ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

9 mars 2023 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information – Directive 98/34/CE – Article 1er, point 4 – Notion d’“autres exigences” – Article 1er, point 11 – Notion de “règle technique” – Article 8, paragraphe 1 – Obligation des États membres de notifier à la Commission européenne tout projet de règle technique – Disposition nationale prévoyant l’incorporation d’un certain pourcentage de biocarburants dans les carburants routiers – Article 10, paragraphe 1, troisième tiret – Notion de “clause de sauvegarde prévue dans un acte contraignant de l’Union” – Non-inclusion de l’article 4, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2009/30/CE »

Dans l’affaire C‑604/21,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunal Administrativo e Fiscal de Braga (tribunal administratif et fiscal de Braga, Portugal), par décision du 14 septembre 2021, parvenue à la Cour le 28 septembre 2021, dans la procédure

Vapo Atlantic SA

contre

Entidade Nacional para o Setor Energético E.P.E.,

en présence de :

Fundo Ambiental,

Fundo de Eficiência Energética (FEE),

LA COUR (troisième chambre),

composée de Mme K. Jürimäe, présidente de chambre, MM. M. Safjan, N. Piçarra, N. Jääskinen et M. Gavalec (rapporteur), juges,

avocat général : M. N. Emiliou,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour Vapo Atlantic SA, par Mes N. Franco Bruno, R. Leandro Vasconcelos et M. Martins Pereira, advogados,

pour l’Entidade Nacional para o Setor Energético E.P.E., par Me G. Capitão, advogado,

pour le gouvernement portugais, par Mme P. Barros da Costa, M. M. Branco, Mme C. Chambel Alves et M. J. Reis Silva, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par MM. G. Braga da Cruz, B. De Meester et Mme M. Escobar Gómez, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 1er, point 3, de l’article 8, paragraphe 1, et de l’article 10, paragraphe 1, troisième tiret, de la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information (JO 1998, L 204, p. 37), telle que modifiée par la directive 2006/96/CE du Conseil, du 20 novembre 2006 (JO 2006, L 363, p. 81) (ci-après la « directive 98/34 »), de l’article 7 bis, paragraphe 2, de la directive 98/70/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 octobre 1998, concernant la qualité de l’essence et des carburants diesel et modifiant la directive 93/12/CEE du Conseil (JO 1998, L 350, p. 58), telle que modifiée par la directive 2009/30/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2009 (JO 2009, L 140, p. 88) (ci-après la « directive 98/70 »), de l’article 4, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2009/30, et de l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2009, relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE (JO 2009, L 140, p. 16).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Vapo Atlantic SA à l’Entidade Nacional para o Setor Energético E.P.E. (Entité nationale du secteur de l’énergie) (ci-après l’« ENSE »), au sujet d’une décision de cette dernière imposant une compensation financière à Vapo Atlantic pour ne pas avoir prouvé l’incorporation de biocarburants dans les carburants routiers que celle-ci avait mis à la consommation lors du deuxième trimestre de l’année 2020.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 98/34

3

L’article 1er de la directive 98/34 prévoyait :

« Au sens de la présente directive, on entend par :

[...]

3)

“spécification technique” : une spécification qui figure dans un document définissant les caractéristiques requises d’un produit, telles que les niveaux de qualité ou de propriété d’emploi, la sécurité, les dimensions, y compris les prescriptions applicables au produit en ce qui concerne la dénomination de vente, la terminologie, les symboles, les essais et les méthodes d’essai, l’emballage, le marquage et l’étiquetage, ainsi que les procédures d’évaluation de la conformité.

[...]

4)

“autre exigence” : une exigence, autre qu’une spécification technique, imposée à l’égard d’un produit pour des motifs de protection, notamment des consommateurs ou de l’environnement, et visant son cycle de vie après mise sur le marché, telle que ses conditions d’utilisation, de recyclage, de réemploi ou d’élimination lorsque ces conditions peuvent influencer de manière significative la composition ou la nature du produit ou sa commercialisation ;

[...]

6)

“norme” : une spécification technique approuvée par un organisme reconnu à activité normative pour application répétée ou continue, dont l’observation n’est pas obligatoire et qui relève de l’une des catégories suivantes :

norme internationale : norme qui est adoptée par une organisation internationale de normalisation et qui est mise à la disposition du public,

norme européenne : norme qui est adoptée par un organisme européen de normalisation et qui est mise à la disposition du public,

norme nationale : norme qui est adoptée par un organisme national de normalisation et qui est mise à la disposition du public ;

[...]

11)

“règle technique” : une spécification technique ou autre exigence ou une règle relative aux services, y compris les dispositions administratives qui s’y appliquent, dont l’observation est obligatoire de jure ou de facto, pour la commercialisation, la prestation de services, l’établissement d’un opérateur de services ou l’utilisation dans un État membre ou dans une partie importante de cet État, de même que, sous réserve de celles visées à l’article 10, les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres interdisant la fabrication, l’importation, la commercialisation ou l’utilisation d’un produit ou interdisant de fournir ou d’utiliser un service ou de s’établir comme prestataire de services.

