournir à ces intervenants, c'est-à-dire à la société civile, les meilleurs services possibles. C'est pourquoi, en plus de notre adhésion générale au contenu du rapport, nous voudrions offrir un certain nombre d'observations et présenter quelques propositions complémentaires.

3.   Causes de la crise financière

3.1

L'excédent de liquidités du secteur financier n'a donné lieu à aucune mesure de la part des banques centrales. Seul était pris en compte le niveau des prix, lequel ne justifiait pas d'augmentation des taux d'intérêt. Des liquidités bon marché ont provoqué l'augmentation des cours des valeurs mobilières. Le fait qu'il y ait eu un excédent de liquidités lorsque la crise est survenue est indubitable, de même qu'il est indubitable que le niveau des liquidités est tombé trop bas en raison de la crise. En revanche, il est malaisé de déterminer ce que sont un niveau approprié de liquidités et une masse monétaire appropriée dans des circonstances normales. Le CESE voudrait aussi attirer l'attention sur le dilemme que constitue le fait d'utiliser à la fois l'inflation et une mesure de la masse monétaire comme indicateurs de politique monétaire. Une masse monétaire trop importante doit amener la banque centrale à relever le taux d'intérêt. Si, dans le même temps, l'inflation est faible, cela devrait au contraire amener à baisser le taux d'intérêt. C'est pourquoi le CESE est d'avis que si l'on utilise la masse monétaire, y compris dans des situations compliquées de cette nature, il faut tenir compte des répercussions éventuelles sur l'économie réelle.

3.2

Des décisions politiques consistant à favoriser l'accès à la propriété du logement, indépendamment de la capacité de l'acheteur à payer le prix de ce logement, le faible coût des prêts et de nouvelles formules inventées par les établissements financiers pour combiner différents titres ont eu pour effet de dissimuler des prêts à risques (subprimes). Ces titres se sont répandus sur les marchés financiers mondiaux, étant donné que l'épargne privée, aux États-Unis, au cours de la période 2005 - 2006, a même été négative. Le CESE a formulé des observations à ce sujet en juillet 2008 (1). «La récente crise américaine des prêts hypothécaires à risque (subprimes) a mis en exergue comment la volatilité des prix de l'immobilier conjuguée à des pratiques superficielles d'évaluation du risque-client, en cas de non-paiement de taux disproportionnés par rapport à la valeur de l'immeuble donné en garantie, peut provoquer des crises financières de nature à déstabiliser le système tout entier. Il convient donc que les initiatives prises au sein de la Communauté tirent parti de cette expérience […]».

3.3

En même temps, les déséquilibres du commerce mondial ont créé d'importants excédents dans certains pays (en premier lieu, la Chine), excédents qui servaient à acheter des bons du Trésor américains. De nouvelles combinaisons complexes de titres mobiliers (avec des subprimes) permettaient d'obtenir des rendements élevés; or, l'ensemble du marché financier était à la recherche de rendements toujours plus élevés. Les titres supplémentaires pouvaient servir de base à de nouveaux prêts, de telle sorte que le volume des transactions sur le marché financier augmentait, tout en étant fondé sur des titres présentant davantage de risques. Or, il a existé, au contraire, un sentiment que l'un des objectifs que poursuivaient les nouveaux produits financiers complexes était de bien répartir les risques. L'accroissement du volume des transactions sur le marché financier engendrait en apparence des gains sans cesse plus importants.

3.4

Un instrument à risques garanti par un prêt hypothécaire, qui était difficilement vendable dans le système bancaire, était intégré dans de nouveaux titres négociables (c'est ce que l'on appelle la titrisation) et pouvait, par ce moyen, être revendu. Ce qui a mis fin à cette situation et qui a déclenché la crise est le fait que pendant l'année 2008, les États-Unis sont entrés en récession et ont vu leur taux de chômage augmenter. De nombreux propriétaires de logements n'étaient pas en mesure de payer leurs intérêts. Les banques se trouvèrent contraintes de déprécier leurs actifs et de les vendre. La valeur de ces actifs continua de s'effondrer et la chute s'accéléra. La confiance s'effondra.

3.5

Le rapport de Larosière relève plusieurs phénomènes qui ont rendu tout cela possible:

lorsque tout a commencé, la réglementation internationale de l'activité bancaire s'inscrivait dans le cadre de l'accord de «Bâle I». Ce système encourageait, en pratique, la technique consistant à faire en sorte que les risques ne figurent pas dans le bilan. Ce défaut est partiellement corrigé par l'accord de «Bâle II»;

l'explosion des nouveaux produits financiers complexes qui se négociaient de gré à gré, de telle sorte que les risques devenaient invisibles;

la réglementation de l'activité des établissements financiers se fonde sur une élévation du risque qui s'effectue par l'intermédiaire des agences de notation de crédit;

les agences de notation de crédit donnaient aux actifs qui se sont ensuite révélés être presque sans valeur les mêmes notes qu'aux emprunts d'État. Ces agences sont financées par les établissements financiers qui leur font noter leurs titres!

les organes de direction et de gestion des établissements financiers ne comprenaient pas le risque que comportaient les nouveaux produits financiers complexes;

un manque de réglementation et un manque de surveillance, en l'absence de coordination, à quoi est venue s'ajouter une forte concurrence entre différents centres financiers.

3.6

Le rapport de Larosière laisse sous-entendre une critique à l'adresse des banques centrales, parce que celles-ci n'auraient pas pris de mesures pour contrecarrer la forte augmentation des liquidités.

3.7

Le CESE voudrait cependant aller un peu plus loin dans l'analyse. L'augmentation des liquidités était en partie fonction du déséquilibre de l'économie mondiale. C'est la relation entre les États-Unis et la Chine qui fait apparaître cela le plus clairement: d'une part, un excédent commercial en Chine et une propension à épargner qui était de 30 à 40 % du revenu, pour des raisons de prévoyance en cas de maladie et en vue de la retraite, et d'autre part, un déficit commercial aux États-Unis associé à une épargne inexistante. Une autre explication possible, que n'évoque pas le groupe de Larosière, est le fait que les revenus ont été détournés du travail vers le capital. La répartition des revenus s'est faite plus inégale. Non seulement l'OIT, mais aussi l'OCDE, se sont prononcées pour qu'il soit mis un terme à cette évolution.

3.8

Le besoin s'est fait sentir, pour les plus fortunés, de faire fructifier leurs disponibilités accrues. Les actifs réels susceptibles de recevoir leurs placements n'ayant pas augmenté au même rythme, les prix des valeurs mobilières ont subi une pression à la hausse. Ces raisons qui expliquent les problèmes actuels ne permettent pas de trouver la solution dans une nouvelle réglementation du marché financier, parce que ce qui est requis, ce sont des décisions politiques. Le rapport de Larosière rend compte de manière complète de la «bulle» financière, mais il faudrait donc procéder à une analyse plus approfondie en vue de décisions politiques à venir.

3.9

En définitive, le scénario financier décrit a favorisé la prolifération d'opérations spéculatives n'ayant pratiquement plus rien à voir avec l'évolution des chiffres de l'économie réelle, sans que l'on puisse compter, en contrepartie, sur des instruments internationaux de politique fiscale et monétaire susceptibles de freiner l'expansion de ces opérations. À cet égard, les forums financiers et organismes internationaux n'ont pas écouté les nombreux mouvements sociaux qui, à plusieurs reprises, ont exigé l'adoption de mesures de réglementation, principalement la taxe Tobin.

4.   Politique et réglementation

4.1

Selon le rapport, il y a, à l'origine de la crise, des défaillances du marché, des déséquilibres mondiaux, une mauvaise réglementation et une surveillance faible. Tous ces problèmes ne peuvent pas se résoudre par la réglementation, mais une bonne réglementation reste une condition nécessaire à la solution. Le rapport affirme qu'il faut s'attaquer à tous les problèmes, mais l'on peut se demander dans quelle mesure la réglementation proposée est suffisante. De surcroît, le rapport exprime la crainte qu'une réglementation accrue n'affaiblisse l'innovation financière. Le CESE souhaite rappeler, à cet égard, que les prêts dits «subprimes» et ce que l'on appelle la «titrisation» sont précisément des innovations financières. Et les abus auxquels ont donné lieu certaines de ces innovations sont la cause des problèmes financiers actuels. La réglementation peut parfois aussi favoriser l'innovation financière, comme dans le cas du SEPA (espace unique de paiement en euros).

4.2

Le rapport propose une meilleure coordination entre les banques centrales et les organes politiques qui réglementent le marché financier. Il faut que les banques centrales se consacrent davantage à la prise en compte de considérations macroéconomiques en surveillant mieux le marché financier. Cette proposition, ainsi que l'idée que le FMI doit, lui aussi, se consacrer davantage à la surveillance, sont, de l'avis du CESE, des propositions nécessaires.

4.3

Le rapport formule l'idée que la réglementation politique et l'autorégulation du secteur financier doivent se compléter mutuellement. Étant donné que le contrôle interne n'a pas fonctionné, on dit qu'il faut surveiller l'autorégulation. Mais cela revient alors à estomper, en réalité, la frontière qui existe entre réglementation politique et autorégulation.

4.4

Il n'existe d'ailleurs pas, dans la pratique, de frontière de cette nature. Par l'intermédiaire des accords de Bâle I et Bâle II, les banques fixent, en pratique, elles-mêmes les règles applicables au secteur financier. Pour ce qui est de faire en sorte que les banques et les autres établissements financiers respectent les règles en question, la responsabilité revient soit à ces établissements bancaires et financiers eux-mêmes, soit à l'État dans les cas où ces règles sont instituées par la voie législative. (L'accord de Bâle II est entré en vigueur dans l'UE le 1er janvier 2008, et il n'entrera en vigueur aux États-Unis que le 1er avril 2010.) Le rapport n'aborde pas sérieusement la question de la lacune organisationnelle et démocratique que constitue, sur le marché financier, l'autorégulation. Avec la mondialisation du marché, il conviendrait de faire une place centrale à la question de savoir si les organes politiques disposent d'une influence suffisante.

5.   Recommandations du groupe de Larosière

5.1   Il convient de renforcer progressivement les obligations des banques en matière de fonds propres. Comme la crise bancaire se trouve actuellement dans une phase d'insuffisance de crédits, ce renforcement devra nécessairement avoir lieu plus tard. Le CESE considère qu'il s'agit là d'une exigence nécessaire pour permettre d'éviter qu'à l'avenir, le public ne doive apporter des capitaux lorsqu'une banque rencontre des problèmes de liquidités. Le CESE partage le sentiment selon lequel il convient que l'UE établisse les définitions des obligations en matière de fonds propres.

5.2   Possibilité de modifier les obligations en matière de fonds propres en fonction des conjonctures. Le rapport considère que les banques centrales ne doivent pas seulement prendre en compte l'inflation, mais aussi l'évolution du marché monétaire et du marché du crédit de manière générale. En cas d'augmentation trop forte des crédits, les banques centrales doivent être prêtes à restreindre, pour cette raison aussi, la politique monétaire. La méthode qui est proposée consiste à renforcer les exigences concernant les fonds propres des banques lorsque la conjoncture est bonne, et à alléger ces exigences lorsque la conjoncture est mauvaise. Vu la difficulté qu'il y a à établir des pronostics économiques, cette proposition peut comporter des risques. Dans le cas où, après une période de conjoncture favorable et d'expansion du crédit, l'on renforce les obligations de fonds propres, un renforcement peut, au contraire, aggraver une récession conjoncturelle si la conjoncture favorable tire à sa fin. Cependant, l'exemple de l'Espagne montre qu'un système d'exigences variables en matière de fonds propres peut fonctionner. Le CESE est d'avis que compte tenu des risques liés au choix du moment opportun pour l'appliquer, il est nécessaire de le soumettre à une réflexion.

5.3   Des règles plus strictes pour ce qui concerne les opérations «hors bilan», sous forme de renforcement des obligations en matière de fonds propres et sous forme de transparence accrue. Les autorités espagnoles avaient mis en place la réglementation la plus stricte des opérations hors bilan et les banques espagnoles sont celles qui ont été le moins durement frappées par la crise.

5.3.1

Lorsque les banques procèdent à des opérations hors bilan, il s'agit d'opérations qui sont le plus souvent associées à l'une des innovations du marché financier que sont les «fonds communs de créances» (en anglais: «special purpose vehicles»). Ceux-ci ont souvent pour objet de transférer des actifs à risques en dehors du bilan de la banque, pour ne pas mettre en péril la banque elle-même. Une autre raison peut être la volonté d'échapper à l'impôt. Compte tenu des abus auxquels a donné lieu cette technique, le CESE est d'avis qu'il est nécessaire d'adopter une réglementation plus stricte s'appliquant aussi bien au système des «opérations hors bilan» qu'aux «fonds communs de créances». La réglementation doit avoir pour effet essentiel d'empêcher un opérateur de pouvoir utiliser ces méthodes pour dissimuler quoi que ce soit de son activité.

5.4   Il faut que les risques que contiennent les actifs des banques soient plus clairement visibles. Le CESE considère que cela devrait constituer l'un des impératifs principaux lorsque la Commission, grâce aux travaux qui feront suite au rapport, créera, comme on peut l'espérer, les moyens d'une transparence véritable des actifs des banques.

5.4.1

Le rapport aborde les sujets de la titrisation, du marché des produits dérivés, des fonds d'investissement et du «système bancaire parallèle». Le CESE souhaite une solution globale dans le cadre de laquelle différentes propositions n'amèneront pas à devoir s'accommoder de quelconques problèmes posés par ces valeurs mobilières à risques. Le «système bancaire parallèle» consiste en différentes formes de prêts qui ne sont pas réglementés. Le rapport propose d'élargir le champ d'application de l'accord de Bâle II à ce domaine, ainsi qu'aux fonds spéculatifs, aux banques d'investissement, etc. Il faut voir là une évidence, et il convient que cette proposition fasse l'objet d'une décision immédiate. Ces nouvelles formes d'activité de financement, souvent en marge du système bancaire lui-même, ont pu se développer sans réglementation aucune, sans même aucune exigence en matière de réserves. Pour les fonds d'investissement aussi, le rapport souhaite la fixation de règles communes, l'établissement de définitions des différents types d'actifs et un contrôle plus strict. Là encore, l'on ne peut qu'approuver. Les auteurs du rapport souhaitent que les banques et établissements financiers conservent toujours une partie du risque en cas de revente d'actifs à risques.

5.5   Sous le titre de «gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs», la Commission a présenté le 13 mai une proposition qui porte sur plusieurs de ces nouveaux instruments. Le CESE fera connaître ultérieurement son avis sur cette proposition de directive. En 2006 déjà, le CESE s'était exprimé à propos d'un livre vert sur les fonds d'investissement (2).

5.6   En ce qui concerne les règles comptables, il est proposé, entre autres, que le Conseil des normes comptables internationales (IASB) établisse de nouvelles règles applicables aux nouveaux actifs compliqués. La méthode comptable dite de «valorisation au prix du marché» a fortement aggravé la situation. Lorsque la valeur des actifs s'est effondrée, ces actifs ont été comptabilisés à la valeur du jour. Dans cette situation difficile, la valeur des actifs a même été poussée bien en dessous de ce qui était leur valeur effective. L'autre méthode possible, qui consisterait à évaluer les actifs en fonction de leur prix d'achat, ne peut pas fonctionner non plus dans une telle situation. C'est là que, selon le CESE, l'on dispose à coup sûr d'une latitude permettant d'introduire des innovations.

5.7   Il est permis de se poser la question de savoir quelle est la valeur du procédé consistant à faire circuler de banque en banque des actifs qui comportent des risques cachés. Il est peut-être nécessaire de procéder à un nettoyage parmi les instruments. Les professionnels de la banque parlent souvent de l'importance des innovations sur le marché financier. Est-on allé trop loin sur ce plan? Le CESE invite la Commission à examiner les instruments qui existent, à déterminer leur valeur, ainsi que les risques qu'ils comportent, et à présenter des propositions de nettoyage éventuel ou de définitions d'instruments pouvant continuer à exister. Il n'est pas possible de s'en remettre au seul secteur bancaire pour exercer cette responsabilité. Il faut que la Commission pose les fondations de décisions qui seront prises par le Parlement européen et le Conseil des ministres. Il ne faut pas introduire de complications excessives dans les produits financiers. Les risques qu'ils comportent doivent être clairement visibles. La transparence des produits financiers est peut-être l'élément le plus important pour le rétablissement de la confiance vis-à-vis du marché financier.

5.7.1

À cet égard, le CESE souhaite de nouveau attirer l'attention sur l'exemple de l'Espagne. Il ne faut pas que de nouveaux instruments du secteur financier soient utilisés avant d'avoir fait l'objet d'un contrôle de la part d'une autorité monétaire. Il conviendrait que l'examen de la Commission comporte une réflexion sur les différences qui existent entre les instruments utilisés en Espagne et les instruments utilisés dans d'autres pays de l'UE. En même temps, l'on devrait débattre de la question d'une mise en place généralisée de contrôles de cette nature et, dans le cadre de ce débat, décider si ces contrôles doivent avoir lieu au niveau national ou si l'on a besoin de créer un système commun de contrôle. Compte tenu du caractère hautement transfrontalier de l'activité financière, l'essentiel des arguments pèse en faveur d'un système commun.

5.8   Le CESE approuve la proposition qui est présentée dans le rapport et qui concerne la gestion des risques par les banques: celle-ci doit constituer une fonction séparée, cette activité doit être très valorisée, et il ne faut pas faire confiance autant que cela a été le cas à une évaluation externe des risques (agences de notation de crédit). Il y a naturellement lieu de soutenir les propositions visant à développer la gestion de crise au sein des établissements financiers. La question décisive sera celle de savoir si des recommandations émises dans ces domaines pourront être autre chose que des recommandations. Jusqu'où peut-on aller dans la réglementation de l'organisation interne des entreprises financières? En ce domaine, il n'est probablement pas possible d'aller plus loin que de prévoir que les organes de surveillance doivent pouvoir surveiller l'organisation et rendre publiques leurs critiques.

5.9   Lorsque la crise est devenue aiguë, de nombreux États membres ont renforcé les obligations de garantie prévues par le droit communautaire pour les dépôts bancaires. Les auteurs du rapport souhaitent maintenant une harmonisation des règles, de telle sorte que la protection soit uniforme et le montant garanti suffisamment élevé pour tous les clients des banques. Il faut résoudre le problème de l'existence de filiales d'établissements bancaires qui se trouvent dans d'autres pays, mais où les réserves correspondant à ces garanties doivent-elles être constituées? Le CESE partage cet avis et invite la Commission à présenter dans les meilleurs délais des propositions de nouvelles règles communautaires applicables en matière de garantie des dépôts bancaires.

5.10   Renforcement des exigences en matière de gestion et d'audit des établissements bancaires. Dans le contexte de ce qui s'est produit, il s'agit là d'une exigence nécessaire. Il existait aussi dans les établissements financiers des codes de déontologie. Il semble que dans certains cas, ces codes n'aient influencé en rien les comportements effectifs. En ce qui concerne la compétence personnelle, il peut toutefois être difficile d'élaborer des propositions concrètes. Une nouvelle réglementation et, éventuellement, le retrait de certains instruments financiers du marché devraient faciliter la gestion des banques. Cette gestion devient très pénible à assurer lorsqu'il existe des instruments dont la finalité est de dissimuler des risques. En outre, le CESE est d'avis que les solutions proposées dans le rapport de Larosière n'insistent pas suffisamment sur le rôle des auditeurs. Un système d'audit fonctionnant de manière satisfaisante aurait dû pouvoir atténuer la propagation des actifs à risques. La direction d'un organisme financier doit pouvoir faire confiance à l'audit interne pour l'évaluation des actifs. Il convient d'intégrer dans la révision de l'accord de Bâle II la question du rôle des auditeurs et celle des méthodes comptables. Il serait par ailleurs très positif de permettre à certains acteurs concernés de participer à l'évaluation des politiques et des instruments des institutions financières au travers de la création de comités ad hoc.

5.10.1

Les systèmes de primes qui récompensent le placement d'instruments à risques et à court terme sont l'une des causes importantes du comportement des gestionnaires des établissements bancaires. Le rapport présente de bonnes recommandations en ce qui concerne les systèmes de primes, à savoir que ces systèmes doivent porter sur plusieurs années, s'appuyer sur des résultats concrets et ne pas garantir a priori que les intéressés en bénéficieront. Le CESE juge qu'il est nécessaire de passer de la vision à court terme à une vision à long terme, dans laquelle les primes ne reposent pas sur la spéculation. Dans cet esprit, le CESE soutient l'idée d'une taxation des transactions financières dont le produit pourrait être affecté à l'aide au développement. En outre il conviendrait de poser comme exigence supplémentaire que les systèmes en question ne doivent pas fonctionner par référence à l'évolution générale, mais par référence à la question de savoir si les intéressés ont réussi à faire la différence, dans un sens positif, par rapport à une tendance générale. De plus, il serait souhaitable de déterminer les modalités d'un plafonnement de ces primes afin d'éviter les extravagances qui incitent à la prise de risques inconsidérés.

5.11   Pour ce qui concerne les agences de notation de crédit, il est proposé de charger le Comité européen des régulateurs des marchés de valeurs mobilières (CERVM) de la délivrance à ces établissements de licences d'exercice de leur activité. La Commission a déjà présenté une proposition de règlement sur les agences de notation de crédit. Le CESE a rendu un avis sur cette proposition, dans lequel il recommande l'adoption de la proposition de la Commission (3). Les auteurs du rapport indiquent qu'il faut examiner la question du financement des agences en question. Pour le CESE, l'on peut déjà affirmer clairement que le financement ne doit pas venir des établissements qui font noter leurs instruments de crédit par les agences de notation.

6.   Surveillance

6.1   La surveillance du marché financier constituait le principal sujet soumis à la réflexion du groupe de Larosière. De l'avis du CESE, la surveillance est aussi d'une importance fondamentale pour garantir qu'il n'y ait pas de nouvelle crise financière. Mais la surveillance nécessite des règles. C'est pourquoi l'on peut considérer comme tout aussi importantes les propositions de modification et de renforcement des réglementations qui figurent dans la première partie du rapport.

6.2   Un système européen de surveillance macroprudentielle

6.2.1

Le rapport critique la surveillance qui est pratiquée actuellement en lui reprochant de se concentrer sur chaque établissement financier individuellement, alors qu'il conviendrait au contraire de renforcer la surveillance du système financier dans son ensemble. Les auteurs du rapport voudraient que cette responsabilité soit confiée à la BCE ou au SEBC (Système européen de banques centrales). Dans les cas où il est nécessaire d'exercer une surveillance transfrontalière (pour les établissements financiers qui ont des filiales dans d'autres pays), le rapport préconise de prévoir des possibilités d'arbitrage contraignant.

6.2.2

Le groupe de Larosière constate qu'il est nécessaire de prévoir un mandat formel à confier à un organe européen de surveillance du système financier dans son ensemble, de telle sorte que cet organe puisse donner l'alarme en cas de risques financiers de nature systémique. Il conviendrait de constituer, au sein de la BCE/du SEBC, un conseil spécial indépendant ou un organe directeur spécial et indépendant (European Systemic Risk Council: Conseil européen du risque systémique) chargé de s'acquitter de cette mission. Devront en faire partie, outre les banques centrales, les trois autorités proposées pour assurer une surveillance microprudentielle. Le CESE est en mesure de constater qu'actuellement, les connaissances qui sont nécessaires pour assurer une surveillance macroprudentielle sont très probablement impossibles à trouver réunies où que ce soit. Il faut donc construire ces connaissances pour les besoins de l'activité du conseil en question. Le rapport de Larosière constate aussi qu'il faut faire intervenir la Commission si des risques de nature globale apparaissent dans le système financier.

6.2.3

Le CESE est favorable aux ajouts apportés par le Conseil ECOFIN et par le Conseil européen aux propositions issues de la communication du 27 mai, ajouts dont il résulte que le Conseil général de la BCE siègera au sein du CERS (Conseil européen du risque systémique) avec les organes nationaux de surveillance en tant qu'observateurs, que chaque pays disposera d'une voix et que les recommandations éventuelles passeront par le Conseil ECOFIN. Le Conseil européen a également proposé que le président du CERS soit désigné par le Conseil général de la BCE. Le CESE juge cette disposition appropriée, étant donné que les 27 États membres font tous partie de ce Conseil. Le Conseil européen recommande que les autorités européennes de surveillance disposent également de pouvoirs de surveillance à l'égard des agences de notation de crédit. Le CESE soutient cette proposition qui découle du débat relatif à la proposition de directive sur les agences de notation de crédit, mais souhaite souligner que seule l'une de ces trois autorités peut exercer cette responsabilité.

6.3   Un système européen de surveillance microprudentielle

6.3.1   Pour la surveillance au jour le jour, il est proposé de renforcer, en leur conférant le statut d'autorités, les trois comités actuels qui sont compétents, respectivement, pour la surveillance des banques, la surveillance des compagnies d'assurances et la surveillance du marché des valeurs mobilières. Les réglementations dans ces trois domaines sont suffisamment différentes pour que l'idée d'une fusion des trois comités en une seule autorité ne puisse pas être d'actualité.

6.3.2   Il est proposé que seul le secteur financier soit représenté au sein de ces nouvelles autorités. Comme on l'a déjà indiqué, le CESE est d'avis que l'activité financière n'intéresse pas uniquement ceux qui participent directement à l'exercice de cette activité. Il existe des raisons péremptoires de faire intervenir les organisations de salariés. Il existe des raisons tout aussi péremptoires de faire siéger au sein des autorités en question les consommateurs des services offerts par le secteur bancaire, par le secteur des assurances et par le secteur des valeurs mobilières. À cet égard, il est permis d'établir une comparaison avec ce qu'a proposé l'administration Obama aux États-Unis. Un conseil spécial des clients d'établissements bancaires sera créé dans ce pays et il sera chargé de surveiller l'activité du secteur. Il conviendrait aussi, pour des motifs évidents, de proposer au CESE de siéger au sein de ces autorités, en tant que représentant de la société civile.

6.3.3   Il est proposé, notamment, de charger ces nouvelles autorités de la mission de détecter les différences qui existent, d'un État membre à l'autre, dans l'application des règles communautaires existantes. De l'avis du CESE, il conviendrait que cela amène naturellement la Commission à proposer des adaptations des règles concernées, afin de faire disparaître les différences dont il s'agit.

6.3.4   Le rapport affirme que les États membres doivent disposer d'autorités de surveillance compétentes, ayant aussi la possibilité de recourir à des sanctions dissuasives. Le CESE ne peut qu'approuver cette prise de position, tout en faisant remarquer à quel point il importe que ces autorités soient indépendantes des banques et des établissements financiers. Le Comité invite la Commission à élaborer pour cela des règles communautaires.

6.3.5   Le groupe de Larosière souhaite que les organes nationaux de surveillance assurent la surveillance au jour le jour, mais que les trois nouvelles autorités établissent des normes et coordonnent l'activité. Il faut vérifier que les autorités nationales soient réellement indépendantes. Pour un établissement financier qui exerce son activité dans plusieurs pays, il faudra mettre en place des collèges des autorités nationales de surveillance participantes. Compte tenu de l'expérience vécue jusqu'à présent, il s'est même révélé indispensable de proposer une obligation pour les organes nationaux d'échanger des informations.

6.3.6   Le rapport propose de développer en deux étapes un nouveau système de surveillance microprudentielle. La deuxième étape devra consister dans la mise au point de règles fondamentales communes et dans l'élimination des différences d'application d'un pays à l'autre. C'est aussi au cours de cette étape que devront être harmonisées les possibilités de sanctions. Le CESE ne voit aucune raison de retarder tous ces travaux, et c'est pourquoi il apprécie que la Commission, dans sa communication, propose maintenant de passer sans transition aux préparatifs de mise en place de l'ensemble du système de surveillance microprudentielle.

6.3.6.1

De l'avis du CESE, les collèges d'autorités nationales de surveillance concernées risquent de se révéler difficile à gérer si l'on ne procède pas, dans le même temps, à l'harmonisation qui est nécessaire. Des différences d'importance déterminante entre les règles applicables aux organes nationaux de surveillance obligeraient, dans la pratique, les trois autorités à assumer une partie de la surveillance des établissements ayant une activité dans plusieurs pays.

6.3.6.2

Le CESE appuie pleinement l'invitation faite par le Conseil européen à la Commission de préciser la manière dont le système européen de surveillance financière pourrait, en cas de crise, jouer un rôle important de coordination des autorités de surveillance, dans le plein respect de la compétence des autorités nationales en matière de maintien de la stabilité financière et de gestion des crises pour ce qui est des conséquences budgétaires potentielles et en respectant pleinement les attributions des banques centrales, s'agissant notamment de la fourniture d'une aide d'urgence en cas de crise de liquidité.

7.   Le niveau mondial

7.1

Le groupe de Larosière fait observer qu'au niveau mondial également, l'enjeu est de réglementer le secteur financier, d'exercer une surveillance et de gérer les crises, et que l'on ne dispose pas d'un cadre permettant d'y parvenir. Parmi les souhaits qu'exprime le groupe, figurent des renforcements de l'accord de Bâle II et des règles comptables internationales, une réglementation mondiale des agences de notation de crédit, des modifications des modes de gouvernance dans le secteur financier et un rôle plus important pour le FMI. La volonté du groupe est de voir supprimer la possibilité d'attirer les opérateurs grâce à la faiblesse de la réglementation du secteur financier. L'existence de collèges d'autorités de surveillance des banques est particulièrement importante pour ce qui concerne les banques ayant des activités à l'échelle mondiale.

7.2

L'on pourrait s'attendre à ce qu'il soit difficile de réaliser des changements au niveau mondial. Cependant, plusieurs des propositions du groupe ont déjà été examinées lors de la réunion du G-20 à Londres. Le Forum de stabilité financière internationale, qui avait été créé en 1999, a été transformé en «Financial Stability Board», avec une composition élargie à tous les pays du G-20, plus l'Espagne et la Commission européenne et s'est vu doter de domaines de compétence plus importants et d'un rattachement plus étroit au FMI. Ces changements sont totalement conformes aux recommandations du groupe de Larosière. Le Forum qui existait jusqu'à présent n'avait pas été en mesure d'avertir à un stade précoce des risques existant dans le système financier lors de la crise que nous connaissons actuellement. Le CESE espère que les changements en question rendront cet organe plus enclin à la transparence et que celui-ci disposera de ressources et de connaissances accrues, ainsi que d'une plus grande capacité à intervenir. Il y a lieu aussi de faire observer que la majeure partie des décisions prises à Londres restent encore à mettre en œuvre.

7.3

Une notion qui est utilisée dans les discussions sur le marché financier est celle d'«examen de résistance» («stresstest»), qui désigne un procédé permettant d'examiner comment le système bancaire d'un pays donné résisterait à une crise du marché financier. Au vu de la crise financière actuelle, l'on comprend aisément quelle pourrait être l'importance d'examens de cette nature. En même temps, se pose la question de savoir dans quelle mesure il convient de rendre publics les résultats. Si le FMI procède à un tel examen et rend publique la constatation que le système bancaire d'un certain pays ne supporterait pas une crise, cela pourrait déclencher la crise. Il conviendrait toutefois que ces examens de résistance s'effectuent de la manière la plus transparente possible et puissent devenir un instrument important en matière de surveillance des systèmes financiers nationaux.

7.4

La proposition visant à doter le FMI de ressources supplémentaires pour pouvoir aider les pays confrontés à des problèmes aigus a été, elle aussi, adoptée à Londres. Le CESE s'en félicite, mais trouve matière à critique dans les exigences que pose le FMI, exigences qui remettent en question des éléments à caractère social, ainsi que des parties importantes du modèle social européen. Aussi bien pour cette raison que sous tous les autres aspects, il est essentiel que l'UE puisse présenter un front commun au sein du FMI.

Bruxelles, le 30 septembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 27 du 3.2.2009, p. 18.

(2)  JO C 110 du 9.5.2006, p. 19.

(3)  JO C 277 du 17.11.2009 (ECO/243 – Agences de notation).


Annexe

a l'avis du comite economique et social europeen de la section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale»

Les amendements suivants, qui ont recueilli au moins un quart des suffrages exprimés, ont été rejetés au cours des débats (article 54, paragraphe 3, du règlement intérieur):

Paragraphe 1.2

Supprimer:

«La cause la plus importante de la crise a été un excès de liquidités, lequel, selon le groupe de Larosière, était en partie dû à une politique monétaire expansive aux États-Unis, des déséquilibres de l'économie mondiale, la relation entre les États-Unis et la Chine en donnant le témoignage le plus manifeste. Une autre explication possible se trouve, selon le CESE, dans le fait que les revenus ont été détournés du travail vers le capital. La répartition des revenus s'est faite plus inégale. Le besoin s'est fait sentir, pour les plus fortunés, de faire fructifier leurs disponibilités accrues. Les actifs réels susceptibles de recevoir leurs placements n'ayant pas augmenté au même rythme, les prix des valeurs mobilières ont subi une pression à la hausse. Le rapport de Larosière rend compte de manière complète de la “bulle” financière, mais il faudrait procéder à une analyse plus approfondie en vue de décisions politiques à venir.»

Exposé des motifs

Comme le dit le rapporteur en d'autres endroits de l'avis, et comme mentionné dans le rapport de Larosière, les causes qui ont provoqué la crise sont diverses mais rien ne permet d'affirmer qu'un changement dans la répartition des revenus soit l'une d'elles et aucune étude sur les causes de la crise ne le dit.

Résultat du vote

Voix pour: 68 Voix contre: 121 Abstentions: 15

Paragraphe 1.3.3.

2e phrase. Supprimer, «et quelquefois dans le but d'échapper à l'impôt»:

«Les expressions “hors bilan” et “fonds communs de créances” ont parfois été employées à tort. Des actifs à risques ont été retirés du bilan même de la banque dans le but de contourner les exigences en matière de fonds propres, et quelquefois dans le but d'échapper à l'impôt. Dans ces conditions, le CESE est d'avis qu'une réglementation plus stricte est nécessaire».

Exposé des motifs

La raison principale des opérations hors bilan, comme le dit justement le rapporteur, est la non-consommation des ressources propres. Rien ne permet d'affirmer qu'elles sont réalisées pour échapper à l'impôt, ce qui serait d'ailleurs très difficile même en cas d'opération hors bilan.

Résultat du vote

Voix pour: 65 Voix contre: 125 Abstentions: 12

Paragraphe 1.4.4.

Supprimer:

« Il convient que les organes directeurs de ces nouvelles autorités ne se composent pas uniquement de professionnels de la banque. Il conviendrait d'y faire siéger de droit les organisations syndicales, les consommateurs de services bancaires, ainsi que le CESE en tant que représentant de la société civile. »

Exposé des motifs

Les organes directeurs ne se composent pas uniquement de professionnels de la banque, mais aussi de représentants des autorités monétaires. L'inclusion de nouveaux représentants qui entraveraient le fonctionnement des nouvelles autorités n'est pas non plus justifiée. D'ailleurs, la recommandation 12 du rapport de Larosière indique clairement que les organes directeurs des nouvelles autorités doivent avoir un caractère indépendant et professionnel.

