21.10.2010   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

CE 285/74


Jeudi, 26 novembre 2009
Nicaragua

P7_TA(2009)0103

Résolution du Parlement européen du 26 novembre 2009 sur le Nicaragua

2010/C 285 E/12

Le Parlement européen,

vu ses résolutions antérieures sur le Nicaragua, notamment sa résolution du 18 décembre 2008 sur les attaques contre les militants des droits de l'homme, les libertés civiles et la démocratie au Nicaragua (1),

vu l'accord du 15 décembre 2003 de dialogue politique et de coopération entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et les Républiques du Costa Rica, d'El Salvador, du Guatemala, du Honduras, du Nicaragua et du Panama, d'autre part, et l'accord-cadre de coopération entre la Communauté économique européenne et les Républiques du Costa Rica, d'El Salvador, du Guatemala, du Honduras, du Nicaragua et du Panama (2),

vu les lignes directrices de l'Union européenne, de juin 2004, sur les militants des droits de l'homme,

vu les rapports élaborés par l'équipe d'experts de l'Union européenne sur les élections municipales nicaraguayennes qui se sont déroulées le 9 novembre 2008,

vu les déclarations de la commissaire Ferrero-Waldner sur les événements qui ont eu lieu au Nicaragua après les élections municipales du 9 novembre 2008,

vu les négociations en cours pour la signature d'un accord d'association entre l'Union européenne et les pays d'Amérique centrale,

vu l'article 122, paragraphe 5, de son règlement,

A.

considérant que l'Inter American Press Association (IAPA) a exprimé son inquiétude devant un ensemble d'actions et de déclarations du gouvernement du Nicaragua qui étouffent la liberté de la presse dans ce pays,

B.

considérant qu'aux termes de l'article 147 de la constitution du Nicaragua, il n'est pas possible de se porter candidat à deux mandats présidentiels consécutifs et que le président Ortega essaie de contourner, illégalement, cette disposition afin de pouvoir se présenter à un second mandat lors des élections de 2011,

C.

considérant qu'il appartient seulement au corps législatif de se prononcer sur une réforme de la constitution et que le parti gouvernemental, le Front sandiniste de libération nationale,n'y dispose pas de la majorité nécessaire des deux tiers,

D.

considérant que, le 19 octobre 2009, la Cour suprême de justice (Corte Suprema de Justicia) du Nicaragua s'est réunie durant la nuit, en l'absence de trois des six juges titulaires, qui n'avaient pas été invités et qui ont été remplacés par trois juges pro-gouvernementaux, et qu'elle a déclaré à l'unanimité que l'article 147 de la constitution était inapplicable,

E.

considérant que tous les partis politiques d'opposition à l'Assemblée nationale (Asamblea Nacional), ainsi que nombre d'associations de la société civile, de juristes et d'organisations non gouvernementales (ONG), ont rejeté cette déclaration judiciaire comme entachée d'illégalité et ont convenu d'œuvrer ensemble dans le but de préserver la démocratie et l'état de droit au Nicaragua,

F.

considérant que les États membres de l'Alternative bolivarienne pour les Amériques (ALBA) ont immédiatement salué cette déclaration judiciaire,

G.

considérant qu'une délégation de l'internationale libérale a été l'objet de menaces et d'insultes durant sa visite au Nicaragua et que son président, Johannes Cornelis van Baalen, député au Parlement européen, a même été menacé d'être expulsé du Nicaragua et a été déclaré persona non grata par les autorités sandinistes,

H.

considérant que la situation de la démocratie s'est détériorée au Nicaragua, depuis les accusations de fraude aux élections municipales de 2008,et depuisles attaques et les actes de harcèlement dont font l'objet les organisations de défense des droits de l'homme, ainsi que leurs membres, les journalistes et les représentants des médias, de la part d'individus, de forces politiques ou d'organismes liés aux autorités gouvernementales,

I.