Constituent notamment des règles techniques de facto :

les dispositions législatives, réglementaires ou administratives d’un État membre qui renvoient soit à des spécifications techniques ou à d’autres exigences ou à des règles relatives aux services, soit à des codes professionnels ou de bonne pratique qui se réfèrent eux-mêmes à des spécifications techniques ou à d’autres exigences ou à des règles relatives aux services, dont le respect confère une présomption de conformité aux prescriptions fixées par lesdites dispositions législatives, réglementaires ou administratives,

[...] »

4

L’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, de cette directive disposait :

« Sous réserve de l’article 10, les États membres communiquent immédiatement à la Commission tout projet de règle technique, sauf s’il s’agit d’une simple transposition intégrale d’une norme internationale ou européenne, auquel cas une simple information quant à la norme concernée suffit. Ils adressent également à la Commission une notification concernant les raisons pour lesquelles l’établissement d’une telle règle technique est nécessaire, à moins que ces raisons ne ressortent déjà du projet. »

5

Aux termes de l’article 10, paragraphe 1, troisième tiret, de ladite directive :

« Les articles 8 et 9 ne sont pas applicables aux dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres ou aux accords volontaires par lesquels ces derniers :

[...]

font usage des clauses de sauvegarde prévues dans des actes communautaires contraignants ».

La directive 98/70

6

L’article 7 bis de la directive 98/70, intitulé « Réduction des émissions de gaz à effet de serre », dispose, à ses paragraphes 1 et 2 :

« 1.   Les États membres désignent le ou les fournisseurs chargés de contrôler et de déclarer les émissions de gaz à effet de serre des carburants et de l’énergie fournis, produites sur l’ensemble du cycle de vie par unité d’énergie. Dans le cas des fournisseurs d’électricité destinée au fonctionnement de véhicules routiers, les États membres veillent à ce que ces fournisseurs puissent décider de contribuer à l’obligation en matière de réduction, prévue au paragraphe 2, s’ils peuvent démontrer leur capacité à mesurer et à contrôler efficacement l’électricité fournie pour le fonctionnement de ces véhicules.

À partir du 1er janvier 2011, les fournisseurs présentent à l’autorité désignée par l’État membre un rapport annuel sur l’intensité des émissions de gaz à effet de serre des carburants et de l’énergie fournis dans chaque État membre, en apportant au minimum les informations suivantes :

a)

le volume total de chaque type de carburant ou d’énergie fournis, en indiquant le lieu d’achat et l’origine de ces produits ; et

b)

les émissions de gaz à effet de serre produites sur l’ensemble du cycle de vie par unité d’énergie.

Les États membres garantissent que les rapports sont soumis à une vérification.

La Commission fixe, le cas échéant, des orientations pour la mise en œuvre des dispositions du présent paragraphe.

2.   Les États membres demandent aux fournisseurs de réduire, aussi progressivement que possible, les émissions de gaz à effet de serre, produites sur l’ensemble du cycle de vie du carburant ou de l’énergie fournis, par unité d’énergie, à hauteur de 10 %, le 31 décembre 2020 au plus tard, en comparaison avec les normes de base pour les carburants visées au paragraphe 5, point b). Cette réduction se compose des éléments suivants :

a)

6 %, le 31 décembre 2020 au plus tard. Les États membres peuvent exiger des fournisseurs, à cette fin, qu’ils se conforment aux objectifs intermédiaires suivants : 2 %, le 31 décembre 2014 au plus tard et 4 %, le 31 décembre 2017 au plus tard ;

b)

un objectif indicatif de 2 % supplémentaires, le 31 décembre 2020 au plus tard, dans les termes de l’article 9, paragraphe 1, point h), réalisé grâce à au moins l’une des deux méthodes suivantes :

i)

la fourniture d’énergie destinée aux transports, fournie pour le fonctionnement de tout type de véhicule routier ou d’engin mobile non routier (y compris les bateaux de navigation intérieure), les tracteurs agricoles et forestiers et les bateaux de plaisance ;

ii)

l’utilisation de toute technologie (y compris le piégeage et le stockage du dioxyde de carbone) susceptible de réduire les émissions de gaz à effet de serre produites sur l’ensemble du cycle de vie par unité d’énergie du carburant ou de l’énergie fournis ;

c)

un objectif indicatif supplémentaire de 2 %, le 31 décembre 2020 au plus tard, dans les termes de l’article 9, paragraphe 1, point i), réalisé grâce à l’utilisation de crédits acquis via le mécanisme pour un développement propre du protocole de Kyoto, dans les conditions prévues par la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil[,] du 13 octobre 2003[,] établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté [et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil (JO 2003, L 275, p. 32)], dans un objectif de réduction des émissions dans le secteur de l’approvisionnement en carburants. »

La directive 2009/30

7

Les considérants 8 et 9 de la directive 2009/30 énoncent :