Résultat du vote

Voix pour: 60 Voix contre: 132 Abstentions: 8


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/66


Avis du Comité économique et social européen sur «L’avenir de la politique agricole commune après 2013» (supplément d'avis)

2009/C 318/12

rapporteur: Adalbert KIENLE

Le 24 février 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l’article 29, lettre A, des modalités d’application de son règlement intérieur, d’élaborer un supplément d’avis sur

«L’avenir de la politique agricole commune après 2013».

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 2 septembre 2009 (rapporteur: Adalbert KIENLE).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 30 septembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 167 voix pour, 3 voix contre et 13 abstentions.

1.   Le rôle du CESE dans l’évolution future de la PAC

1.1

Le CESE a la bonne habitude d’étudier les réformes prévues de la politique agricole commune (PAC) de manière approfondie et en temps utile, dans la mesure du possible avant que la Commission européenne ne présente ses communications ou propositions législatives. Avec l’avis exploratoire demandé par la Commission européenne en 2007 sur le thème «Bilan de santé et futur de la PAC après 2013» (1), le CESE a même été la première institution européenne à mener une vaste réflexion sur l’avenir de la politique agricole commune.

1.2

Tant la présidence française du Conseil, au second semestre 2008, que la présidence tchèque, au premier semestre 2009, se sont efforcées de faire progresser les débats sur la configuration de la PAC après 2013, mais jusqu’ici sans résultat. C’est précisément parce que le Conseil «Agriculture» a jusqu’à présent évité de définir les contenus et les modalités de cette évolution que le CESE estime absolument indispensable de publier dans les plus brefs délais un «supplément d’avis» sur les derniers développements importants. Celui-ci permettra de faire le lien entre le «bilan de santé» de 2008 et le débat sur l’avenir de la PAC après 2013. Le CESE juge en outre nécessaire d’élaborer un autre avis approfondi sur l’ensemble de la problématique de la PAC.

1.3

Depuis la décision du Conseil des ministres de l’agriculture sur le «bilan de santé» de la PAC en novembre 2008, les prix sur les marchés agricoles se sont effondrés, parfois brutalement. La chute du prix du lait est particulièrement dramatique. Le CESE est d’avis qu’il convient de vérifier encore une fois si les filets de sécurité, y compris les systèmes de quotas qui existent encore, sont aptes à amortir de telles situations.

2.   Conditions de départ pour l’évolution future de la PAC après 2013

2.1

Depuis la réforme de la PAC de 2005, les paiements agricoles directs sont largement découplés de la production et, dans certains États membres, leur répartition s’effectue, totalement ou partiellement, au niveau régional. Indépendamment des paiements directs, les mesures en faveur du développement rural (FEADER) constituent un deuxième pilier important de la politique agricole de l’UE. Dans une perspective de «multifonctionnalité», les paiements directs visent à rendre l’agriculture à la fois compétitive et durable, socialement et écologiquement.

2.2

Pendant plusieurs dizaines d’années, la sécurité de l’approvisionnement alimentaire du consommateur européen à des prix relativement avantageux a semblé aller de soi et ne poser aucun problème. Cependant, l’on prévoit pour les décennies à venir une tendance mondiale à la hausse des prix des matières premières, agricoles ou non (par exemple, le pétrole). Il faut également s’attendre à une forte augmentation de la volatilité des prix.

2.3

Les amples fluctuations des prix à la production qui ont été observées au cours des deux dernières années pour des produits agricoles de base – avec, récemment, des prix extrêmement bas, par exemple pour le lait et les céréales – devraient être considérées comme un signal d’alarme. À l’avenir, la dimension sociale de la sécurité de l’approvisionnement en denrées alimentaires – en particulier pour les citoyens à faibles revenus – va reprendre de l’importance, notamment parce que les marchés agricoles sont, de manière générale, particulièrement sensibles aux fluctuations de prix qui peuvent avoir une influence négative sur la stabilité de cet approvisionnement comme des exploitations agricoles. En outre, il existe manifestement de graves déséquilibres dans la chaîne de l’approvisionnement alimentaire. Très concentré, le secteur du commerce de détail exerce une forte pression économique sur la production agricole primaire et la chaîne de transformation. Le secteur agricole reçoit une part équitable des marges bénéficiaires au sein de la chaîne de l’approvisionnement alimentaire? La question fait actuellement débat.

2.4

L’Union européenne et les États membres poursuivent des objectifs ambitieux en matière de sécurité de l’approvisionnement alimentaire et de protection de l’environnement, du climat, et des animaux. Il s’agit là d’un volet important du modèle agricole européen. Il a été décidé, lors de la réforme de la PAC de 2003-2005, de lier le paiement unique découplé au respect de normes fondamentales et «des bonnes conditions agricoles et environnementales» (notion dite de «conditionnalité des aides»). Au-delà de ce «socle de référence», il existe des aides agroenvironnementales qui, depuis 2007, ne contiennent plus aucune composante incitative. Il conviendra de développer l’architecture de la politique de soutien pour la période après 2013 en vue d’atteindre les objectifs environnementaux et sociaux dans l’agriculture. Le CESE a insisté à plusieurs reprises sur sa conception de base, selon laquelle il serait erroné d’axer l’agriculture européenne uniquement sur les conditions ou les prix des marchés mondiaux.

2.5

Une dotation financière appropriée sera indispensable pour pouvoir réaliser les objectifs et les missions présentés pour la période entre 2014 et 2020. Les dépenses pour la politique agricole commune représentent actuellement une part de moins de 0,4 % par rapport au produit intérieur brut (PIB) de l’UE. Il conviendra en permanence d’informer les citoyens sur les services essentiels fournis à la société qui sont financés par le budget de la politique agricole commune. La part des dépenses agricoles dans le budget global de l’UE, qui était d’environ 50 % en 1993, passera à 33 % d’ici 2013.

3.   Calendrier prévu pour les débats et les décisions

3.1

Au Conseil, les premiers débats sur la configuration de la politique agricole de l’UE après 2013 ont déjà été menés sous les présidences française et tchèque.

3.2

Sur cette base, la Commission européenne renouvelée soumettra au débat politique, probablement à l’automne 2010, ses premières réflexions (sous forme de communication) sur la politique agricole après 2013. Il conviendra dans ce cadre de se pencher également sur la «révision financière» toujours en suspens. La présentation de la proposition législative sur la PAC après 2013 est attendue pour la mi-2011. Le Parlement, le Conseil et la Commission pourraient alors prendre une décision en la matière au premier semestre 2012.

3.3

Conformément au traité de Lisbonne, le Parlement européen exercera pour la première fois le droit de codécision en ce qui concerne la politique agricole commune. Ce renforcement du Parlement aura une influence fondamentale et positive sur les débats relatifs au développement de la PAC après 2013.

4.   Indications concernant les débat sur le développement futur de la PAC

4.1

Les débats relatifs au développement de la PAC après 2013 doivent, selon le CESE, continuer à reposer sur le modèle d’une agriculture multifonctionnelle, qui soit axée sur le marché tout en servant les intérêts de la société. Depuis 1992, les réformes de la PAC ont tenté d’aplanir le conflit d’objectifs entre, d’une part, une ouverture internationale du marché (à l’enseigne du cycle de Doha de l’OMC) et, d’autre part, les exigences élevées de la société (le mot d’ordre étant la protection préventive des consommateurs, la protection de l’environnement, la protection animale). La poursuite de cette politique agricole au-delà de 2013 continuera de nécessiter un financement suffisant de la PAC.

4.2

L’instrument des paiements directs à l’agriculture gardera sa place essentielle au sein de la PAC. Le CESE est d’avis que la mission de cet instrument devra évoluer si l’on souhaite garantir sa durabilité. Sa fonction de compensation pour les baisses de prix des organisations de marché perdra du terrain. En revanche, il jouera un rôle accru pour assurer la fourniture de services à la société et de biens collectifs. Eu égard à l’actuelle situation de crise et aux fluctuations de prix auxquelles il faut s’attendre sur les marchés agricoles, les missions de stabilisation et de sécurité d’approvisionnement gagnent de l’importance. De la sorte, la PAC profitera aussi aux consommateurs. Il convient également de mieux prendre en compte les aspects relevant de la protection du climat.

4.3

Il conviendrait de maintenir le principe actuel de la combinaison des «premier et deuxième piliers», mais en veillant à améliorer encore la coordination. Il y a lieu d’accorder davantage d’attention à l’uniformité de la mise en œuvre de la PAC dans les États membres, Il s’impose aussi et surtout, s’agissant des mesures de soutien, d’en définir plus précisément les tenants et aboutissants, et les objectifs poursuivis.

4.4

Le CESE espère que les montants des paiements directs, qui, pour des raisons historiques, diffèrent selon les exploitations et les États membres, seront harmonisés après 2013. Il convient à cet égard de définir des critères objectifs tenant compte des diverses situations structurelles, naturelles et agroclimatiques. Il y a lieu de se pencher également sur les écarts importants entre les régions s’agissant de la dotation financière de l’aide au développement rural. De l’avis du CESE, il est nécessaire de veiller à ce que la mise en œuvre de la politique agricole commune ne continue pas à diverger d’un État membre à l’autre.

4.5

Eu égard à la chute brutale des prix sur certains marchés agricoles importants, le CESE espère que des mesures efficaces seront prises pour garantir au secteur agricole une part équitable dans la chaîne de création de valeur.

Le CESE attend en outre des conclusions sur la manière dont les filets de sécurité doivent être adaptés à l’avenir, compte tenu des leçons tirées de la crise de la conjoncture mondiale.

4.6

Le CESE est d’avis qu’il faut continuer à soutenir le processus d’adaptation des exploitations agricoles ou du secteur à l’évolution du marché et de la concurrence, par exemple en octroyant des aides à l’investissement dans l’amélioration de la qualité, la sécurité des aliments ou l’utilisation durable des ressources. Il apparaît toutefois plus important encore de renforcer la position des agriculteurs et des organisations de producteurs sur le marché. La future PAC devra comprendre des outils permettant aux États membres de financer ces priorités avec suffisamment de flexibilité.

4.7

Là où la compétitivité des exploitations agricoles est limitée, par exemple dans les régions défavorisées et les zones de montagne, il convient, selon le CESE, de prévoir des compensations judicieuses, afin de garantir la pérennité de l’exploitation agricole de ces terres. Ainsi, 60 % de l’élevage laitier dans l’UE est pratiqué dans des régions défavorisées, dont, dans 25 % des cas, des zones de montagne; cet exemple montre clairement qu’une mission de soutien des prix par l’État et de régulation des marchés agricoles peut avoir une incidence économique particulièrement forte dans les zones défavorisées.

4.8

Les problèmes démographiques (par exemple les infrastructures et la disponibilité de main-d’œuvre qualifiée) doivent être davantage pris en compte dans le cadre de l’aide au développement rural. Lorsque des productions (par exemple sucre, lait, tabac) sont menacés de mort économique par pans entiers dans certains régions où elles étaient traditionnelles, des mesures d’adaptation particulières sont nécessaires. Les aspects sociaux, tels que la sécurité du travail doivent également être pris en compte.

4.9

Les aides agroenvironnementales risquent, après la suppression officielle des composantes incitatives, d’être marquées par une absence d’orientation. Afin que les agriculteurs continuent à l’avenir d’accorder la préférence à ces mesures de soutien, le CESE réclame, au-delà de l’indemnisation des frais engagés, une récompense efficace des efforts fournis par les agriculteurs pour la protection de l’environnement. De telles rétributions devraient également être prévues pour les mesures actives prises par les agricultures en vue de la protection du climat ou de la protection animale.

4.10

Introduite de manière facultative en 2000, la conditionnalité pour le versement d’aides à la superficie, est devenue obligatoire en 2005. La Cour des comptes européenne en critique la gestion trop superficielle; d’autre part, les agriculteurs et les autorités locales de contrôle en déplorent la charge bureaucratique trop élevée. Le CESE recommande de faire évoluer la situation avec prudence: il convient d’analyser précisément toute proposition de modification de la liste des critères de conditionnalité afin de déterminer si elle aboutira effectivement à une amélioration.

Bruxelles, le 30 septembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 44 du 16.2.2008, p. 60.


III Actes préparatoires

Comité économique et social européen

456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009

23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/69


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen: Vers une stratégie européenne en matière d'e-Justice»

COM(2008) 329 final

2009/C 318/13

Rapporteur: M. PEGADO LIZ

Le 30 mai 2008, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen: Vers une stratégie européenne en matière d'e-Justice»

La section «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 9 septembre 2009 (rapporteur: M. PEGADO LIZ).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 30 septembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis à l'unanimité.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE accueille favorablement la communication de la Commission à l'examen, «Vers une stratégie européenne en matière d'e-Justice», car elle est opportune et a été élaborée et présentée de manière structurée et probante, ce qui a motivé l'initiative du CESE de se prononcer à son sujet, bien que cet avis n'ait pas été sollicité initialement.

1.2

L'accord qui a entre-temps été conclu entre le PE, le Conseil et la Commission (v. résolution du Conseil Justice et affaires intérieures du 28 novembre 2008) sur le plan d'action à mettre en œuvre dans ce domaine jusqu'en 2013 ainsi que les recommandations sur la portée de l'initiative et son développement futur constituent des éléments fondamentaux de pondération qu'il convient de prendre en considération.

1.3

Dans ce contexte, le CESE prend bonne note des orientations définies pour les actions à mettre en œuvre. Il les accompagne toutefois de quelques conditions, en fonction de certains paramètres, et de plusieurs réserves à émettre quant à la façon dont elles seront mises en œuvre et appliquées.

1.4

Il attire dès lors l'attention sur la nécessité d'une délimitation mieux adaptée du domaine propre et spécifique de l'e-Justice dans le cadre d'autres applications des nouvelles technologies de l'information à différents aspects de la citoyenneté et de l'administration publique en général.

1.5

Il attire également l'attention sur les objectifs ultimes de la réalisation de la Justice, dite «Justice juste»: les initiatives louables de simplification et d'uniformisation des actes et procédures doivent effectivement servir les intérêts des citoyens en général et des opérateurs économiques et sociaux en particulier s'agissant de l'accès à la justice, de même qu'elles doivent être acceptées et souhaitées par les professionnels de la justice.

1.6

Il exprime sa crainte quant à la possibilité que toute initiative dans ce domaine n’affecte les droits fondamentaux des citoyens européens, en particulier sur le plan de la protection des données, et recommande vivement que les actions à mener le soient dans le respect des principes structurants du droit dérivant des conventions internationales et du droit national de la procédure civile communs aux États européens.

1.7

Il invite la Commission à ne jamais cesser de tenir compte des spécificités et des caractéristiques propres des différents droits nationaux, lesquels reflètent des modèles culturels et des valeurs nationales qu'il convient de préserver, dans le respect du principe de subsidiarité mais aussi en vue d'un rapport coût/bénéfice équilibré pour chaque nouvelle initiative, conformément au principe de proportionnalité.

1.8

Il recommande dès lors à la Commission de toujours prendre en considération, dans le cadre de la mise en œuvre des différentes initiatives programmées, la perspective de la citoyenneté dans l'application de la justice, de sorte que ce soient les TIC qui servent la justice et non l'inverse.

1.9

Il suggère en particulier de prendre des précautions particulières et de faire preuve d'une prudence accrue en ce qui concerne l'introduction de mécanismes de dématérialisation des procédures judiciaires, de façon à toujours garantir les exigences de forme et de durabilité des supports utilisés, qui sont les garantes de la certitude et de la sécurité juridiques.

1.10

Enfin, il appelle le Parlement européen et le Conseil à suivre de près la mise en œuvre des différentes actions programmées, en surveillant leur application à la lumière des valeurs et des modèles qui ressortent de leurs différentes résolutions, auxquelles le CESE souscrit en tous points.

2.   Introduction et mémoire justificatif

2.1   La question de la justice électronique a été abordée pour la première fois, sous une forme systématique, lors de la présidence italienne de 2003, dans le cadre d'une conférence conjointe avec le Conseil de l'Europe, les conclusions de laquelle furent les suivantes: «enfin et surtout, les discussions relatives aux avantages, aux opportunités et aux dangers de l'Internet ramènent toujours en définitive à notre préoccupation relative aux valeurs et aux droits qui sont inscrits, en particulier, dans les conventions du Conseil de l'Europe sur les droits de l'homme et la protection des données» (1).

2.2   Dans les années suivantes, plusieurs états ont mis sur pied leurs propres systèmes de justice électronique, certains atteignant un niveau élevé d'élaboration théorique et de préoccupation pratique (2), mais de manière non coordonnée.

2.3   Au niveau communautaire, la question a commencé à être envisagée dans le contexte du gouvernement électronique, et en particulier, dans le sillage des documents eEurope 2002 et eEurope 2005 approuvés respectivement lors des Conseils de Feira (2000) et de Séville (2002), et elle a été couverte dans le document de stratégie i2010 (3).

2.3.1

C'est d'ailleurs dans le contexte du 6e programme cadre qu'a été lancé le projet e-Justice. Il s'agissait d'un des premiers «projets intégrés», toutefois assorti d'objectifs très limités et expérimentaux. De manière spécifique, ce n'est cependant que lors de la réunion informelle des ministres de la justice tenue à Dresde en janvier 2007 que la question a été abordée, pour être ensuite développée lors de la conférence «Work on e-Justice» en mai 2007 de Brême (4).

2.4   C'est véritablement lors de la présidence portugaise que la question a bénéficié d'un dynamisme accru (5): lors de la réunion informelle des ministres de la justice et des affaires intérieures des 1er et 2 octobre 2007, au cours de laquelle furent définies les questions centrales des futures options; lors du Conseil «Justice et affaires intérieures» des 6 et 7 décembre 2007, où le point a été fait sur les travaux menés à bien et où la date butoir du premier semestre 2008 a été fixée pour leur terme; et enfin, dans les conclusions du Conseil des ministres du 14 décembre 2007, qui saluent les réalisations enregistrées dans le domaine de la justice électronique et appellent à une poursuite des travaux en la matière.

2.5   C'est dans la foulée de cette présidence que la Commission a élaboré la communication à l'examen, adressée au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen, sans que celui-ci n'en soit toutefois saisi. S'en rendant compte, le CESE a décidé de prendre l'initiative de se prononcer sur la communication.

2.6   Il est certain que tant le Parlement européen (6) que le Conseil (7) ont déjà eu l'occasion de prendre position sur cette communication, et en particulier sur le plan d'action qui y est annexé. Cependant, vu qu'il s'agit d'un programme de mesures à déployer sur un horizon de cinq ans, le Comité juge utile de formuler les observations et recommandations ci-après – dès lors qu’il s’agit du point de vue des représentants de la société civile, que les initiatives à mener à bien intéressent et affectent au plus haut degré –, observations et recommandations qui pourront éventuellement être prises en compte lors de la mise en œuvre des différentes mesures envisagées (8).

3.   Synthèse succincte du document de la Commission  (9)

4.   Observations générales

4.1   Le CESE appuie dans ses lignes générales l'initiative de la Commission, aujourd'hui complétée par les propositions du Parlement européen et par les orientations du Conseil.

4.1.1

Il accompagne toutefois ce soutien de quelques conditions, en fonction de certains paramètres, et de plusieurs réserves.

4.2   Il est avant tout indispensable de délimiter correctement ce que l'on entend par «e-Justice». Quoique pouvant être intégrée dans les notions plus vastes de «démocratie électronique» ou de «gouvernance électronique», dont elle fait partie intégrante, et quoique liée de façon étroite au «droit électronique», qui doit permettre l'accès électronique aux textes légaux et à leur élaboration en temps réel, qu'il s'agisse de droit matériel ou procédural, de «hard law» ou de «soft law», ainsi qu'à la jurisprudence des tribunaux et aux décisions administratives, l'«e-Justice» doit être circonscrite aux aspects judiciaires de l'application de la justice dans les domaines du droit civil, commercial et peut-être administratif, c'est-à-dire aux pratiques et procédures juridictionnelles, y compris la procédure d'arbitrage (10).

4.3   Par ailleurs, il faut bien garder à l'esprit que, dans tout programme sur l'application de la justice, la valeur suprême n'est ni la célérité de la justice, ni son efficacité, ni son coût, ni encore sa simplification, mais la JUSTICE JUSTE (11), assortie du respect intégral des droits fondamentaux, en particulier la protection des données personnelles des citoyens.

4.3.1

On entend ainsi mettre en garde contre tous les excès qui, dans un souci de simplification, d'efficacité, d'économie ou de vitesse, porteraient préjudice à cette valeur fondamentale de la justice et qui, au lieu de faciliter l'accès à la justice, le rendraient plus difficile ou complexe.

4.4   Il est également important qu'une dématérialisation ou simplification souhaitables des actes de procédure, ainsi qu'une uniformisation des méthodes et procédures de travail, ne dénaturent pas ce qui est nécessairement différent, et que ces efforts n'entraînent pas la suppression, avec ce qui est superflu et accidentel, d'éléments essentiels qui n'ont pas à être identiques, et qui ne doivent peut-être pas l'être.

4.4.1

Il est primordial de garantir que tout programme d'application des technologies de l'information satisfasse à la fois les besoins des citoyens européens en général, des opérateurs économiques et sociaux en particulier, ainsi que ceux des praticiens du droit, un tel programme ne pouvant aller à leur encontre.

4.4.2

Il est également indispensable de garantir que tout système introduit ou mis en œuvre ne permette pas d'éventuelles interventions de la part de tiers, que ce soit par fraude ou par simple négligence, susceptibles de remettre en cause la sécurité ou la fiabilité de son utilisation, ou la possibilité de modifier, en tout ou en partie, ses dossiers et leur contenu respectif.

4.5   Une autre préoccupation qui doit être toujours présente concerne différents formalismes qui peuvent paraître excessifs ou inutiles aux profanes, mais qui contribuent de façon essentielle à la façon que le public a d'apprécier les juges et les jugements qu'ils rendent, et constituent des garanties de respect des droits fondamentaux dans l'application de la justice (12).

4.6   Ajoutons que le droit procédural étant en tant que tel subsidiaire au droit matériel, que cela résulte de la diversité culturelle entre États membres, et qu'il n'est de ce fait ni possible ni souhaitable de procéder à son uniformisation, l'on ne peut et l'on ne doit pas uniformiser des aspects fondamentaux et par conséquent différents des procédures juridictionnelles dérivées, sous peine de violer les droits substantiels qu'ils ont pour rôle de protéger et de garantir.

4.7   Le droit (et c'est particulièrement vrai du droit de la procédure) étant un ensemble d'instruments de technique juridique destinés à l'application de la justice par des techniciens du droit, dotés d'une formation spécialisée et d'une expérience professionnelle adéquate, il est naturel qu'un langage technique propre à ces professionnels soit utilisé pour leur définition et leur utilisation.

4.7.1

Une tendance exagérée à la simplicité et à l'accessibilité pour le plus grand nombre peut conduire à une perte de rigueur et de technicité, ce dernier élément ne devant pas nécessairement être identique dans tous les droits nationaux.

4.7.2

Encore une fois, plus qu'une uniformité, c'est un «tableau d'équivalences» ou un «cadre commun de références» qu'il convient de rechercher entre les différents instruments judiciaires.

4.8   Enfin, pour la mise en œuvre efficace de tout système d'application des nouvelles technologies à la justice, il faut au préalable s'assurer qu'il correspond aux besoins et aux objectifs de l'organisation, qu'il soit compatible avec les systèmes informatiques existants, qu'il soit procédé à un audit préalable des procédures en vigueur et que le système soit en mesure de s'adapter rapidement à un coût limité aux nouvelles circonstances et aux nouveaux objectifs.

4.8.1

Il convient d'accorder une attention accrue au rapport coûts/bénéfices global de cette initiative, dans son ensemble et à chaque étape de sa mise en œuvre, d'autant plus que ce rapport n'est pas quantifié par l'étude d'impact de la Commission (étude qui n'est apparemment disponible que dans une seule des langues officielles), dans laquelle il est même reconnu expressément que «des coûts induits sont certains mais ne peuvent être évalués […]» et ne peuvent être déterminés qu'au «cas par cas». Quant aux bénéfices, ils représentent «de manière générale un impact économique qu'il est difficile de quantifier mais qui n'est pas douteux» – ce qui est éminemment subjectif, et difficilement acceptable pour un projet d'une telle envergure (13).

5.   Observations spécifiques

5.1   Un procès étant constitué d'un ensemble d'actes (de procédure) appelés à être documentés pour des raisons de sécurité et de certitude juridiques ainsi que pour la garantie des droits des parties, la question du support durable de l'ensemble du procès peut imposer des limites à l'oralité et à la dématérialisation dans un état de droit.

5.1.1

C'est dans cette perspective que certains aspects des actions envisagées dans la «stratégie globale» doivent être analysés et pondérés.

5.2   S'agissant du portail e-Justice, le CESE entend que ce dernier soit précédé d'une formation rigoureuse de tous les praticiens de la justice (juges, magistrats du parquet, fonctionnaires de la justice, autorités administratives, fonctionnaires gouvernementaux et tous les professionnels du droit), de sorte qu'il puisse s'agir d'un instrument utile et viable pour tous les intéressés.

5.2.1

Le CESE estime que le portail pourra être un centre d'information et de services judiciaires ainsi qu'un espace de liaison très utile entre les citoyens, les entreprises et les praticiens de la justice en vue de contribuer à résoudre les problèmes juridiques.

5.2.2

De l'avis du CESE, le portail peut être un outil utile et viable susceptible d'être utilisé quotidiennement par tous les praticiens de la justice; cependant, il est pour ce faire nécessaire de garantir la fiabilité et l'authenticité des informations qui y seront contenues, de même qu'il est souhaitable qu'il compte différents niveaux d'accès et droits d'accès selon le type d'information en cause, afin de protéger les intéressés.

5.2.3

Il devra également servir de point d'accès à la législation communautaire et nationale, à l'instar du rôle rempli par le réseau judiciaire européen en matière civile et commerciale (14), cet accès devant être libre pour le public et permettre de fournir de meilleurs conseils et une meilleure assistance juridique de caractère générique pour les problèmes juridiques.

5.3   S'agissant de la vidéoconférence, le CESE estime qu'il convient de procéder à un audit rigoureux de tous les tribunaux des États membres (15), de manière à vérifier s'ils disposent ou non du matériel audiovisuel susceptible de généraliser l'utilisation de cette technique. En effet, à l'heure actuelle, il n'est pas certain que tous les États membres aient doté leurs tribunaux du matériel nécessaire pour la vidéoconférence, ni que leurs systèmes soient compatibles, ni même qu'ils fonctionnent correctement (16).

5.3.1

En outre, si l'objectif est de rassembler des preuves par témoins ou de communiquer des actes ou décisions judiciaires, le CESE est d'avis qu'une véritable harmonisation législative est nécessaire en matière de dépositions et de vidéoconférence entre les différents États membres, de sorte qu'il n'y ait pas d’interprétations ni d'applications divergentes de la législation en la matière. En effet, sans ce nécessaire dispositif législatif, la vidéoconférence se heurtera à des obstacles légaux voire culturels dans les différents États membres.

5.3.2

Si la vidéoconférence est adoptée selon les grandes lignes proposées ici, le CESE estime qu'elle devra toujours être requise entre les tribunaux concernés, et dans ce cas, le CESE reconnaît que le portail peut contribuer à cette pratique, dès lors qu'il contiendra tous les éléments nécessaires à cette fin (17).

5.4   S'agissant de la coopération entre autorités judiciaires, et en particulier de l'interconnexion des casiers judiciaires, le CESE entend que cette coopération, vu le caractère sensible de la matière, doit obéir aux exigences les plus rigoureuses de sécurité et de protection des données, de façon à garantir le respect de la vie privée des citoyens concernés (18).

5.4.1

Néanmoins, le CESE est d'avis qu'il faudra également analyser au préalable les législations nationales et les conditions matérielles qui prévalent dans chaque État membre, de façon à ce que n'existent pas dans ce domaine si sensible des applications et des traitements différents dans l'échange d'informations en matière pénale.

5.5   S'agissant de l'aide à la traduction, le CESE attire l'attention sur le fait que le portail e-Justice doit être multilingue, les informations devant être disponibles dans toutes les langues de l'UE. Un système de traduction automatique devra pour être utile permettre la traduction et l'interprétation en temps réel de la page web, de façon à ce qu'elle soit accessible aux citoyens de l'UE.

5.5.1

De manière à aider les praticiens du droit, le portail e-Justice pourra contenir une base de données de traducteurs et interprètes juridiques, de même que tous les formulaires nécessaires, correctement traduits dans la langue propre au système juridique de chaque État membre.

5.5.2

Les énormes coûts que pourrait entraîner un système de traduction automatique et en temps réel efficace dans toutes les langues communautaires doivent être évalués avec soin en termes de faisabilité et de proportionnalité par rapport aux résultats que l'on peut atteindre et à l'utilisation pratique de ce système.

5.6   Certaines initiatives appellent des réserves et des précautions particulières, notamment celles qui portent sur la dématérialisation totale des procédures européennes en matière d'injonction de payer (19) et de petits litiges (20), voire qui envisagent la création de «procédures européennes complètement électroniques», ou encore celles relatives à l'assignation ou à la signification d'actes judiciaires par voie exclusivement électronique, au paiement en ligne des frais de procédure ou à l'authentification électronique de documents.

5.6.1

Dans tous ces cas, le CESE conseille de faire preuve de la plus grande prudence au niveau de leur introduction, et de procéder à une évaluation approfondie du rapport coûts/bénéfices de même qu'il insiste sur la nécessité de longues périodes expérimentales et de test avant leur adoption généralisée, ainsi que sur celle de disposer de garanties absolues quant à leur conformité avec les règles de droit procédural communes à des états de droit.

Bruxelles, le 30 septembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Conférence «Stratégies internet et justice électronique en Europe», Rome, 13 et 14 novembre 2003.

(2)  Force est de citer le cas de la Belgique, où la commission chargée de donner corps au projet e-Justice comptait parmi ses membres certains des plus éminents juristes, universitaires et praticiens du droit, notamment le Prof. George de LEVAL, sur les modes d'introduction d'instance et les moyens de communication entre les acteurs du monde judiciaire, et Yves POULLET, sur le droit de la preuve. Le second exemple est celui du Portugal, où le projet a été le fruit d'une réflexion de fond. «Pour un nouveau système judiciaire: qualité et efficacité dans la gestion des procédures civiles»: dans le cadre de l'Observatoire permanent de la justice portugaise, dirigé par le Prof. Boaventura de Sousa Santos et coordonné par la Prof. Conceição Gomes, une étude approfondie a été menée sur l'introduction des nouvelles technologies aux différents moments et étapes des procédures judiciaires.

(3)  COM(2005)229 final du 1.6.2005. Cf. avis CESE JO C 110 du 8.5.2006, rapporteur: M. LAGERHOLM.

(4)  Il est significatif que le «Programme de La Haye: Dix priorités pour les cinq prochaines années», de 2005, (COM(2005)184 final du 10 mai 2005, ne fasse encore aucunement mention de l'utilisation des nouvelles technologies appliquées à la justice. Le manque d'ambition de ce programme ne manqua d'ailleurs pas d'être souligné dans l'avis du CESE y afférent (rapporteur: M. PARIZA (JO C 65 du 17.3.2006). Cf. le récent rapport de la Commission sur la mise en œuvre du programme de La Haye en 2007 (COM(2008) 373 final du 2.7.2008) qui considère que «le bilan global est plutôt négatif».

(5)  Il convient de se référer à cet égard à la décision 1149/2007/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 septembre 2007 portant création, pour la période 2007-2013, du programme spécifique «Justice civile» dans le cadre du programme général «Droits fondamentaux et justice» (JO L 257 du 3.10.2007).

(6)  Cf. résolution du Parlement européen du 18 décembre 2008, qui contient des recommandations adressées à la Commission en matière d'e-Justice (Rapporteuse: Diana Wallis – 2008/2125(INI) – T6-0637/2008) et avis de la Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (Rapporteur: Luca Romagnoli) du 5 novembre 2008.

(7)  Cf. communiqué de presse relatif à la 2908 session du Conseil «Justice et affaires intérieures» des 27 et 28 novembre 2008 (16325/08), et, pour référence, le doc. 15315/08 du 7 novembre 2008 de la présidence pour le Coreper/Conseil (JURINFO 71,JAI 612, JUSTCIV 239, COPEN216).

(8)  Ce que font clairement apparaître les interventions et discussions qui ont eu lieu lors du Forum sur la coopération judiciaire en matière civile, tenu le 2 décembre 2008 au Parlement européen à Bruxelles, dans le cadre de la présidence française, en particulier celles de la Session II «Justice en ligne - un outil pour les citoyens, les professionnels et les entreprises».

(9)  Afin de limiter la taille de l'avis, la synthèse qui devait reprendre la communication de la Commission n'est pas ajoutée. Le lecteur est renvoyé à ce document ainsi qu'aux résolutions du PE et du Conseil y afférentes.

(10)  À l'exclusion toutefois des mécanismes ADR, lesquels, bien qu'ayant trait à la résolution des conflits, ne relèvent pas de l'application de la justice mais du simple règlement volontaire et extrajudiciaire des litiges.

(11)  Telle qu'elle est exemplairement définie dans le dicton latin: «Justitia est constans et perpetua voluntas jus suum cuique tribuendi».

(12)  On pense ici aux «principes structurants» du droit procédural, parmi lesquelles la garantie d'un procès équitable, l'impartialité du tribunal, l'égalité entre les parties, le principe dispositif et celui de la disponibilité des parties, la garantie d'une procédure contradictoire, la publicité du procès, les règles de recevabilité des preuves, la continuité de la procédure et la garantie de la citation ou notification effective de tous les actes de procédure (cf., pour chacun de ces éléments, Miguel Teixeira de Sousa, «Estudos sobre o Novo Processo Civil», Ed. LEX Lisboa, 1997).

(13)  Cf. Analyse d'impact (SEC (2008) 1947 du 30 mai 2008), paragraphes 5.3.2. et 5.3.3., pp. 30-31.

(14)  En tenant particulièrement compte du fait que, suite à la récente proposition de décision de la Commission modifiant la décision 2001/470/CE, le champ de son utilisation a été exclusivement limité aux professionnels du droit (cf. JO C 175 du 28.7.2009, p. 84, rapporteur: Sánchez Miguel, Conseiller).

(15)  La présidence du Conseil assurée par la République tchèque a entre-temps demandé aux États membres de lui transmettre toutes les informations relatives aux équipements audiovisuels disponibles dans leurs tribunaux et a publié une synthèse de leurs réponses intitulée «Summary of the replies of the EU Member States to the request of the Czech Minister of Justice for information on national videoconferencing equipment in the judiciary».

(16)  La question de l'interopérabilité des systèmes a d'ailleurs été récemment soulevée par la Commission (COM(2008) 583 final), qui a fait l'objet de l'avis du CESE (JO C 218 du 11.9.2009, p. 36, rapporteur: A. Pezzini); nous renvoyons aux observations de cet avis ainsi qu'à l'énumération circonstanciée de différents autres avis émis par le CESE en la matière.