considérant que le développement et la consolidation de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent faire partie intégrante des politiques extérieures de l'Union européenne,

J.

considérant que l'Union et ses partenaires, lorsqu'ils concluent des accords avec des pays tiers qui comprennent une clause sur les droits de l'homme, assument une responsabilité pour faire respecter les normes internationales en matière de droits de l'homme, et que de telles clauses sont nécessairement réciproques,

K.

considérant que l'Union devrait exercer un contrôle plus strict de l'usage des fonds versés au Nicaragua pour des projets de développement, afin de s'assurer qu'aucune part de ce financement ne tombe entre les mains des sandinistes,

L.

rappelant que les Nations unies, l'Union européenne, les États-Unis ainsi que plusieurs organisations non gouvernementales (ONG) au Nicaragua ont exprimé leur inquiétude au sujet du manque de transparence des récentes élections,

1.

déplore les nombreuses attaques et actes de harcèlement que des organisations de défense des droits de l'homme et leurs membres, ainsi que des journalistes indépendants, ont subis de la part d'individus, de forces politiques et d'organes proches de l'État;

2.

condamne les modifications de la constitution, qui imposent d'enfreindre l'ordre constitutionnel du Nicaragua, et condamne en particulier les manœuvres tactiques juridiquement douteuses utilisées par le gouvernement du Nicaragua, qui a fait appel aux juges pro-gouvernementaux de la Cour suprême de justice;

3.

conjure le président Ortega de respecter la constitution du Nicaragua, qui interdit au président d'exercer deux mandats successifs, et rappelle qu'il appartient uniquement au corps législatif de se prononcer sur une réforme de la constitution et qu'en aucunes circonstances, l'appareil judicaire ne saurait le faire;

4.

considère que l'attitude du président Ortega révèle une compréhension limitée et bien peu de respect pour la démocratie et l'état de droit, ainsi que pour l'exercice de droits fondamentaux primordiaux comme la liberté d'expression et d'association politique;

5.

soutient tous ceux qui, au Nicaragua, s'opposent à la violation de l'ordre constitutionnel perpétrée par les autorités gouvernementales et demande sa prompte restauration, ainsi que l'annulation de la déclaration judiciaire du 19 octobre 2009;

6.

condamne et déplore toutes les menaces, insultes et intimidations subies par la délégation de l'internationale libérale menée par Johannes Cornelis van Baalen, député au Parlement européen, et manifeste sa solidarité à l'égard de ses membres;

7.

déplore la manière dont les élections municipales du 9 novembre 2008 se sont déroulées, avec les manœuvres du gouvernement du Nicaragua visant à disqualifier les partis politiques d'opposition, de nombreuses irrégularités dans le scrutin, des accusations de fraude électorale et le refus d'accréditer des observateurs indépendants des élections, tant nationaux qu'étrangers; invite la Commission à envoyer une mission européenne d'observation des élections pour surveiller les prochaines élections présidentielles;

8.

regrette que l'Organisation des États américains, qui est ordinairement si prompte à aborder d'autres questions problématiques, ne voit aucune nécessité de commenter une violation si flagrante de l'ordre constitutionnel dans l'un de ses pays membres;

9.

fait remarquer que, lors des négociations sur l'accord d'association entre l'Union européenne et les pays d'Amérique centrale, il y a lieu de rappeler au Nicaragua la nécessité de respecter les principes de l'état de droit, la démocratie et les droits de l'homme, tels que défendus et encouragés par l'Union;

10.

charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, aux gouvernements et aux parlements des États membres ainsi qu'au secrétaire général des l'Organisation des États américains, à l'assemblée parlementaire euro-latino-américaine, au parlement d'Amérique centrale, au gouvernement et au parlement de la République du Nicaragua et à la Cour suprême du Nicaragua.


(1)  Textes adoptés de cette date, P6_TA(2008)0641.

(2)  JO L 63 du 12.3.1999, p. 39.