« (8)

La combustion du carburant utilisé pour le transport routier est responsable d’environ 20 % des émissions de gaz à effet de serre de la Communauté. Pour réduire ces émissions, une possibilité consiste à réduire les émissions de gaz à effet de serre générées par ces carburants tout au long de leur cycle de vie. Cela peut se faire de plusieurs manières. Étant donné la volonté de la Communauté de réduire davantage encore les émissions de gaz à effet de serre et l’importante part que représentent les émissions produites par le transport routier, il est souhaitable d’instituer un mécanisme imposant aux fournisseurs de carburants de rendre compte des émissions de gaz à effet de serre produites sur l’ensemble du cycle de vie des carburants qu’ils fournissent et de réduire ces émissions à partir de 2011. La méthode utilisée pour calculer les émissions de gaz à effet de serre provenant des biocarburants devrait être identique à celle établie aux fins de calculer l’impact des gaz à effet de serre en vertu de la [directive 2009/28].

(9)

Les fournisseurs devraient progressivement réduire, le 31 décembre 2020 au plus tard, les émissions de gaz à effet de serre sur l’ensemble du cycle de vie générées à hauteur de 10 % par unité d’énergie fournie pour les carburants et l’énergie. La réduction devrait être d’au moins 6 % d’ici au 31 décembre 2020 par rapport à la moyenne communautaire des émissions de gaz à effet de serre sur l’ensemble du cycle de vie par unité d’énergie produite à partir de combustibles fossiles en 2010, grâce à l’utilisation de biocarburants ou de carburants de substitution ou à la réduction des opérations de brûlage à la torche et de dispersion des gaz dans l’atmosphère sur les sites de production. Sous réserve d’un réexamen, elle devrait comprendre une réduction supplémentaire de 2 % obtenue grâce à l’utilisation de technologies de piégeage et de stockage du carbone respectueuses de l’environnement et l’emploi de véhicules électriques, et une réduction supplémentaire de 2 % obtenue par l’achat de droits en vertu du mécanisme pour un développement propre du protocole de Kyoto. Ces réductions supplémentaires ne devraient pas être contraignantes pour les États membres ou les fournisseurs de carburants au moment de l’entrée en vigueur de la présente directive. Lors du réexamen, il conviendrait de se pencher sur leur caractère non contraignant. »

8

L’article 4 de la directive 2009/30, intitulé « Transposition », dispose :

« 1.   Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive, au plus tard le 31 décembre 2010.

Les États membres communiquent immédiatement à la Commission le texte de ces dispositions.

Lorsque les États membres adoptent ces dispositions, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d’une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les États membres.

2.   Les États membres communiquent à la Commission le texte des dispositions essentielles de droit interne qu’ils adoptent dans le domaine régi par la présente directive. »

La directive 2009/28

9

La directive 2009/28 a été abrogée par la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2018, relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables (JO 2018, L 328, p. 82), avec effet au 1er juillet 2021. Toutefois, compte tenu de la date des faits en cause, le litige au principal demeure régi par les dispositions de la directive 2009/28.

10

Les considérants 8 et 9 de la directive 2009/28 énonçaient :

« (8)

D’après la communication de la Commission du 10 janvier 2007 intitulée “Feuille de route pour les sources d’énergie renouvelables — Les sources d’énergie renouvelables au XXIe siècle : construire un avenir plus durable”, une part de 20 % de l’énergie provenant de sources renouvelables dans la consommation totale d’énergie et une part de 10 % de ce type d’énergie dans les transports seraient des objectifs appropriés et réalisables, et un cadre prévoyant des objectifs contraignants devrait apporter aux milieux d’affaires la stabilité requise pour effectuer des investissements durables dans le secteur des énergies renouvelables, qui permettent de réduire la dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles importés et d’accroître l’utilisation des nouvelles technologies énergétiques. Ces objectifs existent dans le cadre de l’amélioration de 20 % de l’efficacité énergétique d’ici à 2020, visée dans la communication de la Commission du 19 octobre 2006 intitulée “Plan d’action pour l’efficacité énergétique : réaliser le potentiel”, lequel a été entériné par le Conseil européen de mars 2007 et par le Parlement européen dans sa résolution du 31 janvier 2008 sur ledit plan d’action.