(17)  Il convient de souligner le travail déjà accompli par le groupe «Information juridique» (Justice en ligne) du Conseil, qui comprend notamment le rapport d'activité du 15 mai 2009 sur le traitement des données juridiques (DOC 9362/09), ainsi que le document stratégique sur l'utilisation de la visioconférence (DOC 9365/09), le guide destiné aux utilisateurs (DOC 9863/09) et le livret d'information grand public (DOC 9862/09), tous datés du 15 mai 2009, lesquels reflètent à juste titre des préoccupations identiques à celles exprimées dans le présent avis.

(18)  Cf. avis du contrôleur européen de la protection des données sur la communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen intitulée «Vers une stratégie européenne en matière d'e-Justice», JO C 128 du 6.6.2009, p. 13.

(19)  Règlement (CE) no 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 instituant une procédure européenne d'injonction de payer (JO L 399 du 30.12.2006, p. 1).

(20)  Règlement (CE) no 861/2007 du Parlement Européen et du Conseil du 11 juillet 2007 instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges (JO L 199 du 31.7.2007, p. 1).


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/74


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Des médicaments sûrs, innovants et accessibles: une vision nouvelle du secteur pharmaceutique»

COM(2008) 666 final

2009/C 318/14

Rapporteur: M. van IERSEL

Le 10 décembre 2008, la Commission a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions – Des médicaments sûrs, innovants et accessibles: une vision nouvelle du secteur pharmaceutique»

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 9 septembre 2009 (rapporteur: M. van IERSEL).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre 2009 et 1er octobre 2009 (séance du 30 septembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 170 voix pour, 1 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

La communication (1) vise à établir un programme à long terme pour progresser sur la voie d'un marché unique des produits pharmaceutiques (2), ce qui devrait permettre de créer un environnement durable pour l'industrie pharmaceutique en Europe et dans le monde pour répondre aux besoins accrus des patients.

1.2

Le CESE est convaincu que la communication fournit un cadre indispensable, contenant plusieurs objectifs appréciables. Elle reste cependant assez prudente et ambiguë sur les modalités d'exécution de ce programme.

1.3

L'industrie pharmaceutique dépend beaucoup des conditions de soins de santé et de la situation financière dans les États. Elle doit aussi faire face à des défis liés aux besoins et attentes accrus de la population et des patients ainsi qu'à une concurrence mondiale plus intense. La crise actuelle, associée à la réduction des budgets, influencera également l'avenir du secteur pharmaceutique.

1.4

Selon le CESE, il est dès lors d'autant plus urgent que le Conseil définisse un programme complet pour relever ces défis en se fondant sur des perspectives stratégiques convenues. L'objectif de l'UE devrait être de créer les conditions nécessaires à une position durable de l'industrie pharmaceutique européenne sur notre continent et à son développement dans le monde entier.

1.5

Cette perspective commune implique que les compétences actuelles, souvent nationales, en raison desquelles le libre accès aux médicaments et un marché unique, bien que souhaitable, apparaissent toujours comme une lointaine réalité, soient progressivement remplacées par des pratiques convergentes et des approches communes dans l'intérêt des patients européens, de l'industrie et de l'ensemble de la chaîne des soins de santé.

1.6

Le CESE est d'avis que les législations nationales devraient tenir compte de manière plus explicite de la dimension européenne. Les conditions financières et des soins de santé nationales devraient notamment prendre en compte les coûts et l'importance énormes que représentent dans le secteur une R&D tournée vers l'avenir et l'innovation.

1.7

Le CESE approuve l'initiative relative aux médicaments innovants dans le cadre du 7e programme-cadre. Il est totalement favorable à l'adoption d'un brevet européen, et est aussi partisan d'un système européen de règlement des litiges. Il convient d'améliorer encore le fonctionnement de l'Office européen des brevets.

1.8

Les médicaments génériques offrent la possibilité de réaliser des économies en matière de soins de santé. Le CESE approuve le développement d'un marché compétitif de médicaments non brevetés. Le Conseil devrait envisager des moyens d'en exploiter le potentiel pour réaliser d'importantes économies dans ce domaine.

1.9

S'agissant de la liberté d'accès aux médicaments à un prix abordable, il y a lieu de se pencher à nouveau sur les questions interconnectées induites par les différences significatives des prix des médicaments en Europe, l'accessibilité, le commerce parallèle et le principe de non-extraterritorialité. Ce débat devrait également traiter «d'une proposition comportant des mesures appropriées en vue de supprimer les distorsions ou entraves subsistant, en ce qui concerne la libre circulation des spécialités pharmaceutiques…» (3).

1.10

Pour le moment, le CESE estime qu'il faudrait recourir à la méthode ouverte de coordination et confier le suivi à la Commission, en se basant sur les meilleures pratiques et des données transparentes, comme c'est actuellement le cas dans le cadre de la stratégie de Lisbonne afin de promouvoir une plus grande convergence. Les données devraient comprendre des chiffres et des tendances concernant toutes les parties du monde, ainsi que leur impact et placer les enjeux et les possibilités pour l'industrie dans la perspective appropriée.

2.   Introduction

2.1

En raison des compétences partagées de la Commission et des États membres, une vision européenne globale du secteur pharmaceutique fait défaut depuis longtemps. Les efforts des institutions européennes se sont concentrés principalement sur l'amélioration de l'accès au marché et sur les questions réglementaires.

2.2

La position exceptionnelle du secteur de la santé a été et est à l’origine des réticences rencontrées à l’échelon européen; en outre, les systèmes et les compétences de niveau national prévalent de manière généralisée. Néanmoins, la Commission et les États membres ont souligné de plus en plus la nécessité de conditions-cadre européennes pour certaines questions précises liées aux soins de santé.

2.3

Des conditions et des objectifs européens sont indispensables pour un secteur qui dépend des investissements à long terme fondés sur la recherche et l'innovation. C'est d'autant plus important que:

le secteur pharmaceutique dépend fortement de la R&D et des nouveaux produits innovants;

la concurrence extérieure, y compris celle des pays asiatiques émergents, augmente.

2.4

Le marché unique a besoin d'investissements fondamentaux. Il est aisément compréhensible que la Cour de justice européenne demande dans plusieurs jugements la réalisation d'un marché unique dans ce secteur, en particulier dans l'intérêt des patients. L'existence de 27 systèmes de soins de santé ayant chacun leurs propres traditions, dispositions juridiques et tarification entrave sérieusement ce marché unique.

2.5

En 1996 déjà, le commissaire Bangemann, chargé du développement industriel, a organisé trois tables rondes pour discuter avec tous les acteurs concernés de la réalisation au niveau européen du marché unique des produits pharmaceutiques. Ces tables rondes ont été suivies de nombreuses autres consultations. La composition hétérogène des tables rondes, où figurent des représentants des gouvernements, des entreprises pharmaceutiques et d'autres acteurs concernés, se traduit par une grande diversité de points de vue et d'approches nationales.

2.6

En réponse à ces points de vue et approches, le CESE a présenté à plusieurs reprises de nombreuses propositions concrètes, qui portaient principalement sur la libre circulation des médicaments dans l'UE, la nécessité de contrôler les dépenses pharmaceutiques dans les États membres et la promotion d'une industrie pharmaceutique forte pour la croissance et l'emploi en Europe (4). Il reste encore beaucoup à faire pour progresser dans ces domaines.

2.7

La position des États membres est déterminante. Les caractéristiques structurelles et organisationnelles nationales des systèmes de soins de santé sont décisives pour la tarification et le remboursement en Europe ainsi que pour l'accès aux médicaments.

2.8

Malgré les divergences d'opinions et le maintien des compétences nationales, le Conseil a adopté depuis 1965 une série de mesures législatives relatives à la santé publique et aux médicaments dans le but d'améliorer les conditions contextuelles pour les patients et les soins de santé.

2.9

En 2001, il a été décidé d'améliorer la structure du débat en créant un groupe restreint de parties intéressées, le G-10 (5). En mai 2002, le G-10 a présenté quatorze recommandations générales composant un cadre d'orientation stratégique pour le secteur pharmaceutique. Au cours des années qui ont suivi, plusieurs de ces recommandations ont été mises en œuvre.

2.10

Un forum pharmaceutique de haut niveau a ensuite été créé en 2005 afin de mettre en œuvre les autres recommandations du G-10, et trois groupes de travail ont été chargés d'élaborer de nouvelles recommandations.

2.11

Ce processus a été clôturé en octobre 2008, lorsque le forum a adopté ses conclusions et recommandations sur l'information des patients, l'efficacité relative des médicaments et la tarification/remboursement.

2.12

Ces conclusions et recommandations soulignent l'interconnexion entre d'une part la technologie et l'innovation au sein d'un marché concurrentiel dynamique et d'autre part, des garanties de qualité, le libre-accès aux produits pharmaceutiques, une information fiable des patients et des politiques de tarification et de remboursement efficaces.

2.13

Le forum pharmaceutique conclut qu'une approche approfondie et une vision à moyen et long termes du secteur sont aujourd'hui nécessaires tant pour la stratégie de Lisbonne visant à renforcer la compétitivité européenne que du point de vue de la dynamique et des défis du secteur pharmaceutique au niveau mondial.

2.14

Pour la première fois, le 7e programme-cadre a défini un programme de recherche commun pour l'industrie pharmaceutique. Il prévoit un nombre important de projets pharmaceutiques innovants qui stimulent les réseaux internationaux de recherche existants et potentiels (6).

2.15

Entre-temps, les effets de la mondialisation deviennent palpables. Compte tenu des résultats impressionnants de la R&D aux États-Unis, en Chine et dans d'autres économies émergentes, l'exposition à l'innovation des entreprises européennes de ce secteur sera en fin de compte déterminante pour l'industrie européenne.

2.16

En raison de la crise économique actuelle, le monde aura à l'avenir un autre visage. La situation économique, associée à la réduction des budgets nationaux, ainsi que la position renforcée des autres acteurs mondiaux en Asie, auront une influence sur les conditions concurrentielles. Ces facteurs doivent être dûment pris en compte dans toutes les futures politiques concernant le secteur et l'industrie de la santé.

2.17

Le CESE conclut qu'au cours de la dernière décennie, les réseaux et les échanges se sont intensifiés, ce qui, dans une certaine mesure, a entraîné une convergence de points de vue entre les nombreux acteurs concernés. Malgré ces développements, il reste des points noirs dus aux différences entre les législations et les systèmes de soins de santé. Le libre-accès aux produits pharmaceutiques est limité et il n'existe pas de marché unique pour l'industrie.

3.   Positions de la Commission

3.1

En décembre 2008, la Commission a publié une communication stratégique sur le secteur pharmaceutique qui définit des principes et des objectifs, en esquissant les perspectives du secteur à long terme ainsi que les défis mondiaux.

3.2

La communication établit le cadre des propositions législatives du paquet intégral de décembre 2008 et des propositions futures.

3.3

L'accent mis sur les aspects externes tels que la contrefaçon, le commerce et les nouvelles maladies ainsi que l'importance croissante des économies émergentes constituent également un élément nouveau.

3.4

La communication met en avant trois thèmes, qui font l'objet de cinq propositions législatives accompagnant la communication: la contrefaçon de médicaments, la pharmacovigilance et l'information des patients (7).

3.5

L'importance primordiale de l'industrie pharmaceutique pour l'Europe s'agissant de R&D, de croissance et d'emploi et de santé publique a été une fois de plus soulignée.

3.6

Néanmoins, l'Europe doit relever des défis majeurs dans les domaines sanitaire, scientifique et économique afin de préserver la viabilité et la durabilité de l'industrie pharmaceutique:

l'Europe continue à céder du terrain aux États-Unis et à l'Asie dans le domaine de la R&D et de l'innovation;

des inégalités persistent au sein de l'Union en ce qui concerne la disponibilité et l’accessibilité financière des médicaments;

la division internationale du travail s'accélère, notamment en ce qui concerne la R&D, les essais cliniques, la production et la commercialisation;

de nouvelles percées scientifiques sont nécessaires pour répondre aux défis non relevés en matière de santé publique ainsi que pour ouvrir de nouveaux marchés aux médicaments produits dans l'UE.

3.7

La Commission considère qu'il est grand temps de progresser davantage vers l'amélioration du fonctionnement du marché unique pour les produits pharmaceutiques afin de stabiliser et de renforcer la position de l'Europe sur la scène mondiale.

3.8

À cette fin, 25 objectifs ont été définis concernant (a) un marché unique et durable des produits pharmaceutiques, (b) l'exploitation des possibilités et des défis de la mondialisation, et (c) le renforcement d'un environnement stimulant les sciences et l'innovation.

3.9

La communication à l'examen fournit un aperçu cohérent des défis nationaux et mondiaux et des démarches souhaitables dans un cadre global qui devrait constituer une feuille de route à long terme.

4.   Observations générales

4.1   Le CESE souscrit à la nécessité d'une approche globale en ce qui concerne le secteur pharmaceutique européen qui soit placée dans une perspective mondiale.

4.2   La communication à l'examen est présentée comme une «vision nouvelle». Quelque souhaitable qu'elle soit et en dépit d'une vaste consultation d'un nombre important de parties concernées, le résultat est assez décevant étant donné qu'il n'y a pas d'analyse globale des lacunes du marché unique ni d'approche proactive en termes de recommandations politiques tenant compte des intérêts des patients et de l'industrie.

4.3   L’Europe a perdu du terrain dans le domaine de l’innovation pharmaceutique. La mondialisation du secteur est source de nouvelles perspectives et de nouveaux défis. L'absence de libre-accès aux médicaments en Europe et la nécessité de percées scientifiques permettant de répondre aux progrès de la médecine ainsi qu'aux défis mondiaux en matière de santé publique sont regroupés à juste titre dans un même tableau. La communication n'indique pas clairement quelles sont les mesures à prendre par les États membres et l'UE en réponse à ces défis.

4.4   Selon le CESE, il est urgent d'améliorer le fonctionnement d'un marché unique durable des produits pharmaceutiques; ce qui constitue une condition préalable pour maintenir en Europe un secteur pharmaceutique hautement innovant et rentable et pour répondre aux besoins croissants de la population ainsi qu'aux défis mondiaux.

4.5   La communication constitue un cadre et une base appropriés pour une coopération règlementaire et des négociations avec un nombre croissant de pays tiers, tels que les États-Unis, le Japon, le Canada, la Russie, l'Inde et la Chine. La coopération et les négociations avec les pays tiers permettront de créer une perspective durable pour les exportations européennes.

4.6   Dans ce contexte international, un marché unique fonctionnant bien constitue une condition première. La fragmentation du marché perdure soit en raison de disparités dans les systèmes de tarification et de remboursement nationaux soit à cause de (nouvelles) charges réglementaires, de carences dans la mise en œuvre de la législation communautaire, d'inégalités d'accès, ou d’un manque d’intérêt commercial pour les marchés nationaux qui sont économiquement moins attractifs.

4.7   En outre, en un laps de temps relativement court, l'UE s'est élargie jusqu'à compter 27 États membres, avec chacun leur propre système et, partant, des caractéristiques spécifiques supplémentaires notamment en raison de la diversité accrue des marchés et des besoins des patients. Cela illustre bien la complexité du tableau d'ensemble européen.

4.7.1

Pour illustrer cette complexité, l'on peut citer la question de l'accessibilité des médicaments, qui dépend très fort des systèmes nationaux de sécurité sociale concernés ainsi que du degré de couverture de la population. Dans la plupart des systèmes, les organismes de sécurité sociale ou leurs associations négocient avec les fabricants les prix des médicaments dont la délivrance se fait uniquement sur ordonnance, afin que ceux-ci puissent être distribués à bon prix aux assurés, tout au plus moyennant un léger ticket modérateur.

4.8   La relation entre les coûts d'innovation et le chiffre d'affaires du secteur a une grande influence. La recherche et l'innovation ne peuvent être florissantes que dans la mesure où l'industrie est compétitive et que le fonctionnement du marché européen donne dès lors satisfaction.

4.9   Si des divergences persistent dans les procédures et les approches administratives, le secteur sera continuellement touché par la fragmentation, le double-emploi, une innovation trop coûteuse, et il sera ainsi pénalisé face à des industries qui peuvent bénéficier d'avantages à l'échelle continentale, comme c'est actuellement le cas aux États-Unis et en Chine.

4.10   Même si ailleurs dans le monde, les grands marchés d'échelle continentale subissent en partie l'influence des différences régionales, la situation ne peut se comparer aux conditions de fragmentation qui existent en Europe.

4.11   La baisse de productivité, ces dernières années, des dépenses dans la R&D pharmaceutique en raison d'une combinaison de plusieurs facteurs complexes constitue un problème supplémentaire.

4.11.1

La révolution biotechnologique, même si elle laisse présager beaucoup de nouvelles avancées, a été coûteuse pour l'industrie étant donné que la R&D et la technologie appliquée ne se sont pas encore traduites par un ensemble de produits mûrs pour le développement. La recherche de traitements pour de nouvelles maladies nécessite le développement de médicaments à grands frais.

4.11.2

Le coût de mise sur le marché de nouveau produits a augmenté, en partie parce que des essais cliniques approfondis et onéreux sont nécessaires. Les exigences règlementaires en matière de développement clinique sont également devenues plus importantes tandis que la recherche et développement concentrent leurs efforts vers des maladies plus complexes et des domaines thérapeutiques, tels que le cancer, la maladie d'Alzheimer, et autres..

4.11.3

Actuellement, l'innovation médicale est d'abord considérée comme un facteur de coût pour les budgets nationaux plutôt que comme une possibilité d'améliorer le bien-être des patients. Pour preuve, les systèmes de prix et les politiques de remboursement nationaux qui ne rémunèrent pas les produits innovants davantage que les anciens s'agissant de certains groupes de maladies (par exemple le système des prix de référence des médicaments).

4.12   Cet état de fait en Europe a des conséquences par rapport à la concurrence. Alors que, s'agissant de l'octroi de l'autorisation de mise sur le marché, les autorités réglementaires aux États-Unis sont en moyenne plus strictes que dans l'UE, le marché américain attire davantage les investissements de R&D, parce qu'il rémunère mieux l'innovation que la plupart des marchés européens.

4.13   Les pays asiatiques tels que la Chine et l'Inde, dont les marchés connaissent une croissance de plus de 15 % par an en moyenne, sont susceptibles d'attirer une part plus importante des investissements de R&D une fois que les normes de protection de la propriété intellectuelle seront effectivement mises en œuvre dans ces pays.

4.14   Pour continuer à avancer dans ce domaine, il convient de chercher un nouvel équilibre entre les compétences nationales, les mécanismes et procédures (juridiques) européennes et des conditions de marché favorables à un secteur pharmaceutique européen viable et puissant.

5.   Au-devant de l'avenir

5.1

Le CESE estime que la combinaison de l'actuelle crise économique, de la préparation de la relance de la stratégie de Lisbonne en 2010 et des défis mondiaux constitue pour la prochaine Commission un point de départ propice au renouveau et au progrès.

5.2

La stratégie de Lisbonne, qui prévoit l'ajustement des compétences nationales et communautaires et un rôle plus clair pour la Commission, peut fournir un cadre et une méthodologie utiles pour l'industrie pharmaceutique.

5.3

En 2008, la Commission a lancé l'initiative médicaments innovants (IMI) (8) dans le cadre du 7e programme-cadre. Le CESE approuve ce programme stratégique, qui vise effectivement à dégager des solutions pour répondre aux enjeux de la recherche grâce à des partenariats public-privé – universités, instituts de recherche, PME, hôpitaux, organisations de patients et régulateurs – dans le but de supprimer les goulets d'étranglement dans le domaine de la science et des compétences afin d'accélérer le développement des médicaments pour les besoins futurs en matière de santé.

5.4

En matière de recherche concurrentielle, les brevets et la garantie de protection de la propriété intellectuelle dans le secteur pharmaceutique sont essentiels car ils incitent à l'innovation et s'attaquent aux problèmes de santé actuels et émergents, et du long cycle de vie des produits (notamment leurs longues périodes de mise au point).

5.5

Le CESE a pris acte du rapport préliminaire de novembre 2008 sur l'enquête sectorielle dans le domaine pharmaceutique. Il approuve pleinement la recommandation relative à l'adoption d'un brevet européen, et la création d'un système européen de règlement des litiges qui uniformisera les procédures et réduira les frais, par opposition aux 27 procédures actuelles de règlement des litiges, basées sur des législations différentes.

5.6

Malgré la réputation mondiale de l'Office européen des brevets, le CESE estime que son fonctionnement peut être amélioré.

5.7

Les médicaments génériques, qui sont des copies des médicaments originaux une fois que les brevets ont expiré, ont des coûts de production et de commercialisation bien inférieurs à ces derniers. Le CESE approuve le développement d'un marché compétitif de médicaments non brevetés.

5.8

Le CESE souligne la nécessité d'une efficacité et d'une concurrence accrues sur le marché européen des médicaments génériques. Le CESE invite la Commission et les États membres à envisager des moyens d'en exploiter le potentiel afin de réaliser d'importantes économies pour les patients et les systèmes de soins de santé.

5.9

En ce qui concerne le libre-accès aux médicaments à des prix abordables, le CESE souhaite une nouvelle discussion entre la Commission, les pouvoirs publics et les parties intéressées sur des questions interconnectées telles que les différences significatives des prix des médicaments en Europe, l'accessibilité, le commerce parallèle et le principe de non-extraterritorialité.

5.10

À titre d'information, le CESE renvoie aux déclarations successives du G-10, à la recommandation 6, au forum pharmaceutique de haut niveau, à la recommandation 9.2 et au rapport d'avancement final de ce forum (9).

5.11

Cette discussion devrait avoir pour objet la définition d'une vision commune sur la nécessité pour les patients d'accéder librement aux médicaments à un prix abordable, la création d'un marché unique, la prévisibilité de l'attitude des gouvernements et de leurs actions dans ce domaine ainsi que sur la nécessité d'un environnement durable pour la R&D et l'innovation.

5.12

Les défis nationaux et mondiaux sont étroitement liés:

la position de l'industrie pharmaceutique européenne sur la scène mondiale dépendra largement de sa situation en Europe;

la nature mondiale de certaines maladies et la circulation dans le monde entier de produits pharmaceutiques issus des économies développées et émergentes influenceront également les marchés européens;

une position durable de l'industrie en Europe doit être favorable aux patients grâce aux plateformes de discussion relatives aux produits pharmaceutiques, aux maladies et aux changements d'attitude des consommateurs de ces produits en Europe.

5.13

Afin d'étayer la nouvelle discussion, la Commission devrait présenter des chiffres européens récents sur l'évolution des marchés, la création d'emplois et les budgets de la R&D dans le secteur. Il est aussi hautement nécessaire de disposer de données comparables au niveau mondial.

5.14

Les chiffres et tendances relatifs aux différentes parties du monde doivent également couvrir l'extension des activités de R&D des entreprises européennes sur de grands marchés émergents, ce qui ne manquera pas de se produire eu égard à la croissance des marchés chinois et indien. Cet avantage de la mondialisation est un autre argument de poids en faveur du développement d'un marché unique européen en tant que base durable de R&D et d'innovation.

5.15

Le commerce équitable et les intérêts du patient requièrent que les importations en provenance des pays à faible revenu fassent effectivement l'objet de bonnes pratiques de fabrication. Les médicaments de contrefaçon devront être interdits. Le risque de vente par internet de médicaments de contrefaçon devra être réduit par des contrôles efficaces des médicaments envoyés par la poste.

5.16

Le CESE estime que pour se rapprocher du marché unique dans ce secteur, il faudrait recourir à la méthode ouverte de coordination et confier le suivi à la Commission, comme c'est actuellement le cas dans le cadre de la stratégie de Lisbonne.

5.17

En vue de garantir une meilleure transparence, la Commission devrait publier les meilleures pratiques; elle devrait aussi examiner en détail les débats et les évolutions ayant lieu dans les États membres, concernant le libre-accès aux médicaments à des prix abordables, ainsi que le cadre juridique applicable à la R&D, l'innovation et l'industrie pharmaceutique. Le résultat de cet examen devrait servir de base aux décisions du Conseil.

Bruxelles, le 30 septembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Communication de la Commission sur «Des médicaments sûrs, innovants et accessibles: une vision nouvelle du secteur pharmaceutique», COM(2008) 666 final, décembre 2008.

(2)  En 2007, l'industrie pharmaceutique européenne occupait environ 600 000 personnes, et a consacré environ 18 % de son chiffre d'affaires total à la R&D.

(3)  Voir article 9 de la directive du Conseil 89/105/CE du 21 décembre 1988. Par la suite, le Conseil est devenu plus réticent vis-à-vis de l'élargissement.

(4)  Voir JO C 14 du 16.1.2001, p. 122 et JO C 241 du 28.9.2004, p. 7.

(5)  Le G-10 était composé de cinq ministres, de deux commissaires et de représentants de l'industrie.

(6)  Dans ses observations concernant les communications de la Commission sur la recherche et la compétitivité dans l'industrie pharmaceutique, le CESE n'a eu de cesse de souligner l'importance cruciale de la recherche (fondamentale) dans ce secteur. Voir JO C 14 du 16.1.2001, JO C 234 du 30.09.2003 et JO C 110 du 30.4.2004.

(7)  Le CESE s'est prononcé sur ces questions dans un ensemble d'avis: CESE 1022/2009, CESE 1023/2009, CESE 1024/2009, CESE 1191/2009 et CESE 1025/2009), JO C 306 du 16.12.2009.

(8)  Le programme stratégie de recherche de l'IMI est une feuille de route pour une mise en œuvre rapide de l'IMI, et met l'accent sur quatre piliers: sécurité, efficacité, gestion de la connaissance, et éducation et formation.

(9)  Voir p. 85 du rapport final d'avancement.


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/80


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil instituant un instrument européen de microfinancement en faveur de l’emploi et de l’inclusion (instrument de microfinancement Progress)»

COM(2009) 333 final — 2009/0096 (COD)

2009/C 318/15

Rapporteure générale: Mme Gabriela BISCHOFF

Le 17 juillet 2009, le Conseil a décidé, conformément à l'article 152 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil instituant un instrument européen de microfinancement en faveur de l’emploi et de l’inclusion (instrument de microfinancement Progress)»

Le 14 juillet 2009, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Marché unique, production et consommation» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Conformément à l'article 20 du règlement intérieur, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 1er octobre 2009) de nommer Mme Gabriele BISCHOFF rapporteure générale, et a adopté le présent avis par 171 voix pour et 2 abstentions.

1.   Synthèse, conclusions et recommandations

1.1.   Des instruments de financement adaptés aux entreprises sont un prérequis essentiel de la croissance économique. Cela vaut aussi pour les microentreprises du secteur de l'économie sociale. C'est pourquoi le Comité accueille favorablement le développement du microcrédit, qui ouvre une voie nouvelle pour stimuler l'esprit d'entreprise et créer de nouveaux emplois dans les microentreprises (c'est-à-dire les entreprises qui emploient moins de 10 personnes et dont le chiffre d'affaires annuel ou la somme de bilan annuel n'excède pas 2 millions d'euros). Il est ainsi fait justice de la faiblesse de l'offre d'instruments de microfinancement en Europe.

1.2.   L'octroi de microcrédit aux microentreprises du secteur de l'économie sociale et à des groupes défavorisés coûte plus cher et mobilise davantage de ressources que l'octroi de crédits conventionnels. Il est possible de réduire cette différence de coûts, d'une part en développant une offre de services standardisée et automatisée, en utilisant une meilleure mercatique et pour tout dire en professionnalisant les services de microfinancement, et d'autre part en accordant des garanties et des cofinancements. C'est pourquoi la poursuite du développement des prestations de microcrédit, y compris en coopération avec les organismes financiers établis, constitue un objectif central de l'instrument de microfinancement proposé. À cet égard, il importe de développer des structures organisationnelles qui permettent le traitement standardisé d'un grand nombre de demandes. Il sera cependant difficile d'atteindre le plus haut degré possible de professionnalisme sans logiciels adaptés et sans utiliser les technologies offertes par l'internet.

1.2.1.

Par ailleurs, les expériences de microcrédit menées jusqu'à présent en Europe montrent que seule la mise en œuvre de mécanismes incitatifs de marché amène réellement le secteur financier à jouer pleinement le rôle qui lui revient dans l'octroi de microcrédits aux deux groupes cibles spécifiques.

1.3.   Les travailleurs indépendants issus des groupes de personnes défavorisées doivent accéder aux prestations de microfinancement non seulement pour la création de leur entreprise, mais aussi en bénéficier pendant les premières années suivantes.

1.4.   1 % environ des ressources financières allouées à l'instrument de microfinancement Progress l'est au titre des dépenses administratives. Ce chiffre ne comprend pas les ressources accordées aux intermédiaires bancaires et aux institutions de microcrédit au titre de la prestation d'octroi des prêts aux groupes cibles. Le Comité insiste pour connaître le montant et la part de ces ressources. Par ailleurs, il convient de s'assurer que les banques répercutent les taux d'intérêts bonifiés sur les groupes cibles, et ce au moyen, entre autres, d'un suivi régulier à l'échelon européen ainsi que de la publication des conditions d'octroi des prêts sur les sites internet des autorités de surveillance compétentes.

1.5.   Il convient d'évaluer avec précision et de façon différenciée selon les groupes cibles les effets escomptés de l'instrument européen de microfinancement sur la politique sociale et l'emploi. Cette différenciation entre les deux groupes cibles – les microentreprises du secteur de l'économie sociale et les demandeurs individuels (chômeurs, jeunes, personnes socialement défavorisées) – vaut aussi pour leurs besoins de conseil et de soutien. Il convient de prendre en compte cet aspect d'un point de vue organisationnel aussi, tout en évitant l'écueil des chevauchements possibles avec d'autres programmes en cours.

1.6.   Le CESE recommande finalement de vérifier si d'autres ressources, en sus de celles de Progress, sont disponibles pour financer ce nouvel instrument de microfinancement.

2.   Introduction et résumé de la proposition de la Commission

2.1.

La Commission propose, dans sa communication du 13 novembre 2007 sur une initiative européenne pour un développement du microcrédit en faveur de la croissance et de l’emploi (COM(2007) 708 final), en premier lieu d'améliorer l’environnement juridique et institutionnel dans les États membres et en second lieu de créer une nouvelle entité pour soutenir la création et le développement d'institutions de microcrédit (1). De même, des ressources financières doivent être mises à disposition des nouvelles institutions de microfinancement hors du secteur bancaire (2). La Commission accorde dans sa communication une grande importance au développement d'une entité d'octroi de microcrédits pour la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l’emploi (3).

2.2.

Dans sa recommandation du 6 mai 2003 concernant la définition des micro, petites et moyennes entreprises (4), la Commission définit le microcrédit comme un prêt de 25 000 euros ou moins et une microentreprise comme une entreprise qui emploie moins de dix personnes (y compris les travailleurs indépendants) et dont le chiffre d'affaires annuel ou la somme de bilan annuel n'excède pas 2 millions d'EUR.

2.3

Le rapport du groupe d'experts sur la règlementation des microcrédits en Europe a mis en lumière l'ampleur des disparités entre les États membres quant à la mise à disposition de microcrédits et quant aux cadres règlementaires.

2.4

La Commission a déjà annoncé dans sa communication du 3 juin 2009 qu'elle proposera un nouvel instrument de microfinancement européen en faveur de l’emploi (5) (l'instrument de microfinancement Progress).

2.5.

La proposition présentée par la Commission le 2 juillet 2009 d'instituer un instrument européen de microfinancement en faveur de l’emploi et de l’inclusion (6) se donne pour objectif, au regard de la crise économique et financière et de ses effets sur l'emploi et l'accès au crédit, de créer un nouvel instrument européen de microfinancement pour soutenir les personnes ayant perdu leur emploi ou exposées à un risque de le perdre et les personnes défavorisées pour créer leur propre microentreprise, y compris une activité indépendante, à l'aide de microcrédits d'un montant n'excédant pas 25 000 euros, de garanties et d'instruments de partage des risques, d'instruments de capitaux propres, d'instruments de financement par endettement et d'autres mesures de soutien – notamment des activités de communication, suivi, contrôle, audit et évaluation. Les microentreprises du secteur de l’économie sociale qui emploient des chômeurs ou des personnes défavorisées, y compris des jeunes, peuvent, elles aussi, bénéficier d'un soutien. Il permet de rendre l’entrepreneuriat accessible aux chômeurs et à certains des groupes les plus défavorisés en Europe. La réaffectation de 100 millions d'euros provenant du budget actuel du programme Progress, qui pourraient entraîner la mobilisation de plus de 500 millions d’euros au total, doit permettre d'en faire bénéficier sur une période de quatre ans, de 2010 à 2013, jusqu'à 45 000 personnes physiques et morales avec un montant de prêt moyen de 11 000 euros. La Commission gère l’instrument en coopération avec des institutions financières internationales, notamment la Banque européenne d’investissement (BEI) et le Fonds européen d’investissement (FEI). Il n'en découle aucune charge administrative supplémentaire pour les États membres.

3.   Observations générales

3.1.   Le Comité se félicite que la Commission réaffirme, par ses propositions en vue d'instituer un instrument de microfinancement, son engagement en faveur de la création d'emplois et veuille ainsi contribuer une fois de plus à la stimulation de l'esprit d'entreprise des groupes les plus défavorisés. Il convient également de noter qu'il y a jusqu'à présent relativement peu d'exemples et d'expériences de mise en œuvre d'instruments de microfinancement en Europe. Il est nécessaire de mener des réflexions approfondies pour que soient assurés d'une part le service administratif des microcrédits et des autres outils et d'autre part l'usage durable de cet instrument. En regard des réussites impressionnantes des services de microfinancement dans le domaine de la coopération et l'aide au développement (et de la réception du prix Nobel de la paix en 2006 par la banque Grameen et son fondateur, M. Muhammad Yunus), il convient de souligner toutes les chances, mais aussi les défis, que représente la transposition de ces expériences dans le contexte européen. Ceci est d'autant plus vrai que des caractéristiques essentielles du modèle d'origine (comme par exemple l'intégration dans une communauté locale, professionnelle ou ethnique, et donc la confiance qui en découle, réduisant ainsi les coûts de suivi et le nombre de cas d'insolvabilité) pourraient se perdre lors de cette transposition. C'est d'ailleurs pourquoi la possibilité même de transposer ces expériences dans des pays plus développés est controversée.

3.2.   Il existe en Europe un besoin important de prestations de microfinancement; à peine la moitié des PME juge totalement positif le rôle des banques dans l'accès au crédit (7). Le programme Jeremie (Joint European Resources for Micro to Medium Enterprises – Ressources européennes conjointes pour les PME et les microentreprises), qui ressort avant tout des Fonds structurels, est une initiative commune de la direction générale de la politique régionale (DG REGIO) et du groupe BEI visant à améliorer le financement de la création et du développement de micro, petites et moyennes entreprises (8).

3.2.1.

Avec le programme-cadre pour l'innovation et la compétitivité (PIC) (9) et l'initiative pilote Jasmine (Joint Action to Support Microfinance Institutions in Europe - Action commune pour soutenir les institutions de microfinances en Europe), visant à consolider et à développer les institutions de microfinancement non bancaires (10), la Commission européenne a de plus lancé des initiatives importantes pour améliorer de la situation capitalistique des micro, petites et moyennes entreprises. Le Comité recommande une meilleure coordination de ces différentes mesures. Dans son avis (11)«Jeremie», le Comité indique clairement qu'il a toujours soutenu les initiatives lancées par la Commission visant à faciliter l'accès au crédit des PME et des microentreprises et qu'il a toujours insisté sur la nécessité d'impliquer largement les partenaires sociaux.

3.2.2.

Le Comité souligne en outre que les fonds de la BEI, lorsqu'ils ont été utilisés, se sont avérés très utiles pour faciliter l'accès au crédit des micro et petites entreprises.

3.2.3.

Enfin, le Comité précise dans cet avis que l'accès au microfinancement doit être facilité tout particulièrement aux PME, et qu'il est essentiel d'atteindre des catégories spécifiques d'entrepreneurs, comme les jeunes, les femmes, les groupes défavorisés, y compris les minorités ethniques.

3.3.   L'utilisation de prestations de microfinancement offre des chances, car elles constituent une des formes de financement les plus informelles et les plus rapides qui soient, et elles revêtent une importance capitale, entre autres pour la création d'entreprise. En effet, une part prépondérante des ressources nécessaires à la création d'une entreprise est apportée par le créateur lui-même ou par ses parents, ses amis et ses voisins (12). Cette situation met en lumière les limites des crédits bancaires usuels, pour lesquels le taux de refus est d'autant plus élevé que les montants demandés sont faibles, car une vérification consciencieuse de ces demandes se révèle trop coûteuse. Les prestations de microfinancement peuvent combler le vide entre des voies de financement informelles (mais dont l'efficacité est limitée) et le financement par des banques. Si l'on parvient à rendre l'octroi de microcrédit et d'autres prestations de microfinancement aussi rapide, simple et flexible que le sont ces voies informelles, les microcrédits peuvent contribuer sensiblement à la dynamique économique et de l'entreprenariat.

3.4.   Les travailleurs indépendants des groupes cibles doivent pouvoir accéder aux prestations de microfinancement non seulement lors de la création de leur entreprise, mais aussi au cours des premières années suivantes, car la capacité des entreprises à financer leurs projets est dans une large mesure limitée à ce moment-là par la relative faiblesse de leur capital.

3.5.   Indépendamment même de la crise économique et financière actuelle, l'octroi de crédits de faibles montants est plus coûteux, non seulement en termes financiers, mais aussi de gestion administrative, que l'octroi de crédits plus conventionnels, parce que la somme empruntée est faible, que les garanties habituellement exigées par les banques ne sont pas disponibles et les frais de traitement du dossier sont très élevés. Pour ces raisons, un nombre important de demandes, une structure organisationnelle et des techniques adaptées, et de façon générale un très haut niveau de professionnalisme sont primordiaux pour la réussite des initiatives de microfinancement. Aussi, les données issues de l'expérience d'initiatives et programmes semblables (PIC, Jeremie, BEI pilote; Jasmine) devront être absolument prises en compte dès qu'elles seront disponibles.

3.6.   En premier lieu, eu égard au degré de professionnalisme requis, il est tout d'abord nécessaire de gérer les microcrédits comme une activité de masse aussi standardisée que possible, pour bénéficier d'économies d'échelle et mieux répartir les risques. Un tel nombre de demandeurs constitue un objectif ambitieux, comme le montrent les expériences britanniques et canadiennes (13). C'est pourquoi il est nécessaire d'acquérir une forte notoriété (par exemple par des campagnes publicitaires comme les «semaines du microcrédit» organisées par l'Association française pour le droit à l'initiative économique (ADIE) et de prévoir un accès facile (par exemple sur internet). Il convient de spécifier si ces objectifs peuvent être atteints, et de quelle manière, et quel rôle d'autres programmes (comme le Fonds social européen – FSE) peuvent alors jouer (soutien technique). De plus, il convient de mettre en lumière les chevauchements possibles entre les programmes et les initiatives, afin de pouvoir en assurer la cohérence.

3.7.   En second lieu, il importe d'assurer lors de la définition des processus de gestion les conditions organisationnelles que requiert cette activité de masse, pour pouvoir traiter les demandes de manière rapide et flexible tout en assurant un niveau adapté de sécurisation, et de pouvoir appliquer des sanctions et des mesures de répartition des risques en cas de fautes contractuelles (retards de paiement). Comme dans le cas des crédits à la consommation, la question qui se pose alors est celle de l'estimation de la solvabilité des clients de la manière la plus simple, rapide et fiable possible.

3.8.   En troisième lieu, des systèmes de logiciels fonctionnels pour la préparation, la réalisation et le suivi des contrats sont le prérequis technique d'une telle activité de masse. Ils permettraient ainsi de surmonter la contradiction entre une activité de masse standardisée et un traitement individualisé des demandes et ils contribueraient à une exploitation plus large du segment de marché des prestations de microfinancement.

3.9.   Les microentreprises du secteur de l'économie sociale ainsi que les personnes originaires d'États membres et de régions dans lesquels des institutions de microcrédit sont déjà bien établies peuvent bénéficier plus simplement et plus rapidement de fonds que des demandeurs de pays ou de régions où de telles institutions n'existent pas ou n'ont pas encore dépassé le stade embryonnaire. Le Comité recommande de bien veiller à ce que cela ne conduise pas à créer des conditions d'accès inégales dans le cadre du programme.

3.10.   La question centrale de l'accès au crédit est celle du recours soit aux établissements de crédits habituels, soit à des institutions spécifiques de microfinancement, qui ne sont éventuellement pas encore établies, qui pour la plupart ne poursuivent pas de but lucratif et qui sont de très petite taille. D'une part, un réseau de prestataires de microfinancement se développe en Europe depuis plusieurs années avec le soutien de la Commission. Cependant, seuls 20 % de ces prestataires (moins de 20) octroient plus de 400 microcrédits par an (14). D'autre part, les prestations de microfinancement ne réussiront à se développer que grâce à un management hautement professionnel et motivé par le profit – et dans ce domaine, les banques (qui de plus octroient d'ores et déjà la plus grande partie des microcrédits) disposent d'un avantage majeur. Il ne semble guère praticable de répartir les ressources exclusivement entre des prestataires de microcrédits de petite taille, motivés par le seul bien public, et qui s'adressent donc avant tout à des personnes sans revenus réguliers, des femmes, des jeunes, des personnes âgées et des immigrants. En effet, la marginalisation de ces groupes risquerait de se renforcer encore dans un domaine de plus, celui d'une sorte de «système bancaire de niche» qui leur serait réservé. Pour garantir que le secteur bancaire s'intéresse au microfinancement, et ce malgré le profit minimal qu'il peut espérer en retirer, il est donc nécessaire de prévoir des mécanismes incitatifs de marché ou des instruments de soutien pour la création de l'infrastructure correspondante.

3.11.   Puisque cette initiative poursuit explicitement des objectifs socio-économiques et d'emploi, l'efficacité de ce programme doit être absolument évaluée dans ces domaines aussi, et ce de façon différenciée selon les deux groupes cibles (les microentreprises du secteur de l'économie sociale et les personnes défavorisées). Alors que seuls le volume des crédits et le nombre de bénéficiaires sont jusqu'ici pris en compte, le Comité recommande de mesurer la première insertion sur le marché de l'emploi, les revenus ainsi générés et les effets indirects supplémentaires sur l'emploi des groupes mentionnés dans la communication de la Commission. Ce n'est qu'ainsi que sera faite la preuve de la réussite de l'initiative dans ces domaines (15).

3.12.   Il convient d'accueillir favorablement le fait que la proposition de la Commission prévoit, en son article 4 point 1, des mesures de soutien – notamment activités de communication, suivi, contrôle, audit et évaluation. Il n'en ressort cependant pas clairement s'il s'agit là avant tout de conseils pour les créateurs d'entreprise ou pour les institutions de microfinancement, sur la façon dont elles devraient s'organiser ou sur la manière de répartir les ressources disponibles entre garanties, instruments de capitaux propres, instruments de financement par endettement et mesures de soutien.

3.13.   Le Comité recommande de garantir la communication des conditions des prêts à taux bonifiés à l'emprunteur final. Il convient s'assurer en même temps de la part des ressources qui seront réservées aux intermédiaires bancaires ou aux institutions de microfinancement au titre des frais de gestion des demandes.

3.14.   Le Comité soutient, comme il l'a mentionné dans l'avis INT/495, l'initiative de créer un nouvel instrument de microfinancement pour des groupes cibles. Il doute cependant de la pertinence et de la justesse du financement d'un nouvel instrument de microfinancement par une réduction des ressources affectées à Progress. Il recommande donc de vérifier quelles autres ressources – en sus de Progress – seraient disponibles pour financer ce programme.

Bruxelles, le 1er octobre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Voir COM(2007) 708, p. 2.

(2)  Idem, p. 11.

(3)  Idem, p. 2.

(4)  JO L 124 du 20.05.2003, p. 36.

(5)  COM(2009) 257 du 3.6.2009.

(6)  COM(2009) 333.

(7)  Voir Eurobaromètre (2005): «L'accès des PME au financement», Flash Eurobaromètre 174.

(8)  Voir COM(2006) 349, p. 9.

(9)  Voir COM(2005) 121, p. 6.

(10)  Voir COM(2007) 708, p. 3.

(11)  JO C 110 du 9.5.2006.

(12)  Voir http://www.gemconsortium.org/download.asp?fid=608.

(13)  Voir http://ssrn.com/abstract=976211

(14)  Sur le thème du microfinancement dans l'UE, voir: www.nantiklum.org/Overview_final_web.pdf et www.european-microfinance.org/data/file/Librairy/ISSUE%20PAPER.pdf.

(15)  Sur une telle méthode, voir : ftp://repec.iza.org/RePEc/Discussionpaper/dp3220.pdf.


23.12.2009   

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C 318/84


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil modifiant la décision no 1672/2006/CE du Parlement européen et du Conseil établissant un programme communautaire pour l'emploi et la solidarité sociale — Progress»

COM(2009) 340 final — 2009/0091 (COD)

2009/C 318/16

Rapporteure générale: Mme Gabriela BISCHOFF

Le 17 juillet 2009, le Conseil a décidé, conformément à l'article 152 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil modifiant la décision no 1672/2006/CE du Parlement européen et du Conseil établissant un programme communautaire pour l'emploi et la solidarité sociale - Progress»

Le 14 juillet 2009, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Marché unique, production et consommation» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Conformément à l'article 20 de son règlement intérieur, le Comité économique et social européen a décidé au cours de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 1er octobre 2009) de nommer Mme Gabriela BISCHOFF rapporteure générale, et a adopté le présent avis à l'unanimité.

1.   Résumé des conclusions et recommandations du Comité

1.1

Le CESE souligne l'importance que revêt le programme Progress pour renforcer l'Europe sociale, créer des emplois plus nombreux et de meilleure qualité, réduire la pauvreté et améliorer la cohésion de la société. À l'instar du Fonds social européen (FSE), le programme Progress représente l'un des principaux instruments de financement appuyant l'Agenda social. L'une de ses tâches essentielles consiste en outre à apporter son soutien pour développer davantage la dimension sociale.

1.2

Le CESE se félicite que toutes les forces soient concentrées sur la gestion de la crise et que dans ce contexte, toutes les lignes budgétaires soient examinées à l'aune de leur contribution potentielle à la gestion de la crise, plus particulièrement à la sécurisation de l'emploi et à la création de nouveaux postes de travail.

1.3

Ce sont précisément les chômeurs et les groupes défavorisés qui nécessitent un soutien et des conseils efficaces s'ils veulent devenir indépendants. À cette fin, il est possible de recourir notamment au Fonds social européen (FSE). Le Comité recommande dès lors d'examiner de plus près les points où ce dernier et l'instrument de microfinancement Progress se recoupent, afin de s'assurer que les offres et l'accès au crédit spécialement destinés aux groupes cibles soient mis en place et les doublons évités.

1.4

Comme en fait état l'avis INT/494, le CESE soutient en principe l'idée de mettre des microcrédits à la disposition des microentreprises de l'économie sociale à des conditions avantageuses, et de leur imposer en échange l'obligation d'employer des chômeurs et des personnes défavorisées. Il reste toutefois à définir plus précisément ce que ce concept recouvre.

1.5

Le Comité émet cependant des doutes quant à la réaffectation des fonds et à la réduction de 25 millions d'euros par an qui y est liée, se demandant si elles n'auront pas un impact considérable sur l'efficacité et la portée du programme Progress au cours de la période 2010-2013, notamment au niveau du développement ultérieur et de l'orientation stratégique du programme. La Commission est dès lors invitée à se pencher de plus près sur ces incidences et à examiner les alternatives envisageables. Il convient par ailleurs de présenter les effets potentiels sur d'autres lignes budgétaires et programmes, en particulier le FSE et les lignes budgétaires autonomes relatives par exemple au dialogue social.

1.6

Vu que le Comité craint que la réaffectation des ressources budgétaires n'altère l'efficacité du programme Progress en matière de politique sociale et d'emploi, il demande à la Commission de démontrer, motivation à l'appui, que les fonds destinés à être réaffectés permettront de réaliser les objectifs de Progress bien mieux que ne le ferait la démarche prévue jusqu'à présent. Il est en outre nécessaire de montrer comment assurer le développement ultérieur de l'Europe sociale, tout particulièrement dans le contexte du développement, de la communication et de la mise en œuvre d'une stratégie post-Lisbonne après 2010.

1.7

Le Comité recommande par ailleurs de préciser comment parvenir à une mise en œuvre plus efficace de Progress, à une planification plus stratégique et à des mesures plus ciblées; d'expliquer dans quels domaines et sur quelles mesures des économies peuvent être réalisées sans pour autant mettre en péril les objectifs et l'orientation stratégique du programme dans sa durée de validité restante.

1.8

Il demande également des informations sur les incitations économiques envisagées pour que le secteur bancaire remplisse effectivement la tâche d'octroi de crédits qui lui est entre autres dévolue.

2.   Introduction et résumé de la proposition de la Commission

2.1   Dans le prolongement de sa communication sur «L'Europe, moteur de la relance» (1), et de l'échange de vues mené lors du «Sommet pour l'emploi» du 7 mai 2009, la Commission a proposé diverses actions prioritaires dans sa communication du 3 juin 2009, intitulée «Un engagement commun en faveur de l’emploi» (2). Il s'agissait notamment de:

mieux utiliser les mesures de chômage partiel;

mieux anticiper et gérer les restructurations;

stimuler la création d’emploi;

aider les jeunes.

2.1.1   Il y est notamment recommandé qu'avec l’aide des partenaires sociaux et le soutien du FSE, les États membres proposent une aide à la création d’entreprises durables pour les chômeurs et les jeunes, par exemple en mettant à leur disposition des formations à la gestion d'entreprise et des capitaux de démarrage (3).

2.1.2   Toutes les lignes budgétaires disponibles, en particulier le Fonds social européen, doivent contribuer davantage à la gestion de la crise. Il conviendrait que l'aide financière fournie par le FSE se concentre notamment sur la promotion de l'esprit d'entreprise et de l'autonomie, en vue de la création d'entreprises ou au moyen d'une réduction des coûts générés par la souscription d'un prêt.

2.1.2.1

Dans sa communication, la Commission propose en outre la création d'un nouvel instrument de microfinancement européen en faveur de l’emploi afin de donner une nouvelle chance aux chômeurs et de rendre l’entrepreneuriat accessible à certains des groupes les plus défavorisés, y compris aux jeunes.

2.1.2.2

Outre la bonification des taux d’intérêt accordée par le FSE, les créateurs de microentreprises bénéficieront également de parrainages, de formations, d’aide individualisée et de moyens renforcés (4).

2.2   Le 2 juillet 2009, la Commission a finalement proposé un nouvel instrument de microfinancement européen en faveur de l'emploi et de l'inclusion sociale – Progress (5), conçu pour aider à la création de microentreprises par des chômeurs et des groupes défavorisés, et au développement de l'économie sociale. Elle suggère pour ce faire de réaffecter 100 millions d'euros du budget dont dispose actuellement le programme communautaire pour l'emploi et la solidarité sociale - Progress à ce nouvel instrument de microfinancement.

2.3   Le programme communautaire pour l'emploi et la solidarité sociale – Progress (2007-2013) est un instrument de financement conçu pour promouvoir la réalisation des objectifs de l'UE en matière d'emploi, d'affaires sociales et d'égalité des chances. Il couvre également leur développement ultérieur. Progress sert en outre à la mise en œuvre et à la réalisation concrètes de l'Agenda social européen. Le programme a aussi pour mission d'intensifier le soutien accordé aux États membres dans leurs efforts et actions en vue de créer des emplois plus nombreux et de meilleure qualité et de renforcer la cohésion de la société (6).

2.3.1

Jusqu'à présent, les fonds alloués au titre de Progress ont servi à financer:

des analyses et orientations;

le suivi de la mise en œuvre de la législation et des politiques communautaires;

la promotion du transfert de politiques entre différents acteurs;

des plates-formes d'échange d'expériences entre États membres.

2.3.2

Suivant la logique du cadre stratégique, Progress fournit en plus les produits suivants (7):

des formations et apprentissages destinés aux praticiens juridiques et politiques;

des rapports précis de suivi/évaluation sur l’application et l’impact de la législation et de la politique de l’UE;

l'identification et la diffusion des bonnes pratiques;

des activités d’information et de communication et la mise en réseau entre et avec les acteurs et événements;

des outils, méthodes et indicateurs statistiques appropriés;

des conseils, recherches et analyses politiques appropriés;

le soutien aux organisations non gouvernementales (ONG) et aux réseaux.

2.3.3

Le programme Progress est venu remplacer plusieurs programmes d'action antérieurs, répondant ainsi à l'objectif de réaliser des synergies et de parvenir, par ce regroupement, à davantage de transparence et de cohérence.

2.4   Dans son avis SOC/188 datant de 2005, le CESE saluait clairement la proposition de la Commission européenne, en soulignant qu'avec le FSE, Progress représenterait à l'avenir l'un des principaux instruments de soutien à l'agenda de politique sociale.

2.4.1

Dans ce même avis, le CESE enjoignait toutefois d'allouer à Progress des fonds budgétaires suffisants et se demandait si les moyens financiers proposés par la Commission européenne seraient à la hauteur. Il insistait par ailleurs sur la nécessité de garantir que la simplification administrative annoncée n'entraînerait pas simplement une meilleure gestion du programme sur le plan technique, mais qu'elle aboutirait aussi à donner aux contenus de ce programme une structuration plus favorable aux groupes qu'il cible.

2.4.2

Par ailleurs, le Comité invitait à promouvoir l'échange entre les acteurs des sociétés civiles nationales, en sus des réseaux pertinents UE-ONG.

2.5   En vertu de l'accord interinstitutionnel de 2006 et sous la pression du Parlement européen, un montant supplémentaire de 114 millions d'euros a été alloué au programme Progress. Ainsi doté d'un budget de départ de 743 250 000 euros pour une période de sept ans (2007-2013), le programme a été agencé en conséquence. Ce budget est destiné à financer la promotion des changements ou de la modernisation dans les cinq domaines couverts par Progress: l'emploi, la protection et l'inclusion sociales, les conditions de travail, la lutte contre la discrimination et l'égalité entre hommes et femmes.

2.6   Progress est ouvert aux 27 États membres de l'UE, aux pays candidats à l'adhésion à l'UE, ainsi qu'aux pays de l'ALE/EEE. Parmi les groupes cibles figurent les États membres, les autorités locales et régionales, les services publics de l'emploi et les instituts nationaux de statistique. Les universités et instituts de recherche, les partenaires sociaux et les organisations non gouvernementales ont également la possibilité d'y participer.

2.6.1

La Commission sélectionne les projets qui bénéficieront d'un soutien financier sur base d'appels d'offres ou d'appels à propositions.

2.7   La Commission estime que la réaffectation d'une partie des ressources budgétaires ne portera pas atteinte aux objectifs poursuivis par le programme Progress.

2.7.1

Cent millions d'euros doivent être alloués au nouvel instrument de microfinancement européen en faveur de l'emploi et de l'inclusion sociale – Progress, ce qui implique que le budget dont dispose le programme Progress pour sa durée de validité restante, soit la période 2010-2013, sera amputé de 25 millions d'euros par an (8).

2.7.2

Par conséquent, la Commission propose de modifier comme suit l'article 17(1) de la décision no 1672/2006/CE établissant le programme Progress:

«L'enveloppe financière affectée à la mise en œuvre des activités communautaires visées par la présente décision pour la période allant du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2013 est établie à 643 250 000 euros. » (9).

3.   Observations générales

3.1   Globalement, le CESE se félicite que tous les programmes européens soient examinés à l'aune de leur contribution à la gestion de la crise, plus particulièrement à la sécurisation de l'emploi et à la création de nouveaux postes de travail.

3.1.1

Ce sont précisément les groupes les plus défavorisés - qu'il s'agisse des chômeurs, des jeunes, des parents isolés, des immigrants ou des femmes - qui nécessitent un soutien efficace. Néanmoins, il ne suffit pas en l'occurrence de leur proposer des crédits, car ils ont bien plus besoin de conseils, d'une qualification et d'un soutien spécifiques au préalable, notamment pour élaborer un bon plan d'affaires. Il conviendrait ici de mettre en lumière les points de recoupement avec le soutien accordé au titre du FSE, notamment pour examiner les opportunités et les risques éventuels du projet d'entreprise.

3.2   Lors de la conception de l'instrument de microfinancement Progress, il conviendrait par principe que l'approche soit davantage différenciée en fonction des groupes cibles:

a)

les microentreprises de l'économie sociale existantes,

b)

les demandeurs individuels.

3.3   Ainsi qu'il l'expose dans l'avis INT/494, le CESE soutient globalement l'idée de proposer des microcrédits à des conditions avantageuses aux personnes et aux microentreprises de l'économie sociale, et de leur imposer en échange l'obligation d'assurer ou de créer par ce moyen des postes de travail. Le Comité émet toutefois des doutes quant à la réaffectation des fonds et à la réduction budgétaire qu'elle implique pour le programme Progress, se demandant si elles n'auront pas un impact considérable sur l'efficacité et la portée du programme (10), et surtout, comment ce dernier parviendra à accomplir de manière satisfaisante sa mission de soutien au développement de l'Europe sociale, notamment dans l'optique de la stratégie post-Lisbonne. La Commission est dès lors invitée à détailler cet aspect le plus rapidement possible. Il ne suffit pas, comme c'est le cas dans l'évaluation ex-ante (11), de déduire que les lignes budgétaires de Progress conviennent principalement du fait que les fonds doivent provenir réalistement d'une ligne budgétaire existante.

3.3.1

En fin de compte, il existe d'autres lignes budgétaires et programmes dont l'envergure est parfois bien supérieure, notamment le FSE, qui donne déjà aux États membres la possibilité d'utiliser le fonds pour des microcrédits, sans pourtant que les États membres y aient eu recours jusqu'à présent.

3.3.2

Il conviendrait en outre de présenter les effets potentiels sur les lignes budgétaires autonomes relatives par exemple au dialogue social.

3.4   De manière générale, il reste à déterminer quelle incitation est fournie au secteur bancaire pour qu'il assume la tâche concrète d'octroi de crédits qui lui est entre autres dévolue. À elle seule, la sortie de fonds du programme Progress en vue de fournir les liquidités pour financer une mesure ne représente aucune valeur ajoutée pour la promotion des objectifs de Progress. Le Comité invite dès lors la Commission à proposer des incitations économiques en conséquence, afin de faire naître du côté de l'offre un marché pour les microcrédits destinés aux groupes cibles mentionnés.

3.5   Dans le même temps, il est demandé à la Commission d'examiner s'il n'est pas possible de financer le programme pour les instruments de microfinancement à l'aide d'autres fonds budgétaires ou d'autres programmes. C'est seulement à l'issue de cet examen qu'il pourrait être question de consacrer des fonds supplémentaires à la promotion de l'emploi et de l'inclusion sociale. À la suite de la crise, l'Europe sera confrontée à la gestion de grands défis, tels qu'une croissance du chômage, une baisse des recettes fiscales, et de lourds déficits budgétaires. À cet égard, Progress doit également apporter d'importantes contributions. C'est pourquoi il convient de veiller à ce qu'il dispose à cet effet de moyens suffisants.

3.6   Si le nouvel instrument de microfinancement est financé par une réaffectation des fonds alloués à Progress, il conviendrait d'expliquer plus concrètement quels projets ou produits il y a lieu de supprimer ou de réduire, étant donné que le budget de Progress aura chaque année 25 millions de moins à sa disposition. Cette réduction qui, considérée sur la durée entière de validité du programme (2007-2013), représenterait un peu plus de 13 % de son budget, mais correspond en réalité à un pourcentage bien plus élevé, étant donné que la somme de 100 millions d'euros sera prélevée sur le budget restant pour la période 2010-2013 et réaffectée, ne doit pas déboucher sur une restriction correspondante du soutien accordé aux réseaux européens d'organisations non gouvernementales qui bénéficient d'un financement au titre de Progress. Par analogie avec le cadre stratégique de Progress, l'importance des moyens financés alloués aux ONG et aux réseaux constitue l'indicateur de performance de Progress.

3.6.1

Ainsi, le cadre stratégique 2009 fait état de la volonté de renforcer les investissements dans ce domaine, de stimuler la capacité des réseaux nationaux et européens à participer à la prise de décisions et à la mise en œuvre des politiques à l’échelon de l’UE comme des États membres et à influencer ces deux processus (12).

3.7   Dans le même temps, le Comité fait remarquer qu'il n'est en aucun cas indiqué de réduire le financement des mesures relatives à l'apprentissage mutuel /l'évaluation par des pairs, pièce maîtresse de la méthode ouverte de coordination. Il conviendrait de développer ces mesures afin de mieux soutenir la gestion de la crise dans les États membres, notamment en y associant davantage les partenaires sociaux et les organisations non gouvernementales concernées.

3.8   Le Comité est convaincu que le fait d'opérer des coupes générales dans les différents domaines de Progress mettrait en péril les objectifs du programme et en altérerait gravement l'impact. Dans le cas où le nouvel instrument de microfinancement serait instauré à l'aide de fonds issus de Progress, il recommande donc de convoquer le comité du programme Progress et de discuter d'un concept de réduction budgétaire, avec la participation de la société civile.

3.9   Au cours de la période de validité restante du programme Progress, il s'agira en outre de s'accorder sur une nouvelle stratégie post-Lisbonne, d'en assurer la communication et la mise en œuvre, avec la participation de tous les acteurs concernés. Un soutien important, essentiellement financé par les fonds issus de Progress, sera nécessaire à cette fin. Le plan de travail 2009 de Progress prévoit déjà des mesures en la matière. Dès 2010, il conviendrait d'y consacrer davantage de fonds dévolus à Progress.

Bruxelles, le 1er octobre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  COM(2009) 114 du 04.03.2009.

(2)  COM(2009) 257.

(3)  COM(2009) 257, p. 7.

(4)  op. cit., p. 14.

(5)  COM(2009) 333 et COM(2009) 340.

(6)  Voir le document de la Commission européenne intitulé «Progress, priorité aux résultats – Cadre stratégique pour la mise en œuvre du programme communautaire pour l'emploi et la solidarité sociale Progress (2007-2013)», p. 5.

(7)  op. cit, p. 9.

(8)  La fiche financière actualisée de la Commission indique qu'à la fin de l'année 2009, un peu plus de 280 millions d'euros (sur le budget total de 745 millions d'euros) auront été dépensés. Cela signifie qu'un montant de 100 millions d'euros sera prélevé sur le budget restant, et réaffecté.

(9)  COM(2009) 340.

(10)  Dans l'évaluation ex-ante de sa proposition, la Commission explique qu'il est certes souhaitable d'allouer plus de 100 millions d'euros aux nouveaux instruments de microfinancement, mais qu'un prélèvement de fonds supérieur à 100 millions d'euros aurait un impact négatif sur les objectifs et les priorités du programme Progress. Elle n'avance toutefois aucune justification pour étayer le fait que ces incidences négatives surviennent seulement lorsque la somme dépasse 100 millions d'euros.

(11)  La seule option réaliste consisterait dès lors à réaffecter des fonds provenant d'une ligne budgétaire existante. La ligne budgétaire allouée à Progress semble le mieux convenir à cette fin. SEC(2009) 907, p. 12.

(12)  Commission européenne, «Progress, priorité aux résultats – Cadre stratégique pour la mise en œuvre du programme communautaire pour l'emploi et la solidarité sociale Progress (2007-2013) », p. 18.


23.12.2009   

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C 318/88


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant les obligations des opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché»

COM(2008) 644 final — 2008/0198 (COD)

2009/C 318/17

Rapporteur: M. Valerio SALVATORE

Corapporteur: M. Brendan BURNS

Le 14 novembre 2008, le Conseil a décidé, conformément à l'article 175, paragraphe 1, du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant les obligations des opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché»

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 2 septembre 2009 (rapporteur: M. SALVATORE, corapporteur: M. BURNS).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 1er octobre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 87 voix pour, 7 voix contre et 8 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité économique et social européen partage entièrement l'objectif fixé par la proposition de règlement de la Commission consistant à réduire autant que possible le risque de mise sur le marché communautaire de bois et de produits dérivés issus d’une récolte illégale. En effet, la déforestation est non seulement responsable de près de 20 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre et de la diminution de la biodiversité, mais est également à l'origine d’importants problèmes économiques et surtout sociaux. Pour atteindre le but fixé par la proposition de règlement, il convient cependant de faire preuve de plus de courage et d’intervenir de manière plus déterminée, en s’appuyant sur des mesures juridiques contraignantes et sur un calendrier de mise en œuvre plus serré.

1.2

Parallèlement aux accords de partenariat volontaires FLEGT (1), au développement de programmes de coopération en matière de certification et d’exploitation durable des ressources forestières et, enfin, aux accords conclus avec les principaux pays importateurs de bois, cette proposition de règlement constitue une composante essentielle en vue de lutter contre la coupe illégale du bois, mais également contre sa commercialisation.

1.3

Le concept de viabilité ne porte pas uniquement sur la capacité de produire du bois, mais également sur les critères suivants: sociaux (conditions de travail acceptables, respect des droits des travailleurs) conformément aux définitions de OIT (2); économiques (éviter toute distorsion du marché due à une concurrence déloyale) et environnementaux (impact de la déforestation illégale sur l'environnement et sur la diminution de la biodiversité).

1.4

Dans le règlement à l’examen, la Commission a défini le système de diligence raisonnable comme l’outil permettant de réduire dans toute la mesure du possible le risque de mise sur le marché communautaire de bois et de produits dérivés issus d’une récolte illégale. Cette option, telle qu’elle est formulée, exige certaines mesures correctrices.

1.5

Premièrement, la Commission prend seulement en considération les opérateurs mettant pour la première fois du bois et des produits dérivés sur le marché. De l’avis du Comité, ce système doit être étendu, par des modalités et des règles diverses, à l’ensemble des opérateurs qui constituent la filière bois. La traçabilité doit concerner chaque opérateur, lequel doit disposer des informations relatives à l’origine et aux caractéristiques du produit: pays, forêt, espèce, âge et fournisseur. Les petites et moyennes exploitations, ainsi que les petits producteurs, devraient bénéficier d'une certaine souplesse et progressivité pour s’adapter au nouveau système, sans supporter de charges excessives.

1.6

En tout état de cause, il y a lieu d’éviter les doublons avec les systèmes de traçabilité déjà en place, en reconnaissant les législations nationales et leurs instruments de contrôle, les systèmes de certification des forêts et les modèles d'organisation, dès lors qu’ils sont conformes aux critères de gestion durable du patrimoine forestier. En particulier, lorsque les principes de diligence raisonnable sont déjà appliqués, il est inutile d’imposer des obligations administratives supplémentaires. L’UE doit fixer des normes réglementaires et comportementales communes relatives à la procédure de gestion du risque, plus rigoureuses dans le cas des zones d'exploitation du bois à haut risque d’illégalité (3), en s’appuyant le cas échéant sur des organismes tiers de certification, indépendants et disposant d’une expérience notoire.

1.7

Le taux de coupe illégale du bois étant inversement proportionnel au revenu par habitant d’un État donné, les accords conclus avec les pays tiers doivent prévoir des coopérations en matière d’organisation et de gestion ainsi que des systèmes d’incitations sociales.

1.8

L'extension du devoir de diligence à l’ensemble des opérateurs favoriserait la mise sur le marché de bois issu de la seule récolte légale, qui serait plus apprécié non tant pour ses effets économiques au sens strict, que pour son fort impact social. Une gestion prévoyante du patrimoine forestier et une utilisation de produits issus d'une coupe légale représentent en effet une opportunité de développement durable pour les populations locales employées dans la filière bois ainsi qu’une garantie d’avenir pour l’industrie européenne de ce secteur.

1.9

Le règlement doit être également étendu au bois et aux produits dérivés destinés à la production d’énergie à partir de sources renouvelables.

1.10

Les sanctions prévues pour tout contrevenant aux obligations de commercialisation du bois et des produits dérivés doivent être homogènes dans les différents États et graduelles en fonction du niveau de responsabilité, et doivent même prévoir, dans les cas véritablement délictueux, la suspension des activités commerciales.

1.11

Afin de garantir le bon fonctionnement du système, le Comité approuve largement l’idée d'adjoindre à la Commission un groupe consultatif sur le commerce du bois, qui représente les différents acteurs concernés.

1.12

Après une période de deux ans à compter de l’entrée en vigueur du règlement, il conviendrait que la Commission effectue une analyse d’impact concernant le bon fonctionnement du marché intérieur des produits du bois. En cas d'éventuels résultats non satisfaisants, elle devra veiller à revoir les points faibles du règlement.

2.   Introduction

2.1

Cette proposition de règlement vise à lutter contre la coupe illégale de bois et à favoriser l’approvisionnement dans les pays qui appliquent des pratiques légales de gouvernance des forêts. Elle constitue une des réponses apportées par l’UE au problème de la coupe illégale de bois, qui est l’une des causes de la déforestation. La déforestation est responsable de près de 20 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre et est une cause majeure de diminution de la biodiversité dans le monde. De plus, l’exploitation illégale des forêts entraîne des phénomènes de dumping économique, social et environnemental, et sape ainsi la compétitivité des entreprises forestières qui exercent leur activité dans le respect des règles.

2.2

En ce qui concerne le dumping social, l’UE a tenté à maintes reprises, à partir de 1996, d’inclure dans les accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) les dispositifs de défense des droits fondamentaux en matière de travail. Ces propositions ont rencontré de fortes résistances de la part des pays en voie de développement, qui accusent les pays industrialisés d’instrumentaliser ces propositions afin de créer de nouvelles formes de protectionnisme vis-à-vis de leurs exportations. Par ailleurs, ce thème est à l’heure actuelle très discuté à l'intérieur même de l’UE.

2.3

La Commission a dès lors élaboré une série d’options afin de garantir, à l’intérieur de l’UE, la seule mise sur le marché de bois et de produits dérivés issus d’une récolte légale. Ces options ont été soumises à des analyses d’impact et ont été intégrées dans le système dit de diligence raisonnable. Sans nul doute, des contrôles plus nombreux aux frontières seraient souhaitables et très efficaces, mais ils seraient malheureusement incompatibles avec les règles de la libre circulation des biens et, partant, ne seraient pas applicables.