(9)

Le Conseil européen de mars 2007 a réaffirmé l’engagement de la Communauté de développer la production d’énergie à partir de sources renouvelables dans l’ensemble de la Communauté après 2010. Il a entériné les objectifs contraignants d’une part de 20 % de l’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation totale d’énergie de la Communauté d’ici à 2020 et d’une part minimale de 10 % de biocarburants dans la consommation totale d’essence et de gazole destinés au transport, cet objectif devant être réalisé d’ici à 2020 par tous les États membres, et ce à un coût raisonnable. Il a déclaré que le caractère contraignant de ce seuil se justifiait, sous réserve que la production ait un caractère durable, que des biocarburants de deuxième génération soient disponibles sur le marché et que la [directive 98/70] soit modifiée pour prévoir des niveaux de mélange adéquats. Le Conseil européen de mars 2008 a répété qu’il était essentiel de mettre au point et de respecter des critères de durabilité effective pour les biocarburants ainsi que d’assurer la disponibilité, sur le marché, de biocarburants de deuxième génération. Le Conseil européen de juin 2008 a de nouveau mentionné les critères de durabilité et le développement de biocarburants de deuxième génération, et il a souligné la nécessité d’évaluer les incidences éventuelles de la production de biocarburants sur les produits agricoles destinés à l’alimentation et de prendre des mesures, le cas échéant, pour faire face à d’éventuels problèmes. Il a également indiqué qu’il convenait de poursuivre l’évaluation des incidences environnementales et sociales de la production et de la consommation de biocarburants. »

11

L’article 1er de la directive 2009/28, intitulé « Objet et champ d’application », prévoyait :

« La présente directive définit un cadre commun pour la promotion de la production d’énergie à partir de sources renouvelables. Elle fixe des objectifs nationaux contraignants concernant la part de l’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie et la part de l’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation d’énergie pour les transports. [...] »

12

L’article 3 de la directive 2009/28, intitulé « Objectifs contraignants nationaux globaux et mesures concernant l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables », disposait, à son paragraphe 4 :

« Chaque État membre veille à ce que la part de l’énergie produite à partir de sources renouvelables dans toutes les formes de transport en 2020 soit au moins égale à 10 % de sa consommation finale d’énergie dans le secteur des transports.

[...] »

13

Dans sa dernière version en vigueur, la directive 2009/28 avait été modifiée par la directive (UE) 2015/1513 du Parlement européen et du Conseil, du 9 septembre 2015 (JO 2015, L 239, p. 1), qui prévoyait, conformément à son article 4, paragraphe 1, que les modifications apportées par celle-ci devaient être transposées par les États membres au plus tard le 10 septembre 2017, lesquels étaient également tenus d’informer immédiatement la Commission de toute mesure de transposition.

Le droit portugais

14

L’article 11 du Decreto-Lei n.° 117/2010 (décret-loi no 117/2010), du 25 octobre 2010, tel que modifié par le Decreto-Lei n.° 6/2012 (décret-loi no 6/2012), du 17 janvier 2012 (ci-après le « décret-loi no 117/2010 »), dispose, à son paragraphe 1 :

« Les entités qui procèdent à la mise à la consommation de carburants routiers, en présentant les déclarations de mise à la consommation (DMC) conformément au code des accises, approuvé par le décret-loi no 73/2010, du 21 juin 2010, modifié par la loi no 55-A/2010, du 31 décembre 2010, [...] doivent contribuer au respect des objectifs d’incorporation de biocarburants dans les pourcentages suivants, en teneur énergétique, relativement aux quantités de carburants routiers qu’elles mettent à la consommation, à l’exception du gaz de pétrole liquéfié (GPL) et du gaz naturel :

a)

2011 et 2012 – 5,0 % ;

b)

2013 et 2014 – 5,5 % ;

c)

2015 et 2016 – 7,5 % ;

d)

2017 et 2018 – 9,0 % ;

e)

2019 et 2020 – 10,0 %. »

15

Le préambule du décret-loi no 6/2012 précise que « le décret-loi no 117/2010 [...] qui transpose partiellement en droit national la [directive 2009/28] et la [directive 2009/30], établit les critères de durabilité pour la production et l’utilisation de biocarburants et de bioliquides, les mécanismes visant à promouvoir les biocarburants dans les transports terrestres et fixe les limites pour l’incorporation obligatoire de biocarburants ».

Le litige au principal et les questions préjudicielles

16

Vapo Atlantic est une société exerçant son activité sur le marché des carburants au Portugal.

17

Ayant le statut fiscal de destinataire enregistré, elle ne remplit pas les conditions légales pour procéder à l’incorporation physique de biocarburants dans les carburants routiers qu’elle met à la consommation au Portugal. Par conséquent, elle achète, auprès d’une société établie en Espagne, de tels carburants qui contiennent du biocarburant dans des proportions respectant les dispositions de la législation espagnole.

18

Vapo Atlantic n’a présenté à l’ENSE aucune preuve de l’approbation par la Commission européenne du système de certification volontaire appliqué par la société auprès de laquelle elle achète des carburants routiers en Espagne.

19

Au cours du deuxième trimestre de l’année 2020, Vapo Atlantic a mis à la consommation 7582 tonnes de carburants routiers.

20

L’ENSE a constaté que, contrairement à l’obligation qui lui en est faite par le décret-loi no 117/2010, Vapo Atlantic ne disposait d’aucun certificat relatif aux biocarburants, alors qu’elle aurait dû en détenir au moins 758 pour démontrer qu’elle respectait l’obligation d’incorporer 10 % de biocarburants aux carburants routiers qu’elle a mis à la consommation au deuxième trimestre de l’année 2020.