2.4

La légalité de la provenance est établie sur la base de la législation du pays où est cultivé le bois. Elle peut faire l’objet d’une vérification dans les pays adhérents aux accords FLEGT, dans le cadre des autorisations UE-FLEGT, établies sur la base d’accords bilatéraux volontaires (APV) conclus entre la Commission européenne et chaque pays exportateur, ou sur la base des permis CITES (4). Dans les autres pays, il est possible de vérifier la légalité par d’autres moyens. Pour les opérateurs, cette vérification est possible par le biais de systèmes répondant entièrement aux critères prévus par le système de diligence raisonnable.

2.5

Le système de diligence raisonnable est fondé sur la responsabilité qu'ont les opérateurs de réduire le plus possible le risque d’introduire sur le marché du bois issu d’une récolte illégale par le biais d’un système de traçabilité, qui s’appuie sur la possibilité d’accéder aux informations relatives à la provenance et aux caractéristiques du bois, conformément aux exigences légales fixées par les législations nationales. Ce système vise par ailleurs à informer le consommateur, lors de l’achat, qu’il ne contribue pas à la coupe illégale de bois.

2.6

Afin de favoriser la mise en œuvre de la proposition de règlement à l’examen, les opérateurs peuvent avoir recours aux systèmes élaborés par les organisations de contrôle, lorsqu'elles existent. En tout état de cause, les autorités compétentes désignées par les États membres sont tenues d’identifier les organisations de suivi et se réservent le droit de vérifier, à intervalles réguliers, qu'elles respectent les exigences fixées.

2.7

Les organisations de contrôle ayant élaboré préalablement des règles pour l’application du système de diligence raisonnable accordent leur autorisation aux opérateurs selon des modalités adaptées. Les autorités compétentes effectuent les contrôles nécessaires et appliquent les mesures disciplinaires appropriées aux opérateurs certifiés qui ne respectent pas le système de diligence raisonnable.

2.8

Les États membres déterminent le régime des sanctions applicables en cas de violation des dispositions du règlement et appliquent toute mesure nécessaire pour favoriser la mise en œuvre de celles-ci. Sur la base des accords de l’OMC, les règles prévues par le règlement seront appliquées de la même manière aux produits importés et à ceux fabriqués dans l’UE.

3.   Observations générales

3.1   L’objectif visant à garantir que le bois présent sur le marché communautaire provient de forêts exploitées de manière légale et conforme aux principes de durabilité est totalement partagé; par ailleurs, il est souhaitable que le règlement soit approuvé rapidement et qu’il constitue un signal fort de l'engagement de l’UE contre la coupe illégale de bois.

3.2   Le développement de l’approche bilatérale par la conclusion d’accords de partenariat volontaires FLEGT est sans nul doute souhaitable, de même que les accords souscrits avec les plus grands importateurs de bois (États-Unis, Russie, Chine, Japon) afin d’établir des règles internationales visant à lutter non seulement contre la coupe illégale de bois mais également contre sa commercialisation. Il serait par ailleurs opportun de développer des programmes de coopération avec les pays producteurs, pour favoriser une utilisation durable des ressources forestières, le respect de la législation dans les pays producteurs et l’extension des systèmes de certification. De manière plus générale, il y a lieu de réaliser des projets qui, par la mise en place de systèmes de contrôle adaptés, favorisent l'application sur le terrain des principes de bonne gouvernance.

3.3   Le système de diligence raisonnable présente néanmoins quelques points faibles. Premièrement, il prend uniquement en considération les opérateurs mettant pour la première fois du bois et des produits dérivés sur le marché: les propriétaires de bois, les détenteurs des droits de coupe et les importateurs de bois, ce qui a pour conséquence d'amoindrir les effets attendus du contrôle du risque lié à la commercialisation de produits illégaux, au fur et à mesure que les opérateurs de la filière se rapprochent du consommateur final. De l'avis du Comité, ce système devrait être étendu, par des modalités et des règles diverses, à l'ensemble des opérateurs de la filière bois de l'UE.

3.3.1

Tout opérateur de la filière doit s'assurer de la légalité du bois en sa possession et disposer des informations essentielles sur l'origine du produit: pays et forêt de provenance, fournisseur, espèce, âge, volume. Pour y parvenir, il convient d'adopter un système de traçabilité, qui prévoie différents niveaux de responsabilité. Il est en effet inutile d'imposer des charges administratives supplémentaires aux petits propriétaires forestiers qui exercent leur activité dans un environnement national déjà réglementé par des systèmes législatifs de contrôle efficaces et qui respectent le système de diligence raisonnable. En revanche, les grands opérateurs qui achètent et commercialisent du bois dans l'UE ou qui en importent à partir de pays tiers, sont tenus d'appliquer le système, comme prévu par le règlement.

3.4   En tout état de cause, le système de diligence raisonnable ne semble pas à court terme suffire pour atteindre les objectifs préalablement fixés, même en y apportant les mesures correctrices souhaitées, compte tenu notamment de la gravité et de la complexité du problème que représente la coupe illégale de bois. Il convient principalement d'axer les mesures et les contrôles sur les zones de provenance du bois et sur les étapes de la filière considérées à fort risque d'illégalité, qui constituent véritablement l'aspect crucial du problème. Dans ces cas, la gestion des forêts exigerait également le contrôle par des organismes de certification indépendants et disposant d'une expérience notoire.

3.5   Il y a lieu de définir au niveau de l'UE un cadre commun qui fixe les normes à respecter dans la procédure de gestion du risque, en utilisant au mieux les systèmes de contrôle et de traçabilité du bois existant déjà dans l'UE, en évitant les doublons inutiles, surtout ceux pesant sur les petites et moyennes exploitations forestières et en s'orientant vers une harmonisation du nouveau système avec les systèmes existants les plus efficaces et déjà adoptés par différentes États membres. Il faut donc encourager l'application de tous les systèmes qui répondent déjà aux exigences de diligence raisonnable, sur la base des législations nationales et de systèmes de contrôle adaptés, tels que certification forestière.

3.6   Il convient que le règlement à l'examen soit également étendu au secteur du bois et aux produits dérivés destinés à la production d'énergie à partir de sources renouvelables. Tous les produits et les produits dérivés du bois, notamment ceux pouvant présenter des caractéristiques de durabilité, comme dans le cas de la biomasse vouée à la production d'énergie, doivent être issus d'une récolte légale. La légalité est en effet un préalable obligé pour la durabilité de toute action.

3.7   Il faut en dernier lieu définir de manière claire et homogène dans les différents États membres les systèmes de sanctions à adopter pour tout contrevenant aux obligations de commercialisation de bois et de produits dérivés issus d'une récolte légale. Dans ce but, il y a lieu de garantir que les sanctions soient réelles, proportionnées et dissuasives, et envisager même, pour les cas véritablement délictueux, la suspension des activités commerciales.

4.   Observations particulières

4.1

Dans le but d'atteindre les objectifs indiqués, il est primordial de définir les instruments adaptés qui permettent de s'assurer de la provenance légale du bois et des produits dérivés commercialisés dans l'UE. En plus des réglementations nationales et des instruments prévus par la proposition de règlement, il y a lieu de prendre en considération les différents systèmes qui répondent déjà aux critères de diligence raisonnable, notamment ceux de certification des forêts. Par ailleurs, il est nécessaire de définir des systèmes adaptés de reconnaissance pour les acteurs agissant en toute légalité lors de la commercialisation de bois et de produits dérivés, et de sanctions pour les contrevenants aux règles établies. Ces règles, qu'il n'est pas possible de fixer à l'échelon européen, devront être établies par les États membres en s'inspirant de critères d'homogénéité.

4.2

Les coupes illégales constituent en effet une menace pour tout projet de gestion durable des forêts. Les accords conclus avec les pays tiers doivent dès lors prévoir des collaborations en matière d'organisation et de gestion ainsi que des systèmes d'incitations sociales, compte tenu du fait que le taux de coupe illégale du bois est inversement proportionnel au revenu par habitant d'un État donné. Les pays tropicaux connaissant une forte pression démographique et un taux élevé de pauvreté sont les plus touchés par la déforestation (5). De manière analogue, les pays africains exportateurs de bois comptent parmi les cinquante États les plus pauvres de la planète, possèdent le plus faible indice de développement humain et leur revenu par habitant est parmi les plus bas (6).

4.3

L'extension du système de diligence raisonnable à l'ensemble des opérateurs, et pas uniquement à ceux qui mettent pour la première fois du bois et des produits dérivés sur le marché, entraîne des charges administratives supplémentaires, mais les avantages escomptés apparaîtront avec évidence grâce à la commercialisation sur le marché européen de bois issu d'une récolte exclusivement légale, identifiable tout le long de la filière. Il y aura de multiples avantages, de nature non strictement économique (7) mais essentiellement sociale. Dans ce contexte, l'on considère l'environnement comme faisant partie intégrante des forces économiques et sociales, les acteurs étant mus par des motivations non seulement économiques mais également par des intérêts d'autre nature (environnementaux, sociaux et culturels).

4.4

Les produits ainsi obtenus, en plus de satisfaire aux exigences d'un marché toujours plus sensible aux thématiques de protection de l'environnement, seront valorisés et pourraient susciter un effet d'imitation non négligeable dans les pays tiers. Dès lors, une gestion prévoyante du patrimoine forestier et une utilisation de produits issus d'une récolte légale représentent une opportunité de développement pour les travailleurs locaux et une garantie d'avenir pour l'industrie de ce secteur.

4.5

Il est en tout état de cause utile que les obligations soient appliquées en fonction de la taille des entreprises, en octroyant de la sorte aux petites et moyennes exploitations et aux petits producteurs une plus grande souplesse et progressivité pour s'adapter au système de diligence raisonnable. En particulier, les opérateurs qui achètent pour la première fois du bois devront réduire le plus possible le risque de commercialiser des produits issus d'une récolte illégale, grâce à une traçabilité de la documentation qui atteste l'origine et les caractéristiques du produit (pays et forêt de provenance, fournisseur, espèce, âge, volume), alors que les autres opérateurs de la filière en aval seront tenus d'étayer par des documents l'origine de leurs achats de bois.

4.6

Dans la définition contenue dans le règlement, il semble opportun de réaffirmer l'entière reconnaissance des réglementations et des modèles organisationnels nationaux répondant le mieux aux critères de gestion durable du patrimoine forestier, sans imposer à ces derniers des innovations dictées uniquement par la volonté d'innover. À ce propos, il conviendrait d'élargir le concept de durabilité, qui ne doit pas être axé uniquement sur la capacité à produire du bois, mais également sur des critères sociaux (conditions respectueuses des droits de l'homme et du travail), économiques (éviter toute distorsion du marché due à une concurrence déloyale) et environnementaux (l'impact des activités sur l'environnement et sur la biodiversité de la zone concernée).

4.7

Il y a lieu de créer un environnement favorable pour les opérateurs ayant un comportement vertueux et qui informent les acquéreurs de la provenance légale du bois et de ses produits dérivés. En dernier lieu, il est également souhaitable de lancer une campagne d'information et de sensibilisation des consommateurs concernant l'importance de connaître et de vérifier au moment de l'achat, grâce à la traçabilité, l'origine légale du bois et des produits dérivés.

4.8

L'utilisation de bois issu d'une récolte légale dans le bâtiment, dans le secteur du mobilier ou des autres produits manufacturés, peut être encouragée par des actions conjointes et la diffusion de matériel de vulgarisation et d'information, afin de promouvoir le bois issu de forêts gérées de manière durable, en tant qu'unique matière première durable en mesure de se renouveler naturellement et de stocker le dioxyde de carbone, y compris tout au long du cycle de vie du produit; cette caractéristique le distingue de tout autre matériau.

4.9

Le Comité approuve largement l'idée d'adjoindre à la Commission un groupe consultatif sur le commerce du bois, qui représente les différents acteurs concernés, afin de garantir le bon fonctionnement du système.

Bruxelles, le 1er octobre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Plan d'action relatif à l'application des réglementations forestières, à la gouvernance et aux échanges commerciaux.

(2)  Organisation internationale du travail.

(3)  Ruhong Li, J. Buongiorno, J.A. Turner, S. Zhu, J. Prestemon. Long-term effects of eliminating illegal logging on the world forest industries, trade and inventory. Forest policy and economics. 10 (2008) 480-490.

(4)  Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction.

(5)  Causes of forest encroachment: An analysis of Bangladesh (Causes de l'empiètement sur les forêts: une analyse du Bengladesh}. Iftekhar M.S., Hoque A.K.F. Journal Geo 62 (2005) 95-106.

(6)  Greenpeace. L'industrie du bois en Afrique. Impacts environnementaux, sociaux et économiques. (2001)

(7)  Economics of sustainable forest management (Science économique de la gestion durable des forêts. Éditorial Shashi S. Kant. Forest policy and economics (Politique et économie des forêts). 6 (2004) 197-203.


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/92


Avis du Comité économique et social européen sur le «Livre vert sur la gestion des biodéchets dans l'Union européenne»

COM(2008) 811 final

2009/C 318/18

Rapporteur: M. BUFFETAUT

Le 3 décembre 2008, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le

«Livre vert sur la gestion des biodéchets dans l'Union européenne»

La section spécialisée «Agriculture, Développement rural, Environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 2 septembre 2009 (rapporteur: M. BUFFETAUT).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 1er octobre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 160 voix pour, 1 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions

1.1

Le Comité économique et social européen accueille favorablement la démarche initiée par la Commission dans son livre vert. Toutefois, il regrette que la réflexion soit limitée aux seuls biodéchets et non à l’ensemble des déchets biodégradables.

1.2

À défaut de réglementation commune, il préconise donc une réglementation harmonisée dans ses principes et dans ses approches techniques.

1.3

Le CESE insiste sur la nécessité de respecter la hiérarchie des modes de gestion des déchets et d’inciter et de favoriser le recyclage ainsi que la valorisation, et notamment la valorisation énergétique.

1.4

Il est favorable à ce que le maximum soit fait pour développer la prévention de la production de déchets par les consommateurs et les producteurs industriels, tout en sachant que les tonnages que l'ont peut éviter demeurent d'une ampleur marginale. Dans la mesure où les conditions locales influent beaucoup sur la gestion des biodéchets et sur les possibilités d’utilisation du matériau produit, le Comité estime que l’Union européenne doit, pour le moment, donner la préférence à des lignes directrices claires et la définition d’objectifs de qualité plutôt que des règles contraignantes uniformes sur les modalités de production du compost. Les États membres doivent donc garder une marge de manœuvre dans la mise en œuvre des objectifs européens. Toutefois, il conviendrait d'opérer un bilan de la mise en œuvre de la politique de l'Union européenne cinq ans après la mise en œuvre d'éventuelles lignes directrices. Si ce bilan s'avérait insatisfaisant, il conviendrait alors d'envisager une législation plus contraignante.

2.   Qu’entend-on par biodéchets?

2.1

Il s’agit des déchets biodégradables de jardin ou de parc, des déchets alimentaires ou de cuisine issus des ménages, des restaurants ou traiteurs ou des magasins de vente au détail (métiers de bouche), ainsi que des déchets comparables provenant des usines de transformation de denrées alimentaires. La définition n’englobe donc pas les résidus agricoles et forestiers, le fumier, les boues d’épuration et autres déchets biodégradables, tels que les textiles naturels, le papier ou le bois transformé. L’objet du livre vert réside donc bien dans les biodéchets et non pas dans les déchets biodégradables, notion plus large qui englobe les biodéchets.

2.2

La quantité annuelle totale de biodéchets dans l’UE se situerait entre 76,5 et 102 millions de tonnes pour les déchets alimentaires et de jardin inclus dans les déchets municipaux solides mixtes et 37 millions de tonnes pour les déchets provenant de l’industrie agroalimentaire.

3.   Pourquoi un livre vert?

3.1

Un premier constat s’impose, les politiques nationales varient beaucoup d’un État membre à l’autre. La question est donc de savoir si des actions nationales sont suffisantes ou si une action communautaire serait préférable et plus efficace, en sachant que les conditions locales spécifiques ont leur importance, notamment le climat.

3.2

La directive-cadre sur les déchets demande à la Commission de procéder à une évaluation de la gestion des biodéchets afin d’envisager, le cas échéant, une proposition législative ou des lignes directrices.

3.3

Deux documents de travail ont été publiés en 1999 et 2001 mais la situation a considérablement évolué, notamment du fait de l’adhésion de douze nouveaux États membres.

3.4

Le livre vert a donc pour but d’explorer les possibilités d’améliorer la gestion des biodéchets dans l’Union européenne. Il s’agit d’ouvrir un débat sur l’opportunité d’une action communautaire future qui tienne compte de la hiérarchie du traitement des déchets et des avantages économiques, sociaux et environnementaux éventuels. La difficulté de l’exercice réside dans le fait qu’il existe beaucoup d’incertitudes sur la question.

4.   Les techniques existantes

4.1

On relève dans les États membres les techniques suivantes:

la collecte séparée qui permet la production d’un compost de qualité supérieure;

la mise en décharge, encore beaucoup utilisée pour les déchets municipaux solides (DMS);

l’incinération, avec valorisation énergétique (moins pertinente dans le sud où l’exploitation de la chaleur produite est moins utile);

le traitement biologique;

le cotraitement avec d'autres déchets;

la transformation du compost en pellets;

le traitement aérobique;

le traitement anaérobique;

le traitement biomécanique qui allie tri et traitement biologique.

4.2

Toutes ces techniques sont utilisées dans les États membres avec trois options dominantes: l’incinération pour éviter la mise en décharge, la valorisation à un taux élevé mais dont le taux d’incinération est assez faible, la mise en décharge.

4.3

Les normes existantes varient également. Il en existe sur l’utilisation et la qualité du compost; elles varient d’un État à l’autre. Il en existe également en ce qui concerne la valorisation énergétique. Elles sont d’origine communautaire.

4.4

Les incidences environnementales comme économiques diffèrent selon les techniques. La mise en décharge est considérée comme la solution la moins onéreuse, l’incinération exige un investissement plus important. En ce qui concerne le traitement biologique, les techniques sont si variées qu’il est difficile d’établir un coût unique.

5.   Considérations générales

5.1   Champ d'application

5.1.1

Le champ du livre vert ne couvre pas la totalité des déchets biodégradables. Ce choix est restrictif car les déchets biodégradables ne sont pas pris en compte dans leur ensemble. D’une certaine façon on crée ainsi une nouvelle catégorie de déchets biodégradables qui ne comporte que les déchets des parcs et jardins biodégradables et les déchets alimentaires ménagers, des activités de bouche ou de l’industrie agroalimentaire.

5.1.2

Les circuits de collecte et les outils de traitement des biodéchets et des déchets biodégradables, ainsi que parfois les filières de valorisation, sont conçus et mis en œuvre de façon commune. Dès lors une approche globale homogène au moyen d’une même réglementation eut été plus logique. Si cette réglementation unique s’avérait impossible à mettre en place, il serait nécessaire de parvenir à une réglementation harmonisée dans ses principes et dans ses approches techniques.

5.1.3

Les modes de gestion des biodéchets (et plus généralement des déchets biodégradables) doivent bien sûr respecter la hiérarchie des modes de gestion des déchets: prévention, recyclage (le réemploi étant sans objet en l’occurrence), autre valorisation dont la valorisation énergétique et enfin élimination.

5.1.4

La prévention est évidemment souhaitable. Dans la pratique, il s’agit de limiter la part non consommée de nourriture dans les déchets et de limiter la production de déchets de jardins et de parcs grâce à des méthodes de culture adaptées. Toutefois, il convient d’être réaliste, la production de biodéchets est inévitable.

5.1.5

Pour ce type de déchets le recyclage doit être considéré comme le mode de gestion prioritaire. Il s’agit de produire de l’amendement organique par compostage, voire de l’engrais par méthanisation. Le mode de collecte précédant le traitement biologique revêt une grande importance. On peut procéder par collecte sélective à la source ou par collecte en mélange suivi d’un tri en usine. Il convient de souligner ici que la qualité du produit entrant dans la fabrication du compost a un impact fort sur la qualité du produit final. L’important est que les objectifs en matière de recyclage et de qualité du matériau final soient atteints quels que soient la technologie ou le mode d'organisation retenus.

5.1.6

Pour les déchets biodégradables, la valorisation passe par une valorisation dont les rendements sont optimisés par la méthanisation. La valorisation énergétique de la fraction résiduelle des déchets est un complément indispensable des filières de recyclage des déchets biodégradables afin de ne pas gaspiller l’énergie qu’ils recèlent.

5.2   L’utilisation des composts

5.2.1

En ce qui concerne l’utilisation des composts, il faut souligner que les débouchés sont très variés selon les contextes des États membres et que les relations commerciales d’import/export sont très limitées. Le marché des composts est essentiellement local. Dans certains pays l’usage est principalement agricole, dans d’autres plus orienté vers la végétalisation ou les amendements destinés aux particuliers. Dès lors il semble logique que la réglementation soit pensée en fonction de l’usage dont il sera fait du produit final. Il est possible de discerner trois grands types d’usage/produit:

nutrition des végétaux et des sols;

amélioration des propriétés physiques des sols;

remplacement partiel des sols.

5.2.2

Dans tous les cas, les critères de qualité sanitaire et environnementale des matériaux finaux (composts ou digestats) doivent être établis sur la base d’études de risques scientifiques. Les critères finaux de qualité des composts ou digestats doivent être déterminés en fonction des usages envisagés et de vraies analyses de risques reposant sur des méthodologies solides et éprouvées.

5.3   Le niveau de décision

5.3.1

Pour développer le traitement des biodéchets, dont les conditions varient en raison de la géographie, du climat, des débouchés pour le compost, il est préférable de s’en remettre aux États membres dans le cadre de lignes directrices claires établies sur le plan européen, ainsi qu’en référence à des critères de qualité scientifiquement établis.

5.3.2

La politique de l’UE devrait ainsi reposer sur la définition de standards pour le compost, un support fort à la collecte séparée et le recyclage, la définition de standards dans le processus de production du compost et l'échange de bonnes pratiques. L’ensemble doit cependant conserver une certaine souplesse, d’où la préférence à des lignes directrices claires plutôt qu’à des mesures législatives par trop contraignantes et mal adaptées aux conditions locales. En fait les autorités locales disposent d’une palette de mesures dont la politique tarifaire et la fiscalité. Ainsi, par exemple, en France le fait pour une commune de choisir le tri sélectif entraine une diminution de la taxe sur l’enlèvement des ordures ménagères qui bénéficie directement aux contribuables, ce qui constitue une mesure fortement incitatrice pour les autorités municipales. Néanmoins il demeure que la collecte séparée est plus facile à organiser dans les zones rurales ou péri-urbaines que dans le cœur même des villes, notamment des villes anciennes.

5.4   La classification du compost. Plutôt que classifier a priori la qualité du compost en fonction du type de collecte, sélective ou mixte, il conviendrait de déterminer des critères de qualité du produit fini quel que soit son origine, en fonction de critères scientifiques et sanitaires solides et de l’usage projeté.

5.5   Les techniques à encourager. Si la collecte séparée peut difficilement être imposée, car elle peut s’avérer pratiquement très difficile notamment dans les centres urbains, elle doit néanmoins être encouragée lorsqu’elle est techniquement et économiquement possible. Ceci doit être accompagné d'une forte politique d'information et de communication afin de provoquer un changement de comportement et d'habitudes de la part de la population.

5.5.1

Le traitement biologique doit être favorisé plutôt que d’autres formes de traitement et notamment la mise en décharge. On notera qu’à cet égard des instruments économiques et fiscaux peuvent inciter à trouver d’autres solutions que la mise en décharge, par exemple l’augmentation ou la création de redevances ou de taxes à acquitter pour la mise en décharge afin de financer leur traitement en fin d’exploitation. Encore faut-il que des alternatives soient offertes à un coût abordable.

5.5.2

La hiérarchie des déchets doit être rappelée et les mesures de prévention renforcées.

5.6   Installations non couvertes par la future directive IPPC. Les installations qui échappent à l’application de la future directive IPPC (moins de 50 Mt de déchets traités) devraient respecter un schéma d’assurance qualité. Encore faut-il souligner que si ces petites installations représentent 30 % des installations, elles ne traitent qu’un très faible pourcentage du tonnage total des déchets.

6.   Considérations spécifiques: huit questions

6.1   La Commission pose huit questions précises aux parties prenantes. Le Comité économique et social européen se propose d’y répondre.

6.2   Question 1: prévention des déchets

6.2.1

On ne peut que souscrire à l’objectif général de prévention de la production de déchets. La prévention peut être quantitative ou/et qualitative. Dans le premier cas, il s’agit de limiter la quantité de déchets entrant dans les circuits de gestion collective par le compostage à domicile voire de quartier, mais ces techniques restent, en pratique, limitées sur le plan des volumes et leur impact est faible dans le court et moyen terme. Dans le second cas, il s’agit d’éviter la contamination des déchets biodégradables.

6.2.2

Dans les deux cas il est nécessaire de sensibiliser et d’éduquer la population qui est un acteur essentiel non seulement dans la production des déchets mais encore dans leur tri et leur collecte. Concrètement, cette sensibilisation devrait d’abord être ciblée sur les plus gros producteurs de déchets.

6.2.3

Des mesures spécifiques pourraient être préconisées:

campagnes afin de prévenir la production de déchets alimentaires;

emploi de sacs de collecte biodégradables et intégralement compostables;

collecte sélective des déchets dangereux diffus des ménages;

incitation au développement des collectes sélectives de biodéchets pour les plus gros producteurs;

prévention de la production de déchets dans la chaine d'approvisionnement.

6.3   Question 2: limitation de la mise en décharge

6.3.1

Le fait de restreindre davantage la mise en décharge des biodéchets a des avantages écologiques et permettrait la valorisation énergétique des biodéchets, de recycler des matières et de produire davantage de compost, mais nécessite l'existence d'alternatives à un coût abordable.

6.3.2

Il conviendrait de stimuler les traitements biologiques, par exemple grâce à des outils financiers. En France, l’augmentation de la taxe sur l’enfouissement s’accompagne d’une redistribution pour les traitements biologiques. La fixation de taux de recyclage des déchets biodégradables doit aussi être envisagée.

6.4   Question 3: Possibilités de traitement des biodéchets détournés de la mise en décharge

6.4.1

La digestion anaérobie des déchets avec valorisation énergétique du biogaz et utilisation du digestat pour la fabrication de compost paraît particulièrement indiquée. Cette méthode est conforme au concept de «cycle de vie» puisqu’elle permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre, d’améliorer la qualité des sols grâce au compost et de valoriser énergétiquement le biogaz.

6.4.2

En tout état de cause, et quelle que soit la technique retenue, la priorité doit être donnée au recyclage avec production de fertilisants destinés au retour au sol, via les traitements biologiques dont le bilan environnemental est unanimement reconnu comme positif.

6.4.3

Le concept de cycle de vie est intéressant mais son usage pratique se heurte au fait que les outils de mise en œuvre actuellement disponibles ne permettent pas de le mettre en application. Les méthodologies d’évaluation de la gestion doivent être améliorées afin de tenir compte des effets du changement climatique et de la question de la qualité des sols.

6.4.4

La faculté d'incinérer les déchets homogènes devrait être assortie de conditions plus souples, eu égard au fait que pour ces déchets, l'incinération présente moins de risques.

6.5   Question 4: valorisation énergétique des biodéchets

6.5.1

Les déchets biodégradables municipaux contribuent à hauteur de 2,6 % à la production d’énergie renouvelable. Ceci est le résultat des modes de traitement actuellement utilisés: incinération, traitement du biogaz issu des décharges, biogaz issu de méthanisation.

6.5.2

D’après l’Agence européenne pour l’environnement, le potentiel énergétique des déchets municipaux serait de 20 millions de tonnes équivalent pétrole, ce qui représente près de 7 % du potentiel global des énergies renouvelables dont on disposera en 2020. La marge de progression est donc importante. Il ne convient donc pas de considérer de façon a priori négative la valorisation énergétique des biodéchets. Le développement de la méthanisation des biodéchets doit être considéré comme une voie intéressante à encourager.

6.5.3

Il est essentiel de promouvoir le développement de nouvelles technologies plus efficaces en vue d'une utilisation accrue d'usines de production de biogaz pour l'élimination des déchets et d'autres formes d'exploitation des déchets pour la production de biocarburants.

6.6   Question 5: le recyclage des biodéchets

6.6.1

Le soutien au renforcement du recyclage et de la valorisation des biodéchets est indispensable. Il faut non seulement informer et encourager les producteurs de biodéchets, mais également agir auprès des administrations chargé de ces dossiers. On pourrait envisager d’inciter chaque État membre à fixer un objectif d’utilisation de fertilisants d’origine renouvelable.

6.6.2

Pourraient être envisagées les mesures suivantes:

des incitations fiscales en faveur des opérations de recyclage des déchets biodégradables et de valorisation des composts/digestats;

l’introduction de clauses dans les marchés publics privilégiant l’utilisation de fertilisants d’origine renouvelable;

la promotion de systèmes d’assurance qualité sur les étapes de traitements biologiques;

la valorisation énergétique de la fraction résiduelle des déchets.

6.7   Question 6: promouvoir l’utilisation du compost/digestat

6.7.1

Compte tenu de la diversité des usages et de la diversité des produits, il faudrait fixer des règles à la fois sur les composts et leur usage.

6.7.2

En ce qui concerne les composts, il y a lieu de fixer des seuils limites relatifs aux contaminants, polluants et éléments pathogènes.

6.7.3

Pour l’usage des composts il serait souhaitable de fixer:

des objectifs de nutrition des végétaux et des sols;

des objectifs d’amélioration des propriétés physiques des sols;

des objectifs de remplacement partiel des sols.

6.7.4

Chaque objectif correspondrait aux caractéristiques et aux qualités des composts concernés. Dans chacun de ces cas, des critères de qualité sanitaire et environnementale des matériaux finaux devraient être déterminés sur le fondement d’études de risques scientifiques. Ces critères porteraient sur les polluants, les pathogènes et les impuretés.

6.7.5

La question de l’utilisation de compost obtenu à partir de déchets mixtes soulève la question du mode de traitement. La collecte sélective à la source est la plus sûre mais toujours pas facile à organiser. L’autre solution réside dans une collecte en mélange suivie d’un tri en usine ou centre de tri. Dès lors, dans la mesure où il existe plusieurs techniques disponibles, il convient de s'assurer que les objectifs de recyclage et de qualité du matériau final sont atteints, quel que soit le procédé retenu.

6.8   Question 7: des lacunes dans le cadre réglementaire

6.8.1

Toutes les installations de traitement de déchets doivent faire l’objet d’un suivi et d’un encadrement stricts. Un texte spécifique à la gestion des déchets biodégradables fixant des standards minimaux européens permettrait, sans modifier le seuil de la directive IPPC, d’assurer un meilleur suivi des installations de compostage qui sont souvent en deçà de ce seuil.

6.9   Question 8: avantages et inconvénients des techniques de gestion des biodéchets

6.9.1

Le Livre vert reprend la hiérarchie des déchets. C’est ainsi à juste titre qu’il est préconisé de limiter la mise en décharge. L’incinération peut constituer un bon moyen de valorisation des biodéchets, toutefois, par définition, en ce cas, les nutriments contenus dans les biodéchets ne sont pas utilisés pour améliorer la qualité des sols. La mise en compostage présente l’avantage de produire un matériau doté d’une forte valeur fertilisante et de propriétés propices au conditionnement des sols. L’inconvénient réside dans la production d’émissions de gaz à effets de serre durant la fabrication du compost. La digestion anaérobie des déchets avec production et valorisation énergétique du biogaz et utilisation du digestat pour la fabrication de compost est plus complexe et nécessite des investissements plus conséquents que la mise en compostage, toutefois elle permet d’obtenir une source d’énergie renouvelable plus noble.

6.9.2

En tout état de cause, il convient de préserver la capacité d’innovation technologique des opérateurs afin qu’ils puissent faire évoluer les filières et les améliorer tant sur le plan économique que quantitatif et qualitatif. L’essentiel est d’assurer la meilleure qualité possible du compost produit et il convient de se concentrer sur des obligations de résultat, grâce à des seuils scientifiquement établis, et non sur la détermination des moyens techniques prédéterminés.

Bruxelles, le 1er octobre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/97


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Une approche communautaire de la prévention des catastrophes naturelles ou d'origine humaine»

COM(2009) 82 final

2009/C 318/19

Rapporteure: Mme María Candelas SÁNCHEZ MIGUEL

Le 23 février 2009, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions - Une approche communautaire de la prévention des catastrophes naturelles ou d'origine humaine»

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 2 septembre (rapporteuse: Mme María Candelas SÁNCHEZ MIGUEL).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 1er octobre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 165 voix pour et 2 abstentions.

1.   Conclusions

1.1

La prévention est un principe fondamental de la protection et de la préservation de l'environnement, de même qu'un moyen de minimiser les dommages que pourraient occasionner à la population civile les catastrophes naturelles ou d'origine humaine provoquées par une utilisation non durable des ressources naturelles. Le CESE a rappelé en plusieurs occasions la nécessité que les autorités compétentes de chaque État mettent en œuvre les dispositions en vigueur en la matière et en contrôlent le respect.

1.2

L'approche globale proposée pour la prévention des catastrophes nous paraît appropriée. À cet égard, nous attachons une importance essentielle à tous les instruments de collecte de l'information, tant en ce qui concerne l'évaluation de la situation actuelle – inventaire, cartographie des risques et bonnes pratiques – que la mise en œuvre des programmes de travail annuels du mécanisme communautaire de protection civile, via le Centre de suivi et d'information. Le rôle des autorités locales devrait encore une fois être souligné dans ce contexte, en insistant dans la proposition sur leur rôle dans l'information de la population civile sur les méthodes et les mesures de prévention ainsi que dans la gestion de catastrophes.

1.3

S'agissant des systèmes de financement des mesures de prévention proposés, il nous paraît nécessaire, sur la base d'un inventaire des actuels systèmes de prévention des catastrophes ainsi que des autres systèmes concrets mis en place dans le cadre des politiques agricoles, industrielles, etc., d'étendre le financement à d'autres domaines relatifs à la préparation, la planification et l'alerte précoce. Pour ce faire, il conviendrait de disposer de moyens financiers suffisants, afin de ne pas compromettre l'efficacité actuelle du mécanisme.

1.4

La recherche dans le domaine des mesures de prévention des catastrophes est un aspect essentiel qu'il convient de développer. Il ne suffit pas de faire référence au septième programme cadre de recherche et de développement technologique. Il faudrait prévoir des fonds propres pour les programmes spécifiques de prévention des risques, ce non seulement au niveau de la Communauté mais aussi des États membres.

1.5

Enfin, la coopération internationale dans le domaine de la prévention vient compléter la coopération déjà existante en matière d'intervention et de secours lors des catastrophes. Il s'agit d'un instrument fondé sur la solidarité et appliqué non seulement au sein de l'ONU, mais aussi dans le cadre d'autres accords internationaux signés par l'UE, tels qu'Euromed, les accords de Lomé, ceux conclus avec l'Amérique latine, etc.

2.   Introduction

2.1

Si l'UE a décidé de prendre des mesures préventives de lutte contre le changement climatique, c'est non seulement en raison des engagements pris à l'échelon international mais aussi à la suite des catastrophes naturelles ou d'origine humaine répétées qui se sont succédé ces dernières années en Europe. Cette approche préventive peut permettre non seulement de préserver et de régénérer l'état de nos sols, de nos mers et de nos cours d'eau, mais également de favoriser l'extension de ces dispositions à d'autres pays.

2.2

Les mesures énoncées dans la communication à l'examen sont le fruit d'une pratique suivie dans la plupart des pays communautaires dans des circonstances spécifiques (inondations, incendies) et qui a débouché sur l'instauration, en un court laps de temps, d'une coordination communautaire ayant permis d'intervenir de manière rapide et efficace, y compris au niveau international.

2.3

Le CESE a appelé de ses vœux une coordination et surtout le développement au niveau communautaire d'une approche européenne intégrée de prévention des catastrophes (1). Cela étant, il souhaite insister sur la nécessité d'accompagner ces mesures de prévention d'un système communautaire d'intervention face aux catastrophes de tous types, qui devrait être conçu comme un système d'assistance solidaire non seulement à l'égard des pays communautaires mais aussi de tous ceux qui ont besoin de notre savoir-faire et de nos moyens pour atténuer les effets de ces catastrophes.

2.4

La prévention est un principe fondamental en ce qui concerne la protection et la préservation de l'environnement ainsi que la minimisation des dommages subis par la population civile. Elle vise à une utilisation durable des ressources naturelles. Face à l'accélération brutale ces derniers temps du nombre de victimes, du recul de la biodiversité et des pertes économiques, nous devons reconsidérer la question du respect de la législation existante. Le CESE a insisté à cet égard sur la nécessité que les autorités compétentes de chaque État appliquent les dispositions en vigueur et en contrôlent le respect (2), ce qui aurait permis d'éviter certaines catastrophes ou du moins d'en limiter les effets.

2.5

La portée des objectifs de prévention contenus dans la communication à l'examen ne se limite pas à l'UE. Ainsi s'est tenue à Genève, du 16 au 19 juin derniers, la deuxième session de la Plateforme mondiale pour la réduction des risques de catastrophes, marquée par une forte participation de l'UE. D'une manière générale, le contenu des conclusions est en accord avec les objectifs proposés par la Commission européenne. Certaines de ces conclusions seront commentées dans le présent avis.

3.   Résumé des propositions contenues dans la communication

3.1

La communication à l'examen est le résultat de l'engagement pris par la Commission vis-à-vis du Parlement européen et du Conseil de renforcer l'action communautaire dans le but de prévenir les catastrophes et d'en atténuer les effets.

3.2

Les éléments clés de la mise en œuvre d'une approche préventive reposent essentiellement sur des mesures déjà adoptées au niveau européen et faisant partie de la législation sectorielle en vigueur. Il s'agit d'ordonner les actions et les moyens existants et de leur conférer une certaine cohésion afin que l'on puisse en avoir une vue d'ensemble. Il y a notamment lieu de souligner les aspects suivants.

3.2.1

Il convient d'assurer une meilleure connaissance des conditions de départ et de la situation actuelle, grâce à un inventaire des informations sur les catastrophes, et une diffusion des meilleures pratiques afin de permettre un échange d'informations entre les parties concernées. Cela permettra d'établir une cartographie des dangers et des risques, par analogie avec les dispositions de la directive 2007/60/CE relative à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation (3). Il est essentiel à cet égard de promouvoir la recherche, comme le prévoit le septième programme cadre de recherche et de développement technologique (2007-2013).

3.2.2

L'établissement de liens entre les acteurs et les politiques tout au long du cycle de gestion des catastrophes constitue l'une des autres mesures clés proposées. Le mécanisme communautaire de protection civile sera une pièce maîtresse de ce dispositif, compte tenu de la vaste expérience acquise au fil de ses interventions. Mais il faut aussi insister sur la nécessité de former et sensibiliser le grand public dans le domaine de la prévention. L'accent est également mis sur l'amélioration des liens entre les parties prenantes et il est proposé de créer un réseau européen composé de représentants des différents services nationaux.

3.2.3

L'une des clés de la prévention consiste à améliorer l'efficacité des instruments existants, et notamment à mieux cibler les financements communautaires, sachant qu'il est moins coûteux de prévenir que de réparer. Ces mesures devront être prises en compte dans certains des fonds existants (par exemple les projets de boisement/reboisement), dans le cadre de la législation communautaire en vigueur, où elles feront office de dispositions préventives pour un grand nombre de catastrophes naturelles.

3.3

Enfin, il est proposé de renforcer la coopération internationale dans le domaine de la prévention. La Commission travaillera en coordination avec la Stratégie internationale de prévention des catastrophes de l'ONU ainsi qu'avec d'autres organisations dans le cadre du partenariat euro-méditerranéen et de la politique européenne de voisinage.

4.   Observations concernant la proposition

4.1   Le CESE évalue très positivement le contenu de la communication de la Commission. Il est vrai que celle-ci introduit peu de nouveautés, mais cette approche peut se justifier. Si toutes les dispositions communautaires en vigueur étaient respectées, les mesures de prévention feraient la preuve de leur efficacité en évitant et en atténuant dans bien des cas les catastrophes qui malheureusement se produisent de plus en plus fréquemment. Le CESE (4) a fait de la prévention l'une de ses revendications les plus fréquentes.

4.2   Concernant certaines de ces propositions, il convient de mettre en avant leur intérêt en tant qu'approche globale ne s'appliquant pas seulement à des phénomènes concrets, comme dans le cas des inondations. Le Comité considère que les catastrophes, qu'elles soient naturelles ou d'origine humaine, requièrent une méthode de prévention générale s'appuyant sur une information aussi complète que possible sur l'état actuel de nos sols, de nos mers et cours d'eau et de notre atmosphère ainsi que des fuites qui pourraient se produire dans les installations souterraines de stockage de dioxyde de carbone. Ainsi, la proposition de création d'un inventaire des informations sur les catastrophes permettra l'établissement d'une cartographie des risques, comme le prévoit la directive sur les inondations, qui exigera une action préventive de la part des autorités compétentes.

4.2.1

Les autorités compétentes en matière d'environnement diffèrent en fonction de l'organisation territoriale de chaque État (5). Le Comité juge toutefois important qu'elles soient responsables en première instance, aussi bien en ce qui concerne les mesures préventives que l'information et l'éducation de la société civile. C'est d'elles que dépend dans une large mesure l'efficacité des mesures adoptées pour prévenir ou atténuer les effets des catastrophes, tant naturelles que d'origine humaine.

4.3   Le Comité estime opportun de souligner l'importance de l'instrument financier pour la protection civile (6) qui permet, au moyen des programmes de travail annuels, de couvrir, outre les activités proprement dites du mécanisme communautaire de protection civile (transports, formation, etc.), d'autres activités dans le domaine de la préparation, de la planification, de l'alerte précoce et de la prévention.

4.4   Le programme de travail 2009 (PT), adopté en novembre 2008, prévoit d'augmenter de manière significative le poste «Projets de coopération dans le domaine de la prévention», qui passe de 1,1 million d'euros (PT 2008) à 2,25 millions d'euros (PT 2009), ce qui favorisera la prévention et la réduction des dommages à long terme grâce à une meilleure évaluation des risques. Des acteurs impliqués dans la protection civile à tous les niveaux de l'administration et de la société peuvent y participer.

4.5   Il apparaît également important de signaler l'augmentation notable dans ce programme de travail des activités de soutien et de préparation du mécanisme - dont l'un des objectifs est d'assister la Commission dans la mise en œuvre de la stratégie de prévention des catastrophes et de développer les connaissances en la matière -, dont le budget passe de 650 000 euros (PT 2008) à 1,18 million d'euros, ainsi que l'inclusion dans le programme de travail 2009 d'un chapitre relatif aux échanges de bonnes pratiques en matière de prévention.

4.6   La diffusion des meilleures pratiques permettra non seulement d'assurer une meilleure coordination entre les autorités compétentes mais aussi d'améliorer la mise en œuvre des mesures de prévention des risques et des interventions concrètes en cas de catastrophe. Le Comité estime à cet égard que c'est le mécanisme communautaire de protection civile (7), par l'intermédiaire de son Centre de suivi et d'information, qui doit être chargé de centraliser ces bases de données afin de les rendre plus opérationnelles.

4.7   Dans cette optique, le Comité considère que la proposition d'améliorer la liaison entre tous les acteurs par le biais d'un réseau européen composé des différents services nationaux permettra non seulement de mettre en œuvre les meilleures pratiques lors des catastrophes, mais jouera aussi un rôle préventif dans les cas où l'intervention s'avère habituellement difficile.

4.8   Le financement des mesures de prévention constitue un aspect important. La proposition prévoit deux dispositifs:

l'établissement en 2009 d'un inventaire des instruments communautaires destinés à financer la prévention des catastrophes, afin d'évaluer leur degré d'utilisation ainsi que les lacunes éventuelles (8);

la production d'un catalogue des mesures préventives financées par les différentes politiques communautaires, tels que les projets de boisement/reboisement.

4.9   Le CESE estime qu'en dehors de ces propositions, il convient également de se pencher sur la question d'un financement approprié de la protection civile (Instrument financier pour la protection civile), afin que les nouvelles missions qui lui sont imparties n'aient pas pour effet de restreindre la capacité d'action du mécanisme communautaire, tant dans le domaine de la prévention que dans celui de la gestion des catastrophes.

4.10   Par ailleurs, il convient d'insister à nouveau sur l'importance de la recherche en matière de prévention. À cet égard, il s'avère nécessaire d'investir dans des domaines hautement prioritaires, qui commencent du reste à être abordés dans le septième programme cadre de recherche et de développement technologique (2007-2013). Cela étant, s'agissant des mesures concrètes de prévention, il serait envisageable de recourir à d'autres moyens de financement en rapport avec le domaine concerné, tels que les ressources du second pilier de la PAC pour les interventions dans le domaine de la sylviculture. À cet égard, le Comité est avis que la Commission devrait identifier les sources de financement potentiellement disponibles dans les différentes politiques communautaires, et non pas seulement au sein de la PAC, telles que la politique régionale, la politique énergétique, la politique de lutte contre le changement climatique, etc., de manière à pouvoir mettre en œuvre une action préventive efficace pour tous types de catastrophe.

4.11   Il convient en outre de souligner l'importance d'une prise de conscience des citoyens, des organisations sociales et des organisations de volontariat quant à la nécessité de politiques de prévention, condition d'une plus grande sécurité et d'une réaction adéquate aux situations d'urgence. La formation et la sensibilisation de la société civile en ce qui concerne la prévention et l'utilisation appropriée des ressources naturelles font partie des missions essentielles des autorités compétentes, et plus particulièrement des autorités locales, du fait de leur proximité avec les ressources et leurs modalités d'utilisation.

4.12   Enfin, la proposition de renforcer la coopération internationale dans le domaine de la prévention, et non pas seulement dans celui des interventions, constitue l'un des aspects essentiels de la Stratégie internationale de prévention des catastrophes de l'ONU dans les pays en développement. En tout état de cause, il conviendrait d'envisager, sous l'égide de l'ONU, une universalisation des mécanismes d'intervention, sans pour autant minimiser l'intervention européenne, qui a été si précieuse lors des dernières catastrophes.

4.13   La politique européenne de voisinage devrait comporter de manière systématique un chapitre consacré à la coopération en matière de prévention des risques, afin de promouvoir le développement durable, conformément entre autres aux objectifs du Millénaire pour le développement et au cadre d'action de Hyogo de la Stratégie internationale de prévention des catastrophes des Nations unies.

Bruxelles, le .1er octobre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 204 du 9.8.2008, p. 66.

(2)  JO C 221 du 8.9.2005, p. 35.

(3)  JO L 288 du 6.11.2007.

(4)  JO C 221 du 8 septembre 2005, p. 35, JO C 195 du 18 août 2006 p. 40 et JO C 204 du 9 août 2008, p. 66.

(5)  Le point 12 des conclusions de la Plateforme appelle au développement d'une coopération qui reconnaisse et renforce la dépendance mutuelle entre les autorités centrales et locales et la société civile.

(6)  Décision du Conseil, du 5 mars 2007, instituant un instrument financier pour la protection civile (2007/162/CE, EURATOM)

(7)  JO C 204 du 9 août 2008.

(8)  L'opportunité d'évaluer les éventuels instruments de financement disponibles à l'échelle mondiale pour la réduction des catastrophes est reconnue au point 17 des conclusions de la Plateforme.


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/101


Avis du Comité économique et social européen sur le «Livre vert — RTE-T: un réexamen des politiques. Vers une meilleure intégration du réseau transeuropéen de transport au service de la politique commune des transports»

COM(2009) 44 final

2009/C 318/20

Rapporteur: M. SIMONS

Le 4 février 2009, la Commission a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur le

«Livre vert – RTE-T: un réexamen des politiques. Vers une meilleure intégration du réseau transeuropéen de transport au service de la politique commune des transports»

La section spécialisée «Transports, énergie, infrastructures, société de l'information», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 septembre 2009 (rapporteur: M. Simons).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 30 septembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 167 voix pour, 1 voix contre et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité partage l'avis de la Commission en ce qui concerne la nécessité de procéder à une révision en profondeur des orientations en matière de RTE-T, l'Union européenne s'étant élargie à un grand nombre d'États membres depuis 1996. Pour cette raison et compte tenu de l'évolution des priorités politiques – notamment une attention accrue pour les questions d'environnement et de climat – une réorientation du réseau communautaire d'infrastructures de transport s'impose.

1.2

S'agissant de la problématique de l'augmentation des émissions de CO2 et des lacunes infrastructurelles et organisationnelles du transport de marchandises, le Comité peut se retrouver dans l'idée de la Commission visant à rechercher des solutions comodales pour ce type de transport afin de créer des synergies au bénéfice de l'utilisateur.

1.3

Le CESE souhaite que l'établissement d'un nouveau RTE-T prenne en compte de manière expresse la politique dite de voisinage, les liaisons vers l'est et le sud de l'Union européenne. Dans ce cadre, la Commission et les États membres devraient surtout se focaliser sur le réseau dans son ensemble et non sur chaque chantier d'infrastructure. Cela renforcera la solidarité entre les États membres.

1.4

En ce qui concerne la forme que prendra le futur RTE-T, la Commission propose trois options. À l'instar du Conseil, le Comité accorde sa préférence à une structure à deux niveaux, avec un réseau global et un réseau central dans lequel un réseau prioritaire délimité géographiquement serait combiné à un pilier théorique afin d'intégrer la politique des transports ainsi que des aspects infrastructurels. De l'avis du CESE, cette option permettra d'utiliser les ressources financières de l'UE plus efficacement que cela n'a été le cas jusqu'à présent. Un groupe de coordination devrait être mis sur pied afin d'assurer le suivi de l'allocation des fonds.

1.5

Le Comité attire l'attention de la Commission sur le fait que tant la mise en place du réseau prioritaire que le fonctionnement de systèmes interopérables de gestion du trafic requièrent de concevoir un cadre de mise en œuvre plus contraignant, prévoyant notamment des mesures de sanction adéquates.

1.6

Dans le cadre de la planification à venir du RTE-T, le CESE marque son accord sur l'approche adoptée par la Commission telle que présentée dans son livre vert, en ce qui concerne le principe selon lequel chaque mode de transport est utilisé en fonction de ses avantages comparatifs dans le cadre de chaînes de transport comodales efficaces et joue de cette manière un rôle important dans la réalisation des objectifs de l'Union en matière de climat. Le but doit rester une évolution vers la chaîne de transport la plus respectueuse de l'environnement qui soit.

2.   Introduction

2.1

Le 4 février 2009, la Commission a publié le Livre vert intitulé «RTE-T: un réexamen des politiques. Vers une meilleure intégration du réseau transeuropéen de transport au service de la politique commune des transports», lequel présente une révision de la politique de la Commission dans le domaine du réseau transeuropéen de transport (RTE-T).

2.2

Par le biais de cette révision, la Commission entend associer le plus grand nombre possible de parties prenantes en vue de pouvoir exploiter les connaissances disponibles, l'expérience accumulée et les différents points de vue. À cette fin, elle a lancé une consultation publique, qui a été clôturée le 30 avril 2009.

2.3

La Commission a l'intention d'analyser les résultats de cette consultation publique et de s'en inspirer dans le cadre des activités liées au développement de la nouvelle politique en matière de RTE-T. Le reste de l'année 2009 devrait être consacré au traitement des différentes réactions suscitées par le livre vert et à la réalisation des études nécessaires. La Commission prévoit de présenter la méthodologie de cette politique au début de l'année 2010 et de formuler ensuite, pour la fin de cette même année, des propositions législatives concernant la révision des orientations dans le domaine du RTE-T et, éventuellement, le règlement RTE-T.

2.4

Dans le traité CE (articles 154-156) la politique du RTE-T est définie comme une contribution à la réalisation des objectifs du marché intérieur en matière de croissance et de création d'emplois et au développement d'une cohésion sociale, économique et géographique devant bénéficier à l'ensemble des citoyens et des opérateurs économiques.

2.5

Dans le même temps, il convient de mettre en place un développement durable en accordant aux exigences liées à la protection de l'environnement une place centrale dans la politique. La politique du RTE-T devra être orientée de façon à contribuer de manière substantielle à la concrétisation des objectifs climatiques «20-20-20» de l'UE.

2.6

La politique de l'Union en matière de réseaux transeuropéens a pris forme dans les années 1990-1995 et a été lancée officiellement en 1996, par une décision du Parlement européen et du Conseil. Depuis lors, 400 milliards d'euros ont été investis dans divers projets d'infrastructures de transport d'intérêt commun. Il convient toutefois d'observer qu'un retard important a été accumulé dans la finalisation de nombreux projets. Notamment au cours de la première période du RTE (1996-2003), par rapport au nombre total de projets prioritaires, la plupart des projets menés à bien par les États membres concernent le transport routier. Il convient, dans les cas évidents, de développer davantage et sans tarder les infrastructures destinées à des modes de transport plus respectueux de l'environnement.

2.7

Environ 30 % des 400 milliards d'euros investis proviennent de sources communautaires telles que le budget RTE-T, le Fonds de cohésion, la BERD et la BEI. On estime le reliquat des postes d'investissement à 500 milliards d'euros. Il est prévu d'allouer 80 % de l’ensemble des fonds destinés aux projets RTE-T prioritaires au secteur ferroviaire.

2.8

L'expérience a révélé la difficulté pour les citoyens européens de percevoir les résultats engrangés par la politique du RTE-T et la valeur ajoutée de cette dernière. Dans le livre vert à l'examen, la Commission s'efforce d'y remédier par le biais de l'approche qu'elle a définie et place les objectifs liés au changement climatique au centre de la future politique en matière de RTE-T.

2.9

La Commission considère elle-même qu'une révision en profondeur de la politique du RTE-T s'impose. Il conviendrait d'établir une base saine pour contribuer efficacement aux objectifs climatiques de l'Union en lançant un processus qui intégrerait les objectifs économiques et environnementaux et serait clairement axé sur la nécessité d'un transport de passagers et de marchandises efficace. Ce processus miserait sur la comodalité et s'appuierait sur des techniques novatrices.

2.10

Compte tenu de l'amplitude du champ d'application de la révision, qui comporte des dimensions tant politiques que socio-économiques, environnementales, institutionnelles, géographiques et techniques, la Commission a opté pour la publication d'un livre vert dans lequel elle a présenté ses vues et offert aux parties prenantes la possibilité, au travers de la consultation, de prendre une part active à la réflexion et d'émettre des suggestions concernant une nouvelle politique du RTE-T.

2.11

S'agissant du livre vert sur la future politique du RTE-T, le Parlement européen a observé, dans sa résolution datant du 22 avril 2009, qu'il soutient la notion assez vague de pilier théorique du RTE-T, bien qu'il voie également l'utilité des projets concrets, et estime que les modes de transport respectueux de l'environnement devraient être surreprésentés dans la liste des projets prioritaires.

2.12

Lors de sa réunion des 11 et 12 juin 2009, le Conseil des ministres a considéré que tous les projets RTE-T prioritaires en cours devraient faire partie intégrante d'un réseau prioritaire cohérent, regroupant tant des infrastructures déjà réalisées que des infrastructures en voie de réalisation et des projets d'intérêt commun. Ces projets devraient être multimodaux et les nœuds et les connexions intermodales devraient bénéficier de toute l'attention voulue.

2.13

Le Conseil considère également que la politique du RTE-T devrait apporter une contribution importante à la réalisation des objectifs de protection de l'environnement et de changement climatique. Une intégration et une coopération optimales de l'ensemble des modes de transport, au niveau tant des infrastructures physiques que des systèmes intelligents de transport, devraient assurer l'efficacité de services de transport comodaux et former par ce biais une base solide pour la réduction des émissions de CO2 et d'autres émissions dans le secteur des transports.

3.   Observations générales

3.1

Le Comité estime que la Commission, après avoir pris acte du fait que la mise en œuvre de la décision prise en 1996 par le Parlement européen et le Conseil en vue de la création d'un réseau transeuropéen d'infrastructures d'intérêt communautaire ne s'est pas déroulée conformément à la planification – fait également constaté dans la Communication de la Commission intitulée «Réseaux transeuropéens: vers une approche intégrée», COM(2007) 135 final – a pris les mesures adéquates en cherchant à poser les jalons d'une révision fondamentale de la politique du RTE-T grâce à une consultation publique dans le cadre de l'élaboration du Livre vert.

3.2

Le CESE estime également qu'une révision en profondeur des orientations en matière de RTE-T est nécessaire, l'Union européenne s'étant élargie à un grand nombre d'État membres depuis 1996. Cette évolution rend une réorientation du réseau communautaire d'infrastructures de transport indispensable.

3.3

L'évaluation politique des orientations en matière de RTE-T menée par la Commission souligne que l'élargissement de l'UE a affaibli la planification du réseau établie initialement, qui visait à relier entre elles de vastes parties des réseaux nationaux de différents modes de transport et à les connecter au niveau des frontières nationales.

3.4

La mise en œuvre d'un nouveau RTE-T nécessitant d'énormes investissements, le Comité estime essentiel de prendre en considération le plus grand nombre possible de facteurs et d'éléments pertinents afin d'effectuer des choix justes et raisonnables. Comme point de départ, le Comité recommande que ce soient les moyens financiers qui reflètent les ambitions et non le contraire.

3.5

Les bases de la future politique du RTE-T sont ancrées dans le Traité CE. Les articles 154 à 156 présentent les éléments à prendre en compte. Par le passé, le développement durable et, par extension, les objectifs en matière de climat n'ont pas bénéficié d'une attention suffisante et le Comité partage l'avis de la Commission: il s'agit bien d'un élément clé de la politique des transports en général et donc également de la politique du RTE-T. Le CESE a, du reste, déjà attiré l'attention sur ce point dans son avis du 13 mars 2008 (TEN/298 – CESE 488/2008), où il avait également souligné la nécessité d'adopter une approche intégrée.

3.6

Afin de mettre en œuvre les dispositions du traité, les orientations dites du RTE-T ont été arrêtées. Elles fixent les conditions devant présider à la sélection des projets d'intérêt communautaire qui bénéficieront du soutien des États membres. Le but ultime de ces orientations est de créer un réseau multimodal qui permettra de rendre possible, d'une manière novatrice, un trafic sûr et efficace.

3.7

Le Comité peut se retrouver dans l'idée de la Commission visant à rechercher des solutions comodales pour le transport de marchandises afin de parer aux problèmes que posent l'augmentation des émissions de CO2 et les lacunes infrastructurelles et organisationnelles. Il estime ainsi, à l'instar de la Commission, que le développement des autoroutes de la mer revêt une importance cruciale pour l'essor futur du RTE-T.

3.8

La Commission considère qu'une politique du RTE-T révisée devrait s'appuyer sur les résultats engrangés à ce jour et veiller à la continuité de l'approche convenue précédemment. Le Comité se demande si cela est conciliable avec une révision en profondeur de la politique. En effet, une évaluation de la liste des projets actuellement prioritaires – reprise à l'annexe 3 des orientations TEN – basée sur des critères objectifs devrait, de l'avis du CESE, amener à revoir le contenu de cette annexe, ce qui, logiquement, pourrait aussi se traduire par la disparition de certains projets.

3.9

S'agissant de l'élaboration de la nouvelle politique du RTE-T, le Comité est d'accord avec la Commission sur la nécessité de fonder celle-ci sur un objectif double, intégrant économie et milieu de vie. De l'avis du CESE, une approche intégrée permettra de dégager des synergies, surtout dans le cas de projets liés à l'élargissement de l'Union. C'est la raison pour laquelle il importe, lors du choix d'un réseau, d'avoir identifié également les conséquences environnementales, et notamment les retombées sur le climat. Il s'agira donc, dans le cadre des efforts visant à promouvoir un système de transport durable et efficace reposant sur le principe de comodalité, de rechercher un équilibre entre intérêts économiques et souci de l'environnement.

3.10

En guise d'exemple, le Comité souhaite attirer l'attention sur l'intégration du trafic aérien et du transport ferroviaire sur des distances allant jusqu'à 500 km, une intégration stimulée à partir du marché. Les connexions de lignes à grande vitesse y jouent un rôle très important en ce qui concerne le transport de passagers. Toutefois, pour le transport de fret également, il existe des opportunités intéressantes en matière d'intégration des aéroports au réseau ferroviaire européen.

3.11

Le Comité est d'avis que le nouveau RTE-T devrait surtout se concentrer sur le réseau, dans ses aspects physiques comme non physiques, et que l'accent devrait être davantage mis sur la dimension de la politique de voisinage, notamment sur des infrastructures de transport allant de l'ouest à l'est de l'UE et du nord vers le sud (la «Via Baltica» et l'axe Helsinki-Athènes). De l'avis du CESE, l'approche dite de voisinage favorisera la solidarité entre les peuples de l'Union.

3.12

La Commission suggère de soumettre l'ensemble des projets d'intérêt commun sélectionnés à une analyse coût/bénéfice harmonisée reposant sur des critères multiples, afin d'en déterminer la valeur ajoutée européenne. Cela permettrait de tenir compte de tous les facteurs, qu'ils soient chiffrables en termes financiers ou non. Les subventions communautaires pourraient ainsi être allouées de manière équitable et objective aux seuls projets présentant une réelle valeur ajoutée pour l'UE. Le CESE est d'avis qu'il faut recourir à toutes les méthodes permettant d'utiliser plus efficacement et plus concrètement les fonds communautaires.

3.13

Une telle harmonisation des méthodes de travail serait particulièrement utile dans le traitement des goulets d'étranglement transfrontaliers des infrastructures, où le problème qui se pose souvent est celui de la répartition des coûts. L'harmonisation pourrait conduire à une rationalisation du programme RTE-T et permettrait de se focaliser davantage sur la combinaison des dimensions économique et environnementale.

3.14

Dans le livre vert, la Commission invite à se prononcer en faveur de l'une des options suivantes pour l'avenir du RTE-T:

le maintien de la structure actuelle à deux niveaux: un réseau global et des projets prioritaires (indépendants les uns des autres),

un seul niveau constitué de projets prioritaires, éventuellement en lien les uns avec les autres dans le cadre d'un réseau prioritaire,

une structure à deux niveaux, avec un réseau global et un réseau central dans lequel un réseau prioritaire (délimité géographiquement) serait combiné à un pilier théorique afin d'intégrer la politique des transports ainsi que des aspects infrastructurels.

3.15

Le Comité privilégie la dernière option. Il estime que les moyens financiers de l'Union européenne doivent être utilisés plus efficacement que cela n'a été le cas à ce jour et que la concentration des ressources dans un réseau central offre les possibilités les plus intéressantes pour y parvenir. Le réseau global, dans lequel, au cours des années, l'application d'une partie de la législation communautaire en matière de transports a été liée au champ d'action du réseau RTE-T actuel, ne peut, à cause de ce lien, être simplement mis de côté et devra donc continuer d'exister. Les projets concernés ne pourraient donc plus être éligibles aux subventions provenant du budget RTE-T, mais leur financement pourrait se faire par le biais des fonds régionaux et de cohésion.

3.16

Afin d'utiliser de manière plus efficiente et plus efficace les ressources financières de l'UE, le Comité est d'avis que l'allocation des fonds devrait être suivie par un groupe de coordination.

3.17

Le réseau prioritaire géographiquement délimité devrait, de l'avis du Comité, être constitué d'axes véritablement multimodaux, reliant les centres économiques et démographiques les plus importants entre eux ainsi qu'aux principaux nœuds de transport tels que les ports maritimes, les aéroports et les ports de navigation intérieure. Ce réseau devrait satisfaire aux exigences liées à la protection de l'environnement et à la promotion d'un développement social et durable.

4.   Observations particulières

4.1

La Commission estime que le développement durable et surtout les objectifs climatiques ambitieux que s'est fixés l'UE en décembre 2008 nécessitent de revoir l'approche des réseaux transeuropéens. Si, à l'instar de la Commission, le Comité pense que les considérations climatiques en elles-mêmes constituent une raison suffisante de procéder à cette révision, il souligne toutefois que la non-finalisation des projets planifiés et l'élargissement de l'Union rendent aussi cette révision inévitable.

4.2

En soi, le CESE peut marquer son accord avec l'argumentation de la Commission en faveur de la soumission de tous les projets d'intérêt commun à une analyse coût/bénéfice, pour peu qu'elle offre également la possibilité de recourir à d'autres méthodes ayant les mêmes effets. Cependant, il attire l'attention sur la nécessité d'identifier et d'évaluer les effets externes d'une manière plus uniformisée.

4.3

Le Comité approuve la position de la Commission selon laquelle, dans le cadre d'une révision du RTE-T, un réseau de grands projets d'infrastructures reliés entre eux doit être complété par un réseau théorique de ce type de projets. Il souhaite en outre insister sur la nécessité pour la Commission d'orienter une part importante de ses efforts de coordination vers la concrétisation de projets de ce type.

4.4

Le CESE souligne que l'investissement systématique dans la recherche et le développement technologique européens a créé de nouvelles possibilités de réaliser les objectifs poursuivis par la politique européenne des transports par d'autres moyens que les seuls investissements dans des infrastructures physiques.

4.5

Ainsi, la Commission a présenté les diverses possibilités et intentions politiques dans différentes communications comme le Plan d’action sur la logistique ou le Plan d'action sur le Système de transport intelligent (STI). Lors de la mise en œuvre de ces nouvelles technologies, il y a lieu, en tout état de cause, d'éviter toute répercussion négative sur les conditions de travail et la protection des données.

4.6

Il convient également de mentionner l'initiative «Voitures vertes», qui s'inscrit dans le plan de relance économique pour l'Europe et indique comment améliorer l'efficacité du système européen de transport en recourant à des technologies de propulsion propres et à une logistique intelligente. De même, il y a lieu de faire mention du programme européen d'action NAIADES dont l'objectif est, au sens large, de stimuler la navigation intérieure.

4.7

Le concept de «corridors verts» est décrit sommairement dans le Plan d'action sur la logistique mentionné au paragraphe 4.5. Le Comité apprécierait une clarification de ce concept car il lui semble que les corridors verts supposent également que des modes de transport alternatifs soient disponibles pour assurer le transport entre les différents nœuds afin de pouvoir faire des choix rentables.

4.8

La mise en œuvre du RTE-T a été à ce jour considérée comme une obligation d'engagement pour les États membres. Bien que la construction d'infrastructures en tant que telle soit une compétence nationale, le CESE insiste auprès de la Commission afin que celle-ci conçoive, pour la création du «réseau prioritaire», un cadre plus contraignant, prévoyant notamment des mesures de sanction. Un tel cadre pourrait également être élaboré dans le cas des systèmes interopérables de gestion du trafic.

4.9

Le Comité est d'avis que les autoroutes de la mer doivent jouer un rôle explicite dans la réflexion relative au réseau prioritaire. Parallèlement, il s'agira de mettre davantage l'accent sur le réseau logistique élargi afin de doter les ports maritimes de l'UE d'un accès correct et de liaisons adéquates avec l'arrière-pays, tout en gardant à l'esprit qu'il ne peut être question de distorsions de concurrence.

4.10

Enfin, le Comité marque son accord avec plusieurs questions mentionnées par la Commission dans son livre vert et qui devront être prises en compte dans la planification future du RTE-T. L'on peut notamment citer les besoins divergents du transport de passagers et du transport de marchandises, la sensibilité des aéroports aux prix des carburants, la sûreté, le développement économique et la protection de l'environnement, la problématique des ports maritimes et de la logistique du transport de marchandises dont il est fait mention au paragraphe 4.9, qui part du principe que chaque mode de transport est utilisé en fonction de ses avantages comparatifs dans le cadre de chaînes de transport comodales efficaces et joue un grand rôle dans la réalisation des objectifs climatiques de l'Union. Le but doit rester une évolution vers la chaîne de transport la plus respectueuse de l'environnement qui soit.

Bruxelles, le 30 septembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/106


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: L'UE, l'Afrique et la Chine: vers un dialogue et une coopération trilatéraux»

COM(2008) 654 final

2009/C 318/21

Rapporteur: M. Luca JAHIER

Le 17 octobre 2008, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions - L'UE, l'Afrique et la Chine: vers un dialogue et une coopération trilatéraux»

La section spécialisée «Relations extérieures», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 3 septembre 2009 (rapporteur: M. JAHIER).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre 2009 et 1er octobre 2009 (séance du 1er octobre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 145 voix pour, 1 voix contre et 3 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Au cours des quinze dernières années, l'Afrique a fait l'objet d'une attention croissante de la part de la Chine, qui est devenue de façon stable le troisième partenaire commercial et économique du continent grâce à une augmentation constante du volume des échanges, des investissements et des partenariats signés avec la plupart des pays africains. Bien que l'Europe reste le premier partenaire économique de l'Afrique, son avance tend à s'éroder dans ce monde multipolaire où les pays émergents cherchent à établir un nouvel équilibre. Parce que l'Afrique reste un espace proche partageant des solidarités d'intérêts, l'intervention d'autres puissances oblige l'Europe à relancer ses relations de partenariat.

1.2

Le Comité économique et social européen se félicite de la proposition de la Commission d'entamer un dialogue et une coopération trilatérale entre l'Union européenne, la Chine et l'Afrique. Il s'agit d'une perspective on ne peut plus nécessaire et inévitable, bien que le résultat en soit assez incertain et problématique. Il convient en particulier d'évaluer à la fois l'approche pragmatique et progressive et la pertinence des quatre secteurs spécifiques proposés: la paix et la sécurité, les infrastructures, l'utilisation des ressources naturelles et de l'environnement, l'agriculture et la sécurité alimentaire.