21

Par conséquent, l’ENSE a adopté une décision imposant à Vapo Atlantic le paiement d’un montant de 908084 euros à titre de compensation financière au motif que celle-ci n’avait pas prouvé l’incorporation de biocarburants dans les carburants routiers mis par elle à la consommation pendant le deuxième trimestre de l’année 2020, ce en méconnaissance de l’article 11, paragraphe 1, du décret-loi no 117/2010.

22

Vapo Atlantic a contesté cette décision devant le Tribunal Administrativo e Fiscal de Braga (Tribunal administratif et fiscal de Braga, Portugal), qui est la juridiction de renvoi.

23

Cette juridiction souligne que le projet de la réglementation nationale visée au point 21 du présent arrêt ne paraît pas avoir été notifié à la Commission préalablement à la publication et à l’entrée en vigueur de cette réglementation.

24

Ladite juridiction s’interroge, en substance, sur l’interprétation des dispositions de la directive 98/34, afin de déterminer si ladite réglementation constitue une « règle technique » qui aurait dû faire l’objet d’une notification à la Commission.

25

En premier lieu, cette même juridiction se demande si l’article 11, paragraphe 1, du décret-loi no 117/2010, qui se borne à déterminer des pourcentages d’incorporation de biocarburants dans les carburants routiers mis à la consommation sans déterminer une quelconque caractéristique de ces biocarburants, peut être considéré comme une « règle technique », au sens de l’article 1er, point 11, de la directive 98/34, et, plus particulièrement, s’il s’agit d’une « autre exigence », au sens de cet article 1er, point 4.

26

En deuxième lieu, la juridiction de renvoi se demande si l’article 11, paragraphe 1, du décret-loi no 117/2010 peut relever de l’exception prévue à l’article 8, paragraphe 1, de ladite directive, en tant que cette disposition de droit national constituerait une « simple transposition intégrale d’une norme [...] européenne ». En effet, l’article 7 bis, paragraphe 2, de la directive 98/70 imposerait l’obligation pour les États membres de demander aux fournisseurs de réduire, aussi progressivement que possible, les émissions de gaz à effet de serre produites à hauteur de 10 %.

27

En troisième lieu, cette juridiction s’interroge sur le point de savoir si l’article 11, paragraphe 1, du décret-loi no 117/2010 relève de l’article 10, paragraphe 1, troisième tiret, de la directive 98/34, eu égard à l’article 4, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2009/30 et à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2015/1513. En effet, ces deux dernières dispositions pourraient s’analyser comme des « clauses de sauvegarde prévues dans des actes communautaires contraignants », au sens de l’article 10, paragraphe 1, troisième tiret, de la directive 98/34.

28

En quatrième lieu, ladite juridiction s’interroge, à titre subsidiaire, sur les conséquences découlant du manquement à l’obligation de communication du projet de réglementation, prévue à l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34. La juridiction de renvoi reconnaît que, en principe, l’absence de notification de dispositions nationales au titre de cette disposition entraîne l’inopposabilité de celles-ci. Toutefois, elle éprouve des doutes à cet égard, dès lors qu’une telle interprétation entraînerait un non-respect généralisé de l’obligation d’incorporation de biocarburants dans les carburants routiers mis à la consommation. Cette même interprétation compromettrait non seulement l’objectif national mais également l’objectif européen de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de promotion des énergies renouvelables.

29

Dans ces conditions, le Tribunal Administrativo e Fiscal de Braga (tribunal administratif et fiscal de Braga) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

L’article 1er, point 3, de la directive 98/34 doit-il être interprété en ce sens que la détermination du pourcentage de biocarburants que, en vertu de l’article 7 bis de la directive 98/70, introduit par la directive 2009/30, et conformément à l’objectif énoncé à l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2009/28, un opérateur économique donné est tenu d’incorporer dans les carburants qu’il met à la consommation, comme c’est le cas dans la législation nationale en cause, relève de la notion d’“autre exigence”, aux fins de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34 ?

2)

L’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34, lorsqu’il indique “sauf s’il s’agit d’une simple transposition intégrale d’une norme internationale ou européenne”, doit-il être interprété en ce sens qu’il exclut une disposition de droit national qui détermine les pourcentages d’incorporation de biocarburants, en vertu de l’article 7 bis, paragraphe 2, de la directive 98/[70], introduit par la directive 2009/30, et conformément à l’objectif visé à l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2009/28 ?

3)

L’article 4, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2009/30 et l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2015/1513 doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils constituent des clauses de sauvegarde prévues par des actes communautaires contraignants au sens de l’article 10, paragraphe 1, troisième tiret, de la directive 98/34 ?

4)

Si les réponses aux questions précédentes ne préjugent pas de la réponse à cette question, l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34 doit-il être interprété en ce sens qu’une disposition nationale telle que celle en cause dans la procédure au principal, qui détermine le pourcentage d’incorporation de biocarburants en application de l’article 7 bis, paragraphe 2, de la directive 98/70, introduit par la directive 2009/30, ne peut pas être opposée aux opérateurs économiques ? »

Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle

30

L’ENSE considère que la demande de décision préjudicielle est irrecevable, dès lors que le libellé des dispositions dont la juridiction de renvoi demande l’interprétation serait clair et qu’il n’y aurait donc aucun doute à éclaircir.

31

À cet égard, il est de jurisprudence constante que, dans le cadre de la procédure instituée par l’article 267 TFUE, il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer (arrêt du 6 octobre 2021, Sumal, C‑882/19, EU:C:2021:800, point 27 et jurisprudence citée).

32

En l’occurrence, il suffit de constater que, ainsi qu’il ressort de la demande de décision préjudicielle, les questions posées ont un rapport direct avec le litige au principal et qu’elles sont pertinentes afin de permettre à la juridiction de renvoi de trancher celui-ci. Cette demande contient, par ailleurs, suffisamment d’éléments pour déterminer la portée de ces questions et y apporter une réponse utile.

33

En tout état de cause, il n’est nullement interdit à une juridiction nationale de poser à la Cour une question préjudicielle dont, selon l’opinion d’une des parties au principal, la réponse ne laisse place à aucun doute raisonnable. Ainsi, même à supposer que tel soit le cas, la demande de décision préjudicielle comportant de telles questions ne devient pas pour autant irrecevable (arrêt du 14 octobre 2021, Viesgo Infraestructuras Energéticas, C‑683/19, EU:C:2021:847, point 26).

34

Partant, la demande de décision préjudicielle est recevable.

Sur les questions préjudicielles

Sur les première et quatrième questions

35

À titre liminaire, il convient de rappeler que, dans le litige au principal, Vapo Atlantic s’est vu imposer le paiement d’une compensation financière pour avoir méconnu l’article 11, paragraphe 1, du décret-loi no 117/2010, en ce que cette société n’avait pas satisfait à son obligation de présenter des certificats permettant de prouver l’incorporation de biocarburants dans les carburants routiers mis à la consommation par elle pendant le deuxième trimestre de l’année 2020.

36

À cet égard, si la juridiction de renvoi s’est formellement référée, dans sa première question, à l’article 1er, point 3, de la directive 98/34, il ressort du libellé de cette question qu’elle demande si l’obligation imposée par la réglementation nationale relève de la notion d’« autre exigence », au sens de l’article 1er, point 4, de cette directive, et constitue ainsi une « règle technique », au sens de l’article 1er, point 11, de ladite directive.

37

Dès lors, il convient de considérer que, par ses première et quatrième questions, qu’il convient d’examiner conjointement, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 1er, point 4, de la directive 98/34 doit être interprété en ce sens qu’une réglementation nationale qui fixe un objectif tenant à l’incorporation de 10 % de biocarburants aux carburants routiers mis à la consommation par un opérateur économique au titre d’une année donnée relève de la notion d’« autre exigence », au sens de l’article 1er, point 4, de cette directive, et constitue ainsi une « règle technique », au sens de l’article 1er, point 11, de ladite directive, laquelle règle peut être opposée aux particuliers uniquement si son projet a été notifié conformément à l’article 8, paragraphe 1, de la même directive.

38

En premier lieu, il importe de rappeler que la notion d’« autre exigence » est définie à l’article 1er, point 4, de la directive 98/34 comme une « exigence, autre qu’une spécification technique, imposée à l’égard d’un produit pour des motifs de protection, notamment des consommateurs ou de l’environnement, et visant son cycle de vie après mise sur le marché, telle que ses conditions d’utilisation, de recyclage, de réemploi ou d’élimination lorsque ces conditions peuvent influencer de manière significative la composition ou la nature du produit ou sa commercialisation ».

39

Conformément à une jurisprudence constante, relève de cette catégorie une réglementation qui fixe une condition pouvant influencer de manière significative la composition, la nature ou la commercialisation d’un produit, ces « autres exigences » visant les exigences nées de la prise en considération du cycle de vie du produit en cause après sa mise sur le marché et étant relatives, notamment, à l’utilisation de celui-ci (arrêt du 28 mai 2020, ECO-WIND Construction, C‑727/17, EU:C:2020:393, point 40 et jurisprudence citée).

40

En l’occurrence, les interrogations de la juridiction de renvoi portent sur une réglementation nationale qui exige des opérateurs économiques qui procèdent à la mise à la consommation de carburants routiers, à l’exception du GPL et du gaz naturel, qu’ils contribuent au respect des objectifs d’incorporation de biocarburants dans les quantités annuelles de carburants routiers qu’ils mettent à la consommation, à savoir un objectif de 10 % au titre de l’année 2020. Même si une telle réglementation ne précise pas le type de carburant routier visé, ni ne fixe de pourcentage de biocarburant devant être physiquement incorporé dans les carburants routiers, ni ne précise le type de biocarburant à incorporer, l’exigence qu’elle prévoit, adoptée à des fins de protection de l’environnement, vise le cycle de vie des carburants routiers après leur mise sur le marché et peut influencer de manière significative la commercialisation desdits produits, en ce que la méconnaissance de l’obligation d’incorporation de biocarburants qu’elle prévoit est susceptible d’entraîner l’imposition d’une compensation financière.