1.3

Cependant, une coopération trilatérale n'a de sens que si elle est efficace et équitable. Le point de départ de l'asymétrie des rapports existants doit être sérieusement pris en considération: la Chine est un seul grand pays traitant un par un avec les pays africains, tandis que l'UE peine à parler d'une seule voix dans ses rapports avec le continent. Bien que la présence chinoise en Afrique ne soit pas dénuée de zones d'ombre, de nombreux gouvernements africains tendent à préférer le partenariat avec Pékin, qui apparaît plus prompte à répondre à leurs demandes sans poser de conditions et sans lenteurs administratives.

1.4

En vue d'une coopération efficace, il est avant tout nécessaire de s'assurer de l'intérêt véritable de toutes les parties en jeu pour la stratégie proposée, ainsi que de leur engagement concret dans le dialogue triangulaire. La Commission et le Conseil doivent dès lors mettre en œuvre toutes les initiatives voulues pour obtenir des réponses adéquates aux propositions en jeu.

En outre, il est nécessaire:

que l'Union européenne s'engage davantage à harmoniser son action, tant au niveau économique et diplomatique que dans le domaine de la coopération au développement, en se dotant d'une approche géostratégique à long terme plus assertive, qui relance énergiquement la stratégie UE-Afrique de Lisbonne et accroisse les dotations;

que les gouvernements et l'Union africaine prêtent une plus grande attention aux bénéfices à long terme que leurs pays peuvent attendre d'un partenariat avec l'Europe et la Chine, en limitant la place réservée aux avantages immédiats des dirigeants. À cette fin, ils doivent être soutenus dans le renforcement de leurs capacités respectives à définir et gérer des stratégies de développement régional et continental à long terme;

que la Chine s'engage davantage à ce que les fruits de cette coopération trilatérale, ainsi que des coopérations bilatérales qu'elle établit avec tel ou tel pays africain en particulier, profitent à l'ensemble de la société et des populations locales, plutôt qu'à leurs seuls gouvernements.

1.5

Rendre une place centrale à l'objectif d'une croissance locale durable signifie en particulier qu'il convient de s'assurer:

que l'on augmente la création de valeur ajoutée locale;

que l'on élabore de nouvelles infrastructures sociales, tout en tenant compte des structures sociales existantes;

que l'on réalise un véritable transfert de compétences et de technologies;

que l'on soutienne la croissance des marchés locaux et régionaux, des entreprises locales et plus généralement l'amélioration des conditions de vie et de travail;

que l'on favorise les partenariats entre les entreprises étrangères et les entreprises locales;

que la dette insoutenable à long terme ne s'aggrave pas et que, dans l'ensemble, les institutions locales et régionales se renforcent.

1.6

Un dialogue et une coopération équitable doivent également assurer à chaque partie la liberté de mettre à l'ordre du jour les points les plus controversés ou ceux pour lesquels existent des appréciations et des préoccupations divergentes. Eu égard au contenu de la décision du Conseil de l'Union européenne, il serait plus cohérent de faire rentrer dans le processus proposé des questions clefs telles que la gouvernance démocratique, les droits de l'homme et le rôle de la société civile, actuellement absents de la communication, en s'appuyant soit sur la stratégie de Lisbonne de 2007, soit sur l'accord de Cotonou de 2000 qui régit les rapports entre l'UE et les pays ACP.

1.7

En particulier, le CESE considère qu'il est nécessaire de souligner l'importance cruciale de l'engagement de l'ensemble des acteurs non étatiques dans le dialogue trilatéral, notamment dans le cas du secteur privé, des organisations syndicales, des agriculteurs, des organisations de femmes et de défense des consommateurs, etc. Le rôle de ces acteurs s'est fortement accru ces dernières années, notamment en raison du succès des accords de Lomé et de Cotonou. Ce cercle vertueux de participation des divers acteurs socio-économiques dans les rapports UE-Afrique est dès lors bien plus valorisé de manière appropriée que pénalisé ou mis en danger. Aussi le Comité invite-t-il la Commission à intégrer ce point décisif dans sa proposition.

1.8

Eu égard à la vocation multilatérale de l'Europe et à l'intérêt croissant dont les États-Unis font preuve envers ce continent, la coopération entre l'UE, la Chine et l'Afrique pourrait également être élargie aux États-Unis, afin de mettre en place un partenariat plus complet, efficace et équitable, qui fonctionne certes dans des secteurs déterminés, mais qui se réserve la possibilité d'étendre la collaboration à d'autres domaines également.

2.   Introduction

2.1

L'Afrique évolue très rapidement. Bien que ne représentant toujours que 2 % du PIB mondial et moins de 1 % de la production industrielle mondiale, le continent prend une part croissante dans les circuits de la mondialisation après plusieurs décennies de marginalisation géopolitique et économique. Même si l'Union européenne reste le première partenaire économique du continent, l'Afrique est de plus en plus courtisée par les «donateurs émergents», la Chine au premier chef, mais aussi l'Inde, le Japon, la Corée du Sud, les grands pays d'Amérique latine et ceux du Golfe. Ces dernières années, les États-Unis ont eux aussi fait preuve d'un regain d'intérêt pour le continent africain, dans le but notamment de s'assurer des approvisionnements énergétiques sûrs et de prévenir la menace du terrorisme. En dépit du fait que 40 % de sa population continue de vivre en dessous du seuil de pauvreté, l'Afrique est donc de moins en moins perçue comme un «continent désespéré» et de plus en plus comme une «nouvelle frontière», offrant des perspectives de développement et des ouvertures commerciales.

2.2

Le continent africain a connu des changements politiques majeurs au cours de la dernière décennie: naissance de l'Union africaine, avec le lancement de son plan stratégique 2004-2009 et la mise en œuvre de nouvelles capacités d'intervention pour le règlement des conflits, renforcement des communautés économiques régionales, programmes de développement économique (NEPAD, Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique) et de gouvernance (Mécanisme africain d'évaluation par les pairs).

2.3

Suite à tous ces changements, le regain d'attention suscité par l'Afrique au niveau international, comme l'a souligné à plusieurs reprises le commissaire Louis Michel (1), s'est manifesté selon trois axes principaux: les intérêts économiques, ceux relatifs à la sécurité et les nouveaux intérêts géostratégiques et de pouvoir.

2.4

Sur le plan économique, parallèlement à la compétition pour l'accès aux ressources naturelles du continent et leur contrôle, à commencer par les ressources énergétiques, l'attention s'est également portée sur les potentialités encore considérables du marché intérieur africain, qui a connu ces dernières années un rythme de croissance moyenne de 6 %, un faible taux d'inflation et un processus vertueux de réduction significative de la dette publique.

2.5

La Chine a fait preuve dans ces deux domaines d'une grande détermination et d'une capacité d'investissement structurel à long terme (2), modifiant le rapport historique établi dans les années 1950 avec les pays africains. À partir du milieu des années 1990, la Chine, tout en continuant à vanter la coopération Sud-Sud entre les pays en développement, a accordé une attention accrue aux perspectives économiques que l'Afrique offre et a établi des relations amicales avec la quasi-totalité des pays africains. La dimension continentale de la nouvelle approche chinoise a été confirmée par la création par Pékin du Forum sur la coopération sino-africaine (Focac) (3) dont les sommets triennaux (Pékin 2000, Addis Abeba 2003, Pékin 2006 et celui prévu pour décembre 2009 à Charm el-Cheikh, en Égypte) ont rythmé l'évolution continue des rapports entre la Chine et les pays africains. La nouvelle stratégie chinoise à l'égard du continent a été officialisée par la publication, en janvier 2006, du «livre blanc» sur la politique de la Chine en Afrique (4).

2.6

Le changement radical de la donne par rapport aux décennies précédentes a également incité l'Union européenne à revoir sa politique vis-à-vis de l'Afrique. Ce processus l'a conduite, en décembre 2007, à adopter à Lisbonne une nouvelle Stratégie commune UE-Afrique, sur laquelle le CESE a eu l'occasion d'émettre un avis riche et fouillé (5).

2.7

Alors que la Chine et l'Europe retrouvent de l'intérêt pour l'Afrique et sont disposées à y investir, la façon dont ces importants acteurs définiront à l'avenir leur ligne d'action réciproque suscite des questions et des attentes, tant pour ce qui est des évidentes perspectives de concurrence que des possibles espaces de coopération. En effet, si l’UE et la Chine, en termes absolus, occupent respectivement la première et la troisième place parmi les partenaires commerciaux et les investisseurs étrangers en Afrique, il faut bien voir qu'au cours de la dernière décennie, l'importance relative des relations commerciales Europe-Afrique a diminué, tandis que celle des relations Chine-Afrique a enregistré une hausse exponentielle (6).

2.8

Prenant acte du débat public croissant au sujet de la présence chinoise en Afrique et motivée par la résolution sur ce thème adoptée en avril 2008 par le Parlement européen (7), la Commission européenne a donc engagé depuis deux ans une réflexion approfondie, assortie d'importantes initiatives de consultation élargie (8), afin de comprendre les répercussions des processus en cours et d'esquisser les pistes possibles pour un dialogue trilatéral entre l'UE, la Chine et l'Afrique.

3.   Contenu essentiel de la Communication

3.1

La communication propose de rechercher les voies les plus opportunes pour favoriser un processus de dialogue et de coopération paritaire entre l'Afrique, la Chine et l'UE. L'objectif principal de la Commission est donc de promouvoir la compréhension mutuelle et de permettre l'adoption d'actions communes et coordonnées dans des secteurs stratégiques, selon des priorités définies principalement par les institutions africaines.

3.2

La communication se fonde sur une approche pragmatique et progressive, principalement axée sur des mesures concrètes d'engagement et de coordination dans des domaines jugés essentiels pour la promotion de la stabilité et du développement du continent. Il s'agit des domaines suivants:

la paix et la sécurité en Afrique, essentiellement dans l'optique d'une coopération renforcée avec l'Union africaine et avec la Chine dans le cadre des Nations unies, pour promouvoir le développement de l'architecture africaine de paix et de sécurité et renforcer les capacités de gestion des opérations de maintien de la paix par l’Union africaine;

l'appui aux infrastructures africaines, qui constituent l'épine dorsale du développement, des investissements et du commerce, en vue d'améliorer les capacités d'interconnexion et l'intégration régionale, notamment dans le secteur des transports, des télécommunications et de l'énergie;

la gestion durable des ressources naturelles et de l'environnement, qui, en renforçant les liens avec des initiatives telles que l’EITI (Initiative pour la transparence du secteur des industries extractives), le FLEGT (Plan d'action relatif à l'application des réglementations, à la gouvernance et aux échanges commerciaux dans le secteur forestier) et avec le processus de Kimberley destiné à promouvoir la transparence dans l'industrie diamantaire, permet la mise en place de processus plus transparents et encourage l'intensification des transferts technologiques et des investissements visant à lutter contre le changement climatique et à favoriser le développement des énergies renouvelables;

l'agriculture et la sécurité alimentaire, afin d'augmenter la productivité et les niveaux de production de l'agriculture africaine, notamment grâce à la recherche et l'innovation agricoles, les contrôles vétérinaires et la sécurité alimentaire, dans le cadre du PDDAA (Programme détaillé de développement de l'agriculture africaine).

3.3

L'objectif de la Commission est de faire en sorte que le dialogue et les consultations se développent à tous les niveaux (national, régional, continental et dans les relations bilatérales UE-Chine), afin de diffuser entre les décideurs politiques des trois parties en présence une meilleure compréhension mutuelle des politiques et approches respectives et de permettre ainsi de développer des possibilités concrètes de coopération. Dans le même temps, cette démarche donnera la possibilité d'augmenter l'efficacité des aides, conformément à la déclaration de Paris de mars 2005 et aux conclusions du forum d'Accra de septembre 2008.

3.4

Le Conseil de l'Union européenne a approuvé les principales recommandations contenues dans la communication de la Commission. Il considère que ce dialogue trilatéral pourra contribuer «à appuyer les efforts engagés par l’Afrique et la Communauté internationale en faveur de la démocratisation, l’intégration politique et économique, la bonne gouvernance et le respect des droits de l’homme» (9) et recommande un examen plus approfondi des propositions de mesures concrètes.

3.5

Cependant, le CESE se montre préoccupé et déçu de ce que ni la Chine, ni l'Union africaine n'ont jusqu'à présent exprimé de position officielle en ce qui concerne le dialogue trilatéral proposé par l'UE. La coopération avec l'Afrique ne figurait pas à l'ordre du jour du dernier sommet UE – Chine, comme le proposait pourtant la communication à l'examen (10). Jusqu'à présent, aucune preuve tangible n'a donc été relevée qui indiquerait que la Chine ou l'Union africaine seraient disposées à accueillir la proposition de l'UE.

4.   Aspects positifs

4.1

La Communication contient divers éléments appréciables et positifs, en particulier:

une approche fondée sur le dialogue et inspirée par une logique d'échange, qui s'inscrit dans la nécessaire stratégie de recherche d'une coordination entre les donateurs et les principales parties prenantes;

le pragmatisme dont il est fait preuve dans l'identification de quatre secteurs, incontestablement stratégiques et offrant de vastes possibilités d'intervention;

l'approche progressive proposée pour l'établissement de cette coopération trilatérale, qui s'efforce de valoriser toutes les structures existantes plutôt que de mettre sur pied une énième et coûteuse structure multilatérale.

4.2

S'agissant en particulier du deuxième point, il est incontestable que les quatre secteurs identifiés sont essentiels pour le développement du continent africain, de même que – bien que selon des modalités différentes – pour les relations bilatérales Chine-Afrique et Europe-Afrique.

4.3

La résurgence de certains conflits et la fragilité des processus de paix en cours, combinées au risque de développement de nouvelles formes d'intégrisme ou de zones pouvant dissimuler des bases terroristes, confèrent une importance tout à fait essentielle à la coopération en faveur du maintien et de la promotion de la paix et de la sécurité. Une attention particulière sera accordée au soutien apporté à l'architecture africaine de paix et de sécurité et aux opérations de maintien de la paix de l'Union africaine, sous la forme de développement des capacités, de formation, de support logistique ou économique.

4.4

Toutefois, la coopération dans le domaine du maintien et de la promotion de la paix et de la sécurité devrait également prévoir un dialogue spécifique sur les règles régissant le commerce et la fourniture d'armes, en particulier à des gouvernements et des groupes armés non étatiques qui sont impliqués dans des conflits en cours ou se rendent coupables de graves atteintes aux droits de l'homme (11), intégrant de la sorte également dans le rapport trilatéral Chine-Europe-Afrique un thème qui fait déjà l'objet de discussions au siège de l'ONU.

4.5

Le nouvel accent mis sur les investissements dans les infrastructures, qui ont longtemps été négligés par la coopération européenne et sont au contraire au cœur de l'approche chinoise en Afrique, est important, stratégiquement parlant, pour deux séries de considérations. D'une part, des infrastructures adaptées sont nécessaires pour garantir tant l'accès et le transport des matières premières ou des produits mis sur les marchés africains que ces formes d'intégration régionale concrète et effective qui sont primordiales pour le développement social et économique de l'Afrique. L'amélioration ou la création ex nihilo d'infrastructures est en outre une priorité claire pour de nombreux gouvernements africains et ne peut plus dépendre exclusivement des capacités de financement et de la viabilité financière des intervenants locaux (12).

4.6

L'importance de la gestion durable de l'environnement et des ressources naturelles est en soi évidente, non seulement au vu du contexte international du changement climatique mais aussi en ce qui concerne tous les aspects liés aux conditions d'exploitation, de transport et d'utilisation des ressources naturelles du continent, notamment minières et énergétiques.

4.7

Ces dernières années, le débat s'est surtout porté sur les conditions qui ont cours en matière d'environnement et de travail dans les chantiers qui sont gérés par des entreprises chinoises actives en Afrique ou leur sont liés, telles qu'elles ont été amplement illustrées dans une étude menée par le Réseau africain de recherche sur le travail (African Labour Research Network) (13). Mais il ne faut pas oublier qu'un discours identique doit également être tenu à l'égard de nombreuses entreprises européennes ou multinationales. Le problème du respect des normes internationales, tout comme celui de la transparence (14) lors de la conclusion et de l'application des contrats signés avec les gouvernements africains, concerne en effet dans une même mesure la Chine, l'Europe et l'Afrique et devrait dès lors faire partie intégrante du dialogue trilatéral sur la gestion durable des ressources naturelles et de l'environnement, ainsi que de celui sur le soutien aux infrastructures africaines.

4.8

L'agriculture et la sécurité alimentaire sont enfin revenues en tête des priorités des principaux donateurs mais aussi de la stratégie commune à l'égard du continent africain. Il faut toutefois que cette attention débouche au plus vite sur des mesures concrètes, qui s'inscrive dans une perspective à long terme et concerne l'ensemble du développement rural, en assurant la pleine participation des populations locales, l'engagement des organisations d'agriculteurs et la préservation de leurs possibilités d'accéder aux ressources locales et de les gérer à long terme.

4.9

Dans cette perspective, il est utile de tenir compte du récent cri d'alarme qui a été lancé au Sommet des organisations paysannes des cinq régions d'Afrique, organisé à Rome par l'organisation agricole italienne Coldiretti, et a souligné la forte augmentation des acquisitions de terres agricoles que des pays tels que la Corée du Sud, la Chine, les Émirats Arabes Unis, l'Arabie saoudite ou le Japon effectuent en Afrique et dans d'autres pays en développement, afin d'assurer leur propre approvisionnement alimentaire ainsi que les ressources nécessaires à la production de biocarburants (15).

4.10

La coopération en matière de sécurité alimentaire pourrait également servir de tremplin à un dialogue dans d'autres domaines pertinents, tels que le respect des objectifs du Millénaire pour le développement, la protection des groupes les plus vulnérables ainsi que la protection de la santé. À propos de cette dernière, il conviendrait d'accorder une attention particulière à l'identification de stratégies communes dans la lutte contre les trois grandes pandémies (16) (malaria, VIH/sida et tuberculose), qui font en outre déjà l'objet d'une coopération internationale au sein des assemblées multilatérales.

4.11

S'agissant du rôle des institutions africaines dans le processus de dialogue trilatéral, l'importance centrale de l'Union africaine aux côtés des organisations économiques régionales et des différents États est tout à fait appréciable. Désormais possible, la participation au dialogue annuel UE-Chine de la troïka qui est à la tête de l'Union africaine est également importante, de même que l'idée de confier à la Commission de l'Union africaine d'Addis Abeba un rôle de médiateur dans les consultations triangulaires régulières. Ces avancées s'accordent avec la nécessité, déjà soulignée par le Comité dans son avis sur la stratégie UE-Afrique (17), d'assurer une prise de responsabilité concrète par les institutions africaines, de manière à renforcer leur souveraineté et leur légitimité et à permettre des partenariats réellement équilibrés. Il est cependant nécessaire de vérifier que ces priorités soient partagées, que l'Union africaine les fasse siennes et qu'elles se traduisent dans les plus brefs délais en plans d'action concrets.

4.12

La recherche d'un dialogue trilatéral entre l'UE, la Chine et l'Afrique s'impose d'autant plus que Pékin exerce une véritable «fascination» sur le continent. Aux yeux de nombreux gouvernements africains, la Chine fait figure d'exemple à suivre, car elle a réussi, en l'espace d'une seule génération, à sortir de la pauvreté, à vaincre les maladies et à devenir un acteur de premier plan sur la scène internationale. La bataille de la Chine contre la pauvreté s'est principalement déroulée dans les zones rurales, avec une insistance sur le développement et l'augmentation de la productivité agricole, une stratégie qui pourrait également servir les intérêts des pays africains (18). La fascination exercée par la Chine est d'autant plus forte que celle-ci n'a pas gardé d'héritage colonial et continue à se définir comme un pays en développement et à refuser le principe des relations de donateur à bénéficiaire qui, historiquement, est plutôt typique de l'OCDE. Ces caractéristiques, jointes à une importante disponibilité de ressources à investir ou à prêter aux partenaires gouvernementaux africains, confèrent à la Chine un avantage évident dans ses relations avec l'Afrique.

5.   Éléments négatifs

5.1

Dans le même temps toutefois, la relation Chine-Afrique présente également des points faibles qui sont sources de préoccupation pour les observateurs extérieurs et pour lesquels il faudrait trouver des espaces de dialogue au sein du processus de coopération trilatérale qui est proposé par la Commission.

5.2

La présence croissante de la Chine en Afrique n'est pas exempte de zones d'ombre, à commencer par le retour de la place centrale des gouvernements locaux et des élites urbaines, ainsi que l'inquiétante marginalisation du secteur privé africain qui en découle, la mise en danger des modestes conquêtes sociales obtenues par les syndicats africains et des conditions de travail qui pénalisent fortement les ouvriers locaux. Une véritable relation de partenariat sur pied d'égalité devrait prévoir la possibilité pour les trois parties – UE, Chine et Afrique – de mettre également à l'ordre du jour des aspects qui sont plus controversés ou font l'objet d'évaluations et de préoccupations divergentes.

5.3

Si l'on compare les quatre secteurs de coopération proposés par la Commission aux huit points définis comme prioritaires dans le plan d'action de la stratégie Europe-Afrique adoptée à Lisbonne (19), on relève l'absence dans la communication de thèmes importants, tels que la gouvernance démocratique, les droits de l'homme ou le travail décent. Pour l'Union européenne, il serait plus conforme à la stratégie de Lisbonne ainsi qu'à l'accord de Cotonou de 2000 (20), qui régit les rapports entre l'UE et les pays ACP, d'inclure ces questions, tout comme celle du rôle des sociétés civiles, dans le dialogue trilatéral.

5.4

L'UE et la Chine ont des stratégies différentes d'intervention en Afrique. Tandis que l'UE fournit la majeure partie de ses aides sous forme de dons, en les subordonnant à des critères politiques de plus en plus stricts (le respect des règles démocratiques, des droits de l'homme ou des conventions de l'OIT, la lutte contre la corruption et le développement des pratiques de bonne gouvernance, ainsi qu'une participation de la société civile) et en s'efforçant de réduire la pauvreté, la Chine accorde généralement des prêts à des conditions préférentielles, qui visent pour une bonne part à construire des infrastructures et sont garantis par des contrats à long terme concernant l'exploitation des ressources naturelles. De plus, les prêts chinois sont souvent liés à l'utilisation d'entreprises, de biens et parfois même de travailleurs chinois, selon des formules d'«aides liées» aujourd'hui largement délaissées par l'OCDE. Enfin, on remarquera que les règles mêmes de celle-ci en matière d'appel d'offres favorisent les entreprises des pays émergents, dont la Chine au premier chef.

5.5

D'une manière générale, l'approche chinoise recueille la préférence des classes dirigeantes africaines, parce qu'elle n'impose pas de conditions, ni n'est pas ralentie par la bureaucratie excessive de l'Europe. Elle n'en présente pas moins le double risque de recréer une forme de réendettement massif, qui pourrait avoir des conséquences intenables à long terme, et d'aggraver la dépendance des économies des différents pays à l'égard des monoproductions et des exportations qu'elles génèrent, elles-mêmes liées aux fluctuations des prix sur les marchés internationaux.

5.6

L'Europe pour sa part, tout en restant le premier partenaire économique et commercial de l'Afrique, peine à parler d'une seule voix et à instaurer et maintenir une véritable cohérence globale de ses politiques, qu'elles concernent le développement, le commerce ou encore l'action extérieure et la sécurité. Sur le terrain, les entraves à la coordination de l'action des différents États membres restent également nombreuses, d'où une perte d'impact et d'efficacité.

6.   Quelques autres difficultés

6.1

Outre les critères de conditionnalité susmentionnés que l'UE applique dans ses relations avec l'Afrique, son approche et celle de la Chine se différencient par d'autres éléments – que ne manquent pas de souligner les divers gouvernements africains:

les différents problèmes qui sont apparus dans les relations entre l'UE et les pays africains en lien avec les négociations pour la conclusion des accords de partenariat économique (APE) et avec lesquels contraste l'ouverture progressive et habilement proclamée du marché chinois à l'importation de marchandises africaines sans droits de douane (dont le nombre devrait passer de 190 en 2006 à 440 en 2010);

l'engagement solide et visible du gouvernement chinois dans la construction d'infrastructures, d'écoles, d'hôpitaux et d'édifices publics, par rapport aux ouvrages dont la réalisation – souvent partielle – est imputable aux interventions européennes antérieures;

une réponse beaucoup plus concrète de la part de la Chine dans le domaine de l'enseignement et de la formation professionnelle dans les secteurs agricole, médical, scientifique et culturel, avec une large offre d'accès pour les étudiants africains dans les universités et les centres de formation chinois;

l'abondance de produits d'origine chinoise – parfois peu respectueux des normes internationales en matière de sécurité des produits, avec des conséquences graves pour la santé publique et l'environnement – qui envahissent progressivement les marchés et les maisons de tout le continent, avec des effets souvent désastreux sur certains secteurs de la production locale, à commencer par le textile (21).

6.2

Enfin, l'actuelle crise économique et financière internationale incite à engager une réflexion concernant ses retombées possibles sur l'Afrique (22).

Les effets de la récession mondiale, le recul des exportations, la fermeture protectionniste de nombreux marchés et la baisse des prix d'un grand nombre de matières premières dessinent un scénario préoccupant, qui risque de remettre sérieusement en question les objectifs atteints au cours des dix dernières années, comme la réduction de la dette et des déficits publics, l'augmentation des investissements infrastructurels et l'introduction d'une concurrence dans ce domaine, ou encore l'assainissement des systèmes fiscaux, ainsi que les efforts de diversification des structures productives nationales.

6.3

Face à la crise, la Chine a récemment reconfirmé, voire accru ses engagements, qu'il s'agisse d'aides et de prêts ou d'investissements (23). L'Union européenne s'efforce de respecter les siens mais certains États membres ont déjà considérablement réduit les ressources et les efforts financiers bilatéraux en 2009 et les perspectives pour 2010 sont analogues, voire pires, alors que de nouveaux moyens seraient nécessaires, comme l'ont affirmé tous les sommets récents.

6.4

Dans les rapports entre l'Europe et l'Afrique et entre la Chine et l'Afrique, une série de dynamiques migratoires acquièrent une importance toujours plus grande. Ces dynamiques sont encore peu étudiées, en particulier en ce qui concerne l'arrivée de citoyens chinois dans les pays africains. Entamer une réflexion sur les modalités et l'ampleur de ces flux, ainsi que sur leurs éventuelles interconnexions, pourrait servir à comprendre l'impact qu'ils peuvent avoir sur le développement en Afrique.

6.5

Enfin, le CESE considère comme fondamentale la question complexe de la participation de la société civile, que les Européens ne sont pas les seuls à juger cruciale (24) mais qui fait aussi désormais partie intégrante de toutes les relations de partenariat avec l'Afrique et en constitue une composante essentielle, notamment depuis l'Accord de Cotonou. Cet aspect ne semble pas entrer actuellement en ligne de compte dans les relations entre la Chine et l'Afrique, pas plus que dans les relations bilatérales entre Pékin et les différents pays.

Les quatre secteurs mentionnés par la Commission se prêtent à un engagement large et structuré de la part de tous les acteurs non étatiques, en particulier les entrepreneurs, les syndicats et les organisations de femmes, d'agriculteurs et de consommateurs. Bien que reconnu et renforcé en vertu précisément des succès du processus entamé avec les accords de Lomé et de Cotonou, leur rôle dans la société africaine, ainsi que dans les dynamiques économiques et dans les relations politiques,, risque de perdre en importance et d'être à nouveau marginalisé si les dialogues bilatéraux ou trilatéraux se cantonnent au niveau intergouvernemental, alors qu'il s'agit d'une fonction que l'on devrait considérer comme un atout de premier plan, à valoriser et à stimuler.

6.6

Le CESE s'inquiète de ce que la communication elle-même ne contient aucune référence à cette question ni à une possibilité concrète de participation des partenaires sociaux et, plus généralement, des acteurs non étatiques dans le cadre du processus proposé.

Bruxelles, le 1er octobre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Cf. en particulier Louis MICHEL, «Afrique-Europe: l’indispensable alliance», pro-manuscripte, Commission européenne, déc. 2007.

(2)  Il ne s'agit pas uniquement des ressources naturelles, des infrastructures et du commerce. La première banque chinoise, la Banque industrielle et commerciale de Chine, a acquis 20 % de la première banque d'Afrique du Sud et du continent, la Standard Bank, en déboursant 5,6 milliards de dollars. Il s'agit de l'investissement le plus important jamais réalisé en Afrique par un groupe étranger.

(3)  Cf. le site officiel du Focac, http://www.focac.org/fra/gylt/ltjj/t157526.htm

(4)  «La politique de la Chine à l'égard de l'Afrique», 12 janvier 2006, http://www.focac.org/fra/zxxx/t230480.htm

(5)  JO C 77 du 31.3.2009, p. 148–156, «La stratégie UE-Afrique», rapporteur: DANTIN.

(6)  Selon les données du FMI, le volume commercial UE-Afrique, qui en 1995 représentait 45 % du total des échanges commerciaux africains, est tombé à un peu plus de 30 %, tandis que la Chine est passée de pourcentages dérisoires en 1995 à près de 27 % aujourd'hui. En 2008, les échanges Chine-Afrique ont atteint 106,8 milliards de dollars américains, dépassant ainsi, avec deux années d'avance et une croissance de 45 % par rapport à l'année précédente, l'objectif de 100 milliards d'ici à 2010 annoncé lors du sommet de Pékin en 2006. Voir également le document de travail des services de la Commission – Annexes de la communication, SEC(2008) 2641 final.

(7)  La politique chinoise et ses effets sur l'Afrique, référence du Parlement européen: A6-0080/2008/P6_TA-PROV(2008) 0173, résolution du Parlement européen de mars 2008, rapporteuse: Ana Maria GOMES.

(8)  À noter en particulier la conférence organisée par la Commission européenne le 28 juin 2007, avec la participation de plus de 180 hommes et femmes politiques, experts et diplomates africains, chinois et européens, «Partners in competition? The EU, Africa and China» («L’UE, l’Afrique et la Chine, partenaires en concurrence?»).

(9)  Voir les conclusions de la 2902e session du Conseil «Affaires générales et relations extérieures» du 10 novembre 2008.

(10)  11e sommet UE – Chine, Prague, 20 mai 2009; Déclaration finale conjointe.

(11)  Cf. la résolution du Parlement européen précitée, A6-0080/2008/P6_TA-PROV(2008)0173, résolution du Parlement européen de mars 2008, rapporteuse: Ana Maria GOMES.

(12)  Cf. les discussions et les délibérations du 12e sommet de l’Union africaine, qui s'est tenu du 26 janvier au 3 février 2009 à Addis Abeba, et dont le thème central était précisément «Le développement des infrastructures en Afrique», www.africa-union.org

(13)  A. Yaw Baah - H. Jaunch, Chinese investment in Africa, a labour perspective («Les investissements chinois en Afrique, vus sous l'angle du travail», ALRN, mai 2009, http://www.fnv.nl/binary/report2009_chinese_investments_in_africa_tcm7-23663.pdf

(14)  Cf. Tax Justice Network «Breaking the curse: how transparent taxation and fair taxes can turn Africa’s mineral wealth into development» («Briser la malédiction: comment une fiscalité transparente et des taxes équitable peuvent transformer les richesses minérales de l'Afrique en développement»): http://www.taxjustice.net/cms/upload/pdf/TJN4Africa_0903_breaking_the_curse_final_text.pdf

(15)  Les organisations présentes au Sommet ont parlé, pour la seule année 2008, d'acquisitions à hauteur de 7,6 millions d'hectares et d'accords agricoles, signés par la Chine avec divers pays africains. Voir le site http://www.coldiretti.it/docindex/cncd/informazioni/314_09.htm Cf. également L. Cotula, S. Vermeulen, R. Leonard, J. Keeley, Land grab or development opportunity? – Agricultural investment and international land deals in Africa («Accaparement des terres ou perspective de développement? – Investissement agricole et transactions foncières internationales en Afrique»), FAO-IFAD-IIED, mai 2009.

(16)  JO C 77 du 31.3.2009, p. 148–156, Une nécessaire priorité à l’Afrique: le point de vue de la société civile européenne, rapporteur: M. BEDOSSA, mai 2006.

(17)  JO C 77 du 31.3.2009, p. 148–15, déjà cité.

(18)  Avec seulement 7 % des terres arables, la Chine, qui nourrit 22 % de la population mondiale, a pratiquement gagné la bataille contre la pauvreté extrême, l'analphabétisme, les maladies et les épidémies les plus dévastatrices et a réduit la mortalité infantile. Selon Martin Ravallion, Are there lessons for Africa from China’s success against poverty? («L'Afrique peut-elle tirer des leçons de la réussite de la Chine dans la lutte contre la pauvreté?»), Banque mondiale, Policy Research working paper no 4463, janvier 2008, l'Afrique pourrait tirer des enseignements importants d'une analyse attentive des clés du développement chinois. Voir annexe 2.

Cf. également R. SANDREY, H. EDINGER, The relevance of Chinese agricultural technologies for African smallholder farmers: agricultural technology research in China («Pertinence des technologies agricoles chinoises pour les petits agriculteurs africains: la recherche technologique agricole en Chine»), Centre for Chinese Studies, Université de Stellenbosch, avril 2009, http://www.ccs.org.za/downloads/CCS%20China%20Agricultural%20Technology%20Research%20Report%20April%202009.pdf

(19)  Paix et sécurité; gouvernance démocratique et droits de l'homme; commerce, intégration régionale et infrastructures; partenariat sur les objectifs du Millénaire pour le développement; énergie; changements climatiques; migrations, mobilité et emploi; sciences, société de l'information et espace.

(20)  Cf. l’art. 9, paragraphe 1.

(21)  Cf. à cet égard l'intéressant rapport de la Banque mondiale de 2007, «La Route de la soie en Afrique».

(22)  Sur ce point, voir la communication «Aider les pays en développement à surmonter la crise», COM(2009) 160 final, et l'avis que le CESE est en train d'élaborer sur ce texte.

(23)  Cf. les engagements pris au cours du voyage du président Hu Jintao dans quatre pays africains (Mali, Sénégal, Tanzanie et île Maurice) à la mi-février 2009.

(24)  JO C 110 du 9.5.2006, p. 68–74«Les relations UE – Chine: le rôle de la société civile», rapporteur: M. SHARMA, mars 2006.


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/113


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: Une stratégie de l’Union européenne pour investir en faveur de la jeunesse et la mobiliser — Une méthode ouverte de coordination renouvelée pour aborder les enjeux et les perspectives de la jeunesse»

COM(2009) 200 final

2009/C 318/22

Rapporteur: M. SIBIAN

Le 27 avril 2009, la Commission a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: Une stratégie de l’Union européenne pour investir en faveur de la jeunesse et la mobiliser – Une méthode ouverte de coordination renouvelée pour aborder les enjeux et les perspectives de la jeunesse»

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 1er septembre 2009 (rapporteur: M. SIBIAN).

Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009 (séance du 1er octobre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 133 voix pour et 5 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE estime qu'il convient, dans ce cadre, d'élaborer une stratégie non seulement POUR les jeunes mais aussi AVEC les jeunes, qui devraient être associés au processus d'élaboration de la politique et à sa mise en œuvre.