41

Il en découle qu’une réglementation nationale qui fixe un objectif tenant à l’incorporation de 10 % de biocarburants aux carburants routiers mis à la consommation par un opérateur économique au titre de l’année 2020 relève de la notion d’« autre exigence », au sens de l’article 1er, point 4, de la directive 98/34, et constitue ainsi une « règle technique », au sens de l’article 1er, point 11, de cette directive.

42

En second lieu, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, la directive 98/34 vise, par un contrôle préventif, à protéger la libre circulation des marchandises, qui est un des fondements de l’Union. Ce contrôle est utile dans la mesure où des règles techniques relevant de cette directive peuvent constituer des entraves aux échanges des marchandises entre États membres, ces entraves ne pouvant être admises que si elles sont nécessaires pour satisfaire à des exigences impératives poursuivant un but d’intérêt général (voir, en ce sens, arrêts du 30 avril 1996, CIA Security International, C‑194/94, EU:C:1996:172, point 40, et du 19 juillet 2012, Fortuna e.a., C‑213/11, C‑214/11 et C‑217/11, EU:C:2012:495, point 26 ainsi que jurisprudence citée).

43

Dans ce cadre, l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34 impose, en principe, aux États membres de communiquer immédiatement à la Commission tout projet de règle technique. À cet égard, il ressort de la jurisprudence de la Cour que la méconnaissance de l’obligation de notification prévue à cet article 8, paragraphe 1, constitue un vice de procédure substantiel de nature à entraîner l’inapplicabilité des règles techniques concernées, de sorte qu’elles ne peuvent pas être opposées aux particuliers (voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 1996, CIA Security International, C‑194/94, EU:C:1996:172, point 54).

44

Eu égard aux motifs qui précèdent, il y a lieu de répondre aux première et quatrième questions que l’article 1er, point 4, de la directive 98/34 doit être interprété en ce sens qu’une réglementation nationale qui fixe un objectif tenant à l’incorporation de 10 % de biocarburants aux carburants routiers mis à la consommation par un opérateur économique au titre d’une année donnée relève de la notion d’« autre exigence », au sens de l’article 1er, point 4, de la directive 98/34, et constitue ainsi une « règle technique », au sens de l’article 1er, point 11, de cette directive, laquelle règle peut être opposée aux particuliers uniquement si son projet a été notifié conformément à l’article 8, paragraphe 1, de ladite directive.

Sur la deuxième question

45

Par sa deuxième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34 doit être interprété en ce sens qu’une réglementation nationale qui vise à transposer l’article 7 bis, paragraphe 2, de la directive 98/70 de façon conforme à l’objectif figurant à l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2009/28 est susceptible de constituer une simple transposition intégrale d’une norme européenne au sens de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34, et partant, d’échapper à l’obligation de notification prévue par cette disposition.

46

À cet égard, conformément à l’article 1er, point 6, de la directive 98/34, constitue une « norme », au sens de cette directive, une spécification technique approuvée par un organisme reconnu à activité normative dont l’observation n’est pas obligatoire et qui relève de la catégorie des normes internationales, de celle des normes européennes ou de celle des normes nationales. La « norme européenne » est définie par cette disposition comme étant celle qui est adoptée par un organisme européen de normalisation et qui est mise à la disposition du public.

47

Il découle ainsi de ces définitions que la notion de « norme européenne » entendue dans le contexte des règles techniques, et plus spécifiquement de la directive 98/34, a un champ limité aux normes adoptées par un organisme européen de normalisation.

48

Or, il ne ressort ni de l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2009/28 ni de l’article 7 bis, paragraphe 2, de la directive 98/70 que le législateur de l’Union a adopté, au moyen de ces dispositions, des « normes européennes » au sens de l’article 1er, point 6, de la directive 98/34.

49

En effet, d’une part, l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2009/28, lu à la lumière des considérants 8 et 9 ainsi que de l’article 1er de celle-ci, se borne à fixer des objectifs contraignants selon lesquels la part de l’énergie produite à partir de sources renouvelables dans toutes les formes de transport en 2020 soit au moins égale à 10 % de la consommation finale d’énergie dans le secteur des transports dans chaque État membre, tout en laissant aux États membres une marge d’appréciation quant aux mesures qu’ils estiment appropriées pour atteindre ces objectifs.

50

D’autre part, l’article 7 bis, paragraphe 2, de la directive 98/70 concrétise la volonté du législateur de l’Union de réduire les émissions de gaz à effet de serre produites sur l’ensemble du cycle de vie du carburant ou de l’énergie fournis, par unité d’énergie, à hauteur de 10 %. Toutefois, ainsi que cela ressort de cette disposition, lue en combinaison avec les considérants 8 et 9 de la directive 2009/30, les États membres conservent une marge d’appréciation pour parvenir à cette réduction, grâce à l’utilisation de biocarburants ou de carburants de substitution ou encore grâce à la réduction des opérations de brûlage à la torche.