1.2

Compte tenu du principe de subsidiarité, les politiques de la jeunesse relèvent principalement de la responsabilité des États membres. Toutefois, une grande partie des enjeux de la jeunesse dans la société actuelle ne peuvent être traités pleinement sans une conception plus globale et holistique. Par conséquent, il y a lieu de se féliciter d'une stratégie intégrée pour la politique européenne de la jeunesse.

1.3

Tous les champs d'intervention sélectionnés présentent un caractère transversal et ne peuvent exister indépendamment les uns des autres. Ils sont imbriqués et s'influencent mutuellement. Il convient dès lors de les aborder selon une approche horizontale, orientée sur les besoins des jeunes.

1.4

Pour le CESE, les facteurs suivants sont essentiels au succès de la future stratégie:

assurer le processus de coordination;

classer les champs d'intervention par ordre de priorité;

intéresser conjointement les acteurs concernés;

allouer les ressources nécessaires;

soutenir l'animation socio-éducative et les structures de jeunesse.

Le CESE formule dès lors les recommandations suivantes:

1.5

L'animation socio-éducative et les structures de jeunesse devraient constituer le lien principal en matière de sensibilisation et de gestion de tous les champs d'intervention proposés dans la stratégie communautaire pour la jeunesse grâce à une approche transversale.

1.6

L'apprentissage pouvant s'effectuer dans différents environnements, il y a lieu de soutenir un apprentissage non formel venant compléter l'éducation formelle.

1.7

Au niveau tant européen que national, il convient de poursuivre les efforts visant à créer des liens entre l'école, le travail, les associations et les activités de volontariat.

1.8

Il est nécessaire de soutenir les activités d'entreprises par l'intermédiaire de mécanismes de financement, même si cela constitue un défi. L'entrepreneuriat ne doit pas se limiter à sa signification économique mais être considéré dans son acception plus globale.

1.9

Les jeunes doivent devenir des acteurs de la société dans la mesure où leur participation à tous les aspects de leur vie est une condition préalable à la mise au point de politiques dans le domaine de la jeunesse.

1.10

Une offre étendue de systèmes d'animation socio-éducative, d'activités et de services de coopération de qualité doit être mise en place dans toute l'Europe pour éviter la marginalisation des jeunes. Toutes les activités orientées vers les jeunes susceptibles de tomber dans l'exclusion sociale ne doivent pas considérer ces derniers comme des destinataires passifs de services sociaux, mais plutôt comme des intervenants actifs.

1.11

Il est essentiel de reconnaître (notamment dans le cadre de l'éducation formelle), les compétences obtenues dans le cadre d'activités de volontariat. Des compétences et connaissances non formelles accumulées peuvent être mises à profit tant sur le marché du travail que dans la perspective d'une meilleure participation à la vie citoyenne.

1.12

Les projets et les activités devraient sensibiliser les jeunes et développer chez eux un sentiment de solidarité et de responsabilités globales envers la collectivité au sens large. Pour éviter les écueils sur leur route, les jeunes doivent pouvoir espérer pour leur futur proche des salaires décents comme fruit de leur travail à venir, grâce à la mise en place de conditions favorisant des politiques de salaires adéquates.

1.13

Le Comité regrette que la proposition de stratégie ne précise pas de méthodes concrètes de mise en œuvre ni de moyens pour mesurer les avancées à l'échelon européen et à celui des États membres. L'on prévoit, toutefois, que la méthode ouverte de coordination restera l'instrument principal. Le Comité estime qu'il y aurait lieu de la compléter par un Pacte européen révisé pour la jeunesse. Le CESE invite également les partenaires sociaux et la Commission européenne à adopter un accord afin d'améliorer la mobilité et l'emploi des jeunes.

1.14

Les jeunes doivent être au centre de la stratégie. L'animation socio-éducative et la participation à des structures de jeunesse représentent l'approche la plus efficace pour les atteindre. L'évaluation et l'amélioration de la qualité de l'animation socio-éducative doit dès lors constituer une priorité.

1.15

La Commission devrait inciter les États membres à introduire des mesures de nature à accroître les chances d'emploi et permettant aux jeunes de devenir indépendants, comme par exemple:

un soutien au cours de la formation initiale (aide financière, logement, conseil, transports, etc.);

une allocation d'insertion pour les primo-demandeurs d’emploi;

un apprentissage et des stages de bonne qualité;

la transformation des stages en contrats de travail à durée indéterminée.

2.   Proposition de la Commission

2.1

Le cadre actuel de coopération dans le domaine de la jeunesse, fondé sur le Livre blanc sur la jeunesse, sur le pacte européen pour la jeunesse (2005), sur la méthode ouverte de coordination (MOC) et sur l'intégration des questions relatives à la jeunesse dans d'autres politiques devait expirer en 2009 et n'a pas toujours été à la hauteur des attentes. En conséquence, après un large processus de consultation en 2008, la Commission européenne a avancé une proposition de nouveau cadre de coopération. Elle a intitulé sa communication, publiée en avril 2009: «Une stratégie de l’Union européenne pour investir en faveur de la jeunesse et la mobiliser».

2.2

La nouvelle proposition de stratégie se fonde sur trois objectifs généraux et connexes qui comportent chacun deux ou trois champs d'intervention:

Objectif: élargir les possibilités offertes aux jeunes dans les secteurs de l’éducation et de l’emploi:

Champs d'intervention: l'éducation, l'emploi, créativité et entrepreneuriat.

Objectif: améliorer leur insertion sociale et leur pleine participation à la vie de la société:

Champs d'intervention: la santé et le sport, la participation.

Objectif: développer la solidarité mutuelle entre la société et les jeunes:

Champs d'intervention: l'intégration sociale, le volontariat, les jeunes et le monde.

Pour chacun des champs d'intervention, une liste d'objectifs et d'actions spécifiques est proposée à l'intention de la Commission et des États membres.

3.   Observations générales

3.1   Une meilleure coordination est nécessaire

3.1.1

De grands défis sociaux, tels que l'absence de sécurité sociale, la montée de la xénophobie et les obstacles à l'emploi et à l'éducation, peuvent traverser aisément les frontières, mettant ainsi en péril le modèle social européen. En raison de la crise économique, de telles questions nécessitent plus que jamais une réponse européenne plus cohérente. Même si ces défis sociaux ne concernent pas exclusivement les jeunes, cette catégorie est l'une des plus vulnérables.

3.1.2

Le Comité estime qu'une meilleure coordination entre les échelons européen et national est nécessaire, assortie d'une clarification des rôles. Les différences qui existent entre les États membres devraient être prises en considération et envisagées comme une source de synergies fructueuses et non comme un problème. La Commission devrait s'efforcer d'obtenir un lien plus fort entre les échelons européen et national dans les activités de coopération en faveur de la jeunesse, et chercher à renforcer et à améliorer la mise en œuvre d'objectifs européens aux niveaux national, régional et local. Le processus de consultation en matière de jeunesse qui a préludé au lancement de la proposition de stratégie a démontré que la politique de la jeunesse a gagné en importance, non seulement à l'échelon européen mais aussi à l'échelon national.

3.1.3

Le CESE estime que la proposition de stratégie représente une nouvelle étape. Pour réussir, il recommande d'aborder les défis suivants:

Représentation. Bien que la MOC et le dialogue structuré constituent des instruments utiles, il est nécessaire d'évaluer et d'améliorer en permanence leur mise en œuvre et d'élaborer de nouveaux outils de consultation permettant d'associer à l'élaboration des politiques les organisations de jeunesse de terrain, les organes publics, les jeunes eux-mêmes ainsi que d'autres acteurs (1).

Sensibilisation à la politique européenne de la jeunesse. Une plus grande visibilité des mesures au niveau européen bénéficierait aux jeunes; ils devraient en effet avoir conscience que les chances qui leur sont offertes par l'intermédiaire du cycle de coopération en matière de jeunesse (tels que les échanges de jeunesse) émanent de la politique européenne de la jeunesse.

Différences entre les pays. La coordination et le regroupement de 27 approches nationales dans le cadre de coopération européenne est une tâche ambitieuse. Dans certains pays, plusieurs des champs d'intervention concernés ont une longue tradition, et la stratégie européenne pourrait bénéficier de leur expérience, tandis que, dans d'autres, ces champs d'intervention viennent à peine d'être mis en œuvre. Toutefois, la nouvelle stratégie devrait être porteuse d'une valeur ajoutée pour chacun des États membres.

Défis en matière de communication. Il y a lieu de suivre une approche commune afin de diffuser et de recueillir des données comparables de manière structurée, pour améliorer le rapport et l'analyse des progrès accomplis. Il y aurait lieu de convenir d'indicateurs communs orientés sur les résultats.

Mise en œuvre. De grandes différences existent aussi entre les États membres en ce qui concerne les capacités de mise en œuvre des politiques européennes. Certains pays disposent de systèmes bien développés, qui atteignent l'échelon régional et local, tandis que, dans d'autres, très peu de ressources sont consacrées à la coopération européenne dans les domaines qui concernent la jeunesse.

3.1.4

Le CESE appelle la Commission à utiliser les compétences qui sont les siennes ainsi que son autorité pour encourager et orienter les États membres dans la mise en œuvre de la stratégie. La Commission devrait clairement assumer son rôle dans le processus de coordination de la stratégie.

3.2   Faire en sorte que l'approche transversale réussisse

3.2.1

Les champs d'intervention suggérés dans la proposition de stratégie (voir paragraphe 2.2) couvrent un large éventail sur le plan social et économique. Aucun des champs d'intervention n'est directement lié à une tranche d'âge spécifique, mais ils sont d'une pertinence extrême du point de vue de la jeunesse. Toutefois, pour certains champs d'intervention, les objectifs à réaliser sont mieux développés, tandis que pour d'autres, la description reste assez générale.

3.2.2

Le CESE estime que la poursuite simultanée de huit champs d'intervention thématiques est porteuse d'un défi ambitieux; il recommande donc de se pencher sur les questions suivantes:

mettre en place un organisme de coordination au sein de la Commission européenne, ainsi que des procédures clairement définies pour le processus global de coordination, afin d'orienter, de gérer, de contrôler et d'évaluer la mise en œuvre, aux niveaux européen et national, en associant les acteurs concernés (y compris les organisations de jeunesse) et les organismes correspondants qui sont en charge des champs d'interventions (par exemple une organisation différente au sein d'autres institutions européennes, y compris le Conseil de l'Europe), en organisant des réunions périodiques de groupes de travail conjoints et des exercices d'apprentissage entre pairs, et en tenant compte du Pacte européen révisé pour la jeunesse;

fixer des objectifs clairs dans le cadre d'un délai convenu, et définir une feuille de route pour chacun de ces objectifs;

classer par ordre de priorité les champs d'intervention, et s'assurer que tous feront l'objet d'un suivi étroit;

intéresser conjointement les acteurs (tels que les éducateurs, les hommes de terrain, les chercheurs, les experts, les partenaires sociaux, les hommes politiques, etc.) et associer les jeunes et les structures de jeunesse dans un dialogue structuré amélioré et continu;

mettre en place une approche fiable, transparente et systématique pour la mise en œuvre de la stratégie;

intégrer la dimension de la jeunesse dans la stratégie de Lisbonne pour l'après 2010, afin de faciliter l'intégration sociale et professionnelle des jeunes femmes et des jeunes hommes;

faire l'apport des ressources nécessaires en créant de nouveaux instruments ou en adaptant les générations actuelles et futures de programmes tels que Jeunesse en action, le programme pour l’éducation et la formation tout au long de la vie, PROGRESS, MEDIA, Erasmus Jeunes entrepreneurs, le programme-cadre pour la compétitivité et l’innovation ainsi que les Fonds structurels. Il conviendrait que ces outils soient coordonnés et se complètent mutuellement;

réduire la bureaucratie et garantir une plus grande transparence dans la gestion des projets et des activités liés aux champs d'intervention;

soutenir l'animation socio-éducative et les structures de jeunesse en tant que pilier primordial pour traiter tous les champs d'intervention thématiques, la participation devant être le principe général sous-jacent.

3.3   L'animation socio-éducative, un instrument de mise en œuvre de la stratégie

3.3.1

Le CESE se réjouit que l'accent soit mis sur l'importance du rôle de l'animation socio-éducative. Les politiques de la jeunesse doivent être conçues et appliquées au bénéfice de TOUS les jeunes. Le domaine de la jeunesse est devenu un véhicule important des mutations sociales (2), développant des compétences transférables et compensant les certificats officiels manquants (en particulier pour les groupes défavorisés). Il y a lieu, pour autant, de fournir plus d'efforts pour reconnaître les compétences acquises à la faveur de l'animation socio-éducative. Il conviendrait de renforcer le rôle que jouent les organisations de jeunesse dans la mobilisation des jeunes, dans la mesure où elles constituent un espace de développement personnel où les jeunes apprennent à participer, et il convient d'accorder une meilleure reconnaissance au développement des compétences.

3.3.2

L'animation socio-éducative est liée à des activités qui visent délibérément les jeunes et s'inscrivent dans toute une série d'environnements et de structures (telles que des organisations de jeunes volontaires, des centres de jeunesse de collectivité, des cadres spécifiques régis par des institutions publiques ou l'Église). Toutefois, il est nécessaire de définir clairement ce terme.

3.3.3

Il conviendrait que l'animation socio-éducative devienne un élément transversal dans tous les champs d'intervention couverts par la stratégie proposée. En conséquence, la qualité de l'animation socio-éducative doit constituer un objectif explicite si l'on souhaite que la nouvelle stratégie à long terme pour la politique de la jeunesse atteigne toutes les catégories de jeunes. Les programmes tels que Jeunesse en action et le programme sectoriel Leonardo da Vinci devraient avoir pour objectif de développer, de soutenir et d'améliorer la formation de ceux qui participent à l'animation socio-éducative, notamment des professionnels, en contribuant à la mise en place de compétences plus professionnelles dans ce domaine.

3.3.4

Dans la plupart des cas, les jeunes sont usagers de l'animation socio-éducative lorsqu'ils sont dans une situation de «préemploi» dans leur vie: cette situation s'étend des années d'adolescence aux situations des personnes ayant des besoins particuliers, des migrants économiques, des groupes défavorisés ou des personnes défavorisées au sein des groupes démunis. Bien qu'elles ne constituent pas un instrument direct pour l'accès à l'emploi lui-même, l'animation socio-éducative et la participation aux structures de jeunesse ont davantage à offrir en ce qui concerne l'intégration sociale et pourraient davantage bénéficier d'une coopération plus étroite avec des services de formation professionnelle et d'un accroissement de la visibilité de leur contribution en matière d'employabilité de la jeunesse.

4.   Observations particulières concernant les champs d'intervention

4.1   Le Comité émet des observations sur la teneur des huit champs d'intervention, bien que de nouvelles propositions de priorités soient susceptibles d'intervenir et que les champs déjà proposés puissent faire l'objet d'un classement par priorité.

4.2   L'éducation

4.2.1

L'éducation a toujours représenté non seulement un aspect essentiel du développement et de la croissance personnels, mais aussi un vecteur de développement de la société elle-même. Le CESE souligne que les études et la formation professionnelle des enseignants sont intimement liées à d'autres politiques, dont la politique de la jeunesse (3).

4.2.2

L'apprentissage non formel peut compléter l'éducation formelle et fournir les compétences nécessaires susceptibles d'être mieux développées dans un système moins formel, tandis que l'éducation formelle peut intégrer des méthodes non formelles, en faisant application de principes d'apprentissage tout au long de la vie.

4.2.3

Pour rendre l'apprentissage plus efficace et plus attrayant aux yeux des jeunes (4) et pour reconnaître le rôle de l'apprentissage non formel, il y a lieu d'aborder et de suivre les questions suivantes:

introduire des méthodes d'apprentissage non formel dans l'éducation formelle;

créer des transitions aisées entre des opportunités d'apprentissage formel et non formel;

aiguiller les jeunes pour qu'ils apprennent à travers leurs expériences;

lier les établissements scolaires avec l'animation socio-éducative locale;

mettre le jeune au centre du processus d'apprentissage;

reconnaître les compétences obtenues au moyen du volontariat et de l'apprentissage non formel (le certificat «Youthpass» représente un bon exemple et il conviendrait de l'étendre à davantage d'interventions et d'activités, y compris en dehors du programme Jeunesse en action).

mettre en place un système clair d'évaluation des compétences acquises dans le cadre d'une éducation non formelle et informelle.

4.2.4

La proportion de jeunes contraints d’exercer une activité salariée pour financer leurs études ne cesse de croître alors même que cette double activité est un facteur important d’échec aux examens.

4.2.5

«Jeunesse en action» et des programmes tels que Comenius, Erasmus et Erasmus Mundus pourraient envisager des interventions et un financement mieux ciblé pour mettre en pratique, à l'avenir, de tels éléments souhaitables. Il serait souhaitable de rendre ces programmes plus accessibles à toutes les catégories de jeunes.

4.3   L'emploi

4.3.1

Il existe un lien direct entre l'éducation et l'emploi: plus le niveau d'éducation est élevé, plus le risque de chômage est bas (5). Les jeunes qui abandonnent prématurément l'école, en particulier, rencontrent de grandes difficultés pour trouver un emploi, ce qui engendre une situation où ils perçoivent de faibles revenus et risquent de souffrir de la pauvreté et de l'exclusion sociale.

4.3.2

Les inégalités sociales se traduisent de manière croissante et marquée dans ces dernières années par des disparités quant au succès aux études, à l'obtention de diplômes et à l'accès aux emplois qualifiés. Les jeunes salariés sont en situation précaire, avec un faible salaire et des conditions de travail et de vie indécentes. Le diplôme n’est plus une assurance contre le chômage et la déqualification, la société doit répondre à ces défis en assumant sa part de solidarité.

4.3.3

Pour offrir au plus grand nombre possible de jeunes des perspectives d'avenir en dehors du travail précaire, l'enjeu dans ce contexte est surtout, outre l'amélioration du niveau de qualification, une intensification des mesures relevant d'une politique active du marché de l'emploi en direction des jeunes à la recherche d'un emploi ainsi que la suppression des obstacles structurels au passage de la formation à l'emploi.

4.3.4

Recherchant des emplois mieux payés et plus attractifs, beaucoup de jeunes quittent leur pays d'origine. Cette réalité vaut pour tous les niveaux d'éducation, ce qui conduit à une migration permanente de «fuite des cerveaux», en particulier à partir des nouveaux États membres. Cette migration est à distinguer d'une mobilité temporaire, laquelle est positive pour tous (jeunes, sociétés, économies) et doit être encouragée dans l'UE.

4.3.5

Le travail représente un facteur de dignité personnelle et collective ainsi qu'un facteur d'intégration sociale. L'insécurité sur le lieu de travail, les bas salaires et les heures supplémentaires constituent un obstacle à la conciliation de la vie professionnelle et de la vie personnelle/familiale.

4.3.6

Il convient de se pencher davantage, aux échelons européen et national, sur la transition entre l'école et la vie professionnelle. En l'absence de services d'orientation professionnelle bien développés ainsi que de systèmes d'éducation adaptés aux besoins du marché du travail, le problème du chômage des jeunes restera sans solution.

4.3.7

En gardant à l'esprit ce qui précède, le CESE recommande que la stratégie mette à profit des mesures spécifiques dans les domaines suivants:

améliorer et rendre plus accessibles l'éducation et la formation professionnelle, afin de faciliter le plus possible l'accès des jeunes au marché de l'emploi et le maintien à long terme sur celui-ci;

mettre en œuvre des mesures visant à garantir que les contrats à durée déterminée et les emplois offrant une faible protection sociale ne soient pas la norme pour les jeunes;

mettre en place de manière généralisée pour les jeunes, hommes et femmes, des services d'orientation professionnelle et d'information aisément accessibles à tous les niveaux de la formation, et créer davantage de possibilités de stages et d'apprentissages de qualité (au moyen d'une sorte de cadre européen de qualité);

proposer une aide active et précoce aux jeunes en quête d'un emploi ou d'un stage ainsi que des programmes prioritaires renforcés axés sur l'insertion des catégories en difficulté, telles que les jeunes chômeurs de longue durée et des personnes en rupture avec le système éducatif et de formation, notamment par le biais de projets d'intérêt général en matière d'emploi et une aide à la formation;

améliorer la coopération entre les établissements d'enseignement et les employeurs;

créer des liens entre les systèmes d'éducation et le monde de l'entreprise, là où c'est judicieux;

créer des liens avec les associations et reconnaître les activités volontaires;

promouvoir les bonnes pratiques parmi tous les acteurs concernés;

développer davantage l'initiative de la Commission intitulée «Des compétences nouvelles pour des emplois nouveaux»;

encourager la mobilité par le moyen d'une nouvelle génération de programmes (6).

4.3.8

L'initiative visant à faire de l'emploi des jeunes le thème du dialogue structuré pour l'année 2010 est bienvenue et représente une bonne occasion de promouvoir ce thème.

4.3.9

Dans le monde du travail, le rôle des partenaires sociaux est particulièrement important. Les partenaires sociaux européens sont fortement engagés dans ce domaine et l'augmentation de la participation de jeunes qualifiés et compétents répondant aux besoins du marché du travail a toujours été l'une des priorités de leurs programmes de travail conjoints.

4.4   Créativité et entrepreneuriat

4.4.1

Le soutien, au moyen de mécanismes de financement, à l'innovation dans des projets consacrés à la jeunesse ainsi qu'à des activités d'entreprises, constitue un défi, mais il convient de le relever afin de rendre possible l'apprentissage orienté vers les participants. Des ressources financières plus importantes seront bienvenues pour promouvoir de telles initiatives, dans la mesure où, dans beaucoup d'États membres, les financements nationaux sont faibles ou inexistants.

4.4.2

L'entrepreneuriat ne doit pas se limiter à sa signification économique, mais être considéré dans son acception plus large, plus globale, d'esprit d'entreprise, qui permet de cerner ou de créer une opportunité et d'agir afin de la réaliser, quel que soit le domaine concerné (social, politique, etc.).

4.4.3

Le Comité recommande que l'entrepreneuriat social des jeunes soit encouragé et soutenu.

4.4.4

Il conviendrait que des programmes visant à développer la pensée créatrice et la résolution de problèmes existent à tous les échelons de l'éducation.

4.4.5

Il y a lieu de créer des programmes de tutorat pour les jeunes entreprises (entrepreneuriat) ainsi que des dispositifs de soutien pour tous les types d'entrepreneuriat (7).

4.5   La santé et le sport

4.5.1

Le sport et les activités physiques constituent des instruments importants pour atteindre les jeunes. Ils contribuent à un style de vie sain, à une citoyenneté active et à l'intégration sociale. Il conviendra préalablement d'insister moins sur le sport en tant qu'activité de spectateur, la participation de masse devra être promue ainsi que des sports de loisirs et non compétitifs.

4.5.2

Les rassemblements sportifs exigeant une participation active sont relativement communs dans le domaine des clubs de sports de loisirs et attirent des jeunes issus de milieux sociaux différents. Il est possible d'atteindre un grand potentiel lorsque celui-ci est lié avec l'usage de méthodes d'apprentissage non formel chez des éducateurs pour ce qui est de la promotion du sport et des activités physiques à l'intention des jeunes.

4.5.3

Il convient d'associer davantage les organisations de jeunesse, à l'échelon européen comme à l'échelon national, aux campagnes actuelles de l'UE visant à encourager des modes de vie sains et concernant: les défis liés à l'alimentation, les dommages liés à l'alcool, au tabac et à la drogue, ainsi que la santé mentale. Il conviendrait que les révisions des stratégies européennes concernant ces domaines insistent davantage sur les jeunes en tant que catégorie particulière. La Commission devrait également envisager d'élaborer une stratégie européenne sur la santé sexuelle, en mettant particulièrement l'accent sur la jeunesse.

4.5.4

Il y a lieu de promouvoir le programme communautaire de santé parmi les organisations de jeunesse. Ce programme pourrait constituer une source de financements supplémentaires pour la promotion de modes de vie sains. Les organisations de jeunesse devraient être encouragées à tirer profit de cette initiative communautaire, en coopérant avec les professionnels de santé.

4.5.5

La Commission et les États membres devraient également examiner la question de la santé et de la sécurité des jeunes au travail. Les données nationales et européennes indiquent que les travailleurs jeunes sont davantage exposés au risque d'accident du travail. Le taux d'incidence des accidents non mortels au travail était plus de 40 % plus élevé chez les 18-24 ans que chez les travailleurs plus âgés (8).

4.6   La participation

4.6.1

Le CESE estime que la proposition de stratégie devrait adopter une approche pragmatique pour ce qui est de la participation, et qu'elle devrait être davantage qu'un instrument politique. Il est nécessaire d'instaurer un dialogue véritable et transparent parmi les jeunes et les décideurs à tous les échelons (européen, national, régional et local).

4.6.2

Pour parvenir à cet objectif, le CESE envisage les moyens éventuels suivants:

élaborer des méthodes de participation conviviales et attrayantes;

créer des possibilités et des structures de participation pour les jeunes;

transférer et échanger les bonnes pratiques;

créer et soutenir des conseils de jeunesse aux échelons local, régional, national et européen;

développer des opportunités d'expression pour les jeunes défavorisés et pour les groupes informels de jeunes;

supprimer les obstacles à la mobilité, ce qui représente un élément de solution pour la participation des jeunes et une meilleure compréhension des thèmes européens;

faire pleinement usage des instruments de participation déjà élaborés par différents acteurs aux échelons européen et national (9);

mener un dialogue structuré continu faisant intervenir tous les acteurs essentiels (tels que les jeunes, les organisations de jeunesse, les éducateurs, les professionnels de terrain, les chercheurs, les experts, les partenaires sociaux, les responsables politiques, etc.).

4.6.3

Il convient de renforcer la participation des jeunes aux structures de jeunesse et, plus généralement, à la société civile. Sont également nécessaires une compréhension plus claire et une meilleure promotion de concepts tels que la participation et la citoyenneté active.

4.7   L'intégration sociale

4.7.1

Stimuler le potentiel des jeunes devrait constituer une préoccupation constante de la société. Il y a donc lieu d'adopter la meilleure approche possible en faveur des jeunes défavorisés, au moyen de mesures spécifiques.

4.7.2

L'animation socio-éducative et l'apprentissage non formel constituent de puissants outils pour l'intégration des jeunes. Il est plus facile d'approcher les jeunes ayant quitté prématurément l'école ou les personnes issues de l'immigration dans des structures non formelles conçues pour éviter l'exclusion sociale. Le processus ne doit pas être orienté vers les problèmes ou uniquement axé sur les jeunes déjà en difficulté..

4.7.3

Le CESE recommande de prendre des mesures ciblées pour que les projets et les activités s'adressent directement aux jeunes défavorisés (ce qui pourrait être intégré au programme actuel Jeunesse en action). Cela ne devrait pas remplacer la priorité d'ensemble du programme, mais donner davantage d'importance à l'inclusion sociale des jeunes défavorisés.

4.7.4

Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour parvenir à la cohésion sociale dans les régions où la participation des jeunes est plus faible.

4.7.5

Le fait que l'année 2010 ait été proclamée Année européenne de la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale représente une bonne occasion de promouvoir et de développer ce thème.

4.8   Le volontariat

4.8.1

Comme le CESE l'a déjà affirmé dans des avis précédents, le volontariat représente une expérience précieuse du point de vue du développement personnel et de l'intégration sociale et professionnelle dans la société, et joue un rôle important dans l'intégration des jeunes qui bénéficient de moins de possibilités (10).

4.8.2

Pour renforcer le rôle du volontariat, l'Union européenne devrait faire en sorte de maintenir dans son programme politique la nécessité d'une meilleure reconnaissance des activités volontaires. Un bon exemple pouvant être étendu est le «Youthpass». Il convient de développer davantage des initiatives telles que le service volontaire européen, et de reconnaître que la valeur du volontariat s'exprime aussi dans d'autres formes d'implication (par exemple les autres actions au sein de Jeunesse en action).

4.8.3

Il y a lieu de développer davantage de synergies entre les systèmes nationaux et européen de volontariat. À cet égard, en travaillant avec différents concepts de volontariat, la définition du volontariat devrait être harmonisée pour pouvoir être appliquée à différents contextes.

4.8.4

Ainsi qu'il a déjà été affirmé, il est essentiel, dans le domaine du volontariat, d'assurer une meilleure coordination entre les programmes nationaux et communautaires existants, de réduire les obstacles techniques et de traiter les questions liées à l'assurance-maladie ou à l'assurance-accident. Le CESE a appelé la Commission européenne à réfléchir à la création d'un label pour les programmes d'échange qui répondent aux normes de qualité communautaires. La qualité des activités volontaires, quelle que soit leur forme, revêt une grande importance et doit être garantie par des moyens appropriés (11).

4.8.5

Il convient également de faire des efforts pour éviter que le service volontaire ne remplace différentes formes d'emploi.

4.8.6

Le CESE appelle le Conseil à adopter la proposition de décision de la Commission visant à faire de l'année 2011 l'Année européenne du bénévolat. La Journée internationale des volontaires, célébrée le 5 décembre, représente également une bonne occasion de promouvoir et de développer ce thème.

4.9   Les jeunes et le monde

4.9.1

Les jeunes sont aussi des «facteurs» directement touchés par le processus de mondialisation. Une meilleure connaissance de l'impact de la mondialisation sur les jeunes, par des recherches scientifiques, est nécessaire. En participant à des projets et activités qui développent la solidarité sur le monde et qui sensibilisent, les jeunes acquièrent un sentiment de responsabilité envers la collectivité au sens large.

4.9.2

Les questions de portée mondiale (environnement, changement climatique, développement durable) devraient être intégrées dans la politique de la jeunesse afin que celle-ci, ainsi que les projets des jeunes, contribuent à une évolution dans ce domaine. En retour, le thème de la jeunesse devrait être pris en compte dans le cadre du traitement de politiques globales.

4.9.3

L'initiative visant à faire du thème «Les jeunes et le monde» le thème du dialogue structuré pour l'année 2011 est bienvenue et représente une bonne occasion de promouvoir ce sujet.

5.   Instruments et mise en œuvre du nouveau cadre de coopération

5.1

Le CESE regrette que la proposition de stratégie ne précise pas de méthodes concrètes de mise en œuvre ni de moyens pour mesurer les avancées aux niveaux européen et national. L'on prévoit, toutefois, que la MOC restera l'instrument principal. Le CESE estime qu'il y aurait lieu de la compléter par un Pacte européen révisé pour la jeunesse.

5.2

Le futur cadre de coopération devrait se fonder sur un dialogue structuré amélioré, le plus exhaustif possible et développé à tous les échelons, qui fasse intervenir les jeunes, les éducateurs, les organisations de jeunesse, les organismes nationaux, les chercheurs et d'autres parties prenantes tout au long du cycle de décision politique et dans l'ensemble des domaines stratégiques. Ce cadre devrait se fonder sur une large approche ascendante qui comporte aussi diverses formes de citoyenneté active et fasse participer les jeunes qui bénéficient de moins de possibilités.

5.3

Il conviendrait que, dans le cadre de cette proposition de stratégie, la prise de décision politique soit fondée sur des données concrètes et soit aussi transparente que possible. Le Comité recommande que la base de données du Centre européen de connaissances sur les politiques de jeunesse (12) soit utilisée pour la publication de l'ensemble des rapports ainsi que pour la collecte et l'analyse des données.

5.4

Les jeunes doivent être au centre du processus et l'animation socio-éducative est l'approche la plus efficace pour les atteindre. L'évaluation et l'amélioration de la qualité de l'animation socio-éducative doit dès lors constituer une priorité.

Bruxelles, le 1er octobre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Seuls 33 % des jeunes considèrent qu'ils jouent un rôle influent dans la société à l'échelon européen et 50 % considèrent qu'ils ne disposent pas des opportunités qui leur permettraient de faire entendre leur voix (résultats de la consultation en ligne dans le domaine de la jeunesse – 2008).

(2)  Cf. les résultats des recherches dans le cadre du projet UP2YOUTH présenté dans le rapport européen sur la jeunesse publié en avril 2009.

(3)  Voir l'avis du CESE du 16.01.2008 sur le thème «Améliorer la qualité des études et de la formation des enseignants», rapporteur: M. soares (JO C 151, 17.06.2008).

(4)  67 % des jeunes et des organisations de jeunesse ne sont pas satisfaits des systèmes nationaux d'éducation (résultats de la consultation en ligne dans le domaine de la jeunesse – 2008).

(5)  D'après le Rapport européen sur la jeunesse publié en avril 2009, dans les États membres, les titulaires d'un diplôme secondaire inférieur risquent presque trois fois plus d'être au chômage que les titulaires d'un diplôme de l'enseignement supérieur.

(6)  Voir l'avis du CESE du 17.01.2008 sur la communication intitulée «Promouvoir la pleine participation des jeunes à l’éducation, à l’emploi et à la société», rapporteur: M. trantina (JO C 151, 17. 06. 2008).

(7)  Conclusions de la manifestation relative à la jeunesse (Youth Event) organisée à Prague par la présidence tchèque du Conseil de l'UE du 2 au 5 juin 2009.

(8)  Statistiques européennes sur les accidents du travail (SEAT).

(9)  Tels que la Charte européenne révisée de la participation des jeunes à la vie locale et régionale élaborée par le Conseil de l'Europe: http://www.coe.int/t/dg4/youth/Resources/Documents/Bibliographies/Political_participation_fr.asp

(10)  Voir l'avis du CESE du 13.12.2006 sur «Les activités volontaires: leur rôle dans la société européenne et leur impact», rapporteure: Mme Koller (JO C 325 du 30.12.2006).

(11)  Voir l'avis exploratoire du CESE du 25.02.2009 sur le thème «Service civique européen», rapporteur: M. janson; corapporteur: M. sibian (JO C 218 du 11.09.2009).

(12)  http://youth-partnership.coe.int/youth-partnership/ekcyp/index


23.12.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 318/121


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 998/2003 concernant les conditions de police sanitaire applicables aux mouvements non commerciaux d’animaux de compagnie»

COM(2009) 268 final — 2009/0077 (COD)

2009/C 318/23

Le 30 juin 2009, le Conseil a décidé, conformément à l'article 152, 4 b) du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social sur la

«Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 998/2003 concernant les conditions de police sanitaire applicables aux mouvements non commerciaux d’animaux de compagnie»

Ayant estimé que le contenu de la proposition est entièrement satisfaisant et que par ailleurs il avait déjà fait l'objet de ses avis CES 1411/2000 et CESE 1705/2007 adoptés le 29 novembre 2000 (1) et le 12 décembre 2007 (2), le Comité a décidé, lors de sa 456e session plénière des 30 septembre et 1er octobre 2009, (séance du 30 septembre 2009), par 180 votes pour et 9 abstentions, de rendre un avis favorable au texte proposé et de se référer à la position qu'il a soutenue dans les documents susmentionnés.

Bruxelles, le 30 septembre 2009.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  Avis du CESE sur la Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 998/2003 concernant les conditions de police sanitaire applicables aux mouvements non commerciaux d’animaux de compagnie - JO C 116 du 20.04.2001, p. 54.

(2)  Avis du CESE sur la Proposition du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 998/2003 concernant les conditions de police sanitaire applicables aux mouvements non commerciaux d’animaux de compagnie par la prolongation de la période transitoireJO C 120 du 16.05.2008, p. 49.