51

Il s’ensuit que ni l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2009/28 ni l’article 7 bis, paragraphe 2, de la directive 98/70 n’impose une « norme » au sens de l’article 1er, point 6, de la directive 98/34.

52

Eu égard aux motifs qui précèdent, il y a lieu de répondre à la deuxième question que l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34 doit être interprété en ce sens qu’une réglementation nationale qui vise à transposer l’article 7 bis, paragraphe 2, de la directive 98/70 de façon conforme à l’objectif figurant à l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2009/28 n’est pas susceptible de constituer une simple transposition intégrale d’une norme européenne au sens de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34, et, partant, d’échapper à l’obligation de notification prévue par cette disposition.

Sur la troisième question

53

À titre liminaire, il convient d’observer que la réglementation nationale en cause au principal est entrée en vigueur le 18 janvier 2012 tandis que la directive 2015/1513, à laquelle la juridiction de renvoi se réfère dans la troisième question, est entrée en vigueur, conformément à son article 5, le 5 octobre 2015. Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de prendre en considération cette directive pour répondre à cette question.

54

Dès lors, il convient de considérer que, par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 4, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2009/30 doit être interprété en ce sens que cette disposition constitue une clause de sauvegarde prévue dans un acte contraignant de l’Union, au sens de l’article 10, paragraphe 1, troisième tiret, de la directive 98/34.

55

Il convient de relever que les deux premiers alinéas de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2009/30 se bornent à fixer aux États membres un délai pour transposer celle-ci, à savoir au plus tard au 31 décembre 2010, au moyen de dispositions législatives, réglementaires ou administratives nécessaires à cette fin, tout en leur demandant de communiquer immédiatement à la Commission le texte de ces dispositions. Le troisième alinéa de cette disposition prévoit, quant à lui, que, lorsque les États membres adoptent ces dispositions, celles-ci font référence à la directive 2009/30.

56

Or, rien dans le texte de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2009/30 ne laisse penser que le législateur de l’Union a entendu introduire dans celle-ci une clause de sauvegarde, au sens de l’article 114, paragraphe 10, TFUE, dont les États membres auraient pu faire usage.

57

À cet égard, cette dernière disposition prévoit que les mesures d’harmonisation comportent dans les cas appropriés une clause de sauvegarde autorisant les États membres à prendre, pour une ou plusieurs des raisons non économiques visées à l’article 36 TFUE, des mesures provisoires soumises à une procédure de contrôle de l’Union. Il s’ensuit qu’une telle clause de sauvegarde doit être explicitement prévue par l’acte d’harmonisation. Or, l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2009/30 ne répond pas à ces caractéristiques et ne saurait, dès lors, constituer une telle clause de sauvegarde.

58

Il découle de ce qui précède qu’il convient de répondre à la troisième question que l’article 4, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2009/30 doit être interprété en ce sens que cette disposition ne constitue pas une clause de sauvegarde prévue dans un acte contraignant de l’Union, au sens de l’article 10, paragraphe 1, troisième tiret, de la directive 98/34.

Sur les dépens

59

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit :

 

1)

L’article 1er, point 4, de la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information, telle que modifiée par la directive 2006/96/CE du Conseil, du 20 novembre 2006,

doit être interprété en ce sens que :

une réglementation nationale qui fixe un objectif tenant à l’incorporation de 10 % de biocarburants aux carburants routiers mis à la consommation par un opérateur économique au titre d’une année donnée relève de la notion d’« autre exigence », au sens de l’article 1er, point 4, de la directive 98/34, telle que modifiée, et constitue ainsi une « règle technique », au sens de l’article 1er, point 11, de la directive 98/34, telle que modifiée, laquelle règle peut être opposée aux particuliers uniquement si son projet a été notifié conformément à l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34, telle que modifiée.

 

2)

L’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34, telle que modifiée par la directive 2006/96,

doit être interprétée en ce sens que :

une réglementation nationale qui vise à transposer l’article 7 bis, paragraphe 2, de la directive 98/70/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 octobre 1998, concernant la qualité de l’essence et des carburants diesel et modifiant la directive 93/12/CEE du Conseil, telle que modifiée par la directive 2009/30/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2009, de façon conforme à l’objectif figurant à l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2009, relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE, n’est pas susceptible de constituer une simple transposition intégrale d’une norme européenne au sens de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 98/34, telle que modifiée, et, partant, d’échapper à l’obligation de notification prévue par cette disposition.

 

3)

L’article 4, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2009/30

doit être interprété en ce sens que :

cette disposition ne constitue pas une clause de sauvegarde prévue dans un acte contraignant de l’Union, au sens de l’article 10, paragraphe 1, troisième tiret, de la directive 98/34, telle que modifiée par la directive 2006/96.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le portugais.